Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 191

Date de la décision : 2023-11-10

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : BASF Agricultural Solutions Seed US LLC

Requérante : NewAgco Inc.

Demande : 1869941 pour VIGOR

Introduction

[1] BASF Agricultural Solutions Seed US LLC (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce VIGOR (la Marque) qui fait l’objet de la demande no 1869941 produite par NewAgco Inc. (la Requérante).

[2] La Marque est visée par la demande en liaison avec les produits suivants selon l’usage projeté au Canada (les Produits de la Requérante) :

[traduction]

Cl 5 (1) Produit de protection des cultures, nommément herbicides.

[3] À l’exception du motif de mauvaise foi, tous les motifs d’opposition invoqués par l’Opposante sont fondés sur une allégation de confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante no LMC483211 pour INVIGOR (la Marque de commerce de l’Opposante), qui est enregistrée en liaison avec les produits de la catégorie 31 [traduction] « Plantes et matériel reproductif de plantes, nommément semences » (les Produits de l’Opposante).

[4] Pour les motifs énoncés ci-dessous, je rejette la demande.

Le dossier

[5] La demande pour la Marque a été produite le 27 novembre 2017 et a été annoncée aux fins d’opposition le 3 février 2021.

[6] Le 29 mars 2021, l’Opposante a produit une opposition à la demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T13, modifiée le 17 juin 2019 (la Loi).

[7] Les motifs d’opposition sont fondés sur la mauvaise foi (article 38(2)a.1)); l’absence d’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d); l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a); l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2; et l’absence de droit à l’emploi en vertu de l’article 38(2)f) de la Loi.

[8] La Requérante a produit une contre-déclaration niant les motifs d’opposition.

[9] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit de Blaine Woycheshin, souscrit le 16 septembre 2021 (l’Affidavit Woycheshin).

[10] M. Woycheshin a été contre-interrogé sur son affidavit le 11 février 2022. Les transcriptions du contre-interrogatoire de M. Woycheshin ont été produites par l’Opposante le 15 mars 2022 (la transcription Woycheshin).

[11] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Brian Rumberg, souscrits le 28 septembre 2022 (l’Affidavit Rumberg) et de Dorothy Dacres, souscrit le 28 septembre 2022 (l’Affidavit Dacres).

[12] Les deux parties ont produit des observations écrites et ont assisté à l’audience.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

L’Affidavit Woycheshin

[13] M. Woycheshin est le responsable canadien d’InVigor pour BASF Canada Inc. (BASF Canada), poste qu’il occupe depuis 2011, initialement pour le prédécesseur en titre de BASF Canada [au para 1].

[14] M. Woycheshin atteste ce qui suit dans son affidavit :

  • L’Opposante et BASF Canada sont toutes deux des filiales en propriété exclusive de BASF SE (la société mère BASF) [aux para 5 et 6].

  • La part de marché mondiale détenue par le groupe de sociétés BASF (qui comprend l’Opposante, BASF Canada et BASF Agricultural Solutions Ontario Ltd. (BASF Ontario)) est la quatrième en importance dans l’industrie des solutions agricoles. Plus particulièrement, la part de marché du canola au Canada s’établissait à 57,7 % en 2018 [aux para 6 et 7].

  • En août 2018, la société mère BASF a acquis [traduction] « une gamme d’entreprises et d’actifs liés à la protection des cultures, à l’agriculture numérique, aux semences, aux herbicides non sélectifs et au nematicide », y compris tous les droits dans la Marque de commerce de l’Opposante, ainsi que tout l’achalandage qui s’y rattache, de même que l’enregistrement de marque de commerce canadien correspondant [au para 8].

  • La société mère BASF a cédé ses droits sur la Marque de commerce de l’Opposante à cette dernière en août 2018 [au para 9]. L’Opposante a concédé les droits dans la Marque de commerce de l’Opposante à BASF Ontario en août 2018. BASF Ontario et BASF Canada ont fusionné en 2019 (collectivement appelées BASF Canada) [au para 10]. Dans le cadre de la relation de licence entre l’Opposante et BASF Canada, l’Opposante exerce un [traduction] « contrôle décisif sur les caractéristiques et la qualité des produits fabriqués et vendus » en liaison avec la Marque de commerce de l’Opposante ainsi que sur la manière précise dont la Marque de commerce de l’Opposante est employée et affichée [au para 12].

  • BASF Canada est autorisée, à titre de licenciée, à [traduction] « planter, cultiver, récolter, transformer, emballer et/ou autrement fabriquer, commercialiser et distribuer » des semences associées à la Marque de commerce de l’Opposante au Canada. Ces ventes sont habituellement effectuées auprès d’un réseau de distributeurs qui les vendent ensuite à des producteurs [au para 11].

  • Les produits liés à la Marque de commerce de l’Opposante ont été introduits sur le marché canadien en 1996. La Marque de commerce de l’Opposante a toujours été clairement apposée sur l’emballage des produits vendus au Canada ainsi que dans les publicités [au para 13, Pièces 4-A et 4-B].

  • En 2001, le prédécesseur en titre de l’Opposante a réalisé des ventes de près d’un million de dollars des Produits de l’Opposante au Canada, ce qui représente la vente de plus de 6 000 sacs [au para 14]. Depuis 2001, les ventes des Produits de l’Opposante ont continué d’augmenter avec des ventes en 2016, 2017 et 2018 de plus d’un million de sacs au cours de ces années [au para 15].

  • Les factures délivrées par BASF Canada (ainsi que BASF Ontario avant la fusion) pour les ventes des Produits de l’Opposante au Canada entre 2018 et 2020, représentatives de la manière dont la Marque de commerce de l’Opposante est et était jointe aux factures, sont jointes à titre de Pièce 5. Les factures antérieures à 2018 ne sont pas accessibles, car ces ventes ont eu lieu avant la cession à la société mère BASF [au para 16].

  • BASF Canada, à titre de licenciée, effectue régulièrement des essais de démonstration par bandes des Produits de l’Opposante et fournit aux producteurs des résultats d’essais afin de faciliter la prise de décisions éclairées à l’égard des Produits de l’Opposante [au para 18, Pièce 6].

  • Des échantillons de pages Web archivées du prédécesseur en titre de l’Opposante datant de juin 2013 et de juin 2017 sont joints à titre de Pièce 7 [au para 21].

  • À titre de licenciée, BASF Canada a continuellement annoncé et promu les Produits de l’Opposante au Canada depuis août 2018 en ligne, dans des médias imprimés, à la télévision ou à la radio [au para 22].

  • Depuis août 2018, BASF Canada a dépensé plus de 1,7 million de dollars canadiens pour annoncer les Produits de l’Opposante au Canada, y compris dans des médias imprimés, dans des médias extérieurs, à la télévision et à la radio, et sur des sites Web de tiers [au para 23].

  • Des échantillons de publicité des Produits de l’Opposante comprennent des pages imprimées à partir des sites Web de BASF Canada où sont présentés des renseignements sur les Produits de l’Opposante qui sont essentiellement semblables ou identiques aux pages Web disponibles de façon continue sur les sites Web de BASF Canada depuis août 2018 [au para 24, Pièce 8].

  • Entre août 2018 et février 2019, environ 30 000 Canadiens ont consulté des pages Web sur l’un des sites Web de BASF Canada liées aux Produits de l’Opposante [au para 25]. Des documents promotionnels pour les Produits de l’Opposante au Canada pour les années 2016, 2017 et 2018 sont joints comme Pièce 9 et des exemples de la présence de l’Opposante dans les médias sociaux et des Produits de l’Opposante sont joints comme Pièces 10-A et 10-B [aux para 25 et 26].

  • La Marque de commerce de l’Opposante [traduction] « a acquis une réputation prééminente dans l’industrie agricole au Canada » et est d’une valeur importante et croissante pour l’Opposante et sa licenciée canadienne, BASF Canada [au para 27].

Aperçu de la preuve de la Requérante

L’Affidavit Rumberg

[15] M. Rumberg est directeur des ventes nationales pour AgraCity Crop & Nutrition Ltd (AgraCity), une licenciée de la Requérante. M. Rumberg compte plus de 20 ans d’expérience dans l’entreprise agricole, principalement dans la fourniture de produits de protection des cultures et de produits connexes [Affidavit Rumberg, au para 1].

[16] L’Affidavit Rumberg contient, entre autres, les déclarations et pièces suivantes :

  • AgraCity, le distributeur des Produits de la Requérante au Canada, est titulaire d’une licence d’emploi de la Marque au Canada accordée par la Requérante. La Requérante exerce un contrôle sur la qualité et la nature des Produits de la Requérante [au para 4].

  • La Marque a été employée pour la première fois en liaison avec les Produits de la Requérante au Canada en 2018. Les Produits de la Requérante sont vendus directement aux agriculteurs et non par l’entremise de distributeurs, ce qui rend la voie de commercialisation des Produits de l’Opposante différente de celle de la Requérante [au para 5].

  • Ni AgraCity ni la Requérante n’importent, ne fabriquent ou ne vendent de semences ou d’autres produits végétaux [au para 6].

  • Selon l’expérience de M. Rumberg, les agriculteurs considèrent que les semences et les produits de protection des cultures, comme les herbicides, sont très différents. De nombreuses entreprises de semences ne vendent pas d’herbicides et, inversement, de nombreuses entreprises qui vendent des produits de protection des cultures ne vendent pas de semences. De nombreuses entreprises qui vendent à la fois des semences et des produits de protection des cultures le font sous différentes marques. De plus, la décision d’acheter des semences et des produits de protection des cultures est souvent prise à des moments différents de l’année [au para 7].

  • Une copie d’une étiquette utilisée sur les Produits de la Requérante arborant la Marque est jointe en tant que Pièce B [au para 8]. Une copie d’une autre étiquette réglementaire est jointe en tant que Pièce C [au para 9].

  • Les revenus de vente d’AgraCity pour les Produits de la Requérante pour les périodes annuelles d’octobre 2017 à juillet 2022 ont varié de plus de 900 000 $ à plus de 5 millions de dollars [au para 10].

  • Une copie d’un extrait du Guide des produits agricoles d’AgraCity 2022 (le Guide) arborant la Marque est jointe comme Pièce D. Le Guide est disponible sur le site Web d’AgraCity et est également diffusé sur support papier. Depuis 2008, plus de 20 000 Guides ont été distribués par AgraCity au Canada [au para 11].

  • La Marque est employée dans l’annonce des Produits de la Requérante sur le site Web d’AgraCity. Un imprimé de cette publicité sur le site Web est joint en tant que Pièce E. Depuis décembre 2019, cette page Web a eu plus de 1 200 pages vues uniques [au para 12].

  • Des exemples de factures pour la vente des Produits de la Requérante en 2019, 2020, 2021 et 2022 sont joints en tant que Pièce G [au para 13].

  • Un tiers, NutriAg Ltd., emploie la marque de commerce VIGORMAX sur des produits de traitement des semences au Canada [au para 14].

L’Affidavit Dacres

[17] Mme Dacres est une assistante juridique employée par l’agent de la Requérante [au para 1].

[18] En septembre 2022, Mme Dacres a effectué des recherches dans :

  • la base de données Clarivate Analytics pour des dossiers de marques de commerce canadiennes contenant le mot VIGOR dans les catégories 1, 5 et 44 [au para 2]. Une copie de ces résultats de recherche est jointe en tant que Pièce A;

  • le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada pour obtenir des détails sur les marques de commerce repérées dans la recherche dans Clarivate Analytics décrite ci-dessus [au para 3]. Une copie de ces détails des marques de commerce est jointe en tant que Pièce B.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[19] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de prouver les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053 (CF 1ʳᵉ inst.)]. L’imposition d’un fardeau de preuve à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit examinée, il doit exister une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question [John Labatt, p. 298]. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau initial, la Requérante doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition invoqués ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA, 2002 CAF 29].

[20] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, tel qu’il est allégué dans la déclaration d’opposition. L’imposition d’un fardeau ultime à la Requérante signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que l’ensemble de la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante.

Question préliminaire – Admissibilité de la preuve de l’Opposante

[21] Dans ses arguments écrits, la Requérante a soulevé deux questions concernant l’Affidavit Woycheshin; premièrement, l’affidavit contient du ouï-dire inadmissible et, deuxièmement, l’affidavit devrait être radié dans son intégralité en raison du fait que l’avocat de l’Opposante a refusé de permettre à M. Woycheshin de répondre à des questions liées aux marques de commerce de tiers pendant le contre-interrogatoire [observations écrites de la Requérante, aux para 36 et 37].

[22] Plus précisément, la Requérante conteste les paragraphes 7, 21 et 28 de l’Affidavit Woycheshin parce qu’il contient du ouï-dire inadmissible, étant donné que M. Woycheshin :

  • a reconnu en contre-interrogatoire qu’il n’avait pas une connaissance personnelle des ventes de tiers mentionnées dans un rapport joint comme Pièce 1 (mentionné au paragraphe 7 de l’Affidavit Woycheshin);

  • a admis en contre-interrogatoire que les imprimés de pages Web de la Pièce 7, dont il est question au paragraphe 21, lui ont été fournis par son équipe de communication

  • les renseignements concernant le nombre de consultations du site Web de BASF Canada ont été fournis par une agence de publicité [observations écrites de la Requérante, au para 36].

[23] La preuve par ouï-dire est à première vue inadmissible à moins qu’elle ne satisfasse aux critères de nécessité et de fiabilité [voir Labatt Brewing Co c Molson Breweries, A Partnership (1996) , 68 CPR (3d) 216 (CF)].

[24] En ce qui concerne le premier point de préoccupation soulevé par la Requérante à l’égard de la Pièce 1, en contre-interrogatoire, M. Woycheshin a confirmé que le rapport joint à titre de Pièce 1 de son affidavit provenait d’un rapport sur les semences de canola d’AGDATA BPI, daté du 29 août 2018, a confirmé qu’il avait déjà vu ce rapport sous-jacent, qu’il avait une copie du rapport sous-jacent dans ses dossiers et a indiqué que [traduction] « l’exactitude serait très élevée à ce sujet », faisant référence à l’information contenue dans la Pièce 1 [Transcription Woycheshin, Q 55 à 57]. Sur la base de ces déclarations, je suis convaincue que M. Woycheshin a une connaissance personnelle des renseignements contenus dans la Pièce 1 et je rejette l’objection au ouï-dire.

[25] En ce qui concerne la deuxième objection soulevée par la Requérante à l’égard de l’Affidavit Woycheshin, peu importe qui a imprimé les pages Web contenues dans la Pièce 7, elles ne servent que de preuve de l’existence de ces pages à la date à laquelle elles ont été imprimées et constituent une preuve par ouï-dire inadmissible à l’égard des renseignements qui figurent sur les pages Web [voir TCG International Inc c Autosock AS, 2006 CanLII 80379 (CA COMC) citant Envirodrive Inc v 836442 Alberta Inc, 2005 ABQB 446 (CanLII)].

[26] En ce qui concerne la troisième objection concernant les renseignements relatifs au nombre de consultations du site Web de l’Opposante fournis par une agence de publicité, je suis convaincue, d’après la réponse donnée par M. Woycheshin en contre-interrogatoire, que les renseignements étaient fiables et nécessaires [Transcription Woycheshin, Q69]. M. Woycheshin a indiqué que l’information concernant le nombre de consultations du site Web de l’Opposante a été fournie par le partenaire stratégique et l’agence de publicité de l’Opposante au dossier qui suivaient les paramètres du site Web de l’Opposante et que l’information fournie par cette agence était des paramètres standards que l’Opposante examinait chaque année [transcription Woycheshin, Q 70]. Par conséquent, je considère que ces renseignements ont été obtenus dans le cadre des pratiques commerciales courantes de l’Opposante que M. Woycheshin connaissait bien et j’estime qu’il est raisonnable que cette preuve ait été produite au moyen de l’Affidavit Woycheshin.

[27] Enfin, en ce qui concerne la demande de la Requérante visant la radiation intégrale de l’Affidavit Woycheshin en raison du refus de l’avocat de l’Opposante de permettre à M. Woycheshin de répondre aux questions relatives à sa connaissance des marques de commerce de tiers, je suis d’avis que la réparation appropriée consiste à tirer une conclusion défavorable à l’Opposante à l’égard du refus et à ne pas radier la totalité ou une partie de l’Affidavit Woycheshin.

Question préliminaire – Emploi par un prédécesseur en titre de la Marque de commerce de l’Opposante

[28] Comme je l’ai mentionné dans le résumé de la preuve ci-dessus, l’Opposante a acquis des droits sur la Marque de commerce de l’Opposante le 1ᵉʳ août 2018 en vertu d’un contrat d’achat d’actif [Affidavit Woycheshin, au para 8]. La propriétaire antérieure immédiate de la Marque de commerce de l’Opposante était Bayer Intellectual Property GmbH (Bayer IP), avec laquelle l’Opposante a conclu une entente accessoire relativement aux droits dans la Marque de commerce de l’Opposante [Affidavit Woycheshin, au para 8].

[29] Les Produits de l’Opposante ont été introduits sur le marché canadien en 1996 et ont été vendus de façon continue depuis ce temps [Affidavit Woycheshin, au para 13]. De plus, à cette date et depuis, la Marque de commerce de l’Opposante a toujours été clairement apposée sur tous les emballages des Produits de l’Opposante au Canada [Affidavit Woycheshin, au para 13]. Toutefois, comme l’Opposante n’a acquis la Marque de commerce de l’Opposante qu’en août 2018, elle n’a pas été en mesure de fournir des factures délivrées par les prédécesseurs en titre avant cette date [Affidavit Woycheshin, au para 16].

[30] Néanmoins, l’Opposante soutient qu’avant le 1ᵉʳ août 2018, la Marque de commerce de l’Opposante était [traduction] « détenue et employée par d’autres sociétés, qui devraient toutes être considérées comme des prédécesseurs en titre de [l’Opposante] à l’égard de la [Marque de commerce de l’Opposante] et de tous les droits et de l’achalandage qui y sont associés » [Affidavit Woycheshin, au para 8].

[31] Pour sa part, la Requérante soutient qu’il [traduction] « n’y a aucune preuve d’un quelconque emploi de la [Marque de commerce de l’Opposante] au Canada par Bayer IP ou par toute autre entreprise de telle sorte que les exigences de l’article 50 de la Loi sur les marques de commerce ont été respectées » [observations écrites de la Requérante, au para 15]. La Requérante soutient également que la propre preuve de l’Opposante démontre l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante au Canada entre 2015 et 2019 sur des emballages de semences de canola arborant le nom Bayer Cropscience Inc., et que cet emballage contient un avis de droit d’auteur [traduction] « indiquant que Bayer Cropscience Inc. était le titulaire du droit d’auteur, vraisemblablement dans l’œuvre d’art et le texte sur les sacs », alors que la propriétaire de la Marque de commerce de l’Opposante à l’époque, Bayer IP, n’apparaissait nulle part sur l’emballage [observations écrites de la Requérante, aux para 13 et 14]. La Requérante soutient qu’il n’y a [traduction] « aucune preuve d’une licence accordée par Bayer IP à Bayer Cropscience Inc. ou d’un contrôle quelconque sur la nature ou la qualité des produits vendus au Canada par Bayer IP » et qu’il est impossible de déterminer l’identité du propriétaire des Produits de l’Opposante, car il n’y a aucun avis sur l’emballage des Produits de l’Opposante indiquant que la Marque de commerce de l’Opposante est employée en vertu d’une licence [observations écrites de la Requérante, aux para 16 et 17]. Par conséquent, selon la Requérante, il n’y a aucun fondement sur lequel on peut conclure que tout emploi de la Marque de commerce de l’Opposante avant le 1ᵉʳ août 2018 était fait par le propriétaire d’alors, qui était Bayer IP, ou était réputé être fait par cette dernière [observations écrites de la Requérante, au para 18].

[32] À l’audience, lorsqu’elle a abordé la question de savoir si l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante avant le 1ᵉʳ août 2018 constituait un « emploi » aux termes d’une licence conformément à l’article 50 de la Loi qui pourrait s’appliquer à l’Opposante, cette dernière a soutenu que l’Affidavit Woycheshin [traduction] « révèle des indices de contrôle par les prédécesseurs en titre » de la Marque de commerce de l’Opposante.

[33] J’estime que la preuve et les observations de l’Opposante sur la question de l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante avant le 1ᵉʳ août 2018 sont, au mieux, ambiguës. Même s’il est possible de conclure que la Marque de commerce de l’Opposante était employée au Canada par des entités liées au prédécesseur en titre immédiat de la Marque de commerce de l’Opposante avant le 1ᵉʳ août 2018, aucune preuve ne permet de conclure que cet emploi répondait à l’exigence de l’article 50(1) de la Loi. En effet, il est bien établi en droit qu’une relation d’entreprise ne suffit pas à elle seule pour satisfaire à l’exigence de l’article 50 de la Loi [voir MCI Communications Corp c MCI Multinet Communications Inc (1995) , 61 CPR (3d) 245 (COMC); Dynatech Automation Systems Inc c Dynatech Corp (1995) , 64 CPR (3d) 101 (COMC)].

[34] Comme la preuve n’établit pas que la Marque de commerce de l’Opposante a été employée au Canada conformément aux articles 4 et 50 de la Loi avant le 1ᵉʳ août 2018, je ne peux considérer qu’un tel emploi a bénéficié à l’Opposante. Je considère donc que la date de premier emploi la plus rapprochée de la Marque de commerce de l’Opposante est le moment où l’Opposante a elle-même commencé à employer la Marque de commerce de l’Opposante, ce qui ne peut nécessairement être antérieur à la date d’acquisition du 1ᵉʳ août 2018.

[35] La Requérante a également affirmé que l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante par des entités apparemment non licenciées avant son acquisition par l’Opposante le 1ᵉʳ août 2018 fait perdre à la Marque de commerce de l’Opposante tout caractère distinctif potentiel [observations écrites de la Requérante, au para 33. Bien que j’aie déterminé que l’Opposante ne peut invoquer l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante par ses prédécesseurs en titre, je ne suis pas disposée à conclure que l’emploi par les prédécesseurs en titre de l’Opposante fait perdre à la Marque de commerce de l’Opposante son caractère distinctif. L’Opposante est propriétaire de la Marque de commerce de l’Opposante et l’emploie au Canada depuis le 1ᵉʳ août 2018 en vertu de son contrat de licence conclu avec BASF Canada, ce qui signifie que Marque de commerce de l’Opposante a acquis un caractère distinctif acquis dans la l’Opposante depuis cette date. J’estime que l’emploi constant de plus de cinq ans de la Marque de commerce de l’Opposante par cette dernière et/ou sa licenciée BASF Canada n’est pas touché de façon importante, et n’est certainement pas annulé, par l’emploi antérieur par les prédécesseurs en titre [voir Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc, 2005 CanLII 78252 (CA COMC) pour un raisonnement similaire].

Analyse des motifs d’opposition

Motif fondé sur l’article 38(2)a.1) – mauvaise foi

[36] L’Opposante soutient que la demande relative à la Marque a été produite de mauvaise foi, car la Requérante est une concurrente de l’Opposante et fait la promotion de l’herbicide lié à la Marque comme étant destiné à être employé sur les semences de canola vendues en liaison avec la Marque de commerce de l’Opposante. L’Opposante fait également valoir que la Requérante a demandé l’enregistrement de la Marque [traduction] « en faisant intentionnellement une présentation erronée sur la commandite ou l’affiliation entre les produits, les services et les entreprises des parties, et en s’attachant sciemment à l’achalandage et à la réputation bien établis et respectés de la [Marque de commerce] de l’Opposante ».

[37] La date pertinente pour l’évaluation de ce motif d’opposition est la date de production de la demande, soit le 27 novembre 2017.

[38] Il est bien établi que la simple connaissance de la marque de commerce d’une autre personne n’appuie pas en soi une allégation de mauvaise foi [Woot Inc c Woot Restaurants Inc / Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197]. L’aveuglement volontaire ou le défaut de se renseigner sur les droits d’un concurrent, à eux seuls, n’emportent pas non plus une conclusion de mauvaise foi [Blossman Gas Inc c Alliance Autopropane Inc, 2022 CF 1794 (CanLII)]. Bien que les circonstances dans lesquelles un requérant tente de tirer profit de la réputation d’autrui puissent constituer un motif d’opposition favorable, cette affirmation doit être appuyée par la preuve [Yiwu Thousand Shores E-Commerce Co Ltd c Lin, 2021 CF 1040 (CanLII)].

[39] En l’espèce, il n’y a aucune preuve de mauvaise foi ou, plus précisément, aucune preuve à l’appui de l’affirmation selon laquelle la Requérante tentait de lier les Produits de la Requérante à ceux de l’Opposante dans le but de tirer profit de l’achalandage et de la réputation de la Marque de commerce de l’Opposante.

[40] Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Article 38(2)f) – Droit d’emploi

[41] L’Opposante soutient que la Requérante n’avait pas le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits de la Requérante pour les raisons résumées ci-dessous, à savoir que la Requérante :

  • est une concurrente de l’Opposante;

  • connaissait (ou devrait être réputée connaître) les droits de l’Opposante dans la Marque de commerce de l’Opposante;

  • a produit la demande visant la Marque en sachant qu’elle créerait de la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante et porterait atteinte aux droits de l’Opposante, en contravention de l’article 20 de la Loi;

  • savait que l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits de la Requérante serait et est illégal puisqu’un tel emploi est susceptible d’avoir pour effet de déprécier l’achalandage de la Marque de commerce de l’Opposante contrairement à l’article 22 de la Loi et attirerait l’attention sur les Produits de la Requérante d’une manière qui créerait de la confusion entre ces produits et l’Opposante et les Produits de l’Opposante contrairement à l’article 7b) de la Loi.

[42] La date pertinente pour ce motif est la date de production de la Demande relative à la Marque, à savoir le 27 novembre 2017.

[43] Comme je l’ai mentionné à la rubrique des questions préliminaires, je ne considère pas que la preuve d’emploi soumis par l’Opposante de la Marque de commerce de l’Opposante avant la date d’acquisition de la Marque de commerce de l’Opposante, soit le 1ᵉʳ août 2018, est attribuable à l’Opposante, étant donné que la preuve d’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante par les prédécesseurs en titre était insuffisante pour étayer l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante conformément à l’article 50 de la Loi.

[44] Puisque j’ai déterminé que le premier emploi de la Marque de commerce de l’Opposante est postérieur à la date de production de la demande visant la Marque, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition.

[45] Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Motif fondé sur l’article 12(1)d) – Enregistrabilité

[46] La question déterminante à trancher que soulèvent tous les autres motifs d’opposition est celle de savoir si la Marque crée de la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante. Par conséquent, je vais d’abord examiner la question de la probabilité de confusion en vertu de ce que je considère comme le motif le plus solide de l’Opposante, à savoir le motif fondé sur l’article 12(1)d).

[47] La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corp c Wickers/Simmons Bedding Ltd, (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[48] L’opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) si l’enregistrement invoqué est toujours en règle à la date de la décision rendue à l’égard de l’opposition. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et j’ai exercé ce pouvoir discrétionnaire pour confirmer que la Marque de commerce de l’Opposante est toujours en vigueur [voir Quaker Oats Co of Canada Ltd/La Compagnie Quakers Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd (1986) , 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. Je conclus donc que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve. Je dois maintenant déterminer si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime.

Test en matière de confusion

[49] L’article 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[50] Par conséquent, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que les produits ou les services provenant d’une source proviennent d’une autre source. Essentiellement, la question en l’espèce est de savoir si un consommateur moyen, qui a un souvenir imparfait des Marques de commerce de l’Opposante, penserait que les produits et services énumérés dans la demande d’enregistrement de la Marque proviennent de l’Opposante, ou qu’ils sont parrainés ou approuvés par l’Opposante.

[51] Dans l’application du test en matière de confusion, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre des produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces critères ne sont pas exhaustifs et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie selon le contexte [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23]. Je renvoie également à Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, où la Cour suprême du Canada déclare, au paragraphe 49, que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce, est souvent le facteur susceptible de revêtir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

Degré de ressemblance

[52] La Cour suprême du Canada a laissé entendre dans Masterpiece, au paragraphe 49, qu’une étude de la ressemblance entre les marques devrait constituer le point de départ de la plupart des analyses relatives à la confusion. Si les marques ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion, même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire.

[53] Il est bien établi en droit que, lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, les marques de commerce doivent être considérées dans leur totalité. Le critère approprié n’est pas une comparaison côte à côte, mais le vague souvenir que laisse la marque de commerce de l’opposant dans l’esprit d’un consommateur [Veuve Clicquot, au para 20]. L’approche préférable pour comparer des marques de commerce consiste à commencer par déterminer si l’un des aspects d’une marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, au para 64].

[54] Pour sa part, l’Opposante soutient que, bien que la Marque de commerce de l’Opposante soit le mot INVIGOR, l’élément [traduction] « prédominant et frappant » des marques des parties est le terme VIGOR [observations écrites de l’Opposante, au para 62]. Je note que l’Opposante a également décrit la version stylisée dans ses observations écrites qui met en majuscule le « I » initial et la lettre « V » comme pour étayer son argument selon lequel l’élément distinctif de la Marque de l’Opposante est le mot « vigor » [observations écrites de l’Opposante, au para 62]. Toutefois, comme c’est la marque de commerce telle qu’elle est enregistrée plutôt que telle qu’elle est employée qui doit être prise en considération, il ne s’agit pas d’un facteur pertinent aux fins du présent motif d’opposition. Quoi qu’il en soit, le fait que la Marque de commerce de l’Opposante soit couramment employée en utilisant un « I » et un « V » majuscule n’aurait pas d’incidence importante sur mes conclusions relatives à degré de ressemblance.

[55] La Requérante soutient que la Marque de commerce de l’Opposante se distingue de la Marque dans le son en ce que la Marque de commerce de l’Opposante est composée de deux syllabes au lieu d’une seule et que le préfixe « in » de la Marque de commerce de l’Opposante entraîne non seulement une différence dans la prononciation des marques, mais aussi une différence dans la présentation [observations écrites de la Requérante, au para 53]. La Requérante soutient également que les marques en cause véhiculent des idées différentes en ce sens que le mot INVIGOR serait lié à la même idée que le mot « invigorate », qui laisse entendre que les produits liés [traduction] « donneraient vie et énergie à » quelque chose, alors que la Marque, nommément VIGOR, véhicule une idée différente, soit une [traduction] « force physique ou mentale active », une [traduction] « croissance active saine et équilibrée, particulièrement des plantes » ou une [traduction] « intensité d’action ou un effet » [observations écrites de la Requérante, au para 55]. Enfin, la Requérante souligne que les deux marques en cause sont des marques faibles dans leur ensemble et que, par conséquent, de petites différences dans le son, dans la présentation et dans les idées qu’elles suggèrent sont acceptables pour distinguer une marque de l’autre [observations écrites de la Requérante, au para 56].

[56] Je ne suis pas entièrement d’accord avec l’une ou l’autre des parties sur cette question. Malgré l’affirmation de l’Opposante selon laquelle les marques en cause partagent le même élément distinctif, à savoir le mot « vigor », à mon avis ce n’est pas ce mot du dictionnaire qui est l’élément le plus distinctif de la Marque de commerce de l’Opposante. C’est plutôt la Marque de commerce de l’Opposante dans son ensemble qui est distinctive étant donné qu’il ne s’agit pas techniquement d’un mot du dictionnaire, bien qu’il soit très proche du mot courant du dictionnaire « invigorate » et qu’elle le suggère très fortement. La Marque elle-même est composée exclusivement du mot courant du dictionnaire « vigor » et ne comporte pas vraiment d’élément particulièrement frappant ou unique.

[57] J’estime également que les observations de la Requérante sur le degré de ressemblance n’étaient pas convaincantes. Bien que le sens des mots « vigor » et « invigorate » dans les dictionnaires (le dernier serait essentiellement, à mon avis, la pensée initiale qu’un consommateur moyen aurait en voyant pour la première fois la Marque de commerce de l’Opposante) diffère légèrement en ce que la Marque est un nom et que la Marque de commerce de l’Opposante est un verbe, à mon avis, le concept général véhiculé par les marques de commerce des deux parties est essentiellement le même, c.-à-d. que les produits liés à chaque marque confèrent force, résilience, vitalité et robustesse.

[58] Dans l’ensemble, je suis d’avis que les marques de commerce en cause sont très similaires dans la présentation, le son et les idées qu’elles suggèrent. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[59] Comme je l’ai expliqué en détail ci-dessus à la rubrique des questions préliminaires, j’ai conclu que la première date d’emploi pouvant être attribuée à la Marque de commerce de l’Opposante est le 1ᵉʳ août 2018.

[60] La preuve de la Requérante est également quelque peu ambiguë, car l’Affidavit Rumberg indique que les Produits de la Requérante ont été [traduction] « introduits et vendus pour la première fois au Canada en 2018 », mais ne donne pas plus de détails sur le moment où l’emploi a eu lieu pour la première fois en 2018, si ce n’est que pour fournir un chiffre de ventes pour les produits vendus en liaison avec la Marque pour la période du 1ᵉʳ octobre 2017 au 30 septembre 2018, ce qui laisse entendre qu’il y a eu des ventes notables à un moment donné avant le 30 septembre 2018 [aux para 8 et 10]. Il n’est pas clair à quel moment au cours de la période allant d’octobre 2017 à septembre 2018 les Produits de la Requérante ont été vendus, bien que, selon la déclaration assermentée de M. Rumberg, les ventes de la Requérante n’ont eu lieu qu’en 2018. Je ne peux accorder à la Requérante le bénéfice de près d’une année de ventes qui pourraient ou non être survenues avant septembre 2018. Par conséquent, je considère que la date la plus rapprochée est la date la plus tardive de la période prescrite, soit septembre 2018.

[61] Compte tenu du manque de clarté de la preuve présentée par les deux parties concernant l’emploi de leurs marques respectives, je ne peux conclure que l’une ou l’autre des parties est favorisée par ce facteur. Quoi qu’il en soit, la preuve des deux parties donne à penser que l’emploi de leurs marques respectives a commencé à un certain moment en août ou en septembre 2018. Par conséquent, même si la preuve établissait clairement l’emploi de la Marque ou de la Marque de commerce de l’Opposante à titre de premier emploi dans le temps, la durée de l’emploi antérieur serait limitée à quelques mois, au mieux, ce qui est peu susceptible de favoriser de façon significative la partie ayant fait l’emploi antérieur.

[62] En conséquence, aucune des parties n’est favorisée par ce facteur.

Caractère distinctif inhérent et acquis

[63] L’Opposante fait valoir que, comme la Marque est un mot courant du dictionnaire, elle possède un faible caractère distinctif inhérent et que, par contraste, la Marque de commerce de l’Opposante n’est pas un mot courant du dictionnaire (bien que l’Opposante soutienne que la Marque de commerce de l’Opposante suggère un lien avec le verbe « invigorate ») et qu’elle possède dont un [traduction] « degré élevé » de caractère distinctif inhérent » [observations écrites de l’Opposante, aux para 31 et 32].

[64] Bien que les affirmations de l’Opposante concernant sa marque de commerce soient factuellement exactes, à mon avis, un consommateur moyen reconnaîtrait, à première vue, la Marque de commerce de l’Opposante essentiellement comme un mot courant du dictionnaire, étant donné sa ressemblance étroite avec les mots « invigorate » et « vigor ». Par conséquent, bien que la Marque de commerce de l’Opposante puisse être considérée comme ayant un caractère distinctif inhérent plus élevé que la Marque, j’estime qu’il est insuffisant pour avoir une pertinence importante en l’espèce.

[65] Le caractère distinctif acquis d’une marque de commerce fait référence à la mesure dans laquelle elle est devenue connue au Canada par l’emploi et la promotion. En l’espèce, l’Opposante a produit une preuve relative à la publicité et aux ventes des Produits de l’Opposante; toutefois, la majeure partie de cette preuve est antérieure à la date d’acquisition de la Marque de commerce de l’Opposante, soit le 1ᵉʳ août 2018. Comme nous l’avons vu sous la rubrique des questions préliminaires ci-dessus, il n’est pas clair que cet emploi antérieur était conforme aux articles 4 et 50 de la Loi. Par conséquent, je ne peux pas conclure que l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante par les prédécesseurs en titre a réellement contribué au caractère distinctif acquis de la marque.

[66] La preuve d’emploi par l’Opposante de sa marque de commerce après son acquisition le 1ᵉʳ août 2018 se limite à la déclaration selon laquelle plus d’un million de sacs contenant les Produits de l’Opposante ont été vendus en 2018 (mais ne précise pas la partie des ventes qui a eu lieu après le 1ᵉʳ août 2018) et aux factures de ventes en 2019 et en 2020 [Affidavit Woycheshin, aux para 15 et 16, Pièce 5]. L’Opposante a également dépensé plus de 1,7 million de dollars canadiens pour annoncer la Marque de commerce de l’Opposante sur ses sites Web, les sites Web de tiers, les médias imprimés, la télévision ou la radio au Canada depuis le 1ᵉʳ août 2018 [Affidavit Woycheshin, aux para 22 et 23].

[67] La Requérante a produit une preuve de ventes des Produits de la Requérante remontant à 2018, bien qu’aucune date de premier emploi précise en 2018 n’ait été fournie et que le premier échantillon de facture fourni par la Requérante soit daté du 13 novembre 2019 [Affidavit Rumberg, aux para 3, 5 et 10]. Les chiffres des recettes de vente de la Requérante montrent effectivement près d’un million de dollars canadiens pour la période du 1ᵉʳ octobre 2017 au 30 septembre 2018, ce qui indique que les ventes des Produits de la Requérante ont commencé à un certain moment avant le 30 septembre 2018 [Affidavit Rumberg, au para 10].

[68] En ce qui concerne la publicité, la Requérante a fourni des détails concernant la publicité sur le site Web d’AgraCity, qui compte plus de 1 200 pages vues uniques, soit des consultations par des utilisateurs uniques, depuis décembre 2019 [Affidavit Rumberg, au para 12]. Toutefois, je souligne que le nombre de Canadiens qui ont fait ces consultations uniques n’est pas clair et que cet élément n’est pas abordé dans la preuve de la Requérante [Affidavit Rumberg, au para 12].

[69] La preuve au dossier démontre que les parties ont commencé à employer leurs marques de commerce respectives vers la même période en 2018. La Requérante a fourni des revenus de ventes annuelles, mais aucune preuve concernant des dépenses publicitaires ou toute publicité autre que sur son site Web (qui peut ou non se rapporter à des opinions de Canadiens) et la distribution de guides de produits, alors que l’Opposante a fourni des détails sur les dépenses publicitaires et la nature de ses activités publicitaires, mais aucun chiffre de ventes pour la période pertinente (qui a commencé le 1ᵉʳ août 2018).

[70] Je souligne qu’il n’est pas clair pourquoi l’Opposante n’a pas fourni de preuve de ventes annuelles pour les années où elle a été propriétaire de la Marque de commerce de l’Opposante, ni pourquoi la Requérante n’a pas fourni de dépenses de publicité, mais l’un ou l’autre de ces renseignements aurait été nécessaire pour conclure possiblement qu’une partie a acquis un caractère distinctif supérieur.

[71] En raison des lacunes de la preuve au dossier, on ne peut pas dire que l’une ou l’autre des parties est favorisée en ce qui concerne le caractère distinctif acquis.

[72] Par conséquent, dans l’ensemble, ce facteur ne favorise aucune des parties.

Genre des produits et entreprises

[73] Lorsqu’on examine ce facteur dans l’évaluation de la confusion, c’est l’état déclaratif des produits indiqué dans l’enregistrement invoqué par l’Opposante et l’état déclaratif des produits dans la demande visée par l’opposition qui régissent l’évaluation de la probabilité de confusion [Henkel Kodmanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)].

[74] Les deux parties ont présenté des observations concernant leurs produits respectifs et le genre d’entreprises liées à leurs marques de commerce respectives ainsi que la description du consommateur moyen des produits liés à ces marques de commerce.

[75] Pour sa part, l’Opposante soutient que, bien que les produits respectifs des parties n’appartiennent pas à la même catégorie générale, il existe un lien clair entre les Produits de l’Opposante (soit les semences) et les Produits de la Requérante (soit les herbicides) [observations écrites de l’Opposante, au para 46].

[76] Je souligne que l’Opposante a également inclus un tableau d’enregistrements de marques de commerces et de demandes canadiennes qui couvre à la fois les semences ainsi que des traitements comme les herbicides, les pesticides et les engrais dans ses observations à titre de preuve de l’état du registre des marques de commerce canadiennes [observations écrites de de l’Opposante, au para 48]. Bien que le tableau ait été produit en fonction de sociétés mentionnées dans l’Affidavit Rumberg, je conviens avec la Requérante que ce tableau est un nouvel élément de preuve qui ne peut être présenté pour la première fois dans les arguments écrits. Je n’ai donc accordé aucun poids à ce tableau et aux observations connexes de l’Opposante [observations écrites de l’Opposante, aux para 48 et 49].

[77] La Requérante soutient que, bien que ses produits et ceux de l’Opposante puissent être quelque peu liés en ce sens qu’ils sont employés dans l’industrie agricole, l’Affidavit Rumberg contient des éléments de preuve non contestés selon lesquels [traduction] « dans l’esprit du consommateur, dans ce cas les agriculteurs, les marques de semence ne sont pas habituellement liées aux marques d’herbicide » [observations écrites de la Requérante, au para 69].

[78] J’estime que les déclarations vagues contenues dans l’Affidavit Rumberg ne sont ni concluantes ni convaincantes. Les déclarations de M. Rumberg selon lesquelles [traduction] « de nombreuses entreprises de semences ne vendent pas d’herbicides ou d’autres produits de protection des cultures », [traduction] « de nombreuses entreprises de protection des cultures ne vendent pas de semences » et [traduction] « certaines entreprises qui vendent à la fois des semences et des herbicides utilisent des marques différentes » n’enlèvent rien au lien clair entre les semences de l’Opposante et les herbicides de la Requérante. De plus, comme le souligne l’Opposante, les Produits de la Requérante sont destinés à être employés par l’Opposante [observations écrites de l’Opposante, au para 46, faisant référence à l’Affidavit Rumberg, au para 6].

[79] Compte tenu de la preuve au dossier, j’estime que ce facteur favorise l’Opposante.

Nature du commerce

[80] La Requérante soutient que les voies de commercialisation des parties diffèrent considérablement, car AgraCity vend les Produits de la Requérante à des agriculteurs, tandis que les Produits de l’Opposante sont vendus à des distributeurs [observations écrites de la Requérante, au para 71]. La Requérante soutient également que la décision d’acheter des semences (comme les Produits de l’Opposante) et des produits de protection des cultures (comme les Produits de la Requérante) [traduction] « est souvent prise à des périodes différentes de l’année, surtout pour les producteurs de canola », car les semences sont habituellement achetées entre le mois d’août et le mois de novembre, alors que les herbicides sont habituellement achetées à l’hiver ou au début du printemps [observations écrites de la Requérante, au para 27].

[81] Comme je l’ai indiqué, l’approche appropriée à adopter lors de l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) consiste à considérer l’état déclaratif des produits dans la demande et l’enregistrement en cause, plutôt que l’emploi réel sur le marché [Henkel, M. Sous-marin]. Il n’est pas nécessaire de prouver que les produits des parties sont réellement vendus dans les mêmes voies de commercialisation, dans la mesure où les parties ont le droit de le faire [Eminence, SA c Registrar of Trade Marks (1977) CPR (2d) 40 (CF), au para 43].

[82] Par conséquent, j’estime que les observations de la Requérante concernant les consommateurs initiaux des Produits de l’Opposante et des Produits de la Requérante, ou les périodes de l’année au cours desquelles ces produits sont vendus (qui, de toute façon, semblent se chevaucher dans une certaine mesure au début de l’hiver) ne sont pas utiles à la Requérante. Il n’existe aucune restriction quant aux voies de commercialisation de l’enregistrement de l’Opposante ou de la demande en cause. De plus, comme le souligne l’Opposante, les agriculteurs sont les consommateurs ultimes des produits des deux parties [observations écrites de l’Opposante, au para 57].

[83] Comme il semble y avoir un chevauchement, sinon réel, à tout le moins potentiel dans les voies de commercialisation des parties, ce facteur favorise l’Opposante.

Circonstances de l’espèce – État du registre et état du marché

[84] La Requérante soutient que l’Affidavit Dacres démontre la preuve d’au moins 18 demandes de marques de commerce et enregistrements sur le registre canadien des marques de commerce appartenant à 11 personnes différentes qui incorporent le mot VIGOR et qui sont liées à des produits et services de catégories 1, 5 et 22 [observations écrites de la Requérante, au para 79]. La Requérante met en évidence en particulier l’enregistrement VIGOR TRIGGER, qui, affirme-t-elle sans preuve, appartient à un concurrent direct de l’Opposante dans le domaine des produits de traitement des semences [observations écrites de la Requérante, au para 79]. Enfin, la Requérante fait référence à l’Affidavit Rumberg comme preuve que la marque de commerce VIGORMAX est employée par la société tierce NutriAg Ltd. sur des produits de traitement des semences au Canada [Affidavit Rumberg, au para 14.

[85] La preuve de l’état du registre est pertinente dans la mesure où elle permet de tirer des inférences concernant l’état du marché au Canada; de telles inférences ne peuvent être tirées que s’il existe un grand nombre d’enregistrements de marques de commerce pertinents [McDowell c Laverana GmbH et Co KG, 2017 CF 327, au para 42; voir aussi Caterpillar Inc c Puma SE, 2021 CF 974, aux para 91 à 94]. Les marques de commerce pertinentes comprennent celles qui sont enregistrées en liaison avec des produits et services semblables aux marques en cause et celles qui incluent l’élément en cause en tant qu’élément important [Sobeys West Inc c Schwan’s IP, LLC, 2015 COMC 197, au para 38].

[86] Premièrement, je souligne que l’enregistrement de VIGOR TRIGGER mentionné par la Requérante a été radié en novembre 2020 et n’est donc pas pertinent en l’espèce.

[87] En ce qui concerne les 17 autres enregistrements indiqués par la Requérante à partir des recherches contenues dans l’Affidavit Dacres, l’Opposante souligne que huit de ces enregistrements appartiennent au même propriétaire (Home Depot International, Inc.) et que tous ces enregistrements visent des marques de commerce qui comprennent ou contiennent le mot VIGORO, ce qui est sans doute sensiblement différent des mots VIGOR et INVIGOR étant donné que ce mot suggère le mot FIGARO au moins autant que les marques de commerce en cause [observations écrites de l’Opposante, au para 68]. Des autres enregistrements indiqués par la Requérante dans l’Affidavit Dacres, deux sont des Marques officielles et seules trois sont des marques de commerce déposées qui contiennent le mot VIGOR sous une forme ou une autre (VIGORTONE, VIGORMAX et TURFVIGOR) et qui sont également liées à des produits agricoles.

[88] Je ne considère pas que le nombre de marques de commerce indiquées par la Requérante dans l’Affidavit Dacres représente un nombre suffisant d’enregistrements pour tirer l’inférence selon laquelle le mot VIGOR est couramment employé sur le marché avec des produits ou des services liés à l’agriculture au Canada. L’emploi possible de quelques-unes (en l’espèce, trois marques de tiers distinctes et un groupe de huit enregistrements VIGORO au nom d’un seul propriétaire) n’a, à mon avis, aucune incidence mesurable sur la question de savoir si une personne pourrait raisonnablement confondre la Marque avec la Marque de commerce de l’Opposante [voir Association olympique canadienne c SmithKline Beecham Biologicals SA, 2001 CanLII 38020 (CA COMC).

[89] Par conséquent, ce facteur n’est d’aucun secours à la Requérante.

Conclusion

[90] Compte tenu des circonstances de l’espèce, particulièrement du degré élevé de ressemblance entre les marques de commerce respectives des parties, du lien étroit entre les produits des parties et des voies de commercialisation semblables, voire qui se chevauchent, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités une probabilité, qu’il n’y avait aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la Marque de commerce de l’Opposante.

[91] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12d) de la Loi est accueilli.

Motif fondé sur l’article 16(1)a) – Droit à l’enregistrement

[92] L’Opposante a soutenu que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque parce que, à la date de dépôt de la demande, la Marque créait de la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante qui avait été antérieurement employée au Canada par l’Opposante ou ses prédécesseurs en titre.

[93] Comme j’ai conclu que la date de premier emploi la plus rapprochée possible de la Marque de commerce de l’Opposante sur laquelle on peut s’appuyer est le 1ᵉʳ août 2018, qui est postérieure à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la Marque du 27 novembre 2017, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial à l’égard de ce motif.

[94] Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Motif fondé sur l’article 2 – absence de caractère distinctif

[95] L’Opposante soutient que la Marque n’est pas distinctive des Produits de la Requérante pour les raisons suivantes :

  • la Marque ne distingue pas véritablement les produits en liaison avec lesquels la Marque est employée ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer des Produits de l’Opposante;

  • la Marque est employée en dehors du cadre de l’emploi sous licence prévu à l’article 50 de la Loi, y compris par Agracity.

[96] La date pertinente pour ce motif est la date de production de l’opposition, soit le 29 mars 2021 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[97] Pour s’acquitter de son fardeau à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer que la réputation de sa marque de commerce empêche la Marque d’être distinctive et que le niveau d’emploi requis doit être celui d’une « réputation importante » ou « significative ou suffisante » en liaison avec les produits et services pertinents à la date pertinente [Hilton Worldwide Holding LLP c Solterra (Hastings) Limited Partnership, 2019 COMC 133, citant Bojangles’International, LLC c Bojangles Café Ltd 2006 CF 657].

[98] Comme j’ai déjà déterminé que la date de premier emploi la plus ancienne que peut invoquer l’Opposante pour la Marque de commerce de l’Opposante est sa date d’acquisition de la marque de commerce, la preuve doit établir que la Marque de commerce de l’Opposante avait une réputation importante et significative liée aux Produits de l’Opposante du 1ᵉʳ août 2018 à la date pertinente du 29 mars 2021.

[99] L’Affidavit Woycheshin fournit les éléments de preuve suivants pour la période pertinente d’examen de ce motif :

  • à la fin de 2019, la société mère BASF (soit la société mère de l’Opposante) détenait la quatrième part en importance du marché mondial de l’industrie des solutions agricoles [au para 6];

  • les factures pour les Produits de l’Opposante vendus entre 2018 et 2020 [au para 16, Pièce 5];

  • depuis le 1ᵉʳ août 2018, BASF Canada a continuellement annoncé et fait la promotion des Produits de l’Opposante au Canada en ligne sur ses propres sites Web ainsi que sur des sites Web de tiers, dans des médias imprimés, à la télévision ou à la radio [au para 22];

  • depuis le 1ᵉʳ août 2018, BASF Canada a dépensé plus de 1,7 million de dollars canadiens en publicité pour les Produits de l’Opposante [au para 23]. Une liste des médias sur lesquels les Produits de l’Opposante ont été annoncés d’août 2018 à avril 2019 comprend divers médias imprimés, panneaux publicitaires, chaînes de télévision, stations de radio et sites Web de tiers [au para 23];

  • des imprimés tirés des sites Web de BASF Canada arborant la Marque de commerce de l’Opposante qui sont identiques ou essentiellement semblables à ceux qui sont disponibles de façon continue depuis août 2018 [au para 24, Pièce 8]. Entre le 1ᵉʳ août 2018 et le 16 février 2019, environ 30 000 utilisateurs canadiens ont consulté des pages Web tirées du site Web Agriculture.basf.ca liées aux Produits de l’Opposante [au para 24];

  • depuis quelques années, BASF Canada a accru sa présence dans les médias sociaux en publiant du contenu sur des plateformes comme YouTube et Twitter [au para 26, Pièces 10-A et 10-B].

[100] Je suis convaincue que l’Opposante a fourni une preuve suffisante de l’emploi de sa Marque de commerce pour s’acquitter de son fardeau de preuve pour ce motif d’opposition.

[101] La détermination du premier aspect de ce motif repose sur l’évaluation de la probabilité de confusion entre les marques de commerce en cause [Hilton]. Étant donné que je ne considère pas que la date pertinente différente pour ce motif influe de façon importante sur mon évaluation de la confusion, comme je l’ai indiqué ci-dessus, en ce qui concerne le motif fondé sur l’article 12(1)d), je conclus que l’Opposante a gain de cause sur le motif fondé sur l’article 2 dans la mesure où il est fondé sur la probabilité de confusion.

[102] En ce qui concerne le deuxième aspect de ce motif soulevé par l’Opposante, à savoir que la Marque est employée en dehors de l’emploi sous licence, y compris, mais sans s’y limiter, l’emploi par la licenciée de la Requérante Agracity, l’Affidavit Rumberg fournit des détails sur la licence entre la Requérante et Agracity, à savoir que la Requérante a accordé une licence à Agracity pour l’emploi de la Marque, la Requérante ayant le contrôle sur la qualité et la nature des Produits de la Requérante et sur l’emploi de la Marque. M. Rumberg n’ayant pas été contre-interrogé sur son affidavit, ces déclarations, qui contiennent les éléments requis prévus à l’article 50 de la Loi, ne sont pas contestées. Je conclus donc que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime à l’égard de cet aspect du motif fondé sur l’article 2.

[103] Néanmoins, comme l’Opposante a obtenu gain de cause à l’égard du premier aspect de ce motif, la demande d’enregistrement de la Marque est également rejetée en vertu de l’article 2 de la Loi.

Décision

[104] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande conformément aux dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

_______________________________

Leigh Walters

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Liette Girard

 

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-08-10

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Barry Gamache

Pour la Requérante : David Reive

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Robic, LLP

Pour la Requérante : Miller Thompson LLP

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