Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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A maple leaf on graph paper

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 095

Date de la décision : 2023-06-01

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DES OPPOSITIONS

Opposante : Japan Tobacco Inc.

Requérante : Drift More, LLC

Demandes : 1,849,969 pour DRIP MORE,

1,849,975 pour DRIPMORE et

1,849,980 pour le logo Drip More

Introduction

[1] Drip More, LLC (la Requérante) a demandé l’enregistrement des marques de commerce DRIP MORE, DRIPMORE et Drip More Logo (représenté ci-dessous).

Drip More logo

[2] Je ferai référence à ces trois marques de commerce collectivement sous le nom de « Marques », à moins qu’elles ne fassent l’objet d’une discussion individuelle. Chacune des trois demandes est en liaison avec les produits suivants : Liquide pour cigarettes électroniques composé de propylèneglycol; liquide pour cigarettes électroniques composé de glycérine végétale; bouteilles remplies d’aromatisants chimiques liquides pour cigarettes électroniques; aromatisants chimiques liquides pour le remplissage de cartouches de cigarette électronique (les Produits).

[3] Japan Tobacco Inc. (l’Opposante) s’est opposée aux trois demandes principalement en raison d’une allégation de confusion avec sa marque de commerce déposée MORE en liaison avec des cigarettes. Comme les actes de procédure, la preuve et les observations des parties sont essentiellement identiques dans chaque instance, je les examinerai dans une seule décision.

[4] Pour les raisons qui suivent, chaque opposition est rejetée.

Le dossier

[5] Les Demandes nos 1,849,969 (la Demande 969), 1,849,975 (la Demande 975) et 1,849,980 (la Demande 980) ont été déposées chacune le 28 juillet 2017. La Demande 969 et la Demande 975 ont été annoncées aux fins d’opposition le 24 juillet 2019. La Demande 980 a été annoncée le 31 juillet 2019. En vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch T-13 (la Loi), l’Opposante a déposé des déclarations d’opposition à l’égard des Demandes 969 et 975 le 24 janvier 2020 et contre la Demande 980 le 30 janvier 2020. Rien dans cette opposition n’influe sur les différences dans les dates de l’annonce ou de l’opposition.

[6] Par la suite, l’Opposante a été autorisée à produire des déclarations d’opposition modifiées datées du 16 juillet 2021 dans chaque procédure, afin de tenir compte d’un changement de propriétaire des demandes du prédécesseur en titre, Brian Bereber, à la Requérante actuelle. Ce changement de propriétaire n’a aucune incidence sur l’évaluation des motifs d’opposition, et par souci de commodité dans cette décision, je vais simplement faire référence à la Requérante.

[7] La Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Puisque chacune des Demandes en l’espèce a été annoncée après le 17 juin 2019, la Loi dans sa version modifiée s’applique (voir l’article 69.1 de la Loi).

[8] Les motifs d’opposition sont les mêmes dans chaque cas et peuvent être résumés en ces termes : L’Opposante conteste l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), le droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(1)a), le caractère distinctif en vertu de l’article 2 et allègue une non-conformité à l’article 38(2)e) de la Loi. La Requérante a produit une contre-déclaration (et a ensuite été autorisée à produire une contre-déclaration modifiée) réfutant les motifs d’opposition.

[9] L’Opposante a produit comme preuve une copie certifiée de l’enregistrement no LMC215,779 pour la marque de commerce MORE en liaison avec des cigarettes. LMC215,779 a été enregistrée en 1976 en raison de l'emploi et de l'enregistrement de la marque de commerce aux États-Unis.

[10] La Requérante a déposé l’affidavit de Brian Bereber souscrit le 5 juin 2021 (l’Affidavit Bereber) M. Bereber est le PDG de la Requérante. Il décrit la Requérante comme une fabricante de produits de vapotage et affirme qu’elle vend aux distributeurs, aux magasins en ligne de commerce électronique et aux magasins de détail physiques, à partir desquels le consommateur final peut acheter les produits de vapotage à des fins personnelles. M. Bereber décrit le [traduction] « vapotage » comme l’inhalation de vapeur créée par une cigarette électronique ou un autre dispositif de vapotage. Un dispositif de vapotage utilise une cartouche remplie d’un liquide chauffé pour produire une vapeur. L’Affidavit Bereber comprend une preuve de l’emploi des Marques par la Requérante au Canada en liaison avec les Produits depuis au moins 2017. M. Bereber n’a pas été contre-interrogé. Son affidavit fera l’objet de discussions plus approfondies dans l’analyse des motifs d’opposition, ci-dessous.

[11] Les deux parties ont produit des observations écrites et ont été représentées à l’audience.

Fardeau de la preuve

[12] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que chaque Demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun de ses motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, la Requérante doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition plaidés ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la marque de commerce [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA (2002) 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

Analyse des motifs d’opposition

Motifs d’opposition rejetés sommairement

[13] En ce qui a trait aux motifs d’opposition en vertu des articles 38(2)e), 16(1)a) et 2 de la Loi, l’Opposante n’a présenté aucune observation à l’appui de ces motifs, mais a néanmoins indiqué qu’ils avaient été maintenus et qu’ils n’avaient pas été retirés. Je vais aborder brièvement ces motifs.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e)

[14] L’Opposante prétend qu’à la date de dépôt des Demandes, la Requérante n’utilisait pas et n’avait pas l’intention d’utiliser les Marques au Canada en liaison avec les Produits, en contravention de l’alinéa 38(2)e) de la Loi. L’Opposante n’a produit aucune preuve à l’appui de ce motif, pas plus que la preuve de la Requérante n’appuie ce motif. Par conséquent, pour au moins la raison que l’Opposante n’a pas satisfait son fardeau initial de preuve, le motif fondé sur l’alinéa 38(2)e) est rejeté.

Motifs d’opposition fondés sur l’article 16(1)a) et l’article 2

[15] Comme l’Opposante n’a produit aucune preuve d’emploi de sa marque de commerce déposée MORE, elle ne satisfait pas à son fardeau initial de preuve pour le motif d’opposition prévu à l’article 16(1)a) ou le motif d’opposition prévu à l’article 2 en ce qui concerne la confusion avec la marque de commerce de l’Opposante. Bien que l’Opposante a produit une copie certifiée de son enregistrement no LMC215,779, il est bien établi qu’une telle copie certifiée, à elle seule, n’est pas une preuve suffisante de l’emploi d’une marque de commerce pour satisfaire au fardeau de preuve initial de l’Opposante pour les motifs d’opposition relatifs à l'absence de droit et de caractère distinctif [voir Entre Computer Centers, Inc c Global Upholstery Co Limited (1991), 40 CPR (3d) 427 COMC) et 1772887 Ontario Limited c Bell Canada, 2012 COMC 41 aux para 36 à 38 et 44 à 45].

[16] Je note que l'enregistrement no LMC215,779 de l’Opposante a récemment fait l'objet d'une décision du registraire en vertu de l'article 45 de la Loi [voir Robert Anton Nissen et Japan Tobacco Inc., 2023 COMC 12] dans laquelle l'enregistrement a été maintenu à la lumière de la preuve produite par l'Opposante. Cependant, comme l’Opposante a choisi de ne pas produire de preuve d’emploi de sa marque de commerce dans la présente procédure d’opposition, je ne peux faire référence qu’à la copie certifiée de l’enregistrement.

[17] Le motif d’opposition prévu à l’article 2 de l’Opposante comprend également des allégations d’absence de caractère distinctif fondé sur l’emploi des Marques en dehors de la portée de l’emploi autorisé en vertu de l’article 50 de la Loi et par suite du transfert des Marques. Il n’y a aucune preuve au dossier à l’appui de ces allégations.

[18] Compte tenu de ce qui précède, les motifs d’opposition de l’Opposante en vertu de l’article 16(1)a) et de l’article 2 sont rejetés puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de l’un ou l’autre de ces motifs.

Dernier motif d’opposition – Article 12(1)d)

[19] La date pertinente pour un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[20] L’Opposante fait valoir que chacune des Marques n’est pas enregistrable parce qu’elle prête à confusion avec sa marque de commerce déposée MORE, et a produit une copie certifiée de cet enregistrement qui demeure en vigueur. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau initial en ce qui a trait à ce motif d’opposition. Par conséquent, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre chacune des Marques et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

[21] Pour effectuer l’analyse relative à la confusion, par souci de commodité, je me concentrerai sur la marque de commerce DRIP MORE (la Marque) de la Requérante. Cependant, l’analyse relative à la confusion est la même lorsque l’on considère les marques de commerce DRIPMORE et le logo Drip More de la Requérante.

Test en matière de confusion

[22] Le test en matière de confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. En procédant à une telle évaluation, je dois prendre en considération toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[23] Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à différents facteurs selon le contexte [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772, au para 54]. Je cite également Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, sera souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[24] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précité, au para 20].

Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[25] La marque de commerce MORE de l’Opposante a un faible caractère distinctif inhérent, puisqu’elle est constituée uniquement d’un adjectif (ou adverbe) anglais courant signifiant « greater in degree » [plus grand degré] [voir Canadian Oxford Dictionary, 2e éd.]. Même si elle n’est peut-être pas dépourvue de caractère distinctif inhérent en liaison avec les cigarettes, la marque de commerce de l’Opposante est susceptible d’être perçue comme ayant une connotation élogieuse et se trouve au bas de l’échelle du caractère distinctif inhérent. Une marque de commerce peut acquérir un caractère distinctif accru par l’emploi et la publicité; toutefois, dans cette affaire, l’Opposante n’a produit aucune preuve indiquant que sa marque de commerce a été employée ou qu’elle est autrement devenue connue au Canada.

[26] En ce qui concerne la Marque de la Requérante, elle se trouve également au bas de l’échelle du caractère distinctif inhérent. Cependant, je considère qu’elle présente un caractère distinctif inhérent légèrement plus élevé que la marque de commerce de l’Opposante, étant donné qu’elle est composée d’une combinaison inhabituelle de mots dans un contexte commercial, qui ne semble pas donner un sens spécifique unique en liaison avec les Produits. L’Opposante fait valoir que la Marque est descriptive parce que les Produits de la Requérante sont liquides et peuvent donc « drip » [dégouliner]; toutefois, rien dans la présente instance n’indique que l’expression « DRIP MORE » donne un sens descriptif précis dans le contexte des produits de vapotage.

[27] Quoi qu’il en soit, même si je considérais que la Marque de la Requérante n’est pas plus distinctive intrinsèquement que la marque de commerce de l’Opposante, la Requérante a démontré au moins un caractère distinctif acquis par son emploi de la Marque au Canada. En particulier, l’Affidavit Bereber indique que la Requérante a vendu les Produits en liaison avec la Marque de façon continue depuis au moins 2017 (je note que dans de nombreux cas, M. Bereber affirme que la Marque est employée depuis 2016; toutefois, par souci de prudence, je ferai référence à 2017, puisqu’il s’agit de la date à partir de laquelle les factures et les chiffres de ventes annuels au Canada sont fournis). L’affidavit comprend des exemples de la représentation de la Marque au Canada sur les jarres de liquide de vapotage vendues à un distributeur (p. ex. Pièce 2), sur l’emballage au détail des Produits (p. ex. Pièces 9, 10 et 11), sur les factures (p. ex. Pièces 2 et 15) et dans la publicité (p. ex. Pièce 12). Le paragraphe 21 de l’affidavit comprend les chiffres des ventes annuelles au Canada en liaison avec la Marque de 2017 à 2020. Bien que l’Opposante affirme que les chiffres de ventes de la Requérante ne sont que modestes, ils totalisent néanmoins des centaines de milliers de dollars, et la Requérante a démontré qu’il y a plusieurs détaillants au Canada qui font de la publicité à l’égard de ses Produits et qui les offrent en liaison avec la Marque.

[28] En tenant compte à la fois du caractère distinctif inhérent des marques de commerce et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, ce facteur favorise la Requérante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[29] L’Opposante n’a fourni aucune preuve de l’emploi de sa marque de commerce. Comme il a été mentionné ci-dessus, la Requérante a fourni une preuve de l’emploi de sa Marque au Canada depuis au moins 2017. Par conséquent, ce facteur favorise également la Requérante.

Nature des produits, des services ou des affaires, et nature du commerce

[30] Les produits des parties ne se chevauchent pas directement, en ce sens que des cigarettes ne sont pas le même produit que des liquides pour les cigarettes électroniques. Cependant, il est évident que les produits des parties sont de nature liée et sont utilisés de façon similaire. Par exemple, le paragraphe 5 de l’Affidavit Bereber décrit les Produits de la Requérante en ces termes :

[Traduction]

Le vapotage est l’inhalation de vapeur créée par une cigarette électronique ou un autre dispositif de vapotage. Les cigarettes électroniques sont des dispositifs de fumage alimentés par batterie. Un dispositif de vapotage utilise une cartouche remplie d’un liquide qui contient habituellement de la nicotine, des arômes et des produits chimiques. Le liquide est chauffé pour former une vapeur, que la personne inhale. Les produits primaires que la Requérante vend sont les liquides (aussi appelés liquide à vapoter, e-liquide, liquide de vapotage, entre autres) que le consommateur final achètera en bouteilles pour utilisation avec son propre dispositif de vapotage.

[31] En ce qui concerne les voies de commercialisation probables, je n’ai aucune preuve de l’Opposante concernant les types de magasins au Canada, le cas échéant, dans lesquels ses produits sont vendus. La preuve de la Requérante est que ses Produits sont vendus en ligne et dans divers magasins de vapotage.

[32] Tout compte fait, si l’on tient compte de la nature des produits et de leurs voies de commercialisation probables, à mon avis, ces facteurs favorisent légèrement l’Opposante, étant donné le lien entre les produits des parties.

Degré de ressemblance

[33] En tenant compte du degré de ressemblance, il est préférable de déterminer s’il y a un aspect de chaque marque de commerce qui est « particulièrement frappant ou unique » [Masterpiece, au para 64]. L’aspect frappant de la marque de commerce de l’Opposante (en fait son seul aspect) est le mot « MORE ».

[34] Avec la Marque de la Requérante, je considère que le terme « DRIP » est l’aspect le plus frappant, étant donné qu’il s’agit du premier mot de la Marque et qu’il y a une certaine ambiguïté quant à savoir si le terme « DRIP » est destiné à être un nom ou un verbe. Le terme « MORE » est secondaire et descriptif.

[35] Le degré de ressemblance découle de la présence commune du terme « MORE » dans la marque de commerce de chaque partie. Cependant, lorsqu’une partie partagée de deux marques de commerce est descriptive, cela minimise l’incidence de la similitude [voir Venngo Inc. c Concierge Connection Inc., 2015 CF 1338, conf. par 2017 CAF 96, 146 CPR (4th) 182 (Venngo); voir aussi Prince Edward Island Mutual Insurance c Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 CPR (3d) 342 (CF)].

[36] L’Opposante fait valoir que le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties est accru par le fait que la Requérante utilise également la marque de commerce déposée DRIP WITH US en liaison avec ses produits de vapotage, et que dans certains cas, sur son emballage, la Requérante décrit les termes « DRIP » et « MORE » séparés l’un de l’autre (bien que je remarque que dans de tels cas, les deux mots sont séparés par l’expression « #DRIPMORE »). L’Opposante fait valoir que, par conséquent, les consommateurs penseront que la Marque est une référence à une variante liquide des produits de marque MORE de l’Opposante. Toutefois, je trouve cet argument peu convaincant pour plusieurs raisons. Premièrement, comme nous l’avons vu plus haut, la marque de commerce MORE de l’Opposante est intrinsèquement faible et l’Opposante n’a produit aucune preuve indiquant qu’elle a acquis une réputation importante. Dans ce contexte, je m’attends à ce que les consommateurs interprètent la composante « MORE » de la Marque de la Requérante simplement comme un adjectif ou un adverbe descriptif décrivant le mot « DRIP ». Deuxièmement, dans la mesure où l’emploi par la Requérante de la marque de commerce additionnelle DRIP WITH US est pertinent, à mon avis, il renforce la proposition selon laquelle « DRIP » est l’aspect frappant de la Marque, ce qui favorise la Requérante.

[37] Compte tenu de ce qui précède, je considère que le facteur du degré de ressemblance favorise la Requérante.

Circonstance de l’espèce – Aucun cas de confusion

[38] L’emploi simultané de deux marques de commerce sans cas de confusion réelle est une circonstance de l’espèce qui peut laisser entendre une absence de probabilité de confusion, selon la nature et la durée particulières de cet emploi simultané [voir Christian Dior SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155 (CAF), au para 19; voir également Maple Leaf Consumer Foods Inc c Kelbro Enterprises Inc, 2012 COMC 28, 99 CPR (4th) 424].

[39] M. Bereber note au paragraphe 26 de son affidavit qu’il n’est au courant d’aucun cas de confusion réelle entre les produits des deux parties, malgré les années de ventes de la Requérante en liaison avec la Marque au Canada.

[40] Je n’accorde pas beaucoup de poids à ce facteur, étant donné qu’il n’y a aucune preuve de l’emploi de la marque de commerce de l’Opposante et, par conséquent, aucune preuve de la coexistence réelle des marques de commerce des deux parties sur le marché. Quoi qu’il en soit, il n’est pas nécessaire de pondérer ce facteur en faveur de la Requérante pour que celle-ci ait gain de cause sur la question de la confusion, compte tenu des autres facteurs qui pèsent en sa faveur en l’espèce.

Circonstances de l’espèce – État du registre

[41] La Pièce 18 de l’Affidavit Bereber comprend une collection d’imprimés du site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada relatifs aux demandes et enregistrements de marques de commerce de tiers. La Requérante soutient que cette preuve laisse entendre que les marques de commerce comportant le composant « MOR » ou des formes du mot « MORE » sont communes à l’industrie du tabac, et que cela joue en sa faveur. Je ne suis pas d’accord avec la Requérante sur ce point. Premièrement, la plupart de ces marques de commerce de tiers intègrent « MOR » ou « MORE » d’une manière qui est différente des marques de commerce en cause dans la présente affaire (p. ex. LA MORENA et PHILIP MORRIS) de sorte que les références sont essentiellement sans pertinence. Parmi les autres références de tiers, je ne les considère pas suffisamment nombreuses pour tirer des conclusions sur l’état du marché au Canada, et la Requérante n’a fourni aucune preuve d’emploi de telles marques de commerce. En bref, je ne considère pas que l’état de la preuve au registre aide de façon significative l’une ou l’autre des parties.

Conclusion concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d)

[42] Compte tenu de tout ce qui précède et, en particulier, compte tenu de la faiblesse de la marque de commerce de l’Opposante, et du fait que toute ressemblance entre les marques de commerce est attribuable au terme descriptif « MORE », je suis convaincu que la Requérante a satisfait son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de risque de confusion. Le motif d’opposition prévu à l’alinéa 12(1)d) est donc rejeté à l’égard des trois Marques.

Décision

[43] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

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Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Judy Gordian

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-02-14

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Barry Gamache

Pour la Requérante : Robert Anton Nissen

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : ROBIC S.E.N.C.R.L / LLP

Pour la Requérante : Robert Anton Nissen (Nissen Patent Law)

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