Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 093

Date de la décision : 2023-05-31

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Wayfinders Manitoba Inc.

Requérante : Wayfinder Ventures Inc.

Demande : 1,877,721 pour WAYFINDER

Introduction

[1] Wayfinder Ventures Inc. (la Requérante) a déposé la demande d’enregistrement de la marque de commerce WAYFINDER (la Marque) en liaison avec les produits suivants (les Produits) en se fondant sur l’emploi projeté au Canada à l’égard des Produits (3), (5), (6) et (8) :

[traduction]

(1) Guides en ligne et téléchargeables dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(2) Équipement de camping, nommément poêles

(3) Guides imprimés dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage; articles de papeterie, nommément papier; images artistiques, dessins artistiques, reproductions d’œuvres d'art graphiques et images d’art graphiques

(4) Équipement de camping, nommément sacs à dos et sacs polochons

(5) Équipement de camping, nommément matelas de camping

(6) Tentes de camping

(7) Équipement de camping, nommément sacs de couchage

(8) Vêtements, nommément tee-shirts, casquettes, chemises, pantalons, vestes, sous-vêtements, chaussettes, chaussures et tuques

[2] Wayfinders Manitoba Inc. (l’Opposante) a enregistré les marques de commerce WAYFINDERS, numéro d'enregistrement LMC942,511, et wayfinders and Design, numéro d’enregistrement LMC942,512 (collectivement, les Marques de l’Opposante) en liaison avec des services relatifs à un programme éducatif pour les élèves du secondaire. L’Opposante s’est principalement opposée à cette demande selon le fondement que la Marque crée de la confusion avec l’emploi et l’enregistrement antérieurs des Marques de l’Opposante. L’Opposante soulève aussi des contestations techniques de la demande.

[3] Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus que l’opposition doit être rejetée en partie.

Historique du dossier

[4] Le 16 janvier 2018, la Requérante a déposé une demande pour enregistrer la Marque. La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 20 janvier 2021. Le 15 mars 2021, l’Opposante s’est opposée à la demande selon les motifs d’opposition résumés ci-dessous :

[5] L’Opposante a produit comme preuve l’affidavit de Meghan Loewen Cook, une directrice de l’Opposante. La Requérante n’a fourni aucune preuve dans le cadre de la présente procédure. Les deux parties ont produit des observations écrites; seule l’Opposante était présente à l’audience.

Dates pertinentes et fardeau de preuve

[6] Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

[7] Avant d’examiner les motifs d’opposition, j’estime nécessaire de rappeler certaines exigences techniques en ce qui a trait (i) au fardeau de preuve dont doit s’acquitter un opposant, soit celui d’étayer les allégations dans la déclaration d’opposition, et (ii) au fardeau ultime qui incombe à un requérant de prouver sa cause.

[8] En ce qui a trait au point (i) ci-dessus, l’opposant a le fardeau de preuve d’appuyer les faits sur lesquels il appuie ses allégations formulées dans la déclaration d’opposition : John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298. L’imposition d’un fardeau de preuve à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit examinée, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question. Quant à l’élément (ii) mentionné ci-dessus, c’est au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi invoquées par un opposant (en ce qui a trait aux allégations pour lesquelles l’opposant s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombait). La présence d’un fardeau ultime qui incombe au requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre du requérant.

Question préliminaire : Service

[9] Dans ses observations écrites et à l’audience, l’Opposante a fait valoir qu’elle n’avait pas de trace de la signification de la déclaration de la Requérante énonçant son désir de ne pas produire de preuve conformément à l’article 52(1) du Règlement sur les marques de commerce, DORS/2018-227 (le Règlement). Sur cette base, l’Opposante a demandé au registraire de considérer la demande comme abandonnée en vertu de l’article 38(11) de la Loi :

(11) Si le requérant omet de produire et de signifier une contre-déclaration dans le délai visé au paragraphe (7) ou si, dans les circonstances prescrites, il omet de soumettre et de signifier la preuve visée au paragraphe (8) ou une déclaration énonçant son désir de ne pas soumettre de preuve, la demande est réputée abandonnée.

[10] Un examen de la déclaration de la Requérante montre que celle-ci l’a soumise par voie électronique et a indiqué qu’elle l’avait signifiée par les Services électroniques de la Commission des oppositions des marques de commerce, sur consentement. Dans ces circonstances, où la Requérante a confirmé la signification et où la signification a été effectuée par les Services électroniques de la Commission des oppositions des marques de commerce, je considère que la signification a été effectuée comme indiqué dans la déclaration de la Requérante conformément à l’article 46(6) du Règlement puisque la déclaration a été transmise à l’Opposante.

Motifs d’opposition

Motif d’opposition fondé sur les articles 38(2)a) et 30(2)

[11] Il n’est pas certain que la déclaration d’opposition de l’Opposante invoque valablement un motif d’opposition fondé sur l’article 30(2)a) de la Loi. De toute façon, les allégations de l’Opposante aux paragraphes 71 à 77 de ses observations écrites n’entraîneraient pas un rejet de la demande.

[12] L’article 30(2)a) de la Loi exige qu’une demande contienne « un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des produits ou services en liaison avec lesquels la marque de commerce est employée ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer ». L’Opposante allègue que, comme la demande n’a pas été déposée avec des points-virgules indiquant des classes de produits distinctes, la demande n’a pas été déposée conformément aux exigences de la loi, citant Pronuptia de Paris c Pronovias, SA, [2007] COMC No 63. Le Manuel d’examen explique que les produits qui sont séparés par un point-virgule (;) sont généralement considérés comme des produits distincts les uns des autres et doivent satisfaire aux exigences de l’article 30(2)a) de la Loi sans égard aux autres produits et services listés.

[13] L’Opposante allègue en outre que la demande n’est pas conforme aux exigences des articles 38(2)a) et 30(2) de la Loi parce que la Requérante n’a pas inclus une déclaration selon laquelle elle a employé la Marque au sens de la Loi.

[14] Je rejette les observations de l’Opposante concernant l’absence de points‑virgules, car l’absence de points-virgules en l’espèce ne donne pas lieu à des Produits qui ne sont pas énoncés dans des termes ordinaires du commerce ou qui manquent de spécificité. En outre, l’absence de déclaration selon laquelle la Requérante a employé la Marque n’est pas pertinente étant donné que la demande est basée en partie sur l’emploi projeté, et que l’Opposante n’a pas démontré en quoi la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30(2) de la Loi. Par conséquent, l’Opposante ne s’acquitte pas de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition et il est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur les articles 38(2)b) et 12(1)d)

[15] L’Opposante a fait valoir que la Marque crée de la confusion avec deux de ses enregistrements pour les Marques de l’Opposante. L’opposant s’acquitte du fardeau initial qui lui incombe à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) si l’enregistrement invoqué était en règle à la date de la décision concernant l’opposition. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre [Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)] et confirmer que les enregistrements des Marques de l’Opposante établis ci-dessous sont valides.

Enregistrement no

Marque de commerce

Services

LMC942,511

WAYFINDERS

[traduction]

Services d’enseignement et de formation, nommément exploitation d’un programme de mentorat et de sensibilisation communautaire pour permettre aux élèves du secondaire d’obtenir des crédits en vue de l’obtention d’un diplôme et de développer des habiletés fondamentales; exploitation d’un site Web dans les domaines de l’éducation, de la formation, du coaching et du mentorat des élèves du secondaire pour leur permettre d’obtenir des crédits en vue de l’obtention d’un diplôme et de développer de habiletés fondamentales.

LMC942,512

wayfinders and Design

[16] Je suis d’avis que la comparaison de la Marque avec la marque de commerce de l’Opposante WAYFINDERS (numéro d’enregistrement LMC942,511) représente la meilleure chance de succès de l’Opposante. Sauf indication contraire, je concentrerai donc mon analyse sur cet enregistrement, car il décidera effectivement du résultat de ce motif d’opposition.

Test en matière de confusion

[17] Les marques de commerce créent de la confusion lorsqu’il existe une probabilité raisonnable de confusion au sens de l’article 6(2) de la Loi, comme il est indiqué ci‑dessous :

L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classification de Nice.

[18] Par conséquent, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que les produits ou les services provenant d’une des sources proviennent d’une autre source. La question que soulève l’article 6(2) est celle de savoir si les acheteurs des Produits vendus en liaison avec la Marque croiraient que les Produits sont offerts, autorisés ou font l’objet d’une licence octroyée par l’Opposante. La Requérante a le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion.

[19] En procédant à une telle évaluation, je dois prendre en considération toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Les critères énoncés à l’article 6(5) ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie selon le contexte [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 54].

Caractère distinctif inhérent

[20] Le caractère distinctif inhérent d’une marque de commerce fait référence à son caractère unique lorsqu’elle est considérée avec les produits ou services qui lui sont associés. En l’espèce, le terme « wayfinder » évoque dans une certaine mesure les produits du demandeur liés au camping, dans la mesure où le fait de trouver son chemin est une caractéristique des activités en plein air ou dans la nature, comme le camping. De même, le terme « wayfinders » évoque dans une certaine mesure le programme éducatif de l’Opposante en ce sens qu’il aide les élèves à trouver leur chemin. La brochure de l’Opposante explique à la Pièce B :

[traduction]

Wayfinders est un programme de mentorat et de sensibilisation communautaire qui vise à offrir la possibilité d’un avenir meilleur aux élèves du secondaire vivant dans les quartiers d’Elwick Community et de Watson Street, dans le nord-ouest de Winnipeg, et dans la division scolaire Seven Oaks. Wayfinders soutient les élèves des communautés à faibles revenus, où le taux d’abandon scolaire est souvent très élevé. Le programme encourage et aide les élèves à obtenir des crédits en vue de l’obtention d’un diplôme de fin d’études secondaires tout en participant à des activités de tutorat, d’exploration des carrières, de mentorat et de service communautaire. Grâce au programme Wayfinders, les élèves découvrent et apprennent l’importance de participer à des activités communautaires, de travailler ensemble et d’atteindre leur plein potentiel.

[21] Par conséquent, je conclus que le facteur du caractère distinctif inhérent ne favorise ni l’une ni l’autre des parties.

Période d’emploi et mesure dans laquelle la marque est devenue connue

[22] En ce qui concerne le caractère distinctif acquis et la durée d’emploi, la preuve produite par l’Opposante démontre qu’elle a employé et annoncé ses services en liaison avec ses Marques depuis 2008 (affidavit Cook, para 15). En particulier, les Marques de l’Opposante apparaissent sur les brochures figurant à la Pièce B, dont Mme Cook confirme qu’elles ont été distribuées à des membres de la communauté à Winnipeg depuis 2008. Les Marques de l’Opposante apparaissent également sur son site Web qui a été consulté plus de 60 000 fois à travers le Canada entre le 1er mars 2015 et le 7 juillet 2021 (para 20, Pièce J). En conséquence, je conclus que la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et la période d’emploi favorisent l’Opposante.

Genre des produits, services ou entreprises, et nature du commerce

[23] Lorsqu’on examine les articles 6(5)c) et d) de la Loi, ce sont l’état déclaratif des produits et services de la demande et l’état déclaratif des produits et services définis de l’enregistrement de l’Opposante qui régissent l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Toutefois, il faut interpréter ces états déclaratifs de manière à déterminer le genre probable d’entreprise ou la nature possible du commerce envisagé par les parties plutôt que l’ensemble des commerces qui pourraient être visés par le libellé. À cet égard, la preuve des opérations réelles des parties est utile [McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[24] À mon avis, les Produits liés au camping et au plein air sont très différents des services visés par l’enregistrement de l’Opposante, et il est peu probable que leurs voies de commercialisation respectives se chevauchent. Les Produits comprennent du matériel de camping, alors que les services de l’Opposante sont liés à un programme éducatif pour les élèves du secondaire. Il est important de noter que les publics visés par les parties sont distincts. Les Produits de la Requérante s’adressent aux personnes intéressées par le camping et d’autres activités de plein air. En revanche, les services de l’Opposante s’adressent aux élèves du secondaire et à ceux qui s’intéressent à eux. C’est même le cas lorsque certains des programmes offerts aux élèves de l’Opposante sont axés sur le plein air ou comportent une composante de plein air, notamment le camping, la randonnée et la raquette, le canotage et le trekking (para 8) ou que les programmes des cours d’été offerts sont des programmes de plein air et axés sur l’écologie (para 11).

[25] L’Opposante soutient que le fait qu’elle ait publié un Survival Gear Guide (Pièce C) montre qu’il y a un chevauchement entre la nature des Produits et ses services. Cependant, le Survival Gear Guide de l’Opposante a été produit par des élèves de Wayfinders et fournit des conseils, des anecdotes et des astuces sur la façon de rester en sécurité et de survivre à l’expérience de l’adolescence à Winnipeg. Chaque chapitre est illustré par des articles de vêtement usagés modifiés et explore les questions liées à la sécurité et à la survie de l’adolescent. Il est important de noter que le survival gear guide ne couvre pas la survie dans la nature ou en plein air.

[26] En conséquence, je conclus que ce facteur favorise fortement la Requérante en ce qui concerne les produits suivants :

[traduction]

(1) Guides en ligne et téléchargeables dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(2) Équipement de camping, nommément poêles

(3) Guides imprimés dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(4) Équipement de camping, nommément sacs à dos et sacs polochons

(5) Équipement de camping, nommément matelas de camping

(6) Tentes de camping

(7) Équipement de camping, nommément sacs de couchage

[27] Toutefois, les articles de papeterie et de vêtement figurant dans la demande ne font l’objet d’aucune restriction quant à leur nature ou à leurs voies de commercialisation. Étant donné qu’il existe des preuves indiquant que l’Opposante a distribué des brochures promotionnelles affichant la Marque depuis 2008, y compris le « survival gear guide » décrit ci-dessus, distribué depuis 2017 et montrant des articles de vêtement faits maison dans le cadre du programme éducatif de l’Opposante, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que ce facteur lui est favorable dans une certaine mesure en ce qui concerne les produits suivants :

[traduction]

(3) articles de papeterie, nommément papier; images artistiques, dessins artistiques, reproductions d’œuvres d’art graphiques et images d’art graphiques

(8) Vêtements, nommément tee-shirts, casquettes, chemises, pantalons, vestes, sous-vêtements, chaussettes, chaussures et tuques

Degré de ressemblance

[28] Les marques de commerce diffèrent seulement en ce que la marque de commerce de l’Opposante, WAYFINDERS, est le pluriel de la Marque. Par conséquent, ce facteur favorise fortement l’Opposante.

Conclusion

[29] L’article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques elles-mêmes, mais plutôt sur la source des services. En outre, comme l’explique la Cour suprême du Canada dans Mattel, précité, au para 57, il faut accorder une certaine confiance au consommateur ordinaire :

[…] je souscris entièrement à l’opinion formulée par le juge Linden dans Pink Panther selon qui, dans l’appréciation de la probabilité de confusion sur le marché, « il faut accorder une certaine confiance au consommateur moyen » (par. 54). Une idée semblable a été exprimée dans Michelin & Cie c. Astro Tire & Rubber Co. of Canada Ltd. (1982), 69 CPR (2d) 260 (C.F. 1re inst.), p. 263 :

[…] on ne doit pas procéder en partant du principe que les clients éventuels ou les membres du public en général sont complètement dénués d’intelligence ou de mémoire, ou sont totalement inconscients ou mal informés au sujet de ce qui se passe autour d’eux.

[30] En l’espèce, une évaluation de la confusion porte sur la question de savoir si un consommateur confronté à la Marque en liaison avec les Produits serait confus et penserait qu’ils proviennent de l’Opposante, une entité qui propose un programme éducatif pour les élèves du secondaire. Selon la prépondérance des probabilités, je ne pense pas qu’il le ferait en ce qui concerne les produits suivants :

[traduction]

(1) Guides en ligne et téléchargeables dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(2) Équipement de camping, nommément poêles

(3) Guides imprimés dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(4) Équipement de camping, nommément sacs à dos et sacs polochons

(5) Équipement de camping, nommément matelas de camping

(6) Tentes de camping

(7) Équipement de camping, nommément sacs de couchage.

[31] Je parviens à cette conclusion en tenant compte de toutes les circonstances de l’espèce et, en particulier, en tenant compte des différences dans le genre des produits, services et entreprises des parties, malgré la ressemblance entre les marques. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté à l’égard des produits susmentionnés.

[32] En ce qui concerne les autres produits, la preuve indique que l’Opposante a distribué des brochures promotionnelles et des documents imprimés concernant les vêtements ainsi que du matériel qui pourrait être considéré comme des images d’art graphiques. Étant donné que le domaine d’emploi n’est pas restreint à l’égard de ces produits dans la demande, et compte tenu de l’absence de preuves produites par la Requérante, je conclus que celle-ci ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombe de démontrer qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties en ce qui concerne les produits suivants visés par la demande :

[traduction]

(3) articles de papeterie, nommément papier; images artistiques, dessins artistiques, reproductions d’œuvres d’art graphiques et images d’art graphiques;

(8) Vêtements, nommément tee-shirts, casquettes, chemises, pantalons, vestes, sous-vêtements, chaussettes, chaussures et tuques

[33] En conséquence, ce motif d’opposition est accueilli en partie et rejeté en partie.

Motif d’opposition fondé sur les articles 38(2)c) et 16(1)a)

[34] L’Opposante a également plaidé que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(1)a) parce que la Marque crée de la confusion avec les Marques de l’Opposante. En ce qui concerne ce motif d’opposition, l’Opposante a le fardeau initial de prouver l’emploi d’au moins une de ses marques de commerce avant la date de production de la Requérante et le non-abandon de ses marques de commerce à la date de l’annonce de la demande de la Requérante [article 16(1) de la Loi]. La preuve d’emploi présentée par l’Opposante dans l’affidavit Cook aux para 15 à 22 est suffisante pour s’acquitter de ce fardeau. En particulier, Mme Cook confirme qu’une brochure présentant les Marques de l’Opposante, jointe en tant que Pièce B, a été distribuée depuis 2008 aux membres de la communauté, aux élèves, aux bénévoles et à d’autres intervenants du programme. Comme la différence entre les dates pertinentes n’a pas d’incidence sur mon analyse de ce motif d’opposition, je parviens aux mêmes conclusions en ce qui concerne la confusion que celles énoncées dans le motif fondé sur l’article 12(1)d).

Motif d’opposition fondé sur les articles 38(2)d) et 2

[35] L’Opposante a également soutenu que, contrairement à l’article 2 de la Loi, la Marque ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée pour distinguer les Produits des services liés aux Marques de l’Opposante.

[36] Dans Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, aux para 33 et 34, la Cour fédérale a indiqué qu’une marque de commerce pouvait annuler le caractère distinctif d’une autre marque de commerce si elle était connue au Canada dans une certaine mesure, à tout le moins, et que sa réputation au Canada était importante, significative ou suffisante ou si elle est bien connue dans une région particulière du Canada. Une contestation fondée sur le caractère non distinctif n’est pas limitée à la vente des produits ou des services au Canada. Elle peut également être fondée sur la preuve de la connaissance ou de la réputation de la marque de commerce de l’opposant, y compris celle qui est diffusée par le bouche-à-oreille ou par des articles de journaux et de magazines [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst)].

[37] La preuve d’emploi de l’Opposante, détaillée au paragraphe 21 de la présente décision, est suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de preuve. Comme la différence entre les dates pertinentes n’a pas d’incidence sur mon analyse de ce motif d’opposition, je parviens aux mêmes conclusions en ce qui concerne la confusion que celles énoncées dans le motif fondé sur l’article 12(1)d).

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e)

[38] L’Opposante a soutenu que la Requérante n’employait pas ou n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits. En ce qui concerne ce motif d’opposition, une requérante n’a pas l’obligation de prouver qu’elle a employé la Marque ou qu’elle a l’intention de l’employer, à moins que l’Opposante s’acquitte de son fardeau de preuve.

[39] En l’espèce, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, car il n’y a pas de preuve que la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque ou qu’elle ne l’employait pas. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f)

[40] L’Opposante a soutenu que la Requérante n’a pas le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits parce que la Requérante aurait dû savoir que les Marques de l’Opposante étaient employées au Canada.

[41] Je n’estime pas que pas qu’il s’agit là d’un motif d’opposition valable en vertu de l’article 38(2)f) de la Loi, car cet article n’a rien à voir avec la question de savoir si un requérant était ou non au courant des marques de commerce d’un opposant. En concluant ainsi, bien que l’article 38(2)f) de la Loi semble à première vue être similaire à l’article 30i) de la Loi (dans sa version précédant le 17 juin 2019), il y a une différence importante dans la mesure où l’article 30i) exigeait que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant que « le requérant est convaincu qu’il a droit d’employer la marque de commerce au Canada en liaison avec les produits ou services décrits dans la demande ». L’article 38(2)f) de la Loi ne met pas l’accent sur la question de savoir si le requérant est convaincu qu’il a le droit d’employer la marque de commerce visée par la demande. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Décision

[42] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande en ce qui a trait aux produits suivants :

[traduction]

(3) articles de papeterie, nommément papier; images artistiques, dessins artistiques, reproductions d’œuvres d’art graphiques et images d’art graphiques;

(8) Vêtements, nommément tee-shirts, casquettes, chemises, pantalons, vestes, sous-vêtements, chaussettes, chaussures et tuques

[43] Je rejette l’opposition en ce qui concerne le reste des produits mentionnés ci‑dessous :

[traduction]

(1) Guides en ligne et téléchargeables dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(2) Équipement de camping, nommément poêles

(3) Guides imprimés dans les domaines de la randonnée pédestre, du camping, du canotage, du kayak, du ski, des excursions pédestres, de l’escalade, du trekking et du voyage

(4) Équipement de camping, nommément sacs à dos et sacs polochons

(5) Équipement de camping, nommément matelas de camping

(6) Tentes de camping

(7) Équipement de camping, nommément sacs de couchage

___________________________

Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Le français est conforme aux WCAG.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-02-28

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Michael Zacharias

Pour la Requérante : Aucune comparution

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Fillmore Riley LLP

Pour la Requérante : Aucun agent nommé

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