Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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A maple leaf on graph paper

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 111

Date de la décision : 2024-06-13

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Loblaws Inc.

Requérante : MEIJI CO., LTD.

Demande : 1,911,726 pour MELTYBLEND

Le dossier

[1] La demande d’enregistrement pour la marque de commerce MELTYBLEND (la Marque) a été produite le 26 juillet 2018,fondée sur l’emploi projeté de la Marque par MEIJI CO., LTD. (la Requérante) au Canada en liaison avec les produits suivants dans la classe 30 de Nice :

[traduction]

(1) Pâtisseries; chocolats; biscuits enrobés de chocolat; biscuits secs; biscuits; craquelins; bretzels; gelées de fruits (confiseries); bonbons; gommes à mâcher; crème glacée.

[2] La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 18 novembre 2020. Le 18 mai 2021, Loblaws Inc. (l’Opposante) s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi).

[3] L’Opposante soulève un certain nombre de motifs d’opposition, notamment des motifs fondés sur les articles 12(1)d) et 16(1)a) de la Loi et sur l’absence de caractère distinctif, principalement sur la base de la confusion avec la marque de commerce MELTS de l’Opposante (enregistrement no LMC744,593) en liaison avec les confiseries de chocolat et de bonbon. L’Opposante allègue également que la Requérante n’a pas employé et n’a pas l’intention d’employer la Marque (article 38(2)e)) et qu’elle n’a pas le droit d’employer la Marque (article 38(2)f)).

[4] La Requérante a produit une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[5] L’Opposante a produit comme preuve une copie certifiée de son enregistrement pour la marque de commerce MELTS et les affidavits d’Andrea Woudstra, sa gestionnaire des produits, Confiseries et confiseries saisonnières, et d’Amanda Wolczanski, une stagiaire en droit de l’agent antérieur de l’Opposante. La Requérante a produit l’affidavit de Michael Duchesneau, auxiliaire juridique, et de Dane Penney, recherchiste en marques de commerce, les deux employés par l’agent de la Requérante. Les deux parties ont produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[6] C’est au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, un opposant doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition. Une fois qu’un opposant s’est acquitté de ce fardeau de preuve initial, un requérant doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition plaidés ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst) à la p 298, 1990 CanLII 11059; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA, 2002 CAF 29].

Raisons de la décision

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[7] La date pertinente pour évaluer un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce, 1991 CanLII 11769 (CAF)].

[8] En vertu de l’article 12(1)d) de la Loi, l’Opposante plaide que la Marque de commerce n’est pas enregistrable, parce qu’elle crée de la confusion avec sa marque de commerce MELTS (enregistrement no LMC744,593) en liaison avec les confiseries de chocolat et de bonbon.

[9] J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que l’enregistrement de l’Opposante existe encore [voir Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition.

[10] Par conséquent, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Test en matière de confusion

[11] Le test en matière de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. Par conséquent, l’article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais sur la probabilité que les produits ou services provenant d’une source soient perçus comme provenant d’une autre source.

[12] En procédant à une telle évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent pourra être accordé à chacun de ces facteurs selon le contexte [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22 au para 54].

[13] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque d’un requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce d’un opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, supra, au para 20].

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[14] L’examen global de ce facteur implique une combinaison du caractère distinctif inhérent et acquis des marques de commerce.

[15] La Marque possède un degré plus élevé de caractère distinctif inhérent que la marque de commerce MELTS de l’Opposante. La Marque est un mot inventé. En revanche, la marque de commerce MELTS de l’Opposante est un mot du dictionnaire. Dans la mesure que les marques de commerce des deux parties suggèrent que les produits liés peuvent fondre dans la bouche d’un consommateur, leur caractère distinctif inhérent serait influencé de façon égale.

[16] Il n’y a aucune preuve que la Marque a acquis un quelconque caractère distinctif. En revanche, la marque de commerce de l’Opposante a acquis un caractère distinctif significatif en liaison avec les confiseries de chocolat et de bonbon comme le démontre l’affidavit de Mme Woudstra, résumé ci-dessous.

a) L’Opposante est une entreprise d’activités de détail et un propriétaire de marques de commerce, ainsi qu’une filiale à part entière de Loblaw Companies Limited, le plus grand distributeur d’aliments au Canada (para 2).

b) La Marque figure sur l’emballage de chocolats et de confiseries ainsi que de l’avis public de la propriétaire de la marque de commerce (Pièce 2). Un exemple de la partie de l’emballage mettant en valeur la Marque est reproduit ci-dessous.

Packaging showing DARK CHOCOLATE PEPPERMINT MELTS.

c) Les ventes annuelles de chocolats et de confiseries avec les marques de commerce de l’Opposante au Canada varient entre 200 000 et 500 000 unités de 2014 à 2020 (para 15).

d) Il y a eu une annonce répandue et significative de la marque de commerce METLS partout au Canada dans des dépliants et sur des sites Web (para 17 et 18; Pièces 7 et 8).

[17] Compte tenu de ce qui précède, il est clair que le facteur fondé sur l’article 6(5)a) favorise l’Opposante dans la mesure que le facteur fait référence à la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues. Toutefois, l’absence de caractère distinctif inhérent ne peut pas être ignorée dans l’analyse de confusion, même si la marque de commerce de l’Opposante a acquis une réputation significative [London Drugs Ltd c International Clothiers Inc, 2014 CF 223 au para 53].

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[18] La preuve de l’Opposante est qu’elle a employé la marque de commerce MELTS sur des chocolats et des confiseries depuis 1992 et elle fournit la preuve d’importantes ventes depuis 2014 (para 7 et 15). En revanche, il n’y a aucune preuve démontrant que l’emploi de la Marque a commencé.

Genre de produits, de services ou d’entreprises; et nature du commerce

[19] Les produits des parties sont identiques en ce qui a trait aux chocolats et aux bonbons et se chevauchent à l’égard des desserts et des collations énumérés dans la demande. En ce qui a trait à la nature du commerce, les produits des deux parties seraient vendus dans des emplacements semblables comme des épiceries et des pharmacies et, à l’égard à tout le moins de certains des Produits, à proximité les uns des autres (affidavit Wolczanski).

Degré de ressemblance entre les marques de commerce

[20] L’article 6(5)e) de la Loi indique clairement que l’ensemble de la présentation, du son et des idées suggérées par les marques de commerce en question doit faire l’objet de considérations dans l’évaluation du degré de ressemblance. De plus, les marques de commerce doivent être considérées dans leur ensemble. Le test approprié n’est pas une comparaison côte à côte, mais celui du souvenir imparfait dans l’esprit d’un consommateur de la marque de commerce d’une autre partie [Veuve Clicquot, supra, au para 20].

[21] En l’espèce, je n’estime pas qu’il y ait quoi que ce soit de frappant ou d’unique en ce qui a trait à la marque MELTS de l’Opposante. Dans le cas de la Marque, j’estime qu’il s’agit d’un syntagme unitaire composée des deux mots descriptifs MELTY et BLEND. Dans la mesure où les marques de commerce des deux parties comprennent MELT, il existe un degré appréciable de ressemblance. Il y a toutefois quelques différences visuelles et phonétiques entre les marques des parties. De plus, la Marque possède une connotation quelque peu différente, puisqu’elle suggère que ses produits connexes comportent un mélange de chocolats, de bonbons ou d’autres aliments qui fondent. En général, lorsque les trois aspects de la ressemblance sont évalués ensemble, j’estime que les marques des parties sont plus différentes que semblables, mais juste légèrement. Le cinquième facteur favorise donc la Requérante.

Circonstance de l’espèce : Jurisprudence relative aux marques de commerce faibles

[22] La jurisprudence relative aux marques de commerce faibles favorise la Requérante. Il est bien admis que des différences relativement petites suffiront à distinguer des marques de commerce faibles les unes des autres [Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc (2001), 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst) au para 66]. Comme expliqué dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 46 CPR (4th) 112 (CF 1re inst) au para 31 :

[traduction]

Comme les deux marques sont intrinsèquement faibles, il est juste d’affirmer que même de petites différences suffiraient à les différencier. S’il en était autrement, le premier utilisateur de termes couramment employés se verrait conférer injustement un monopole de ces termes. Les tribunaux ont également justifié cette conclusion en affirmant qu’on s’attend à ce que le public soit plus prudent lorsque des noms commerciaux faibles comme ceux-ci sont employés […]

[23] En l’espèce, la marque de commerce de l’Opposante est très suggestive; en conséquence, elle doit accepter un certain risque de confusion [General Motors c Bellows (1949), 10 CPR 101 aux p 115 et 116 (CSC)].

État du registre et état du marché

[24] La Requérante a prouvé qu’il existe au moins 10 marques de commerce contenant MELT, MELTS ou MELTY qui sont enregistrées ou admises pour le chocolat, les confiseries ou les bonbons (affidavit Penney, Pièce A), y compris les suivantes :

· MINT MELTAWAYS enregistrée par Fannie May Confections, Inc. pour des bonbons;

· CANDY MELTS enregistrée par Wilton Industries, Inc. pour des morceaux de bonbons pour l’emploi dans la préparation à domicile d’autres confiseries;

· THE MILK CHOCOLATE MELTS IN YOUR MOUTH-NOT IN YOUR HAND enregistrée par Mars Canada Inc. pour des bonbons de chocolat;

· EASIMELT enregistrée par Barry Callebaut AG pour du chocolat, des produits de chocolat et des enduits de chocolat;

· FEEL THE BUBBLES MELT enregistrée par la Société des Produits Nestlé S.A. pour des chocolats et des bonbons;

· SMOOTH 'N MELTY enregistrée par Guittard Chocolate Co. pour des bonbons.

[25] La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en dégager des conclusions sur l’état du marché et on ne peut tirer des conclusions sur l’état du marché que si l’on relève un grand nombre d’enregistrements pertinents [voir Ports International Ltd. c Dunlop Ltd. (1992), 41 CPR (3d) 432; Del Monte Corporation c Welch Foods Inc. (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst); Kellogg Salada Canada Inc. c Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)]. En l’espèce, il y a un nombre insuffisant d’enregistrements pour tirer une conclusion quant à l’état du marché.

[26] En l’espèce, la Requérante a également fourni la preuve de l’état du marché, y compris des imprimés de sites Web (et des versions archivées de ces sites Web) qui emploient MELT ou METLS dans le nom ou la description de leurs bonbons et de leur chocolat, y compris ceux établis ci-dessous.

Affidavit Duchesneau, Pièce A, Onglet 2

Excerpt from website showing Candy Melts Candy.

Onglet 6

Excerpt From website showing BC Organic EZ Melt Dark 60%.

Onglet 15

Excerpt from website showing Melt-in-your-mouth moments brought to you by AERO.

[27] Bien que ces imprimés de pages Web démontrent un lien avec le Canada, par exemple, en incluant le Canada comme destination d’expédition ou comme provenant d’un site Web .ca, il n’y a aucune preuve que l’une de ces marques de commerce possède une réputation au Canada. Par conséquent, cette preuve n’appuie pas une conclusion que les consommateurs seront en mesure de distinguer la Marque et la marque de commerce MELTS de l’Opposante en fonction de leurs différences. Tout au plus, les résultats de recherche susmentionnés appuient ma conclusion précédente que l’élément MELT est intrinsèquement faible, puisqu’elle est une description convenable pour le chocolat et les confiseries.

Conclusion concernant la probabilité de confusion

[28] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit d’un consommateur moyen plutôt pressé la vue de la Marque en liaison avec les Produits, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce MELTS de l’Opposante employée en liaison avec des confiseries de chocolat et de bonbon et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [Veuve Clicquot, supra, au para 20]. De plus, comme l’explique la Cour suprême du Canada dans la décision Mattel, supra, au para 57, le consommateur ordinaire doit se voir accorder un certain mérite :

[traduction]

[…] Je souscris entièrement à l’opinion formulée par le juge Linden dans Pink Panther selon qui, dans l’appréciation de la probabilité de confusion sur le marché, « il faut accorder une certaine confiance au consommateur moyen » (para 54). Une idée semblable a été exprimée dans Michelin & Cie c. Astro Tire & Rubber Co. of Canada Ltd. (1982), 69 C.P.R. (2d) 260 (C.F. 1re inst.) à la p 263 :

[…] on ne doit pas procéder en partant du principe que les clients éventuels ou les membres du public en général sont complètement dénués d’intelligence ou de mémoire, ou sont totalement inconscients ou mal informés au sujet de ce qui se passe autour d’eux.

[29] Ayant examiné toutes les circonstances de l’espèce et appliqué le test en matière de confusion comme une question de première impression et du souvenir imparfait, malgré le caractère distinctif acquis de la marque de commerce MELTS de l’Opposante, la période pendant laquelle la marque de commerce de l’Opposante a été en usage et la ressemblance dans le genre des produits et la nature du commerce, j’estime que la faiblesse intrinsèque de la marque de l’Opposante, ainsi que les différences générales entre les marques de commerce des parties dans la présentation, le son et les idées suggérées, suffit pour faire pencher la prépondérance des probabilités quant à la confusion en faveur de la Requérante. J’estime qu’il ne serait pas probable que le consommateur ordinaire, comme question de première impression, croirait que les Produits vendus en liaison avec la Marque proviennent de la même source que ceux associés à la marque de commerce MELTS, ou l’inverse. Par conséquent, j’estime qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties.

Motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et le caractère distinctif

[30] Ces motifs d’opposition sont également fondés sur l’allégation de l’Opposante que la Marque crée de la confusion avec son emploi de la marque de commerce MELTS. Comme il n’existe aucune preuve d’emploi de la Marque, la date pertinente pour le motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement est la date de production de la demande d’enregistrement [article 16(1)a) de la Loi]. La date pertinente pour le motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est la date de production de la déclaration d’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[31] La preuve de l’Opposante décrite au paragraphe 17 de cette décision est suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de démontrer l’emploi antérieur de sa marque de commerce pour le motif d’opposition fondé sur le droit à l’enregistrement et que sa marque de commerce avait acquis une réputation importante ou suffisante au Canada en liaison avec ses confiseries de chocolat et de bonbon pour nier le caractère distinctif de la Marque [Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2004 CanLII 71764, 40 CPR (4th) 553, confirmé par 2006 CF 657, 48 CPR (4th) 427 (CF 1re inst)].

[32] La différence entre la date pertinente pour ces motifs d’opposition et la date pertinente pour le motif fondé sur l’article 12(1)d) ne change pas ma conclusion précédente selon laquelle la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de prouver qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion. Par conséquent, les motifs d’opposition fondés sur l’article 16(1)a) et le caractère distinctif sont également rejetés.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e)

[33] L’Opposante plaide que la Requérante n’employait pas ou ne projetait pas d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits. La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de production de la demande d’enregistrement [article 38(2)e) de la Loi]. Bien qu’il n’existe aucune preuve que la Requérante employait la Marque à la date de production, l’Opposante ne s’acquitte pas de son fardeau de preuve en ce qui concerne ce motif d’opposition puisqu’il n’y a aucune preuve que la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f)

[34] L’article 38(2)f) de la Loi porte sur la question de savoir si un requérant a le droit d’employer la marque de commerce visée par sa demande à la date de production de la demande.

[35] Le registraire a précédemment conclu qu’un requérant ne peut pas déclarer qu’il avait le droit ou non d’employer une marque de commerce dans les situations suivantes :

a) Il y a une preuve prima facie de non-conformité avec une loi fédérale comme la Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, ch C-42 ou la Loi sur les aliments et drogues, LRC 1985, ch F-27 [Interactiv Design Pty Ltd c Grafton-Fraser Inc (1998), 87 CPR (3d) 537 (COMC) aux p 542 et 543].

b) Il y a une preuve prima facie de non-conformité avec certains articles de la Loi [McDonald’s Corporation and McDonald’s Restaurants of Canada Limited c Hi-Star Franchise Systems, Inc., 2020 COMC 111; Advance Magazine Publishers Inc. c Pawandeep Dhunna, 2023 COMC 39].

c) Il y a la preuve qu’il existait une relation contractuelle, telle qu’une relation concédant-licencié, et que l’enregistrement d’une marque de commerce constituerait une violation de cette relation [AFD China Intellectual Property Law Office c AFD China Intellectual Property Law (USA) Office, Inc, 2017 COMC 30].

[36] L’Opposante plaide que la Requérante n’avait pas le droit d’employer la Marque, puisque tout emploi est illégal et en contravention à l’article 7b) de la Loi (commercialisation trompeuse), aux articles 19 et 20 (contrefaçon) à l’article 22 (dépréciation de l’achalandage).

[37] J’estime que l’Opposante n’a pas produit la preuve prima facie de quelque commercialisation trompeuse, contrefaçon ou dépréciation de l’achalandage.

[38] En ce qui a trait à la commercialisation trompeuse, trois éléments doivent être établis pour étayer une telle allégation, dont l’un est la [traduction] « déception du public due à la représentation trompeuse » [Ciba-Geigy Canada Ltd c Apotex Inc, 1992 CanLII 33 (CSC)]. Cet élément sera établi si une partie démontre que l’autre partie a employé une marque de commerce qui est susceptible d’être confondue avec la marque de commerce du plaignant [Sadhu Singh Hamdard Trust c Navsun Holdings Ltd, 2016 CAF 69 au para 21]. Puisque j’ai estimé que la Marque ne crée pas de la confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante, je conclus que l’Opposante n’a pas produit la preuve prima facie de commercialisation trompeuse.

[39] L’enregistrement d’une marque de commerce en vertu de la Loi donne au propriétaire le droit exclusif d’utiliser la marque de commerce dans tout le Canada à l’égard des produits et services visés par l’enregistrement [Loi, article 19]. Ce droit est réputé être violé par la vente, la distribution ou l’annonce des produits ou services en liaison avec une marque de commerce créant de la confusion [Loi, article 20(1)a)]. Aucune de mes conclusions quant aux facteurs prévus à l’article 6(5) concernant le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) n’est influencée par la date pertinente antérieure; par conséquent, je n’estime pas que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve prima facie que le droit à la Marque serait violé.

[40] En ce qui a trait à l’article 22 de la Loi, il y a quatre éléments à établir pour étayer une allégation de dépréciation de l’achalandage attaché à cette marque de commerce. Un de ces éléments est que la marque de commerce déposée a été employée par une autre partie en liaison avec des produits ou services [Veuve Clicquot, supra au para 46]. Pour cet élément, une partie doit seulement démontrer que l’autre partie a employé une marque de commerce suffisamment semblable à la marque de commerce du plaignant pour évoquer, dans l’esprit du consommateur, un lien entre les deux marques de commerce [Veuve Clicquot, supra, au para 38]. Bien qu’une absence de confusion entre des marques de commerce ne signifie pas nécessairement que cet élément d’une allégation de dépréciation ne peut pas être établi [voir Toys “R” Us (Canada) Ltd c Herbs “R” Us Wellness Society, 2020 CF 682], j’estime qu’une absence de confusion est convaincante en l’espèce. Comme indiqué ci-dessus, une des raisons pour lesquelles la Marque n’est pas considérée comme créant de la confusion est que le mot MELTS est fortement suggestif (voire descriptif) des produits des parties. Pour cette raison, j’estime que la Marque n’est pas suffisamment semblable à la marque de commerce MELTS pour évoquer un lien entre les marques de commerce dans l’esprit des consommateurs. Pour au moins cette raison, l’Opposante n’a pas établi une preuve prima facie de dépréciation de l’achalandage.

[41] Étant donné que l’Opposante n’a pas établi de preuve prima facie de commercialisation trompeuse, de contrefaçon ou de dépréciation de l’achalandage, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard du motif fondé sur l’absence de droit à l’emploi. Ce motif est donc rejeté.

Décision

[42] Compte tenu de tout ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

 

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Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne Osborne


Comparutions et agents inscrits au dossier

Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Borden Ladner Gervais LLLP

Pour la Requérante : Smart & Biggar LP

 

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