Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

OPIC

Logo de l'OPIC / CIPO Logo

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Citation : 2022 COMC 088

Date de la décision : 2022-04-27

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

La Espanola Alimentaria Alcoyana, S.A. et Aceitunas La Española S.L.

Opposante

et

 

Aceites del Sur-Coosur, S.A.

Requérante

 

1,682,175 pour LA ESPAÑOLA & Dessin

Demande

Introduction

[1] La Espanola Alimentaria Alcoyana, S.A. et Aceitunas La Española S.L. (collectivement, l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce LA ESPAÑOLA & Dessin (la Marque), qui fait l’objet de la demande no 1,682,175 par Aceites del Sur-Coosur, S.A. (la Requérante). La Marque est reproduite ci-dessous :

[2] La demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur l’emploi proposé au Canada en liaison avec de l’« Huile d’olive ».

[3] L’opposition est principalement fondée sur l’allégation que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante, déposée et employée antérieurement au Canada en liaison avec des produits de l’olive.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de la Marque a été déposée le 20 juin 2014. La demande comprend la traduction de caractères étrangers suivante :

[traduction]

Selon la Requérante, LA ESPAÑOLA peut être traduit par le nom « La femme espagnole ». Cependant, « ESPAÑOLA » est aussi un adjectif signifiant « espagnol » (par exemple, « la marina Española » pourrait aussi signifier « dans la marine espagnole »).

[5] La Demande a été annoncée aux fins d’opposition le 20 avril 2016. De nombreuses modifications à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Conformément à l’article 70 de la Loi, les motifs d’opposition seront évalués en fonction de la Loi dans sa version précédant immédiatement le 17 juin 2019, exception faite de la question portant sur la confusion, laquelle sera examinée aux termes de la version actuelle des articles 6(2) à (4) de la Loi.

[6] Le 20 septembre 2016, La Espanola Alimentaria Alcoyana, S.A. s’est opposée à la demande en déposant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi. La Requérante a produit une contre-déclaration réfutant les motifs d’opposition. La déclaration d’opposition a par la suite été modifiée pour ajouter Aceitunas La Española S.L. à titre d’opposante conjointe, et la Requérante a produit une contre-déclaration modifiée en conséquence.

[7] À l’étape de la preuve, l’Opposante a déposé une autre déclaration d’opposition modifiée, qui a été versée au dossier, et la Requérante a produit une contre-déclaration modifiée finale en conséquence.

[8] Tel que présenté dans la déclaration d’opposition modifiée finale, les motifs d’opposition sont fondés sur la non-conformité aux articles 30b), 30e) et 30i) de la Loi; la non-enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi; l’absence d’un droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16 de la Loi; et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi.

[9] Afin d’appuyer son opposition, l’Opposante a produit la preuve suivante :

· Affidavit d’Ignacio Alberola Jorda, souscrit le 14 mars 2017 en Espagne (premier affidavit Jorda);

· Affidavit d’Ignacio Alberola Jorda, souscrit le 20 septembre 2017 à Londres, au Royaume-Uni (l’affidavit Jorda), a été présenté à titre de preuve permise – l’affidavit Jorda est substantiellement semblable au premier affidavit Jorda signé en Espagne, mais a été présenté en réponse aux lacunes alléguées soulevées par la Requérante;

· Affidavit de Mary P. Noonan, souscrit le 14 mars 2017 à Toronto (premier affidavit Noonan);

· Affidavit de Georgi Paskalev, souscrit le 14 mars 2017 à Montréal (affidavit Paskalev);

· Affidavit de June Ye, souscrit le 16 août 2017 (affidavit Ye), présenté à titre de preuve permise;

· Affidavit de Mary P. Noonan, souscrit le 16 août 2019 à Toronto (deuxième affidavit Noonan), produit à titre de contre-preuve;

· Copies certifiées des numéros d’enregistrement LMC614,458 (radié en 2018) et LMC683,041, et de la demande no 1,811,946.

[10] Le dossier comprend également un affidavit « supplémentaire » de M. Jorda, deux « Acta de Manifestacions » et l’affidavit d’Anna Antonetti, adjointe juridique employée par l’agent de l’Opposante. Ces documents ont été soumis en raison de problèmes et de lacunes alléguées dans le premier affidavit Jorda. Étant donné que l’affidavit Jorda, souscrit au Royaume-Uni, est substantiellement semblable au premier affidavit Jorda, il n’est pas nécessaire d’examiner ces documents davantage.

[11] Aucun des déposants de l’Opposante n’a été contre-interrogé.

[12] Afin d’appuyer sa demande d’enregistrement, la Requérante a produit la preuve suivante :

· Affidavit de Sergio Anton Garcia, souscrit le 23 juillet 2018 (affidavit Garcia); et

· Affidavit de Tania Treciokas, souscrit le 30 juillet 2018 (affidavit Treciokas).

[13] Les deux déposants de la Requérante ont été contre-interrogés et les transcriptions et engagements du contre-interrogatoire ont été versés au dossier.

[14] À la suite du contre-interrogatoire de M. Garcia, la Requérante a présenté à titre de preuve permise un deuxième affidavit de Sergio Anton Garcia, souscrit le 15 juillet 2019 (le deuxième affidavit Garcia). M. Garcia n’a pas été contre-interrogé au sujet de son deuxième affidavit.

[15] Les deux parties ont produit des observations écrites. Une audience a été prévue, mais annulée sur demande et avec le consentement des parties.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

[16] Aceitunas La Espanola S.L. (ALE) est propriétaire de l’enregistrement de marque de commerce no LMC683,041 pour LA ESPAÑOLA (& Dessin) (la marque de commerce figurative de l’Opposante) et est la successeure en titre de l’opposante conjointe, La Espanola Alimentaria Alcoyana, S.A. (LEAA). La marque de commerce figurative de l’Opposante est enregistrée depuis mars 2007 en liaison avec des « Olives en boîte de toutes sortes », et est présentée ci-dessous :

[17] Je remarque que l’enregistrement comprend l’avertissement suivant : [traduction] « Le droit à l’usage exclusif de ESPAÑOLA en dehors de la marque de commerce n’est pas accordé ».

[18] L’Opposante est également propriétaire de deux autres marques de commerce LA ESPAÑOLA, illustrées ci-dessous :

Dessin TAPAÑOLAS

Logo LA ESPAÑOLA

[19] Le dessin TAPAÑOLAS a fait l’objet de l’enregistrement no LMC614,458, mais a été radié en avril 2018. Le logo LA ESPAÑOLA fait l’objet de la demande en instance no 1,811,946.

Affidavit Jorda

[20] M. Jorda est le premier dirigeant de LEAA [para 2] et participe à la supervision des opérations d’ALE [para 3]. Tout au long de son affidavit, il désigne les deux sociétés, collectivement, comme « La Espanola » ou [traduction] « l’Opposante » [para 4]. Il affirme que l’Opposante est un chef de file dans la fabrication et la distribution de produits alimentaires espagnols, spécialisé dans la production et la vente de produits alimentaires à base d’olive depuis 1941. Il atteste que l’Opposante a [traduction] « une longue histoire » de vente d’olives et d’autres produits alimentaires au Canada, et plus particulièrement que l’Opposante a employé la marque de commerce LA ESPAÑOLA et diverses marques figuratives qui incorporent cet élément en liaison avec des olives au Canada depuis au moins 1984 [para 7 à 10]. L’affidavit Jorda explique ce qui suit :

· L’histoire et les affaires de l’Opposante, tant dans le monde entier qu’au Canada [para 7 à 14, Pièces 1 et 2];

· Description des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante, y compris la marque de commerce figurative de l’Opposante, le logo LA ESPAÑOLA et la marque nominale non enregistrée LA ESPAÑOLA, employée au Canada en liaison avec [traduction] « divers produits alimentaires, y compris des olives, des produits alimentaires à base d’olive et du gaspacho » [para 15 à 18, Pièce 3];

· Produits associés aux marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante, y compris les produits vendus au Canada [para 19 à 22, Pièces 4 et 5];

· Ventes des produits de la marque LA ESPAÑOLA de l’Opposante dans le cours normal des affaires au Canada en général depuis 1984 et plus précisément avec les volumes de ventes depuis 2000 [para 23 à 30, Pièce 6];

· Promotion et publicité des produits de la marque LA ESPAÑOLA de l’Opposante par l’entremise de divers médias et d’Internet, y compris au Canada [para 31 à 38, Pièces 2 et 7 à 11];

· Emploi et enregistrement des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante dans d’autres pays [para 39, Pièce 13]; et

· Deux décisions en faveur de l’Opposante dans d’autres administrations, où l’Opposante s’est opposée à des marques de commerce semblables à la Marque [para 44, Pièces 14 et 15].

[21] M. Jorda souligne également que la traduction de LA ESPAÑOLA signifie [traduction] « femme espagnole » et estime donc que l’élément de dessin d’une femme dans la Marque [traduction] « sert simplement à renforcer les significations semblables » de la Marque et des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante [para 43].

Premier affidavit Noonan

[22] Mme Noonan est une recherchiste en marques de commerce employée par l’agent de l’Opposante [para 1]. Le premier affidavit Noonan met en évidence les recherches effectuées dans la Base de données sur les marques de commerce canadiennes à l’égard des demandes et des enregistrements de marques de commerce de la catégorie Nice 29 qui contiennent l’élément LA ESPANOLA [para 3, Pièce 1]. Sont également annexés à l’affidavit les historiques du dossier i) de la demande d’enregistrement de marque de commerce no 1,599,948 de la Requérante pour la marque de commerce LA ESPAÑOLA [Pièce 2] et ii) de la demande no 1,103,791 de l’Opposante pour la marque de commerce figurative [Pièce 3].

Deuxième affidavit Noonan

[23] Le deuxième affidavit Noonan met en évidence deux documents. Le premier document est une action du 7 avril 2008 du United States Patent and Trademark Office (USPTO) relative à la demande d’enregistrement de marque de commerce no 77/199,055 de l’Opposante pour la marque de commerce LA ESPANOLA [Pièce 1]. Le deuxième document est un document « Recensement en bref » de Statistique Canada publié en août 2017 intitulé « Diversité linguistique et plurilinguisme au sein des foyers canadiens », relatif au recensement de 2016 [Pièce 2].

Affidavit Paskalev

[24] M. Paskalev est employé par l’agent de l’Opposante. L’affidavit Paskalev démontre la présence de M. Paskalev dans diverses épiceries à Montréal en mars 2017 et démontre qu’il a photographié et acheté des produits alimentaires d’olives et liés aux olives, y compris divers produits de la marque LA ESPAÑOLA [para 2 à 10, Pièces 1 à 13]. L’affidavit met également en évidence une page du site Web de Statistique Canada intitulée « Nombre de Canadiens dont la langue maternelle est l’une des 22 langues immigrantes déclarées par plus de 100 000 personnes, Canada, 2011 » [para 11, Pièce 14].

Affidavit Ye

[25] Mme Ye est une assistante juridique employée par l’agent de l’Opposante [para 1]. L’affidavit Ye inscrit en preuve les communications par courriel entre les parties concernant le contre-interrogatoire des déposants de la Requérante [para 3 et 4, Pièces 1 et 2].

Aperçu de la preuve de la Requérante

Affidavit Garcia

[26] M. Garcia est le directeur international de la Requérante. Il déclare que la Requérante est un chef de file en matière de fabrication et de distribution d’huile d’olive en Espagne et dans le monde [para 3], et qu’il produit et distribue de l’huile d’olive sous la marque LA ESPAÑOLA depuis 1840 [para 4], avec des exportations vers plus de 50 pays [para 5]. L’affidavit Garcia démontre ce qui suit :

· L’historique et le profil de la société de la Requérante [para 3 à 7];

· L’emploi et la réputation de la marque LA ESPAÑOLA de la Requérante dans le monde [para 8 à 11];

· Les ventes d’huile d’olive LA ESPAÑOLA au Canada, y compris les données sur les ventes depuis 2004 [para 12 à 14, Pièce 4];

· Des détails concernant la prétendue coexistence des marques et des marques de commerce LA ESPAÑOLA des parties au Canada et dans d’autres pays [para 16 à 18, Pièces 5 et 6].

[27] Les parties pertinentes du contre-interrogatoire de M. Garcia seront examinées ci-dessous. Toutefois, je note que le deuxième affidavit Garcia précise les réponses que M. Garcia a données lors de son contre-interrogatoire [deuxième affidavit Garcia, para 2 à 10]. En particulier, M. Garcia confirme que la Marque n’a pas été employée au Canada avant la date de dépôt en l’espèce, soit le 20 juin 2014 [para 10].

Affidavit Treciokas

[28] Mme Treciokas est employée par l’agent de la Requérante [para 1]. Mme Treciokas a effectué diverses recherches dans des bases de données et sur Internet entre juin et août 2016. L’affidavit Treciokas démontre ce qui suit :

· Détails de l’enregistrement canadien de la marque de commerce de l’Opposante no LMC683,041 pour la marque de commerce figurative de l’Opposante, en notant l’avis de non-responsabilité susmentionné qui indique que « Le droit à l’usage exclusif de ESPAÑOLA en dehors de la marque de commerce n’est pas accordé » [para 2, Pièce TT‑1];

· Résultats de la recherche dans la base de données des marques de commerce de l’USPTO [para 3, Pièce TT-2], y compris les détails de la demande et la correspondance déposée auprès de l’USPTO concernant la demande de l’Opposante pour la Marque LA ESPANOLA [para 4 et 5, Pièces TT-3 à TT-5];

· Résultats de la recherche sur le site Web de Statistique Canada, y compris une infographie intitulée « Les langues immigrantes au Canada » fondée sur les données du recensement de 2016 [para 6, Pièce TT-6];

· Une copie d’un document de Google Traduction indiquant que « La Espanola » signifie [traduction] « l’espagnole » [para 7, Pièce TT-7];

· Correspondance et représentations relatives à la procédure de radiation prévue à l’article 45 concernant l’enregistrement de la marque de commerce figurative de l’Opposante [para 8 à 10, Pièces TT-8 et TT-9]; et

· Correspondance, observations et décision concernant la demande no 13047238 de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle de la Requérante [para 11 et 12, Pièce TT-10].

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[29] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de preuve d’établir les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053 (CF 1re inst)]. La présence d’un fardeau de preuve imposé à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[30] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, tel qu’il est allégué dans la déclaration d’opposition. La présence d’un fardeau ultime qui incombe à un requérant signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de celui-ci.

Motif fondé sur l’article 30b) – non-conformité

[31] L’Opposante plaide que la demande contrevient à l’article 30b) de la Loi parce que la Requérante a, en fait, employé la Marque au Canada en liaison avec de l’« [h]uile d’olive » de 2004 à au moins 2014.

[32] La date pertinente pour ce motif est la date de production de la Demande, à savoir le 20 juin 2014.

[33] La demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur l’emploi proposé au Canada. Toutefois, aux paragraphes 53 à 64 de ses observations écrites, l’Opposante soutient que M. Garcia admet l’emploi de la Marque au Canada avant la date de dépôt. À cet égard, l’Opposante fait remarquer que l’affidavit Garcia comprend un tableau indiquant les ventes par la Requérante d’huile d’olive de marque LA ESPAÑOLA au Canada entre 2004 et 2014, ainsi que des images de diverses bouteilles d’huile d’olive que M. Garcia atteste que la Requérante vend sous sa marque LA ESPAÑOLA [affidavit Garcia aux para 10 et 14, Pièce 2]. L’Opposante invoque ensuite certains échanges au cours du contre-interrogatoire où il semble que M. Garcia confirme que les ventes canadiennes d’huile d’olive de la Requérante comprenaient des ventes en liaison avec la Marque.

[34] Pour sa part, la Requérante soutient que l’Opposante décrit mal les déclarations de M. Garcia, de sorte que l’Opposante fait essentiellement l’amalgame entre l’emploi antérieur de versions antérieures de la marque de commerce LA ESPAÑOLA de la Requérante et celle de la Marque [para 36].

[35] En effet, bien que la Requérante semble avoir employé des marques de commerce semblables, je suis d’accord avec la Requérante pour dire que la Marque a été correctement demandée en raison de l’emploi projeté au Canada [voir les observations écrites de la Requérante au para 37]. À cet égard, toute ambiguïté découlant du contre-interrogatoire a été précisée dans le deuxième affidavit Garcia, où M. Garcia atteste clairement que la Marque demandée n’a pas été employée au Canada avant le 20 juin 2014 [para 10].

[36] Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que, selon la prépondérance des probabilités, la Requérante a démontré que la demande était conforme à l’article 30b) de la Loi.

[37] Par conséquent, le motif fondé sur la non-conformité avec l’article 30b) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 30e) – non-conformité

[38] L’Opposante fait valoir que la demande contrevient aux dispositions de l’article 30e) de la Loi parce que la Requérante n’avait pas, à la date de dépôt de la demande, l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par la demande, soit l’« [h]uile d’olive ».

[39] Étant donné qu’aucune preuve n’a été produite à l’appui de ce motif, l’Opposante ne s’acquitte pas de son fardeau initial.

[40] Par conséquent, le motif fondé sur la non-conformité avec l’article 30e) de la Loi est rejeté.

Motif fondé sur l’article 12(1)d) – confusion avec une marque de commerce déposée

[41] L’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec l’enregistrement no LMC683,041 pour la marque de commerce figurative de l’Opposante et l’enregistrement no LMC614,458 pour le dessin TAPAÑOLAS de l’Opposante, tous deux reproduits ci-dessus.

[42] La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd, 1991 CarswellNat 1119 (CAF)]. Comme seule la marque de commerce figurative de l’Opposante existe toujours au registre, l’Opposante ne satisfait à son fardeau initial que relativement à cette marque de commerce.

[43] Par conséquent, la Requérante doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce figurative de l’Opposante.

Critère pour décider s’il y a confusion

[44] Le critère à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[45] Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les produits visés par la demande, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, au para 20].

[46] Aux fins de cette évaluation, toutes les circonstances pertinentes de l’espèce doivent être prises en compte, y compris celles énoncées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[47] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie en fonction du contexte propre à chaque affaire [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, la Cour suprême du Canada a déclaré que l’article 6(5)e), le degré de ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [au para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être le plus important dans certains cas, l’approche préférable est de déterminer s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement « frappant ou unique » [au para 66]. Compte tenu de son importance, je commencerai par examiner le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties.

Degré de ressemblance

[48] Dans ses observations, l’Opposante soutient que la Marque et les marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante sont non seulement identiques en termes de son, mais aussi en ce qui concerne les idées qu’elles suggèrent, puisqu’elles transmettent toutes deux l’idée d’une [traduction] « femme espagnole » [para 96]. À cet égard, elle souligne les définitions de LA ESPANOLA ainsi que des éléments de preuve indiquant que les acheteurs ordinaires des produits alimentaires des parties comprennent probablement l’espagnol [para 94 et 95]. Subsidiairement, l’Opposante soutient que, peu importe que l’acheteur ordinaire comprenne ou non l’espagnol, l’élément frappant de la marque de commerce des parties est le même, soit les mots LA ESPAÑOLA [para 97 à 100].

[49] Dans ses observations, la Requérante souligne les différences dans les éléments de conception des marques de commerce des parties [para 87 à 90]. Cependant, malgré l’avertissement relatif à ESPAÑOLA dans l’enregistrement de la marque de commerce figurative de l’Opposante, je considère que l’élément frappant de la marque de commerce de l’Opposante est le mot LA ESPAÑOLA. Comme cet élément frappant apparaît également dans la Marque, il y a un degré élevé de ressemblance entre les marques de commerce des parties en apparence et en particulier dans le son. Je suis également d’accord avec l’Opposante que, peu importe si le consommateur probable des produits des parties comprend l’espagnol, l’idée suggérée par les marques de commerce des parties serait également la même, compte tenu de l’élément commun LA ESPAÑOLA.

[50] Par conséquent, ce facteur important favorise l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[51] Dans ses observations écrites, l’Opposante soutient que sa marque de commerce est intrinsèquement distinctive, puisque LA ESPAÑOLA ne donne pas une description des produits associés, que ces mots soient compris comme signifiant [traduction] « femme espagnole » ou qu’ils soient considérés comme des mots étrangers sans signification [para 114]. En ce qui a trait à la mesure dans laquelle la marque de commerce de l’Opposante est devenue connue, elle soutient que la preuve fait état des ventes, de la promotion et de l’emballage des olives de marque LA ESPAÑOLA de l’Opposante et d’autres produits alimentaires au Canada depuis 2000 [para 104]. À ce stade, je constate que l’affidavit Jorda a tendance à associer la preuve à l’égard des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante avec des images présentées des produits de l’Opposante vendus au Canada affichant en grande partie le logo LA ESPAÑOLA plutôt que la marque de commerce figurative de l’Opposante [Pièces 4 et 5]. Par conséquent, même si j’accepte l’affirmation de M. Jorda selon laquelle la propriétaire a employé la marque de commerce figurative de l’Opposante depuis 1984 [para 18], les éléments de preuve ne démontrent pas clairement la mesure dans laquelle elle est plus particulièrement connue au Canada.

[52] En ce qui concerne la Marque, l’Opposante soutient que, comme les marques de commerce des parties véhiculent la même idée, la Marque ne possède pas de caractère distinctif inhérent pour la différencier des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante [para 115]. En ce qui a trait à la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue, elle soutient que la Requérante ne peut pas invoquer la preuve de réputation à l’étranger et que la preuve de la Requérante montre par ailleurs que les ventes sont limitées à l’Ontario, en notant un écart dans les factures justificatives entre 2007 et 2012 [para 104 et 105].

[53] Dans ses observations écrites, la Requérante fait valoir que les mots LA ESPAÑOLA signifient [traduction] « l’espagnole » et qu’ils sont très suggestifs de produits qui proviennent de l’Espagne. À ce titre, elle soutient que ces mots ne possèdent pas à eux seuls un degré élevé de caractère distinctif inhérent [para 58]. Elle note également que l’Opposante a renoncé au droit exclusif d’utiliser le mot ESPAÑOLA dans son enregistrement existant [para 62]. À la lumière de ce qui précède, la Requérante fait valoir que la Marque possède un degré de caractère distinctif inhérent plus élevé que la marque de commerce figurative de l’Opposante, compte tenu de l’élément figuratif unique d’une femme portant une cruche ou une urne [para 63].

[54] En ce qui concerne la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue, la Requérante soutient que l’image illustrant [traduction] « une femme assise, dans ses diverses itérations, est devenue distinctive des produits d’huile d’olive de la Requérante » [para 64]. À cet égard, elle soutient que, même si le Canada [traduction] « n’est pas un marché important pour la Requérante », les ventes en liaison avec la marque LA ESPAÑOLA de la Requérante ont dépassé celles de l’Opposante [para 73 à 75]. À ce titre, la Requérante soutient que, d’après les volumes de ventes démontrés, les consommateurs canadiens [traduction] « auraient eu une exposition égale, sinon plus grande, aux produits d’huile d’olive LA ESPAÑOLA de la Requérante » [para 76].

[55] À mon avis, en ce qui concerne la mesure dans laquelle les marques de commerce en l’espèce sont devenues connues, la preuve des deux parties est quelque peu problématique. À cet égard, les éléments de preuve et les observations traitent en grande partie des marques LA ESPAÑOLA respectives des parties et de l’emploi de marques de commerce semblables, mais pas nécessairement de la Marque et de la marque de commerce figurative de l’Opposante de façon claire et précise. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où, de façon générale, l’emploi des marques des parties et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues peuvent être considérées comme une circonstance connexe supplémentaire, je ne considère pas qu’une telle mesure favorise manifestement l’une ou l’autre des parties en l’espèce.

[56] Cependant, que LA ESPAÑOLA soit considérée comme distinctive ou non, un tel caractère distinctif est partagé entre les marques de commerce des parties, la Marque ayant un plus grand caractère distinctif inhérent en raison du dessin de femme supplémentaire, comparativement au cadre et à l’image relativement simples d’olives faisant partie de la marque de commerce de l’Opposante.

[57] Par conséquent, dans l’ensemble, je conclus que ce facteur favorise quelque peu la Requérante.

Période d’emploi

[58] Alors que la demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur l’emploi projeté – et la preuve démontre l’emploi subséquent de la Marque conformément à la demande – l’enregistrement de la marque de commerce figurative de l’Opposante revendique l’emploi au Canada depuis au moins 1984. Encore une fois, même si la preuve de l’emploi réel aurait pu être plus claire, j’accepte l’affirmation de M. Jorda selon laquelle l’Opposante a employé ses marques de commerce LA ESPAÑOLA, y compris la marque de commerce figurative de l’Opposante, [traduction] « en liaison avec des olives depuis au moins 1984 » [para 18].

[59] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre de produits ou entreprises et nature du commerce

[60] Lorsqu’il est question de considérer le genre des produits des parties en ce qui a trait à la question de la confusion, ce sont les états déclaratifs des produits dans la demande en question et l’enregistrement en question qui gouvernent [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CarswellNat 749 (CAF); Miss Universe, Inc c Bohna, 1994 CarswellNat 1443 (CAF)].

[61] Dans ses observations, la Requérante soutient que, même si [traduction] « dans les petites boutiques spécialisées comme celles visitées par l’affiant de l’Opposante, M. Pakalev, il peut y avoir chevauchement entre les produits d’olive et les huiles d’olive en raison de l’espace limité sur les étagères », dans la plupart des magasins, ces produits sont affichés dans des sections distinctes [para 80]. La Requérante fait également remarquer que, dans d’autres administrations, l’Opposante a souvent fait valoir les différences entre les produits des parties [para 81 à 84]. À cet égard, la Requérante soutient que [traduction] « les olives en conserve peuvent être différenciées de l’huile d’olive, puisque la première est une nourriture spécialisée, souvent servie en tant qu’hors-d’œuvre » et la deuxième est un article typique de garde-manger [para 83].

[62] Cependant, que les arguments de l’Opposante aient été ou non retenus ailleurs où les positions des parties étaient effectivement renversées, il demeure que les produits des parties sont des olives et des produits dérivés d’olives et sont vendus dans les mêmes magasins.

[63] Par conséquent, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire qu’il y a chevauchement dans la nature des produits, des entreprises et des voies de commercialisation des parties.

[64] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Autre(s) circonstance(s) de l’espèce

[65] Dans ses observations, la Requérante fait remarquer que les marques de commerce des parties coexistent sur les registres des marques de commerce de plusieurs pays dans le monde [para 94]. Elle considère que cette coexistence est importante et souligne en outre que les marques de commerce des parties ont coexisté sur le marché canadien sans qu’il y ait de preuve de confusion réelle chez les consommateurs [para 95]. La Requérante réitère que l’Opposante elle-même a soutenu [traduction] « [qu’]il n’y a pas de risque raisonnable de confusion » entre les marques de commerce des parties, comme lors de la poursuite de la demande de l’Opposante pour la marque nominale LA ESPANOLA devant l’USPTO [para 96 à 99]. La Requérante soutient que si, selon ses propres arguments, il y a eu une longue période de coexistence en Espagne, en Europe et aux États-Unis sans cas de confusion, il est raisonnable de conclure que le risque de confusion est également faible au Canada à la lumière de la longue période de coexistence entre les marques des parties sur le marché canadien [para 100].

[66] Même si je conviens que ce qui précède peut cumulativement constituer une circonstance connexe en faveur de la Requérante, je ne la considère pas comme importante ou déterminante dans l’évaluation globale de la question de la confusion en l’espèce. À cet égard, le critère de la confusion vise le consommateur occasionnel avec un souvenir imparfait – le consommateur moyen ne serait pas au courant de la coexistence des marques de commerce des parties dans d’autres pays et, de toute façon, la Cour suprême a confirmé qu’au Canada, le degré de ressemblance est le facteur susceptible d’avoir le plus d’effet dans la décision relative à la question de la confusion.

Conclusion – confusion avec la marque de commerce figurative de l’Opposante

[67] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties. J’en arrive à cette conclusion principalement en raison de la ressemblance entre les marques de commerce des parties et du chevauchement dans la nature des produits et du commerce des parties, et en dépit du caractère distinctif inhérent de la Marque et de l’absence de preuve de confusion réelle à l’égard des marques des parties.

[68] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) relatif à la confusion avec l’enregistrement de la marque de commerce figurative de l’Opposante est accueilli.

Motif fondé sur l’article 16(1)a) – confusion avec une marque de commerce antérieurement employée

[69] L’Opposante fait valoir que la Requérante n’est pas la partie ayant droit à l’enregistrement de la Marque. En particulier, l’Opposante fait valoir qu’à la date de dépôt de la demande, la Marque créait de la confusion avec les marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante, qui avaient déjà été employées au Canada en liaison avec des olives conservées de tous genres et du gaspacho, qui sont identiques ou très semblables aux produits visés par la demande.

[70] La date pertinente pour ce motif est la date de dépôt de la demande, soit le 20 juin 2014.

[71] Comme il est mentionné ci-dessus, j’accepte que l’Opposante ait démontré l’emploi des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante avant juin 2014, y compris la marque de commerce figurative de l’Opposante et le logo LA ESPAÑOLA. Comme l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et n’importe laquelle des marques de commerce LA ESPAÑOLA de l’Opposante.

[72] Nonobstant la date pertinente antérieure, je n’estime pas que mes conclusions ci-dessus à l’égard de l’analyse de la confusion diffèrent de manière substantielle sous ce motif. En effet, pour ce motif, je remarque en particulier que la preuve concernant la mesure dans laquelle le logo LA ESPAÑOLA de l’Opposante est devenu connu n’est pas aussi problématique que celle concernant la marque de commerce figurative de l’Opposante.

[73] Par conséquent, après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties. J’en arrive à cette conclusion en raison de la ressemblance entre les marques de commerce des parties et du chevauchement dans la nature des produits et du commerce des parties, et en dépit du caractère distinctif inhérent de la Marque et de l’absence de preuve de confusion réelle à l’égard des marques des parties.

[74] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a) de la Loi est accueilli.

Autres motifs d’opposition

[75] Étant donné que l’Opposante obtient gain de cause pour deux motifs d’opposition, je ne considère pas qu’il soit nécessaire d’examiner les autres motifs d’opposition, à savoir ceux fondés sur les articles 2 et 30i) de la Loi.

Décision

[76] Compte tenu de tout ce qui précède, et conformément à l’article 38(12) de la Loi et aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande.

 

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Judy Gordian

Le français est conforme aux WCAG.


 

 

 

 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

AGENTS AU DOSSIER

Gowling WLG (Canada) LLP

Pour l’Opposante

David S. Lipkus

Pour la Requérante

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.