Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

A maple leaf on graph paper

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 138

Date de la décision : 2023-08-04

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS

Opposante : JTH Tax LLC

Requérante : H&R Block Canada, Inc.

Demandes : 1864949 pour INSTANT REFUND BY H&R BLOCK, et

1864950 pour H&R BLOCK’S INSTANT REFUND

Introduction

[1] H&R Block Canada, Inc. produit une demande d’enregistrement pour les marques de commerce INSTANT REFUND BY H&R BLOCK (la Marque IRHRB) et H&R BLOCK’S INSTANT REFUND (la Marque HRBIR; collectivement, les Marques). L’enregistrement de chacune des Marques est demandé en liaison avec les services suivants (les Services) :

[traduction]

Services fiscaux, nommément préparation de déclarations de revenus, évaluation fiscale, services de conseil en fiscalité, vérification fiscale, services de cession du droit au remboursement d’impôt.

[2] JTH Tax LLC (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement des Marques. L’opposition se fonde principalement sur des allégations selon lesquelles les Marques créent de la confusion avec plusieurs marques de commerce de l’Opposante, comme il est indiqué ci-dessous (collectivement, les Marques de l’Opposante). Chacune des Marques de l’Opposante contient les mots « INSTANT REFUND » et est liée aux services suivants (les Services de l’Opposante) :

[traduction]

Services de préparation de remboursement de taxe et d’escompte du remboursement de taxe, ces services susmentionnés étant fournis seuls et/ou par un ou plusieurs concessionnaires franchises.

[3] Pour les raisons qui suivent, l’opposition est rejetée.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de chacune des Marques a été déposée le 27 octobre 2017, et est fondée sur l’emploi projeté au Canada. Les deux demandes ont été annoncées aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 21 octobre 2020. Le 21 avril 2021, l’Opposante s’est opposée aux demandes en produisant des déclarations d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Les déclarations d’opposition modifiées ont été produites le 29 septembre 2021, pour corriger le nom de l’Opposante et une référence à la Loi.

[5] Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Étant donné que les demandes en l’espèce ont été annoncées après le 17 juin 2019, la Loi dans sa version modifiée s’applique (voir l’article 69.1 de la Loi).

[6] L’Opposante énumère trois marques de commerce dans l’annexe A de sa déclaration d’opposition, dont Instant TAX Refund & DESIGN, enregistrement no LMC611,585 (la Marque ITR Design); INSTANT REFUND & DESIGN, enregistrement no LMC612,111 (la Marque IR Design); et une marque de commerce « INSTANT REFUND » liée aux services de l’Opposante. Je note qu’aucun numéro de demande ou d’enregistrement n’est fourni pour cette dernière marque de commerce « INSTANT REFUND » et qu’elle ne semble pas être directement mentionnée dans les preuves ou les observations écrites de l’Opposante. En l’absence de détails relatifs à une demande ou à un enregistrement de cette marque de commerce, de preuve d’emploi, ou de réputation, ou d’observation concernant cette marque de commerce « INSTANT REFUND », je n’estime pas que cela soit en cause dans la présente procédure, car l’Opposante ne serait pas en mesure de s’acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe à l’égard des motifs d’opposition.

[7] Les motifs d’opposition sont les mêmes dans chaque cas et sont résumés ci-dessous :

[8] La Requérante a signifié et produit des contre-déclarations réfutant chacun des motifs d’opposition. Les deux parties ont produit des éléments de preuve, qui sont examinés ci-dessous. Aucun contre-interrogatoire n’a été mené relativement aux éléments de preuve de l’une ou l’autre des parties.

[9] Les deux parties ont produit des observations écrites et étaient représentées à l’audience.

Preuve

Preuve de l’Opposante

[10] La preuve de l’Opposante dans les deux procédures d’opposition est composée des copies certifiées de la Marque ITR Design, de la Marque IR Design et de la marque de commerce LIBERTY TAX, numéro d’enregistrement LMC559,500; ainsi que de l’affidavit de Rory Walters, AVP des Finances de l’Opposante, souscrit le 28 septembre 2021.

[11] L’affidavit Walters comprend notamment les renseignements suivants :

Preuve de la Requérante

[12] La Requérante a présenté trois affidavits comme preuves dans chacune de ces procédures : l’affidavit de Joanne Berent, bibliothécaire de référence employée par l’agent au dossier de la Requérante; l’affidavit de Mary P. Noonan, une recherchiste en marques de commerce par l’agent au dossier de la Requérante; et l’affidavit de Rasanmeet Kaur Sahota, étudiante d’été employée par l’agent au dossier de la Requérante.

[13] Mme Berent joint à son affidavit les renseignements suivants :

[14] Mme Noonan joint à son affidavit les renseignements suivants :

[15] Mme Sahota joint à son affidavit les informations suivantes :

Analyse

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)a.1)

[16] L’Opposante fait valoir que les Marques ne sont pas enregistrables et qu’elles ont été déposées de mauvaise foi parce que la Requérante était au courant de l’emploi des Marques de l’Opposante avant la date de dépôt de la demande et qu’elle avait l’intention de profiter de l’achalandage de l’Opposante.

[17] Toutefois, en l’absence de preuve que la Requérante a agi de mauvaise foi lors du dépôt de ses demandes, ou d’observations concernant ce motif d’opposition, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[18] L’Opposante allègue que, contrairement à l’article 12(1)d) de la Loi, les Marques ne sont pas enregistrables en raison des enregistrements de marques de l’Opposante. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre [selon Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)] et j’ai déterminé que l’enregistrement de l’Opposante pour la Marque ITR Design existe toujours, tandis que la Marque IR Design a été radiée pour défaut d’emploi le 16 août 2022.

[19] En outre, bien que les preuves et les observations écrites de l’Opposante fassent référence à la marque de commerce LIBERTY TAX de l’Opposante, cette marque de commerce n’étant pas mentionnée dans ses déclarations d’opposition, elle n’est pas en cause dans la présente procédure.

[20] L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) en ce qui concerne la Marque ITR Design uniquement.

[21] Comme l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, je dois évaluer si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque de la Requérante et les enregistrements susmentionnés de l’Opposante. La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[22] Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à ces facteurs énumérés [voir, en général, Mattel USA Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22 (Mattel), et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27 (Masterpiece)]. De plus, dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), le degré de ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[23] Enfin, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion entre des produits ou des services provenant d’une source qui est considérée comme provenant d’une autre source. En l’espèce, la question posée par l’article 6(2) est de savoir s’il y aurait confusion entre les services vendus sous la Marque de telle sorte qu’ils seraient considérés comme fournis par l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent et acquis

[24] Une marque de commerce possède un caractère distinctif inhérent si elle ne suggère aucune caractéristique des produits et services connexes, que ce soit par le biais d’un libellé descriptif ou d’épithètes élogieuses. En revanche, un mot inventé possède un caractère distinctif inhérent plus élevé [Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc, 2003 CAF 120, au para 6].

[25] Les observations de l’Opposante sur ce facteur portent essentiellement sur la question du caractère distinctif acquis. En revanche, la Requérante soutient que les mots « INSTANT » et « REFUND », partagés par les Marques de la Requérante et la Marque ITR Design, sont très suggestifs, voire descriptifs, des services qui y sont liés, notant que les articles de presse joints à l’affidavit de Dingman et les sites Web joints à l’affidavit de Sahota montrent que les expressions « instant refund » et « instant tax refund » sont couramment employées dans le domaine de la préparation de déclarations de revenus. La Requérante note en outre qu’à la suite des objections relatives au caractère descriptif émises par l’examinateur de marques de commerce dans le cadre de la demande d’enregistrement de la Marque ITR Design, l’Opposante a introduit des avis de non-responsabilité à l’égard de tous les mots de cette marque de commerce, comme le montre l’historique de l’affaire joint à l’affidavit de Noonan. Ainsi, la Requérante soutient que dans la mesure où la Marque ITR Design possède un caractère distinctif inhérent, ce n’est qu’en ce qui concerne les éléments figuratifs de la marque de commerce. La Requérante soutient que ses Marques possèdent un degré plus élevé de caractère distinctif inhérent en ce qu’elles sont un slogan distinctif incluant la marque maison et le nom commercial de la Requérante « H&R BLOCK ».

[26] Il est bien établi que les marques de commerce composées de mots descriptifs ou de mots suggestifs ne peuvent bénéficier que d’une protection limitée [General Motors Corp c Bellows (1949), 10 CPR 101 (CSC)], et que des différences relativement mineures suffiront à distinguer de telles marques de commerce [Prince Edward Island Mutual Insurance Co c Insurance Co of Prince Edward Island (1999), 86 CPR (3d) 342 (CF 1re inst), aux para 32 à 34]. Dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL (2005), 46 CPR (4th) 112 (CF 1re inst), au para 31), le juge de Montigny explique :

Comme les deux marques en elles-mêmes sont faibles, il est juste d’affirmer que même de petites différences suffiraient à les différencier. S’il en était autrement, le premier utilisateur de termes couramment employés se verrait conférer injustement un monopole de ces termes. Les tribunaux ont également justifié cette conclusion en affirmant qu’on s’attend à ce que le public soit plus prudent lorsque des noms commerciaux faibles comme ceux-ci sont employés […]

[27] En l’espèce, j’accepte que les éléments nominaux de la Marque ITR Design soient descriptifs ou suggestifs des services offerts, compte tenu des définitions du dictionnaire fournies par la Requérante dans l’affidavit Berent pour « instant » et « refund », et compte tenu des articles de presse et des documents promotionnels joints aux affidavits Berent et Sahota montrant que le terme « instant refund » est utilisé de façon descriptive par la Requérante et des entreprises canadiennes tierces de préparation et de production de déclarations de revenus pour le service consistant à [traduction] « acheter votre remboursement de taxe […] pour un pourcentage du remboursement de taxe prévu par le gouvernement » [affidavit Berent, Pièce A, page 15]. Par conséquent, la Marque ITR Design possède un degré très limité de caractère distinctif inhérent, uniquement en raison de sa stylisation.

[28] En ce qui concerne les Marques, bien qu’elles comprennent également les mots « INSTANT REFUND », la Requérante soutient qu’elles possèdent un degré de caractère distinctif inhérent beaucoup plus élevé que la Marque ITR Design en raison de la présence des éléments distinctifs « H&R BLOCK ». En outre, la Requérante a fait référence, lors de l’audience, à la [traduction] « longue histoire » de la marque maison « H&R BLOCK »; cependant, la seule preuve fournie par la Requérante sur ce point est constituée de copies d’enregistrements de marques « H&R BLOCK » et de captures d’écran du site Web de la Requérante décrivant les services et l’histoire de l’entreprise. Je note que la Cour fédérale a déconseillé d’accorder même un minimum de poids aux dates de premier emploi revendiquées dans les enregistrements de marques et, de plus, un enregistrement en lui-même n’est pas la preuve que la marque de commerce déposée a été continuellement employée depuis la date revendiquée [voir Tokai of Canada c Kingsford Products Company, LLC, 2018 CF 951; et Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC)]. En ce qui concerne les sites Web, en l’absence d’informations sur la mesure dans laquelle ces sites ont été consultés par des Canadiens, je ne suis pas disposé à conclure qu’ils établissent que les Canadiens connaîtraient la marque maison « H&R BLOCK ». En outre, le contenu des sites Web équivaut à du ouï-dire.

[29] De toute façon, en l’absence de preuve suggérant que les consommateurs canadiens reconnaîtraient « H&R BLOCK » comme un prénom courant [voir Nada Fashion Designs Inc c Groupe Boyz Inc, 2011 COMC 155, à la p 31; Dixie Lee (Maritimes) Ltd c Dixie’s Pizza-Fried Chicken-Fish Inc, 2019 COMC 48, au para 18], je considère que « H&R BLOCK » est un élément distinctif sans signification inhérente, ce qui augmente le degré de caractère distinctif inhérent des Marques [pour des conclusions similaires, voir Express File Inc c HRB Royalty Inc (2001), 21 CPR (4th) 274, au para 28; HRB Royalty Inc c Express File Inc (2002), 25 CPR (4th) 94, au para 24]. J’estime donc que les Marques ont un degré plus élevé de caractère distinctif inhérent que la Marque ITR Design.

[30] Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être rehaussé par son emploi et sa promotion au Canada [voir Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst); GSW Ltd c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (CF 1re inst)]. L’Opposante soutient que la Marque ITR Design a acquis un caractère distinctif important au vu de ses revenus et de ses dépenses en publicité depuis 2007. En réponse, la Requérante soutient que de tels chiffres doivent être considérés avec prudence en ce qui concerne la Marque ITR Design, étant donné que la plus grande partie de l’affidavit de Walters se réfère spécifiquement à la marque de commerce LIBERTY TAX et ne fait que la [traduction] « simple affirmation » que les photographies de la Pièce I de la Marque ITR Design affichée dans les établissements de l’Opposante sont [traduction] « représentatives de la manière dont la [Marque ITR Design] a été employée au Canada par l’Opposante avec les [Services de l’Opposante] depuis qu’elle a commencé à l’employer pour la première fois en mai 2004 ». La Requérante note qu’il n’est pas expliqué en quoi ces photographies sont [traduction] « représentatives », ni où et quand elles ont été prises, ni si les Services de l’Opposante ont été effectivement fournis dans ces emplacements à l’époque où les photographies ont été prises. En outre, la Requérante soutient que le mode d’emploi et la publicité de la Marque ITR Design est, dans le meilleur des cas, une marque ou un slogan [traduction] « secondaire », ce qui diminue la mesure de la réputation que l’Opposante peut revendiquer, citant Leon’s Furniture Limited c Bad Boy Furniture Warehouse Limited, 2010 COMC 132, et Salt Technology Inc c PayPal, Inc, 2019 COMC 21.

[31] Je suis d’accord avec la Requérante sur ce point. Dans la mesure où la preuve de l’Opposante démontre l’emploi de la Marque ITR Design, c’est exclusivement en conjonction avec la marque de commerce LIBERTY TAX. En particulier, je note que les images de la Pièce I de l’affidavit Walters semblent montrer de façon constante la marque de ITR Design affichée sur une affiche sur les vitrines de magasins dont l’enseigne affiche la marque LIBERTY TAX d’une manière beaucoup plus évidente. Dans les cas où une marque de commerce apparaît toujours en liaison avec une autre marque de commerce, ou avec une [traduction] « marque principale » qui apparaît de façon beaucoup plus évidente, la Commission a conclu que le caractère distinctif ou la réputation de la marque secondaire était nettement moindre [voir Leon's Furniture, précité; Simmons IP Inc cPark Avenue Furniture Corp (1996), 74 CPR (3d) 404 (COMC); PepsiCo, Inc c Coca-Cola Inc / Coca-Cola Ltée, 2016 COMC 12, aux para 116 et 117; Euro-Pharm International Canada Inc c Eurofarma Laboratórios Ltda, 2015 COMC 91, au para 32]. En conséquence, je conclus que la Marque ITR Design a acquis un caractère distinctif limité, voire inexistant, sur la base de l’emploi démontré dans l’affidavit de Walters.

[32] En ce qui concerne les Marques, bien que la Marque HRBIR apparaisse sur certaines captures d’écran du site Web de la Requérante jointes à l’affidavit Sahota, rien n’indique si, ou quand, ces sites Web auraient été visités par des utilisateurs canadiens. Ainsi, elles n’établissent pas que l’une ou l’autre des Marques a été employée au Canada.

[33] Ainsi, bien que la Marque ITR Design puisse être considérée comme ayant, au mieux, un degré légèrement plus élevé de caractère distinctif acquis, étant donné le degré beaucoup plus élevé de caractère distinctif inhérent de la Marque, j’estime que, dans l’ensemble, ce facteur est favorable à la Requérante.

Période pendant laquelle la marque a été en usage

[34] De même, bien que l’Opposante soutienne que sa preuve démontre que la Marque ITR Design est employée depuis 2004, j’estime que le poids de ce facteur en faveur de l’Opposante est diminué en raison de la nature secondaire de l’emploi de la Marque ITR Design par l’Opposante, tel que discuté dans le facteur précédent. Par conséquent, je conclus que ce facteur favorise l’Opposante seulement à un degré limité.

Genre des produits, services ou entreprises, et nature du commerce

[35] Comme l’a fait remarquer l’Opposante, lorsqu’on examine les articles 6(5)c) et d) de la Loi, c’est l’état déclaratif des services, tels que définis dans les enregistrements invoqués par l’Opposante et l’état déclaratif des services dans les demandes d’enregistrement des Marques, qui régit l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Toutefois, comme chaque état déclaratif doit être lu dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise envisagé, une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile [voir McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd, 1996 CanLII 3963 (CAF); McDonald’s Corp c Silcorp Ltd (1989), 55 CPR (2d) 207 (CF 1re inst), conf par (1992), 41 CPR (3d) 67 (CAF)].

[36] L’Opposante soutient que ses Services et ceux de la Requérante sont des services de préparation de remboursement de taxe et d’escompte du remboursement de taxe, offerts à une clientèle similaire. En réponse, la Requérante fait valoir que les services de chaque partie ne seraient probablement offerts que par l’intermédiaire de ses propres établissements de vente au détail, sous une marque distincte, ce qui rend la confusion peu probable [citant London Drugs Limited c Coty Deutschland GmbH, 2012 COMC 193]. À cet égard, la Requérante note que les services de l’Opposante se limitent aux [traduction] « services de préparation de remboursement de taxe et d’escompte du remboursement de taxe, ces services susmentionnés étant fournis seuls et/ou par un ou plusieurs concessionnaires franchises » [non souligné dans l’original]. En outre, la Requérante soutient que le fait que les deux parties emploient les marques de commerce en cause comme marques secondaires avec des marques principales distinctives (LIBERTY TAX et H&R BLOCK, respectivement) rend la confusion peu probable, citant Randstad Holding NV c Hays plc, 2017 COMC 168.

[37] Je partage l’avis de l’Opposante selon lequel la nature des services et le genre de commerce sont similaires, étant donné que les deux marques sont liées à des services de préparation de déclarations de remboursement de taxe et d’escompte du remboursement de taxe, nonobstant la limitation dans l’enregistrement de l’Opposante. Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[38] Lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, la loi est claire qu’il faut prendre en considération les marques de commerce dans leur ensemble; il n’est pas approprié de les placer côte à côte dans le but de les comparer et de relever les ressemblances ou les différences entre leurs éléments constitutifs. La Cour suprême du Canada dans Masterpiece a indiqué que l’approche préférable pour comparer les marques de commerce consiste à déterminer d’abord s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement frappant ou unique.

[39] L’Opposante soutient que la partie la plus frappante des Marques de la Requérante est « INSTANT REFUND », qui comprend également la première partie de la Marque IRHRB, et que « INSTANT REFUND » est également la partie la plus frappante de la Marque ITR Design. L’Opposante soutient que cette ressemblance est étayée par les propres preuves de la Requérante, dans la mesure où l’affidavit Noonan fait référence à huit demandes d’enregistrement ou enregistrements de marques actifs contenant à la fois « INSTANT » et « REFUND », dont six au nom de l’Opposante et deux au nom de la Requérante.

[40] La Requérante soutient que l’élément le plus frappant et dominant de chacune de ses Marques est l’élément « H&R BLOCK », alors que tout élément frappant ou dominant de la Marque ITR Design serait la forme figurative et la stylisation particulières qu’il a adoptées. Ainsi, la Requérante soutient que ses Marques et la Marque ITR Design sont différentes sur le plan visuel, phonétique et connotatif en raison de la présence de l’élément distinctif, dominant et frappant « H&R BLOCK », et que se concentrer sur les éléments « INSTANT » et « REFUND » équivaudrait à une dissection inappropriée des marques, en particulier compte tenu du fait que ces éléments sont communs et descriptifs dans le domaine.

[41] Je suis d’accord avec la Requérante pour dire que l’aspect le plus frappant et unique de chacune des Marques est le terme « H&R BLOCK », alors que l’aspect le plus frappant et unique de la Marque ITR Design est l’ensemble de l’élément figuratif. Il a souvent été soutenu que, lorsqu’une partie d’une marque de commerce est un mot descriptif ou suggestif commun, son importante diminue [voir Vancouver Sushiman Ltd c Sushiboy Foods Co (2002), 22 CPR (4th) 107 (COMC)].

[42] Il existe un degré limité de ressemblance visuelle entre les marques de commerce, étant donné que la Marque ITR Design comprend des éléments figuratifs, tandis que les Marques comprennent une marque maison unique et inventée qui n’est pas présente dans la Marque ITR Design. En effet, la seule ressemblance visuelle entre les marques est constituée par les mots communs « INSTANT » et « REFUND »; étant donné que ces mots sont descriptifs ou suggestifs des services qui y sont liés, ils n’ont qu’une importance limitée dans l’examen du degré de ressemblance entre les marques en cause. Il existe une certaine ressemblance phonétique entre les marques si les mots composant la Marque ITR Design devaient être prononcés; néanmoins, les mots « H&R BLOCK » sont absents de la Marque ITR Design et, une fois encore, les éléments descriptifs ou suggestifs communs sont d’une importance limitée. En ce qui concerne les idées suggérées, la marque ITR Design suggère simplement l’idée d’un [traduction] « remboursement de taxe instantané », alors que les Marques suggèrent un remboursement instantané fourni par une entité particulière.

[43] En résumé, compte tenu de l’importance limitée des éléments communs « INSTANT » et « REFUND », j’estime que ce facteur favorise fortement la Requérante.

Circonstance de l’espèce : Preuve de l’état du registre et de l’état du marché

[44] La preuve de l’état du registre est pertinente dans la mesure où elle permet de tirer des inférences quant à l’état du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); et Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992) 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst)]. Les inférences quant à l’état du marché ne peuvent être tirées de cette preuve que si un grand nombre de marques de commerce pertinentes sont trouvées [Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF) (Kellogg Salada); McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2017 CF 327, aux para 41 à 46]. Les marques de commerce pertinentes comprennent celles qui : (i) sont déposées ou autorisées et fondées sur l’emploi; (ii) concernent des produits et services similaires à ceux visés par les marques en cause; et (iii) comprennent l’élément en cause en tant qu’élément important [Sobeys West Inc c Schwan’s IP, LLC, 2015 COMC 197, au para 38].

[45] Alors que l’affidavit Noonan identifie un certain nombre de marques comprenant les mots « INSTANT » et « REFUND », l’Opposante note que seules huit marques comportent les deux termes, toutes au nom de la Requérante ou de l’Opposante. Je note en outre que parmi les marques de commerce comprenant le terme « instant », seules six sont enregistrées, et toutes sauf deux appartiennent à la Requérante ou à l’Opposante; de même, parmi les marques comprenant le terme « refund », seules neuf sont enregistrées (y compris deux des marques de commerce « instant » appartenant à l’Opposante), et là encore, toutes sauf deux appartiennent à la Requérante ou à l’Opposante. Étant donné que la Requérante a fourni des preuves de l’existence de seulement treize marques déposées comportant « instant » ou « refund » appartenant à seulement six propriétaires, dont la Requérante et l’Opposante, je ne suis pas disposé à tirer des conclusions concernant l’état du marché.

Circonstance de l’espèce : enregistrements de marque de commerce antérieurs de la Requérante

[46] La Requérante soutient que le fait qu’elle ait déjà enregistré plusieurs marques de commerce comportant un élément commun avec les Marques est une circonstance pertinente de l’espèce qui ne justifie pas une conclusion de confusion dans la présente instance, citant Kellogg Salada, précité. À cet égard, la Requérante fait référence à ses marques de commerce déposées REMBOURSEMENT INSTANTANÉ, enregistrement no LMC728,516; INSTANT CASH BACK, enregistrement no LMC653,449; et RAPID REFUND & DESIGN, registration no LMC509,858.

[47] Par conséquent, je ne suis pas disposé à accorder un poids important à l’existence de ces deux enregistrements, puisqu’il est bien établi que l’article 19 de la Loi ne confère pas au propriétaire d’un enregistrement le droit automatique d’obtenir l’enregistrement d’autres marques, même si ces marques sont étroitement liées à la marque déposée originale [voir Groupe Lavo Inc c Procter & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (COMC); Coronet-Werke Heinrich Schlerf GmbH c Produits Menagers Coronet Inc (1985), 4 CPR (3d) 108 (COMC)]. Bien que l’emploi d’une marque de commerce déposée antérieurement au Canada peut être une circonstance de l’espèce pertinente qui réduit la probabilité de confusion [Caesarstone Sdot-Yam Ltd c Ceramiche Caesar SPA, 2016 CF 895], en l’espèce, la Requérante a simplement fourni les détails de ces marques de commerce déposées, qui, comme il est indiqué ci-dessus, n’établissent pas que ces marques de commerce ont été employées au Canada [voir Tokai of Canada, précité]. De même, bien que la marque de commerce « INSTANT CASH BACK » apparaisse sur les captures d’écran du site Web de la Requérante jointes à l’affidavit Sahota, en l’absence de données montrant que ces sites Web ont été effectivement visités par des Canadiens ou d’autres indices de ce type, les captures d’écran n’établissent pas l’usage de cette marque de commerce au Canada par la Requérante. Par conséquent, je ne trouve pas que cette circonstance de l’espèce aide la Requérante.

Conclusion

[48] Dans l’application du test en matière de confusion, je l’ai examinée comme une question de première impression et de souvenir imparfait et j’ai tenu compte de toutes les circonstances de l’espèce. Dans la plupart des cas, le facteur le plus important pour déterminer la question de confusion est le degré de ressemblance entre les marques de commerce [Masterpiece; Beverley Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstery Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145 (CF 1re inst), à la p 149, conf par 60 CPR (2d) 70 (CAF)]. En outre, l’article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques, mais plutôt sur la confusion quant à la source des produits ou des services; à cet égard, comme l’explique la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Mattel, au para 57, il faut accorder une certaine confiance au consommateur moyen. En l’espèce, malgré la nature similaire des services et du commerce des parties, et le degré légèrement plus élevé de caractère distinctif acquis et la plus longue durée d’emploi de la Marque ITR Design, j’estime que les différences générales entre les marques de commerce des parties, en particulier compte tenu de l’élément distinctif et unique « H&R BLOCK » intégré dans les Marques et de la faible nature de la Marque ITR Design, suffisent pour faire pencher la prépondérance des probabilités quant à la confusion en faveur de la Requérante.

[49] Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est donc rejeté.

Motif d’opposition : article 16(1)a)

[50] En vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, l’Opposante soutient que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement des Marques parce que, à la date de dépôt des demandes, les Marques créaient de la confusion avec les Marques de l’Opposante, qui avaient été employées antérieurement au Canada avant la date de dépôt de la demande, et n’avaient pas été abandonnées le jour où la demande a été annoncée aux fins d’opposition.

[51] Afin de s’acquitter de son fardeau initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’au moins une de ses marques a été employée avant la date de production de la demande de la Requérante (27 octobre 2017) et n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande (21 octobre 2020). Par conséquent, les éléments de preuve pertinents que l’Opposante peut invoquer sont des preuves d’emploi antérieures à la date de la production de la demande.

[52] Bien que la preuve présentée par l’Opposante soit suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau à l’égard de ce motif en ce qui concerne la Marque ITR Design, j’arrive aux mêmes conclusions en ce qui concerne la confusion avec la Marque ITR Design que celles énoncées pour le motif de l’article 12(1)d), étant donné que la différence de dates pertinentes n’a pas d’incidence sur mon analyse de ce facteur.

[53] En ce qui concerne la Marque IR Design de l’Opposante, je note qu’il n’y a pas de preuve dans l’affidavit de Walters concernant directement cette marque de commerce au-delà des détails de l’enregistrement de la marque de commerce. En conséquence, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve en ce qui a trait à ce motif d’opposition à l’égard de la Marque IR Design.

[54] Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : article 2

[55] L’Opposante a également soutenu que, contrairement à l’article 2 de la Loi, la Marque ne distingue pas réellement et n’est pas adaptée pour distinguer les Produits et Services de la Requérante des produits liés aux Marques de l’Opposante.

[56] La date pertinente pour un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est la date de production de l’opposition (le 21 avril 2021) [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, au para 25].

[57] Dans Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, aux para 33 et 34, la Cour fédérale a indiqué qu’une marque pouvait annuler le caractère distinctif d’une autre marque si elle était connue dans une certaine mesure à tout le moins et que sa réputation au Canada importante, significative ou suffisante ou, subsidiairement, si elle était bien connue dans une région particulière du Canada. Un motif d’opposition fondé sur le caractère non distinctif n’est pas limité à la vente des produits ou des services au Canada.

[58] Même si je devais conclure que la preuve présentée par l’Opposante dans l’affidavit Walters est suffisante pour s’acquitter de ce fardeau, je parviendrais aux mêmes conclusions en ce qui concerne la confusion avec la Marque ITR Design que celles énoncées dans le motif fondé sur l’article 12(1)d), étant donné que la différence de dates pertinentes ici n’a pas d’incidence sur mon analyse de ce facteur. En outre, comme il est indiqué ci-dessus, l’Opposante n’a fourni aucune preuve de l’emploi de la Marque IR Design. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e)

[59] L’Opposante fait valoir que la Requérante n’employait pas ou n’avait pas l’intention d’employer les Marques au Canada en liaison avec les Services.

[60] L’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition, car il n’y a aucune preuve que la Requérante n’avait pas l’intention d’employer et n’employait pas la Marque. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : article 38(2)f)

[61] L’Opposante allègue que, contrairement à l’article 38(2)f) de la Loi, à la date de dépôt des demandes, la Requérante n’a pas le droit d’employer les Marques au Canada en liaison avec les Services parce qu’un tel emploi est susceptible de créer une confusion avec les Marques de l’Opposante.

[62] Toutefois, l’article 38(2)f) se rapporte au droit légal de la Requérante d’employer la marque de commerce (c’est-à-dire, conformément aux lois fédérales pertinentes et aux autres obligations juridiques), contrairement au droit de la Requérante de déposer la marque (relativement à la marque de commerce d’une autre personne, conformément à l’article 16 de la Loi) [voir Premier Tech Home & Garden Inc c Ishihara Sangyo Kaisha, Ltd, 2022 COMC 25, au para 20; DCK Concessions Limited c Hong Xia ZHANG, 2022 COMC 200, au para 39]. Seul, le fait de faire valoir qu’une demande d’enregistrement d’une marque créait de la confusion avec une marque de commerce antérieurement employée ne peut donc pas appuyer un motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f). Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Décision

[63] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette chacune des oppositions selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

___________________________

G.M. Melchin

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-07-13

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Marta Cheng

Pour la Requérante : James Green

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Riches, McKenzie & Herbert LLP

Pour la Requérante : Gowling WLG (Canada) LLP

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.