Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

OPIC

Logo de l'OPIC / CIPO Logo

CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2021 COMC 103

Date de décision : 2021-05-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Degil Safety Products (1989) Inc.

Opposante

et

 

Jose Luis Castro Inzunza

Requérant

 

1,776,506 pour Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd.

Demande

Introduction

[1] Jose Luis Castro Inzunza (le Requérant) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd. (la Marque), dont les détails sont énoncés ci-dessous :

Marque de commerce

Numéro de demande

Services

Revendications

Désistement

1,776,506

(1) Distribution d’équipement de protection contre les chutes; services d’approvisionnement, à savoir achat d’équipement de protection contre les chutes; conseils et information concernant la gestion des affaires commerciales; gestion des affaires; aide à la gestion des affaires à l’intention de sociétés industrielles et commerciales; gestion des affaires commerciales.

(2) Services de manutention de marchandises d’importation et d’exportation.

(3) Conception et génie d’équipement de protection contre les chutes.

Employée au CANADA depuis 20 novembre 2008 en liaison avec les services.

Le requérant se désiste du droit à l’usage exclusif de la feuille d’érable à onze pointes.

[2] Degil Safety Products (1989) Inc. (l’Opposante) détient un enregistrement pour la marque de commerce FALLPRO (LMC990,919) en liaison avec de l’équipement de protection contre les chutes (la marque de commerce déposée de l’Opposante) et s’est opposée à la demande principalement au motif que la Marque crée de la confusion avec son enregistrement et son emploi de cette marque de commerce. Les détails de la marque de commerce déposée de l’Opposante sont énoncés ci-dessous :

Marque de commerce

Numéro d’enregistrement

Produits

Revendications

FALLPRO

LMC990,919

(1) Équipement de protection contre les chutes pour empêcher et freiner les chutes, nommément harnais de sécurité, cordons, coulisseaux de sécurité, cordages de sécurité, ensembles pour barres d’armature et élingues.

(2) Équipement de protection contre les chutes pour empêcher et freiner les chutes, nommément cordons amortisseurs, cordons en Y, élingues de câble, mousquetons, élingues d’ancrage, sangles d’ancrage, supports de fixation rapide, connecteurs d’ancrage, cordages de sécurité verticaux.

(3) Équipement de protection contre les chutes pour empêcher et freiner les chutes, nommément cordages de sécurité autorétractables.

Employée au CANADA depuis au moins aussi tôt que juin 2001 en liaison avec les produits (1); juin 2004 en liaison avec les produits (2); mars 2006 en liaison avec les produits (3).

[3] D’emblée, je remarque que de nombreuses modifications à la Loi, sont entrées en vigueur le 17 juin 2019. Tous les renvois dans la présente décision sont faits à la Loi dans sa version modifiée le 17 juin 2019, à l’exception des renvois faits aux motifs d’opposition, qui renvoient à la Loi avant sa modification (voir l’article 70 de la Loi qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi, dans sa version antérieure au 17 juin 2019, s’applique aux demandes annoncées avant cette date).

[4] Pour les raisons qui suivent, la demande est rejetée.

Le dossier

[5] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 8 avril 2016 et a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 15 mars 2017. Le 14 août 2017, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition qui a ensuite été modifiée le 20 août 2018.

[6] L’Opposante soulève des motifs d’opposition fondés sur la non-conformité à l’article 30, la non-enregistrabilité en vertu de l’article 12, l’absence de droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16 et l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi.

[7] Le Requérant a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle il conteste chaque allégation contenue dans la déclaration d’opposition. Je remarque que la contre-déclaration comprend également des renvois à des questions qui n’ont pas été correctement exposées dans la preuve, et, par conséquent, je confirme que j’ai ignoré toutes ces parties de ce document.

[8] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit :

· des copies certifiées de l’historique des dossiers de la Marque et de la marque de commerce déposée de l’Opposante;

· une copie certifiée des statuts constitutifs du Manitoba pour Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd., qui montrent que cette entité a été constituée en société le 13 novembre 2008 par le Requérant;

· l’affidavit d’Alan Booth, un chercheur en marques de commerce employé par Trade Mark Research Ltd., souscrit le 7 février 2018 avec les Pièces A à C (l’affidavit Booth). M. Booth présente une preuve de l’état du registre sous la forme d’une recherche qu’il a effectuée dans la Base de données sur les marques de commerce canadiennes concernant les marques qui contiennent à la fois « FALL » et « PRO » dans un ordre non établi à l’aide d’un logiciel de recherche exclusif, d’extraits correspondants du registre, ainsi qu’une page du Journal des marques de commerce où l’une des trois marques de commerce actives trouvées a été annoncée;

· l’affidavit d’Hélène Deslauriers, une analyste en marques de commerce employée par CompuMark, souscrit le 7 février 2018 avec la Pièce HD-1 (l’affidavit Deslauriers). Mme Deslauriers présente en preuve les résultats de la [traduction] « recherche de CompuMark sur la dilution des noms de domaine au Canada » qu’elle a effectuée au sujet des domaines comportant les termes « FALLPRO », « FALL-PRO » ou « FALL » et « PRO » avec tout autre symbole entre eux;

· l’affidavit de Leila Ashurov, une avocate employée par l’entreprise représentant l’Opposante, souscrit le 9 février 2018 avec les Pièces 1 à 18 (l’affidavit Ashurov). Mme Ashurov présente en preuve les résultats de diverses recherches sur Internet, y compris des imprimés des sites Web fall-pro.com, castro-solutions.com, castro-solutions.homestead.com et degilsafety.com, ainsi que des versions archivées des pages de ces sites Web;

· l’affidavit de Gary Cox, gestionnaire des opérations de l’Opposante, souscrit le 12 février 2018 avec les Pièces 1 à 17 (l’affidavit Cox). M. Cox fournit des renseignements sur les activités de l’Opposante, y compris l’emploi et la promotion de sa marque de commerce au Canada. M. Cox fait également part de son opinion sur un certain nombre de questions, y compris le caractère distinctif de la Marque, la capacité de la Marque à distinguer les services du Requérant et la probabilité de confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante. Je confirme que j’ai ignoré toute opinion ou conclusion qu’a pu formuler M. Cox dans ses déclarations à l’égard de questions de fait et de droit qui doivent être tranchées par le registraire dans le cadre de la présente instance.

[9] Les déposants de l’Opposante n’ont pas été contre-interrogés.

[10] Le Requérant a choisi de ne pas produire de preuve. Seule l’Opposante a déposé un plaidoyer écrit et aucune audience n’a été tenue.

Dates pertinentes et fardeau de preuve

[11] Les dates pertinentes relatives aux motifs d’opposition sont les suivantes :

  • articles 38(2)a) et 30 de la Loi – la date de production de la demande, à savoir le 8 avril 2016 [Delectable Publications Ltd c Famous Events Ltd (1989), 24 CPR (3d) 274 (COMC); Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469, à la p. 475 (COMC); Tower Conference Management Co c Canadian Exhibition Management Inc (1990), 28 CPR (3d) 428, aux p. 432 et 433 (COMC)];

· articles 38(2)b) et 12(1)a) de la Loi – la date de production de la demande, à savoir le 8 avril 2016 [Calvin Klein Trademark Trust c Wertex Hosiery Inc (2004), 41 CPR (4th) 552 (COMC); Jurak Holdings Ltd c Matol Biotech Laboratories Ltd (2006), 50 CPR (4th) 337 (COMC)];

· articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi – la date de la décision du registraire [Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

· articles 38(2)c) et 16 de la Loi – la date de premier emploi revendiquée dans la demande, à savoir le 20 novembre 2008 [article 16(1) de la Loi], mais si cette date de premier emploi est contestée avec succès, la date pertinente devient alors la date de production de la demande [Everything for a Dollar Store (Canada) Inc c Dollar Plus Bargain Centre Ltd (1998), 86 CPR (3d) 269 (COMC)];

· articles 38(2)d) et 2 de la Loi – la date de production de l’opposition, à savoir, le 14 août 2017 [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185].

[12] L’Opposante doit s’acquitter de son fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [John Labatt Limited c The Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. Si l’Opposante s’acquitte de ce fardeau, c’est au Requérant qu’incombe le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi.

Motifs rejetés sommairement

[13] Les motifs d’opposition ci-dessous, soulevés en vertu des articles 30a), 30b), 30g), 30i), 12(1)a) et 16(1)c) de la Loi, sont rejetés sommairement parce qu’ils sont invalides et plaidés de façon inappropriée ou que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Article 30a) – état dressé dans les termes ordinaires du commerce

[14] Ce motif d’opposition est rejeté parce que l’Opposante n’a produit aucune preuve ou n’a présenté aucune observation à l’appui, autre qu’en déclarant que l’état déclaratif des Services (1) et (3) sont dressés dans les termes ordinaires du commerce.

Article 30b) – date de premier emploi

[15] Ce motif d’opposition est rejeté parce que la preuve de l’Opposante ne remet pas efficacement en question l’emploi de la Marque par le Requérant ou l’exactitude de la date de premier emploi revendiquée.

[16] Tout d’abord, les différents extraits de sites Web fournis dans l’affidavit Ashurov ne témoignent pas de la véracité de leur contenu, et même s’ils le faisaient, ils ne seraient guère utiles à l’Opposante à l’égard de ce motif. Par exemple, je remarque que le nom de domaine fall-pro.com inclus dans les recherches de Mme Ashurov est enregistré au nom d’une société mexicaine, FALL PRO DE MEXICO S.A. DE C.V. [affidavit Deslauriers, Pièce HD-1, aux p. 16 et 17] et qu’il n’y a aucune preuve établissant clairement un lien entre cette entité et le Requérant.

[17] De plus, même si (1) j’acceptais que Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd. est un nom commercial ou d’entreprise utilisé par le Requérant, (2) déduisant des renvois à Luis Castro, à Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd. et à la Marque dans les résultats des recherches de Mme Asurov que les sites castro-solutions.com et castro-solutions.homestead.com appartiennent au Requérant ou sont exploités par celui-ci, et que(3) j’acceptais les résultats des recherches de Mme Ashurov comme preuve établissant que la Marque ne figurait pas sur ces sites Web à la date de premier emploi revendiquée (ce qui n’est pas le cas), l’Opposante ne serait toujours pas en mesure de s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard de la question de la non-conformité à l’article 30b) de la Loi.

[18] Étant donné que la présentation de la Marque uniquement dans la publicité (par exemple, sur le site Web du Requérant) serait insuffisante pour établir son emploi en vertu de l’article 4(2) de la Loi, il s’ensuit que la seule absence de cette présentation ne suggère pas nécessairement un non-emploi. En outre, étant donné le genre des Services dans la présente instance, je ne suis pas convaincue que même l’absence d’un site Web exploité par le Requérant constituerait en soi une preuve de non-emploi de Marque ou remettrait autrement en question la date de premier emploi revendiquée.

[19] Enfin, il convient de rappeler que le Requérant n’est pas tenu d’étayer la revendication d’emploi contenue dans sa demande, à moins que cette revendication ne soit d’abord remise en question par l’Opposante qui s’acquitte de son fardeau de preuve initial [Kingsley c Ironclad Games Corp, 2016 COMC 19]. J’ajouterais que l’absence de preuve selon laquelle le Requérant a employé la Marque dans les circonstances en l’espèce ne suffit pas pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau.

Article 30g) – adresse

[20] Ce motif d’opposition est rejeté parce que la preuve de l’Opposante n’étaye pas ses allégations selon lesquelles la demande d’enregistrement de la Marque ne contenait pas l’adresse du siège ou de l’établissement du Requérant au Canada ou que cette adresse était en quelque sorte inexacte.

[21] Le fait que différentes adresses soient indiquées sur Internet pour la société Castro’s Fall‑Pro Solutions Ltd., lesquelles diffèrent de son siège social selon les registres de sociétés constituées produits en preuve, n’est pas pertinent, car cette entité n’est pas le Requérant et n’a pas demandé l’enregistrement de la Marque en cause. De plus, bien que la preuve suggère que le Requérant peut avoir eu plus d’une adresse, elle ne démontre pas que l’adresse fournie dans la demande n’était pas son siège ou son établissement à l’époque [plaidoyer écrit de l’Opposante, aux p. 20, 26, 29 et 30; affidavit Ashurov, Pièce 6, 7 et 10; et les statuts constitutifs du Manitoba pour Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd.].

[22] Enfin, je ne suis saisie d’aucune preuve démontrant que l’adresse contenue dans la demande est erronée.

Article 30i) – déclaration du droit à l’enregistrement

[23] Ce motif d’opposition est rejeté parce que la simple connaissance de l’existence de la marque de commerce FALLPRO de l’Opposante ou de la confusion avec la marque de commerce FALLPRO de l’Opposante seulement n’appuie pas l’allégation selon laquelle le Requérant n’aurait pas pu être convaincu de son droit d’employer la Marque.

[24] L’article 30i) de la Loi exige que le requérant inclue dans sa demande une déclaration attestant qu’il est convaincu qu’il a droit à l’enregistrement de sa marque de commerce. Lorsque cette déclaration est fournie, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve d’agissement de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC)]. Je remarque que la demande d’enregistrement de la Marque contient la déclaration exigée. Je remarque également que les arguments relatifs à ce motif ne comprennent aucune allégation de mauvaise foi. Quoi qu’il en soit, la preuve produite n’étayait pas cette allégation.

[25] De plus, même si le registraire a récemment conclu que, conjointement, les articles 30i) et 22 de la Loi peuvent constituer un motif d’opposition valide [McDonald’s Corporation et McDonald’s Restaurants of Canada Limited c Hi-Star Franchise Systems, Inc, 2020 COMC 111, aux para 25 à 30], l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de son allégation selon laquelle le Requérant ne pouvait être convaincu qu’il avait droit d’employer la Marque étant donné que le Requérant a [traduction] « diminu[er] la valeur de l’achalandage attaché à la [marque de commerce] FALLPRO de l’Opposante » [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, aux para 46, et 63 à 68, qui énonce les éléments requis pour établir une violation de l’article 22].

Article 12(1)a) – Nom ou nom de famille

[26] Ce motif d’opposition est rejeté parce que la preuve de l’Opposante n’établit pas que la Marque, dans son ensemble, sera considérée comme étant simplement un nom ou un nom de famille.

Article 16(1)c) – absence de droit à l’enregistrement fondé sur l’emploi d’un nom commercial

[27] Ce motif, tel que plaidé, ne soulève pas un motif d’opposition approprié. L’Opposante fonde ici sa revendication sur l’emploi antérieur d’un nom commercial appartenant à un tiers, à savoir Castro’s Fall-Pro Solutions Ltd. Cette société n’est pas partie à la présente instance et n’a aucun lien démontré avec l’Opposante.

[28] L’article 17 de la Loi prévoit qu’aucune demande d’enregistrement d’une marque de commerce ne peut être refusée du fait qu’une personne autre que l’auteur de la demande d’enregistrement ou son prédécesseur en titre a antérieurement employé ou révélé une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion, sauf à la demande de cette autre personne ou de son successeur en titre. Par conséquent, un opposant ne peut invoquer que l’emploi antérieur ou la révélation de sa propre marque de commerce ou de son propre nom commercial. En d’autres termes, le motif d’opposition fondé sur l’emploi antérieur du nom commercial d’un tiers n’est pas un motif d’opposition valide.

Autres motifs d’opposition

[29] Les autres motifs d’opposition reposent sur la question de confusion entre la Marque et la marque de commerce FALLPRO de l’Opposante.

Article 12(1)d) – confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante

[30] Un opposant s’acquitte de son fardeau ultime à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) si l’enregistrement invoqué est en règle. À cet égard, le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour confirmer l’existence de tout enregistrement invoqué par un opposant [Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. Ayant exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire, je confirme que l’enregistrement no LMC990,919 pour la marque de commerce déposée de l’Opposante existe encore.

[31] Le Requérant doit maintenant établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Critère en matière de confusion

[32] Le critère à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. Par conséquent, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion entre des produits ou services d’une source qui sont considérés comme provenant d’une autre source.

[33] En appliquant le critère en matière de confusion, je dois tenir compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce, y compris dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Ces facteurs ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à chacun selon le contexte [Veuve Clicquot; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22].

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[34] L’Opposante soutient que les mots dans la Marque sont identiques à un nom commercial et que, de toute façon : « Castro » est un nom ou un nom de famille; « Solutions » est un terme anglais ordinaire décrivant les services (et particulièrement les services du Requérant); « Ltd. » est simplement un nom commercial, ce qui signifie que [traduction] « [l]a caractéristique la plus distinctive de la marque du Requérant [est] la marque de l’Opposante, à savoir FALLPRO, un terme inventé et intrinsèquement fort en soi » et [traduction] « mérite une vaste protection » [plaidoyer écrit de l’Opposante, aux p. 10, 11, 23 et 24; affidavit Cox, au para 14].

[35] À mon avis, les marques de commerce en cause possèdent un certain degré de caractère distinctif inhérent, car, bien qu’elles soient toutes deux suggestives dans le contexte des produits et des services de protection contre les chutes qu’elles visent respectivement, je ne suis saisie d’aucune preuve que « fall pro » est un terme courant dans le commerce. Bien qu’individuellement, les éléments supplémentaires de la Marque ne sont pas intrinsèquement distinctifs, ensemble, ils constituent une marque ayant un caractère distinctif inhérent supérieure à celui de la marque de commerce de l’Opposante.

[36] Toutefois, il est possible de renforcer une marque de commerce en la faisant connaître par sa promotion ou son emploi. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, le Requérant n’a présenté aucun élément de preuve indiquant que sa Marque a été employée ou est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Par contre, l’Opposante a produit une preuve d’emploi et de promotion de la marque de commerce FALLPRO dans l’affidavit Cox, qui peut être résumée comme suit :

· L’Opposante, située en Ontario, a été créée en 1989 et se spécialise dans la fabrication et la vente en gros d’équipement de protection individuelle. [para 5 et 7]

· Les produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO de l’Opposante peuvent être achetés en ligne sur degilsafety.com au moyen de commandes téléphoniques, de commandes par télécopieur ou de demandes de commande par courriel [para 20]. M. Cox joint des versions archivées des pages de ce site Web datant de 2001, de 2007, de 2008, de 2012, de 2015 et de 2016, dont certaines contiennent des mentions de la marque de commerce FALLPRO ou montrent des produits de marque FALLPRO. [para 29 à 36, Pièces 10 à 16]

· M. Cox affirme que les voies de commercialisation de l’Opposante pour la gamme de produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO comprennent une distribution en gros, des acheteurs de l’industrie, ainsi que des entreprises de construction qui achètent de l’équipement de protection contre les chutes, des pièces d’équipement de protection contre les chutes et des conseils connexes concernant la protection contre les chutes dans l’industrie. M. Cox affirme également que les produits de l’Opposante sont disponibles à l’achat dans des magasins de détail au Canada, y compris RONA, Inc. et ses détaillants franchisés appartenant à cette entreprise. [para 19]

· M. Cox affirme que l’Opposante a continuellement vendu des produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO au Canada depuis 2001. [para 15, 17, 18 et 38]

· M. Cox explique que, lors de l’achat de produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO, les produits sont présentés dans un emballage en plastique transparent contenant une [traduction] « fiche technique » qui arbore la marque de commerce FALLPRO et que l’acheteur peut voir à travers le plastique transparent. M. Cox joint des copies de diverses [traduction] « fiches techniques » utilisées en 2001, en 2009, en 2013 et en 2017 par l’Opposante, illustrant notamment des harnais, des cordons, des coulisseaux de sécurité et des mousquetons. [para 21 à 25, Pièces 2 à 6]

· M. Cox joint également une image de l’emballage actuel de cordons FALLPRO, qui, selon lui, sont représentatifs de la façon dont les produits de l’Opposante sous cette marque de commerce sont vendus et ont été vendus à des acheteurs au fil des années [para 21, Pièce 2], une copie de l’illustration figurant sur l’emballage en décembre 2005 pour un « Roofer’s Kit » [trousse pour couvreur] de marque FALLPRO [para 27, Pièce 8], des images de l’emballage de cordages de sécurité verticaux de marque FALLPRO en 2016 [para 28, Pièce 9], ainsi qu’un catalogue de commandes pour des produits de marque FALLPRO qui, selon lui, est utilisé depuis 2014. [para 26, Pièce 7]

· M. Cox fournit un graphique décrivant l’emplacement des ventes de l’Opposante de produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO au Canada, en précisant les provinces où ils ont été vendus directement aux acheteurs de 2004 à 2017. Des données sur les ventes ont été recueillies en Ontario et au Québec en 2004, puis dans les dix provinces canadiennes depuis 2013. Les ventes sont documentées dans toutes les provinces canadiennes, sauf à Terre-Neuve-et-Labrador, entre 2005 et 2012. [para 38; plaidoyer écrit de l’Opposante, à la p. 13]

· Les ventes de l’Opposante de produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO au Canada se sont chiffrées à un peu plus de 9,3 millions de dollars de 2004 à 2017. M. Cox joint un échantillon de copies de factures émises de 2007 à 2017 par l’Opposante à des consommateurs canadiens, notamment des produits de protection contre les chutes de marque FALLPRO énumérés dans la liste des articles vendus. Je remarque que certains de ces documents contiennent le terme « Fallpro » dans le texte des factures, tandis que d’autres contiennent un code qui commence par les lettres « FP » qui, selon M. Cox, signifie « Fall Protection » [protection contre les chutes]. M. Cox affirme en outre que la marque de commerce FALLPRO figurait sur l’emballage de ces articles identifiés par le [traduction] « code FP » sur les factures. [para 38 à 40, Pièce 17]

[37] Nonobstant le résumé ci-dessus, je remarque que la preuve de l’Opposante présente certaines lacunes. Par exemple, M. Cox fournit peu de renseignements sur la publicité. Bien que l’Opposante semble avoir assuré une présence en ligne continue au fil des années par l’entremise de son site Web, rien n’indique le nombre de visiteurs canadiens sur le site Web degilsafety.com à un quelconque moment. De plus, il n’y a aucune mention de l’endroit où le catalogue de commandes de l’Opposante a été distribué ou mis à la disposition des consommateurs en 2014 ni de la façon dont il a été distribué ou mis à la disposition des consommateurs. Il n’y a aucune mention d’autres formes de publicité ou de promotion de la marque invoquée de l’Opposante au fil des années ni de dépenses de publicité ou de promotion. Cela m’empêche de conclure que la marque de commerce FALLPRO de l’Opposante est devenue bien connue au Canada.

[38] Cela étant dit, la preuve de l’Opposante montre néanmoins des ventes de produits de marque FALLPRO de plus de 9,3 millions de dollars. Ainsi, je suis convaincue (principalement en raison des renseignements sur les ventes fournis par M. Cox, y compris le fait que la marque de l’Opposante figure sur l’emballage et sur des documents connexes comme des [traduction] « fiches techniques » et des factures) que l’Opposante a démontré que sa marque de commerce FALLPRO a été employée et est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Par conséquent, dans l’ensemble, je conclus que ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[39] Compte tenu de mes commentaires ci-dessus, ce facteur favorise également l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises, et nature du commerce

[40] Pour évaluer le genre de produits et services, et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des services du Requérant avec l’état déclaratif des produits figurant dans l’enregistrement invoqué par l’Opposante [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Toutefois, ces états déclaratifs doivent être interprétés de manière à déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par les parties plutôt que tous les commerces possibles pouvant être visés par le libellé. Une preuve de la nature véritable des commerces des parties est utile à cet égard [McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); American Optional Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[41] Dans cette optique, je conclus qu’il y a chevauchement entre les produits de protection contre les chutes de l’Opposante et ces parties des Services (1) et (3) qui sont décrites comme visant spécifiquement de l’équipement de protection contre les chutes. De plus, même si les Services (2), ainsi que les conseils et l’information, la gestion des affaires, l’aide à la gestion des affaires et la gestion des affaires commerciales du Requérant ne renvoient pas spécifiquement à de l’équipement de protection contre les chutes, en l’absence de preuve contraire du Requérant, je conclus qu’ils pourraient être liés d’une quelconque façon à la protection contre les chutes. En fait, étant donné que la Marque contient les mots « Castro’s Fall-Pro Solutions », elle pourrait présenter (i) le Requérant comme un [traduction] « professionnel des chutes » (c’est-à-dire un professionnel qui dispose de solutions contre les chutes) ou comme ayant des liens, des transactions ou une expertise dans le domaine de la protection contre les chutes, et (ii) tous les services comme étant liés à la protection contre les chutes. En l’absence de preuve ou d’observations concernant les consommateurs ciblés par les services du Requérant ou la nature de son commerce, il n’y a pas non plus de raison de conclure que les produits et services des parties n’emprunteraient pas les mêmes voies de commercialisation et ne viseraient pas le même type de clientèle.

[42] Ainsi, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[43] Il est bien établi en droit que, lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, les marques de commerce doivent être considérées dans leur ensemble. Le critère approprié n’est pas une comparaison côte à côte, mais un souvenir imparfait dans l’esprit d’un consommateur de la marque de commerce d’un opposant [Veuve Clicquot, au para 20]. Il est préférable de commencer l’analyse de la confusion en se demandant si chaque marque de commerce présente un aspect particulièrement frappant ou unique [Masterpiece, au para 64].

[44] Dans cette optique, je conclus qu’il y a au moins une certaine ressemblance entre les marques de commerce en cause, car l’élément dominant de la marque de commerce déposée de l’Opposante fait partie de la Marque. Ainsi, il y a une certaine ressemblance dans la présentation et le son, nonobstant les autres éléments de la Marque. Sur le plan conceptuel, FALLPRO suggère sans doute une protection contre les chutes ou de l’équipement professionnel lié aux chutes, tandis que la Marque suggère sans doute une société canadienne qui est dirigée par une personne nommée Castro et qui offre des solutions professionnelles dans le domaine de la protection contre les chutes. À mon avis, les différences dans la présentation et le son qui existent entre les marques de commerce en raison de la présence d’autres éléments dans la Marque sont quelque peu compensées par l’idée de protection contre les chutes que véhiculent fortement les deux marques dans leur ensemble.

Conclusion sur la probabilité de confusion

[45] Après avoir tenu compte de tout ce qui précède, particulièrement de la mesure dans laquelle la marque de commerce déposée de l’Opposante est devenue connue, du lien étroit entre les produits et les services des parties, et du risque de chevauchement dans leurs voies de commercialisation, je conclus que le Requérant n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée FALLPRO de l’Opposante.

[46] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est accueilli.

Article 16(1)a) – absence de droit à l’enregistrement fondé sur l’emploi d’une marque de commerce

[47] L’Opposant a également allégué que le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement en vertu de l’article 16(1)a) de la Loi, puisque la Marque crée de la confusion avec sa marque de commerce FALLPRO qui a déjà été employée au Canada en liaison avec des produits de protection contre les chutes.

[48] Pour avoir gain de cause à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer que la marque de commerce qu’elle a invoquée était employée au Canada en date du 20 novembre 2008 et n’avait pas été abandonnée en date du 15 mars 2017 [article 16(5) de la Loi]. Conformément à mon résumé ci-dessus, en me fondant sur un examen juste de l’ensemble de la preuve de M. Cox, je suis convaincue que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau. À mon avis, la différence dans les dates pertinentes en l’espèce ne favorise pas suffisamment le Requérant pour faire pencher définitivement la prépondérance des probabilités en sa faveur. Au mieux pour le Requérant, compte tenu de la mesure moindre dans laquelle la marque de commerce invoquée par l’Opposante était connue à la date pertinente, je conclus que la probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce FALLPRO est également partagée entre une conclusion de confusion et une conclusion d’absence de confusion. Étant donné que le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion incombe au Requérant, je dois trancher à l’encontre du Requérant.

[49] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) est également accueilli.

Article 2 – absence de caractère distinctif

[50] Étant donné que j’ai déjà rejeté la demande en vertu de deux motifs, je ne me prononcerai pas sur le dernier motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

[51] Toutefois, je ferai remarquer que, malgré les différences dans la date pertinente, dans la mesure où ce motif concerne la question de la confusion entre les marques des parties, en l’absence de preuve ou d’observations du Requérant, j’aurais probablement tiré la même conclusion que celle énoncée ci-dessus concernant la probabilité de confusion pour des raisons similaires à celles discutées dans l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d), et j’aurais probablement conclu que le Requérant ne s’est pas acquitté de son fardeau à l’égard de ce motif.

Décision

[52] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Iana Alexova

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Anne Laberge


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

LEDGLEY LAW

Pour l’Opposante

FILLMORE RILEY LLP

Pour la Requérante

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.