Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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CIPO

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADEMARKS

Référence : 2020 COMC 131

Date de la décision : 2020-11-30
[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

Rolex SA

Opposante

et

 

PWT A/S

Requérante

 

1,703,725 pour Dessin de Couronne

Demande

Introduction

[1]  Le 20 novembre 2014, PWT A/S (la Requérante) a produit la demande no 1,703,725 (la Demande) pour enregistrer la marque de commerce de Dessin de Couronne, reproduite ci‑dessous (la Marque).

Crown Design

[2]  La Demande est liaison avec les produits et services suivants (les Produits et Services) :

Produits

(1) Savons de toilette, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques et autres produits parfumés, nommément savon parfumé, shampooing parfumé, cosmétiques parfumés, eau de toilette, produits parfumés en vaporisateur, bain moussant, gel douche; produits pour le nettoyage, les soins et l’embellissement de la peau, du cuir chevelu et des cheveux, nommément savon à mains liquide, lotion pour le corps, bain moussant, gel douche, savon à mains, désincrustant pour le corps, beurre pour le corps, baume à lèvres, crème à mains, savon de bain, lotion de bain, produit pour le corps à dissoudre dans le bain, crèmes pour le corps, huiles pour le corps, hydratant à lèvres, shampooing, revitalisant, fixatif, mousse, gel; produits désodorisants à usage personnel, nommément antisudorifiques et déodorants; lunettes; lunettes de soleil; montures de lunettes; verres de lunettes; étuis à lunettes; sacs, étuis et pochettes pour appareils et instruments électroniques, nommément pour ordinateurs, ordinateurs portatifs, ordinateurs tablettes, téléphones, téléphones intelligents, appareils photo et caméras; malles et bagages; sacs à main; sacs de voyage, ensembles de voyage, housses à vêtements de voyage, mallettes de toilette, sacs à dos, sacs de sport, sacs de plage, sacs à provisions, sacs à bandoulière, sacs d’écolier, sacs de voyage en toile, mallettes, boîtes en cuir ou en carton-cuir, mallettes, sacs en cuir pour l’emballage, portefeuilles, sacs à main, étuis porte-clés et anneaux porte-clés en cuir; parapluies, parasols, bâtons de marche, cannes-sièges; vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements de sport, vêtements d’exercice, vêtements imperméables, vêtements de golf, vêtements de ski, vêtements de protection, nommément imperméables, manteaux de fourrure, manteaux, vestes, vestes sans manches, costumes, chemises, jupes, robes, chemisiers, sorties de bain, robes de chambre, cardigans, chandails, tenues habillées pour hommes, gants, tenues d’entraînement, pantalons en similicuir, jupes en similicuir, vestes en similicuir, jerseys, kilts, knickerbockers, pantalons de cuir, jupes en cuir, vestes de cuir, salopettes, pardessus, parkas, pantalons de golf, pochettes pour vêtements, chandails, pyjamas, foulards, châles, étoles, écharpes, shorts, maillots, chandails de sport, chemises sport, complets sur mesure, hauts, pantalons, tee-shirts, pulls d’entraînement, tuniques, gilets de corps, gilets, barboteuses, cravates, ceintures pour vêtements, sous-vêtements, sous-vêtements contre la transpiration, gaines, slips, camisoles, jupons, sous-vêtements absorbant la transpiration, jupons, caleçons, gilets de corps, jupons, corsets, combinés-slips, sous-vêtements longs, chaussettes, maillots, bas, collants, maillots de bain; articles chaussants, nommément chaussures, bottes, pantoufles; couvre-chefs, nommément chapeaux, casquettes, fichus, cache-oreilles, bandeaux.

Services

(1) Vente en gros et au détail dans des magasins et par Internet de produits de beauté et de soins personnels, d’articles de lunetterie, de lunettes de soleil, de lunettes et d’accessoires, d’articles en cuir, de valises, de sacs, d’étuis, de vêtements et d’accessoires vestimentaires.

[3]  La Demande est fondée sur l’emploi proposé de la Marque au Canada et sur l’emploi et l’enregistrement de la Marque au Danemark. La demande revendique la priorité à l’égard d’une demande produite au Danemark le 25 juin 2014.

[4]  La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 23 mars 2016. Le 24 mai 2016, Rolex SA (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Toutes les mentions dans la présente décision visent la Loi dans sa version modifiée, à l’exception des renvois aux motifs d’opposition qui se rapportent à la Loi dans sa version avant sa modification (voir l’article 70 de la Loi qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi, dans sa version antérieure au 17 juin 2019, s’applique aux demandes annoncées avant cette date).

[5]  L’Opposante soulève les motifs d’opposition en fonction de l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), du droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a), du caractère distinctif en vertu de l’article 2, et de la non-conformité en vertu des articles 30a), e) et i) de la Loi. Pour les motifs d’opposition fondés sur un risque de confusion allégué, l’Opposante se fonde sur son emploi et l’enregistrement de la marque de commerce figurative, représentée ci‑dessous, qui font l’objet de l’enregistrement no LMC467,510 (pour en faciliter la référence, j’appellerai cette marque de commerce « DESSIN DE COURONNE Rolex ») :

CROWN DESIGN

[6]  Les produits et services visés par l’enregistrement de l’Opposante sont indiqués à l’Annexe « A » de la présente décision.

[7]  Les deux parties ont produit des preuves et des observations écrites. Une audience a eu lieu au cours de laquelle les deux parties étaient bien représentées.

[8]  Pour les motifs énoncés ci-dessous, la Demande est rejetée en partie.

La preuve

[9]  La preuve produite par les parties est résumée brièvement ci-dessous et est également examinée dans l’analyse des motifs d’opposition.

La preuve de l’Opposante

[10]  L’Opposant a produit l’Affidavit de Gerry O’Hanlon, souscrit le 30 novembre 2016 (l’Affidavit O’Hanlon). Monsieur O’Hanlon n’a pas été contre-interrogé au sujet de son affidavit.

[11]  M. O’Hanlon est le chef de l’exploitation de Rolex Canada Ltd. (« RCL »), une filiale de l’Opposante. L’Opposante conçoit, fabrique et emballe des montres. RCL est le distributeur exclusif des montres de l’Opposante au Canada et contrôle la distribution des montres (et des pièces connexes) aux détaillants tiers autorisés.

[12]  M. O’Hanlon décrit l’histoire de l’Opposante et son emploi de la marque de commerce ROLEX, ainsi que le DESSIN DE COURONNE Rolex. M. O’Hanlon indique que l’Opposante a d’abord adopté un dessin de couronne en liaison avec ses montres en 1931 et a introduit DESSIN DE COURONNE Rolex en 1945. L’Affidavit O’Hanlon fournit une preuve approfondie de l’emploi et de la publicité des marques de commerce ROLEX et DESSIN DE COURONNE Rolex en liaison avec des montres, y compris par la vente, la publicité et le parrainage d’événements culturels et sportifs importants.

[13]  En ce qui a trait au Canada en particulier, M. O’Hanlon affirme que l’Opposante a employé la marque de commerce DESSIN DE COURONNE Rolex au Canada [traduction] « avec un ou plus des produits » indiqués dans l’enregistrement no LMC467,510 depuis au moins aussi tôt que juin 1946. M. O’Hanlon affirme qu’entre 2008 et 2015, en moyenne, RCL a vendu annuellement au Canada plus de 10 millions de dollars en montres de l’Opposante comportant le DESSIN DE COURONNE Rolex.

[14]  De plus, M. O’Hanlon affirme que l’Opposante a également employé le DESSIN DE COURONNE Rolex au Canada depuis au moins aussi tôt que 1990 en liaison avec des [traduction] « livres, magazines, lunettes de soleil, foulards, cravates, sac à cosmétiques, chandails, ceintures et jumelles de théâtre ».

[15]  À cet égard, au paragraphe 50 de l’Affidavit O’Hanlon, M. O’Hanlon décrit une autre filiale de l’Opposante, Rolex Promotions SA (« Rolex Promotions »), qui fabrique un certain nombre de produits autres que les montres en liaison avec le DESSIN DE COURONNE Rolex. L’Opposante contrôle le caractère et la qualité des produits fabriqués par Rolex Promotions. Rolex Promotions vend ces produits autres que des montres à RCL, qui les distribue ensuite aux consommateurs réels ou potentiels au Canada, directement ou par l’entremise d’un de ses détaillants ou plus. Au paragraphe 58 de l’Affidavit O’Hanlon, il déclare : [traduction] « À part les montres, les Produits de l’Opposante sont vendus par Rolex Promotions à RCL ». Les factures pour la vente de ces produits autres que des montres de Rolex Promotions à RCL sont incluses comme Pièce « 24 ».

[16]  M. O’Hanlon inclut également, comme Pièce « 19 », une liste des détaillants de l’Opposante au Canada, ainsi que des images de certaines des vitrines de ces détaillants à la Pièce « 25 ».

La preuve de la Requérante

[17]  La Requérante a produit l’Affidavit de Lars Kristensen, souscrit le 12 avril 2017 (l’Affidavit Kristensen), l’Affidavit de Sylvie Nadaud, souscrit le 11 avril 2017 (l’Affidavit Nadaud) et l’Affidavit de Thomas James, souscrit le 11 avril 2017 (l’Affidavit James). Chacun de ces trois déclarants a été contre-interrogé, et les transcriptions de ces contre-interrogatoires font partie du dossier.

L’Affidavit Kristensen

[18]  M. Kristensen est le directeur des achats de la Requérante. Il décrit sa compréhension de l’histoire de la Marque et de son emploi dans le cadre d’une marque de vêtements appelée Junk de Luxe. En particulier, il décrit que la Marque a été employée pour la première fois au Danemark en 1986 par un individu du nom de Thomas Gundorph Mortensen en liaison avec la vente au détail de vêtements, de chaussures et couvre-chefs. Vers 1991, la marque Junk de Luxe et la Marque ont été transférées à la société danoise Junk Junk, propriété de M. Mortensen. Vers 2012, la marque Junk de Luxe et la Marque ont été transférées à la société danoise Minimum A/S. Le 13 mars 2014, la Requérante a acheté la marque Junk de Luxe et les droits de la Marque auprès de Minimum A/S.

[19]  M. Kristensen indique que la raison pour laquelle la Requérante a acheté la marque Junk de Luxe en 2014 était la réputation dont la marque, y compris la Marque, jouissait au Danemark et dans toute l’Europe en liaison avec des vêtements, des chaussures et des couvre-chefs.

[20]  M. Kristensen affirme que la Requérante a employé la Marque de façon continue au Danemark depuis mars 2014 en liaison avec les Produits et Services. Divers exemples de l’emploi de la Marque par la Requérante au Danemark en liaison avec des vêtements, en plus des chiffres relatifs aux ventes et à la publicité en liaison avec la Marque sont inclus. M. Kristensen indique qu’il n’est au courant d’aucun cas de confusion à l’égard de la Marque et des produits de l’Opposante.

L’Affidavit Nadaud

[21]  Mme Nadaud est analyste de la recherche en marques de commerce chez CompuMark, une firme de recherche en propriété intellectuelle. Son affidavit comprend les résultats d’une recherche dans le Registre canadien des marques de commerce pour les marques de commerce ayant un [traduction] « dessin d’une couronne » en liaison avec les produits et services énoncés à l’Annexe A de son affidavit.

L’Affidavit James

[22]  M. James est analyste de la recherche en marques de commerce chez CompuMark. Son affidavit contient les résultats d’une recherche sur Internet d’images de couronnes en liaison avec certains produits indiqués à l’Annexe A de son affidavit. Je note que je n’ai pas trouvé l’Affidavit James utile comme preuve de l’état du marché au Canada, puisqu’il n’est pas clair dans quelle mesure, s’il y a lieu, les produits identifiés étaient disponibles pour la vente au Canada. Je ne discuterai pas de cet affidavit davantage.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[23]  C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime d’établir, suivant la prépondérance des probabilités, que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Cela signifie que si une conclusion déterminante ne peut être tirée en faveur de la Requérante après examen de tous les éléments de preuve, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter de son fardeau de preuve initial d’établir suffisamment de preuves admissibles à partir desquelles on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p. 298].

[24]  Les dates pertinentes relatives aux motifs d’opposition sont les suivantes :

·  articles 38(2)a) et 30 de la Loi – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la p. 475];

·  articles 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et Le registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

·  articles 38(2)c) et 16(2)a) et 16(3)a) de la Loi – la date de dépôt prioritaire de la demande [Earthrise Farms c Saretzky (1997), 85 CPR (3d) 368 (COMC); Fisons Pharmaceuticals Ltd c Sales Affiliates Inc (1973), 10 CPR (2d) 123 (COMC)];

·  articles 38(2)d) et 2 de la Loi – la date de production de l’opposition [Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Motifs d’opposition rejetés sommairement

Non-conformité à l’article 30a) de la Loi :

[25]  L’Opposante fait valoir que l’état déclaratif des produits et services dans la Demande n’est pas dressé dans les termes ordinaires du commerce. Je n’ai aucune preuve de dossier ou d’observations de la part de l’Opposante relativement à cette question. Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30a) est rejeté.

Non-conformité avec l’article 30e) de la Loi

[26]  L’Opposante soutient que la Demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi parce que la Requérante n’avait pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits et Services. Il n’y a pas de preuve au dossier pour soutenir ce motif d’opposition. J’estime que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial et le motif d’opposition de l’article 30e) est rejeté.

motifs d’opposition fondés sur la confusion alléguée

Questions préliminaires

Emploi par l’Opposante de son DESSIN DE COURONNE Rolex comme marque de commerce

[27]  La Requérante soutient que l’affichage par l’Opposante du DESSIN DE COURONNE Rolex ne constitue pas l’emploi de ce dessin en tant que marque de commerce distincte en soi, parce que le dessin est toujours affiché en lien étroit avec la marque de commerce ROLEX. La Requérante soutient que tout emploi et toute réputation qui peuvent être attribués au DESSIN DE COURONNE Rolex ne font que partie d’une marque de commerce composite qui comprend le mot ROLEX.

[28]  Je ne suis pas d’accord avec la Requérante sur ce point. Bien que la preuve de l’Opposante indique que le DESSIN DE COURONNE Rolex est habituellement représenté directement au-dessus ou à côté de la marque de commerce ROLEX, il est bien établi que deux marques de commerce peuvent être employées ensemble sur le même produit [AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst)]. De plus, la preuve de l’Opposante comprend de multiples exemples de présentation du DESSIN DE COURONNE Rolex distinct du mot marque de commerce ROLEX [voir les Pièces « 17 » et « 20 » où le DESSIN DE COURONNE Rolex est représenté sur le bracelet et le bouton de diverses montres]. À mon avis, un consommateur typique considérerait le DESSIN DE COURONNE Rolex comme une marque de commerce distincte en soi.

Affichage par l’Opposante du DESSIN DE COURONNE Rolex sur les produits autres que des montres

[29]  L’Opposante a démontré dans cette affaire que sa marque de commerce DESSIN DE COURONNE Rolex a été largement employée au Canada en liaison avec des montres et est probablement très bien connue en liaison avec des montres. Toutefois, compte tenu de la preuve produite dans le cadre de la présente instance, l’Opposante n’a pas démontré le même emploi et la même réputation en liaison avec d’autres produits.

[30]  Au paragraphe 62 de l’Affidavit O’Hanlon, l’Opposante fournit une liste des produits autres que des montres sur lesquels le DESSIN DE COURONNE Rolex est représenté, y compris les épingles, les porte-clés en cuir, les attaches, les parapluies, les blocs-notes, les chapeaux, les sacs et les chemises, ainsi que les données relatives aux [traduction] « unités vendues » pour ces produits. Certains exemples de ces produits sont inclus dans les Pièces « 20 » et « 23 » de l’Affidavit O’Hanlon. Toutefois, lorsque l’Affidavit O’Hanlon fait référence à la vente de ces articles autres que des montres présentant la marque de commerce de l’Opposante et fournit des preuves de cette vente, ces ventes sont de Rolex Promotions à RCL (c.-à-d. d’une filiale de l’Opposante à une autre). Il n’est pas fait mention de la vente de ces produits autres que des montres aux consommateurs finaux ou aux détaillants tiers autorisés au Canada. Plutôt, comme il est énoncé au paragraphe 50 de l’Affidavit O’Hanlon, [traduction] « RCL distribue ensuite ces produits à ses consommateurs réels ou potentiels au Canada directement ou par l’entremise d’un ou plus de ses détaillants » [soulignement ajouté].

[31]  À mon avis, il ressort de l’Affidavit O’Hanlon que les produits autres que des montres portant le DESSIN DE COURONNE Rolex sont des articles promotionnels distribués (il semblerait qu’ils soient gratuits pour le détaillant ou le consommateur final) afin de stimuler la vente des montres de l’Opposante. En particulier, il n’y a aucune preuve de vente ou de prix des produits autres que des montres aux consommateurs finaux ou aux détaillants tiers. À mon avis, la vente de produits autres que des montres entre les deux filiales liées de l’Opposante (Rolex Promotions et RCL) ne constitue pas l’emploi d’une marque de commerce dans la pratique normale du commerce aux fins de l’article 4(1) de la Loi [voir JC Penney Co c Gaberdine Clothing Co (2001), 16 CPR (4th) 151 (CF), à la p. 144, qui laisse entendre que les ventes à des sociétés liées ne constituent pas l’emploi d’une marque de commerce dans la pratique normale du commerce]. De plus, il est bien établi que la distribution gratuite d’un produit promotionnel présentant une marque de commerce pour promouvoir la vente d’un produit différent ne constitue pas un emploi d’une marque de commerce en liaison avec le produit promotionnel [voir Distrimedic Inc c Dispill Inc, 2013 CF 1043, 119 CPR (4th) 1 (CF), aux para 302 et 303; Aird & Berlis LLP c Levi Strauss & Co (2005), 45 CPR (4th) 397 (COMC)].

[32]  Par conséquent, l’Opposante n’a pas démontré l’emploi de sa marque de commerce DESSIN DE COURONNE Rolex en liaison avec des produits autres que des montres aux fins de l’article 4(1) de la Loi. Toutefois, si je me trompe sur ce point, et que la présentation de l’Opposante du DESSIN DE COURONNE Rolex sur les produits autres que des montres constitue effectivement un emploi aux fins de l’article 4(1), alors la preuve de l’Opposante suggère que l’étendue de cet emploi était minime, selon les chiffres unitaires fournis au paragraphe 62 de l’Affidavit O’Hanlon. À mon avis, la preuve de l’Opposante n’est pas suffisante pour démontrer une réputation importante dans le DESSIN DE COURONNE Rolex au Canada en liaison avec des produits autres que des montres. Par exemple, le tableau au paragraphe 62 indique que Rolex Promotions a vendu 2 580 chemises à RCL arborant le DESSIN DE COURONNE Rolex pendant une période de huit ans entre 2008 et 2015 (soit environ 322 chemises par année).

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)

[33]  L’Opposante plaide que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce déposée de l’Opposante, DESSIN DE COURONNE (LMC467,510). J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que cet enregistrement existe toujours [voir Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)].

Test en matière de confusion

[34]  Le test permettant de trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, où il est précisé que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice. En faisant une telle évaluation, je dois tenir compte de toutes les circonstances environnantes pertinentes, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles ont été connues, la durée d’emploi des marques de commerce, la nature des produits et services ou des affaires, la nature du commerce et le degré de ressemblance entre les marques de commerce en apparence, en son ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[35]  Ces critères ne sont pas exhaustifs et un poids différent sera accordé à chacun dans le cadre d’une évaluation contextuelle [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401; Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772 (CSC), au para 54]. Je m’appuie également sur l’affirmation de la Cour suprême du Canada dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 (CSC) au para 49, selon laquelle le critère énoncé à l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[36]  Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, précité, au para 20].

Degré de ressemblance

[37]  Le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties est élevé. Les deux sont constituées d’un dessin de couronne avec cinq pointes, chaque pointe ayant un cercle au bout. Bien qu’il y ait des différences entre les marques de commerce en ce qui a trait à l’angle entre les pointes, la taille relative des cercles et la présence d’une bande supplémentaire à la base de la marque de commerce de l’Opposante, je ne considère pas que ces différences soient importantes comme une première impression pour un consommateur typique qui a un vague souvenir de la marque de commerce de l’Opposante. Ce facteur favorise l’Opposante.

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[38]  Les marques de commerce des deux parties sont des marques figuratives, dépourvues de tout mot, et ne décrivent en aucune façon les produits et les services. Par conséquent, les deux marques de commerce possèdent au moins un minimum de caractère distinctif inhérent. Toutefois, je considère que les marques de commerce des deux parties sont à l’extrémité inférieure du spectre du caractère distinctif inhérent. En particulier, il ressort de la preuve que les simples dessins de couronne sont couramment inclus dans les marques de commerce dans divers domaines, vraisemblablement comme une suggestion de prestige ou d’excellence. Cette question est examinée plus en détail ci-dessous en ce qui a trait à l’état de la preuve du registre.

[39]  En ce qui a trait à la mesure dans laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, l’Opposante a démontré un emploi et une publicité exhaustifs de sa marque de commerce au Canada en liaison avec des montres, et je suis convaincu que la marque de commerce de l’Opposante est connue dans une large mesure au Canada en liaison avec des montres. La Requérante n’a pas démontré de preuve que sa Marque a été employée ou est devenue connue dans une certaine mesure au Canada.

[40]  Par conséquent, en tenant compte à la fois du caractère distinctif inhérent des marques de commerce des parties et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, dans l’ensemble, ce facteur favorise l’Opposante.

Durée d’emploi des marques de commerce

[41]  La preuve de l’Opposante démontre l’emploi de sa marque de commerce au Canada depuis au moins aussi tôt que 1946. En revanche, la Demande de la Requérante est en partie fondée sur l’emploi projeté de la marque au Canada et rien n’indique que l’emploi de la Marque au Canada a commencé. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre de produits, services ou entreprises; et nature du commerce

[42]  À mon avis, l’analyse de la confusion dans la présente affaire repose en grande partie sur la mesure dans laquelle la nature des produits, des services et celle des voies de commerce probables des parties se chevauchent. En particulier, compte tenu des autres facteurs qui pèsent en faveur de l’Opposante, la Requérante a-t-elle démontré que ses produits et services et la nature de ses échanges commerciaux sont suffisamment différents de ceux de l’Opposante pour éviter une probabilité de confusion?

[43]  La liste des produits et services dans l’enregistrement de l’Opposante et que la Demande de la Requérante qui régit l’analyse [voir Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); et Miss Universe Inc c Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)]. Ce principe est important en l’espèce. Tel qu’il est indiqué plus haut, l’Opposante a démontré un emploi exhaustif de sa marque de commerce au Canada en liaison avec des montres. À mon avis, l’Opposante n’a pas démontré l’emploi de sa marque de commerce au Canada en liaison avec les produits et services connexes autres que des montres indiqués dans l’enregistrement LMC467,510. Toutefois, l’Opposante a néanmoins un enregistrement valide qui couvre tous les produits et services de cet enregistrement, et c’est cet ensemble complet de produits et services que je dois prendre en considération pour l’application de l’article 12(1)d) du motif d’opposition.

[44]  Compte tenu de ce qui précède, j’ai établi à l’Annexe « B » de la présente décision les produits et services de la Demande qui, à mon avis, chevauchent les produits et services de l’enregistrement de l’Opposant LMC467,510. Par exemple, l’enregistrement de l’Opposante comprend les produits [traduction] « parfums et parfums en bouteille », que je considère comme chevauchants, dans une mesure raisonnable, les divers produits de toilette et les préparations de soins personnels dans la Demande de la Requérante, comme « Savons de toilette, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques et autres produits parfumés, nommément savon parfumé, shampooing parfumé […] ». À titre d’exemple, l’enregistrement de l’Opposante comprend les produits « mallettes », que je considère comme chevauchant les divers sacs et articles de voyage indiqués dans la Demande de la Requérante, comme les « malles et bagages; sacs à main; sacs de voyage, ensembles de voyage, housses à vêtements de voyage, mallettes de toilette, sacs à dos, sacs de sport, sacs de plage, sacs à provisions, sacs à bandoulière, sacs d’écolier, sacs de voyage en toile, mallettes, boîtes en cuir ou en carton-cuir, mallettes […] ». J’ai également inclus à l’Annexe « B » les services « Vente en gros et au détail dans des magasins et par Internet […] d’accessoires vestimentaires », puisqu’à mon avis, cette description pourrait être suffisamment large pour englober la vente de certains des produits figurant dans l’enregistrement de l’Opposante, comme les bijoux, les bracelets et les portefeuilles.

[45]  À l’Annexe « C » de la présente décision, j’ai exposé les produits et services de la Demande qui, à mon avis, ne chevauchent pas les produits et services de l’enregistrement de l’Opposante LMC467,510. En particulier, les produits et services à l’Annexe « C » sont limités aux vêtements, aux articles chaussants et aux couvre-chefs et à la vente de ceux-ci. L’enregistrement de l’Opposante n’inclut pas de tels éléments, et je ne suis pas convaincu que les produits indiqués dans l’enregistrement de l’Opposante chevauchent, dans une mesure significative, les produits et les services de la Demande que j’ai indiqués à l’Annexe « C ».

[46]  De même, je m’attends à ce que les voies de commercialisation des produits et services indiqués à l’Annexe « C » soient probables de différer de ceux de l’Opposante. Par exemple, même si la description des produits et services figurant dans l’enregistrement de l’Opposante n’est pas limitée à ses voies de commercialisation, je note que bon nombre des produits indiqués dans l’enregistrement de l’Opposante, y compris les montres et les pièces de montre, les bijoux, nommément des bagues, et des bracelets, sont des articles qui seraient habituellement vendus dans une bijouterie, ou peut-être la section la des bijoux d’un grand magasin. La preuve de l’Opposante quant à l’emploi de sa marque de commerce est conforme à cette interprétation. Par exemple, au paragraphe 46 de l’Affidavit O’Hanlon, M. O’Hanlon affirme [traduction] « en raison de leur fin travail, de leurs ornementations et de décorations, de nombreuses montres de l’Opposante sont également considérées comme des bijoux fins. » De plus, les Pièces « 19 » et « 25 » de l’Affidavit O’Hanlon indiquent que la grande majorité (sinon la totalité) des détaillants autorisés de l’Opposante au Canada sont des bijouteries. Je ne m’attends pas à ce que des vêtements, des articles chaussants et des couvre-chefs soient vendus dans de tels magasins ou dans les mêmes sections d’un grand magasin qui vendait à la fois des vêtements et des bijoux. Cela réduit davantage la probabilité de confusion, du moins en ce qui a trait à ces éléments que j’ai indiqués à l’Annexe « C ».

 

Autres circonstances de l’espèce

État du registre

[47]  La preuve au sujet de l’état du registre est pertinente dans la mesure où elles permettent de faire des déductions valables au sujet de la situation du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Del Monte Corporation c Welch Foods Inc (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF)]. Les déductions concernant l’état du marché ne peuvent être tirées de ces éléments de preuve seulement si un grand nombre d’enregistrements pertinents sont trouvés [Kellogg Salada Canada Inc c Maximum Nutrition Ltd (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF); McDowell c Laverana GmbH & Co KG, 2017 CF 327, aux para 41 à 46]. Parmi les marques de commerce pertinentes, on compte celles qui (i) sont déposées ou autorisées et basées sur l’emploi; (ii) celles qui concernent des produits et services similaires à ceux des marques en cause et (iii) celles qui incluent l’élément en tant qu’élément important [Sobeys West Inc c Schwan’s IP, LLC, 2015 COMC 197; Allergan Inc c Lancôme Parfums & Beauté & Cie, société en nom collectif (2007), 64 CPR (4th) 147 (COMC), à la p. 169].

[48]  En l’espèce, au moyen de l’affidavit Nadaud, la Requérante a identifié plus de cent enregistrements de marque de commerce de tiers, couvrant une variété de produits et de services, qui comprennent un simple dessin de couronne dans le cadre de la marque de commerce. À titre d’exemple, j’ai inclus dans le tableau ci-dessous une petite sélection de ces marques de commerce de tiers.

No d’enr.

Marque de commerce

Propriétaire

Produits ou services

LMC765920

 

TRIUMPH & DESIGN

Triumph Intertrade AG

Produits

(1) Vêtements, nommément robes, chemisiers, jupes, vestes, gilets, chandails, chapeaux, gants, pardessus, peignoirs, pantalons, robes de nuit […] cosmétiques, nommément rouge à lèvres, hydratants pour la peau, mascara, ombre à paupières, traceur pour les yeux, poudre et fond de teint pour la peau; savons hydratants pour les mains et le visage; produits de soins personnels pour femmes, nommément parfumerie et huiles essentielles, nommément huiles pour la peau et huiles de bain.

 

Services

(1) Services de vente au détail de vêtements.

LMC467855

 

CROWN DESIGN

William E. Coutts Company, Limited

Produits

[traduction] (1) Cartes de voeux, notes personnalisées, papier à lettres décoré, carnets de commande, enveloppes, sacs fourre-tout et boîtes, papier d’emballage pour cadeaux, garnitures pour cadeaux […] crayons et stylos, bourses, mobiles, chapeaux, épingles de revers, poupées, décorations à découper, emporte-pièce, livres à colorier, couverts, bougies, couronnes de chandelle, chandeliers, chandeliers muraux, livres, albums, calendriers pour portefeuilles, calendriers, cartes à jouer, blocs et cartes de pointage, jeux de cartes, agendas et cartes de voeux avec cadeaux combinés à la carte de voeux […] agendas, calendriers de poche et de portefeuille, articles de papeterie en boîte, papier à en-tête, boîtes-cadeaux, contenants à cadeaux, sacs-cadeaux, sacs à bouteille, sacs de surprises […]

 

Services

[traduction] (1) Exploitation de boutique pour la vente au détail de cartes et de cadeaux.

LMC799259

 

A.Y. CROWN design

 

Shanghai A.Y. Crown Sports Goods Co., Ltd.

 

 

Lunettes; flotteurs de natation; claviers d’ordinateur; chronomètres […] coffrets à bijoux; argent; bracelets; chaînes de cou; bijoux; pierres précieuses; oeuvres d’art encadrées; horloges; montres-bracelets. Porte-monnaie; sacs d’école; sacs à dos; portefeuilles; sacs à main; malles; mallettes; étuis porte-clés; valises […] vêtements de sport; vêtements de travail; vêtements pour bébés; vêtements tout-aller; chaussures; chapeaux; bonneterie; gants; foulards; ceintures; cravates; robes de mariée; maillots de bain; combinaisons isothermes; costumes de mascarade; vêtements pour enfants; gaines à usage sportif […]

LMC127469

NINA & DESIGN

Nina Footwear Corp.

[traduction] Chaussures pour dames.

LMC129482

 

CROWN DESIGN

 

The Procter & Gamble Company

[traduction] (1) Une préparation tinctoriale, de teinture et de coloration pour les cheveux.

LMC757095

GLEM (& DESIGN)

Glem Gas

S.P.A.

(1) Lave-vaisselle; laveuses; machines électromécaniques pour préparer des boissons, nommément centrifugeuses; mélangeurs électriques pour la maison […]

LMC840924

The Royal Brand & DESIGN

J. Dhimy Egalite

(1) Rasoirs, lames de rasoir […]

(2) Cosmétiques, nommément sacs à cosmétiques, étuis à cosmétiques, huiles de bain, déodorants, vernis à ongles, produits pour le corps en vaporisateur, parfumerie, parfums en bouteille […]

Crèmes solaires.

[49]  Il y a des faiblesses dans l’état de la preuve de la Requérante au registre. Premièrement, la plupart des marques de commerce de tiers identifiées dans l’Affidavit Nadaud comprennent, en plus d’un dessin de couronne, d’autres mots ou éléments figuratifs qui réduisent le degré de ressemblance avec la marque de commerce déposée de l’Opposante. Il n’y a pas de mots ou d’éléments figuratifs supplémentaires dans la Marque de la Requérante. Deuxièmement, bon nombre des enregistrements de tiers identifiés par la Requérante portent sur des produits et des services qui ne sont pas directement liés aux produits et services en cause en l’espèce. Par conséquent, je ne considère pas que l’état du registre soit suffisant pour suggérer que les consommateurs sont habitués à faire la distinction entre les marques de commerce dans le même domaine en se fondant uniquement sur de petites différences dans les dessins de couronne.

[50]  Toutefois, à mon avis, l’état de la preuve au registre en l’espèce est toujours instructif dans une certaine mesure. Plus précisément, je suis convaincu, d’après l’état du registre, que les dessins de couronne sont couramment incorporés dans des marques de commerce dans divers domaines au Canada. Bien qu’il soit possible d’analyser l’état de la preuve au registre d’une manière qui minimise la mesure dans laquelle elle favorise la Requérante, à mon avis, il n’est pas possible d’échapper à la conclusion que les dessins de couronne sont assez courants. Cela réduit la mesure dans laquelle je peux considérer la marque de commerce de l’Opposante comme intrinsèquement distinctive, ce qui favorise la Requérante. Bien sûr, comme nous l’avons vu plus haut, la marque de commerce DESSIN DE COURONNE Rolex de l’Opposante a acquis un caractère distinctif par son emploi et sa publicité étendues depuis de nombreuses années, mais ce caractère distinctif a été acquis à l’égard des produits sur lesquels la marque de commerce a effectivement été employée (c.-à-d. des montres) et n’est pas fondée sur un caractère unique inhérent de la marque elle-même.

Emploi simultané des marques de commerce dans une autre administration

[51]  La Requérante soutient que l’emploi simultané des marques de commerce des parties au Danemark sans qu’il y ait de confusion réelle est une circonstance qui l’entoure et qui pèse en sa faveur. Bien qu’il ressorte de la preuve de l’Opposante que l’Opposante vend ses produits à l’échelle internationale, je n’ai aucune preuve concernant l’emploi de la marque de commerce de l’Opposante au Danemark, et je n’ai donc pas de preuve suffisante pour évaluer la portée de toute coexistence des marques de commerce dans ce pays. Par conséquent, à mon avis, ce facteur n’aide pas la Requérante.

Conclusion concernant le motif d’opposition en vertu de l’article 12(1)d)

[52]  Après avoir examiné toutes les autres circonstances de l’espèce, la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties en ce qui a trait aux produits et services indiqués à l’Annexe « B » de la présente décision. À mon avis, compte tenu de tous les facteurs pertinents, les produits et services de l’Annexe « B » chevauchent trop étroitement ceux dans l’enregistrement no LMC467,510 de l’Opposante.

[53]  Toutefois, la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties pour les produits et les services indiqués à l’Annexe « C » de la présente décision. En particulier, je suis convaincu que les produits et services de la Requérante énoncés à l’Annexe « C » sont suffisamment différents de ceux de l’enregistrement de l’Opposante que la confusion est peu probable.

[54]  Par conséquent, le motif d’opposition en vertu de l’article 12(1)d) réussis à l’égard des produits et services énoncés à l’Annexe « B » de la présente décision, mais échoue à l’égard des produits et services indiqués à l’Annexe « C ».

Motifs d’opposition en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a)

[55]  La date pertinente pour les motifs d’opposition d’absence de droit à l’enregistrement est la date de dépôt prioritaire de la Demande, soit, le 25 juin 2014. Toutefois, cette date pertinente antérieure n’a aucune incidence sur le résultat de l’analyse de la confusion. À mon avis, l’analyse de la confusion pour les motifs d’absence de droit à l’enregistrement est la même que pour le motif d’opposition en vertu de l’article 12(1)d), à une exception importante. En ce qui a trait aux motifs d’opposition en vertu des articles 16(2)a) et 16(3)a), l’Opposante ne peut se fonder que sur l’emploi de sa marque de commerce, comme le démontre sa preuve, plutôt que sur l’ensemble des produits et services visés par l’enregistrement LMC467,510. Cela a une incidence sur les considérations prévues aux articles 6(5)c) et d), à savoir, la nature des produits, des services et du commerce des parties.

[56]  Tel qu’il est indiqué plus haut, l’Opposante a démontré un emploi et une réputation exhaustifs de sa marque de commerce en liaison avec des montres au Canada, et qu’elle n’a pas abandonné sa marque de commerce. Cela suffit à alléger le fardeau de preuve initial de l’Opposante en vertu des motifs d’opposition prévus aux articles 16(2)a) et 16(3)a). Toutefois, l’Opposante n’a pas démontré l’emploi ou une réputation importante au Canada en liaison avec les produits et services connexes autres que des montres. Dans ce contexte, à mon avis, la nature des Produits et des Services dans la Demande de la Requérante et leurs voies commercialisation probable sont suffisamment différentes des montres de l’Opposante portant le DESSIN DE COURONNE Rolex que la confusion est peu probable.

[57]  Par conséquent, les motifs d’opposition prévus aux articles 16(2)a) et 16(3)a) sont rejetés dans leur intégralité en ce qui a trait à l’ensemble des produits et services de la Demande.

Motif d’opposition en vertu de l’article 2

[58]  La date pertinente pour le motif d’opposition en vertu de l’article 2 est la date de production de la déclaration d’opposition, à savoir, le 24 mai 2016. À mon avis, l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’article 2 est identique à celle des motifs d’opposition fondés sur les articles 16(2) et 16(3). Autrement dit, l’Opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve initial en vertu de l’article 2 en démontrant un usage et une réputation importants dans sa marque de commerce au Canada en liaison avec des montres. Toutefois, compte tenu des différences entre les produits et services de la Requérante et les voies de commercialisation probables, comparativement à celles de l’Opposante, la Requérante m’a convaincue qu’il n’y a pas de probabilité de confusion raisonnable.

[59]  Par conséquent, le motif d’opposition en vertu de l’article 2 est rejeté dans son intégralité.

Motif d’opposition en vertu de l’article 30i)

[60]  Dans sa déclaration d’opposition, l’Opposante plaide que la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits et Services, puisque la Requérante était au courant de la marque de commerce de l’Opposante et, contrairement à l’article 22 de la Loi, l’emploi de la Marque par la Requérante déprécierait la valeur de l’achalandage que l’Opposante a développé dans sa marque de commerce. Les observations de l’Opposante par rapport à ce motif se trouvent aux paragraphes 124 à 127 de son plaidoyer écrit, où l’Opposante soutient que la production de la Demande par la Requérante ayant connaissance de la marque de commerce de l’Opposante équivaut à de la mauvaise foi.

[61]  L’article 30i) de la Loi exige qu’une requérante ajoute une déclaration dans la demande selon laquelle la requérante est convaincue qu’elle a le droit d’employer la marque de commerce au Canada. D’après la jurisprudence, lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée, on ne peut conclure à la non-conformité à l’article 30i) de la Loi qu’en présence de circonstances exceptionnelles qui rendent la déclaration du requérant invraisemblable, comme une preuve de mauvaise foi ou si l’opposant a démontré une preuve contraire que l’emploi de la marque enfreindrait une loi fédérale [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p. 155; et Pablo Enterprise pte Ltd c Hai Lun Tang, 2019 COMC 54, au para 17]. Le simple fait que la Requérante ait pu connaître l’existence de la marque de commerce de l’Opposante ne suffit pas pour établir un motif d’opposition en vertu de l’article 30i) [voir Woot Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197]. En l’espèce, la Demande contient la déclaration requise et, à mon avis, il n’y a aucune preuve qu’il s’agit d’un cas impliquant une mauvaise foi.

[62]  En ce qui a trait au motif d’opposition fondé sur l’article 30i) et avec l’article 22 de la Loi, je note que dans Veuve Clicquot, précitée au para 46, la Cour suprême du Canada a déterminé les quatre éléments suivants requis pour démontrer une dépréciation de l’achalandage en vertu de l’article 22 : (1) l’emploi de la marque de commerce, (2) l’achalandage suffisant de la marque de commerce, (3) le lien probable dans l’esprit du consommateur et (4) la probabilité de dépréciation. En l’espèce, je n’ai aucune observation de la part de l’une ou l’autre des parties concernant ces quatre éléments. Quoi qu’il en soit, je ne suis pas convaincu que la preuve démontre à première vue qu’il y a eu violation de l’article 22 de la Loi suffisante pour alléger le fardeau de preuve initial de l’Opposante pour le motif d’opposition prévu à l’article 30i). En particulier, je ne suis pas convaincu qu’il y aura vraisemblablement un lien mental dans l’esprit d’un consommateur typique entre la Marque de la Requérante et la marque de commerce de l’Opposante, compte tenu de la différence dans les produits et services des parties, en tenant compte que la bonne volonté et la réputation dans la marque de commerce de l’Opposante concernent des montres.

[63]  Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté.

Décision

[64]  À la lumière de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la Demande d’enregistrement en ce qui a trait aux produits et services indiqués à l’Annexe « B » de la récente décision, et je rejette l’opposition en ce qui a trait aux produits et services indiqués à l’Annexe « C », en vertu de l’article 38(12) de la Loi. Par conséquent, la Demande peut procéder en liaison avec les produits et services énoncés à l’Annexe « C » de la présente décision.

 

 

Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-France Denis


Annexe « A »

Enregistrement invoqué par l’Opposante

Marque de commerce

Numéro d’enregistrement

Produits ou services

CROWN DESIGN

LMC467,510

Produits

[traduction] (1) Instruments d’horlogerie et de chronométrage et pièces et accessoires connexes, nommément montres, horloges, chronomètres, cadrans, remontoirs, mouvements d’horloges et de montres, et pièces connexes; boîtiers de montre, boucles, bracelets de montre et montres-bracelets, réveils; métaux précieux et leurs alliages, et articles en métaux précieux, nommément boîtiers pour montres, horloges, horlogerie et joyaux; pierres précieuses; appareils et instruments électriques et électroniques pour la lecture et la détermination du temps; appareils pour la vérification du fonctionnement et de la résistance aux vibrations et aux chocs des horloges, montres et mouvements d’horloge; appareils pour la vérification de l’étanchéité des montres et des boîtiers de montre; appareils pour l’enregistrement et la lecture du temps et pièces connexes; montres de plongée sous-marine; loupes et oculaires, tous à l’usage des horlogers; calculatrices électriques se portant au poignet et de poche; résistances, condensateurs, circuits imprimés, circuits intégrés, diviseurs de fréquence, minuterie et résonateurs, tous électriques; transducteurs électromécaniques; générateurs électriques d’impulsions d’horloge (ne faisant pas partie des montres ou des horloges); montres pour le calcul, piles.

(2) (2)  Bijoux, nommément bagues

(3) Bracelets.

(4) Articles en cuir, nommément portefeuilles

(5) Agendas, blocs-notes, blocs-notes de conférence, porte-bloc-notes de conférence, carnets de téléphone, mallettes, étuis à lunettes, étuis à stylo en cuir, tours de poignet en cuir, porte-certificats, porte-chèques, porte-cartes de crédit, porte-blocs-notes, porte-billets, porte-documents, porte-clés; parfums et flacons à parfum; stylos et stylos avec base; crayons; mouchoirs de poche; pinces à billets; tissus selvyt; loupes de bureau; recharges pour blocs-notes, blocs-notes de conférence et carnets de téléphone; coupe-papier; épingles de cravate, dessous de verre; tés de golf en bois; tapis d’exposition; coussins; tee-shirts; casquettes; balles de golf; pochettes d’allumettes; cendriers; étiquettes de valise; chocolats et calendriers.

(6) Canifs.

 

Services

[traduction] (1) Réparation et entretien de montres, d’instruments d’horlogerie, d’instruments de chronométrage, d’appareils électriques et électroniques et de leurs pièces connexes.

(2) Chronométrage d’activités sportives, fourniture de machines et d’appareils pour mesurer le temps.


Annexe « B »

 

Produits

[traduction] (1) Savons de toilette, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques et autres produits parfumés, nommément savon parfumé, shampooing parfumé, cosmétiques parfumés, eau de toilette, produits parfumés en vaporisateur, bain moussant, gel douche; produits pour le nettoyage, les soins et l’embellissement de la peau, du cuir chevelu et des cheveux, nommément savon à mains liquide, lotion pour le corps, bain moussant, gel douche, savon à mains, désincrustant pour le corps, beurre pour le corps, baume à lèvres, crème à mains, savon de bain, lotion de bain, produit pour le corps à dissoudre dans le bain, crèmes pour le corps, huiles pour le corps, hydratant à lèvres, shampooing, revitalisant, fixatif, mousse, gel; produits désodorisants à usage personnel, nommément antisudorifiques et déodorants; lunettes; lunettes de soleil; montures de lunettes; verres de lunettes; étuis à lunettes; sacs, étuis et pochettes pour appareils et instruments électroniques, nommément pour ordinateurs, ordinateurs portatifs, ordinateurs tablettes, téléphones, téléphones intelligents, appareils photo et caméras; malles et bagages; sacs à main; sacs de voyage, ensembles de voyage, housses à vêtements de voyage, mallettes de toilette, sacs à dos, sacs de sport, sacs de plage, sacs à provisions, sacs à bandoulière, sacs d’écolier, sacs de voyage en toile, mallettes, boîtes en cuir ou en carton-cuir, mallettes, sacs en cuir pour l’emballage, portefeuilles, sacs à main, étuis porte-clés et anneaux porte-clés en cuir; parapluies, parasols, bâtons de marche, cannes-sièges;

 

Services

[traduction] Vente en gros et au détail dans des magasins et par Internet de produits de beauté et de soins personnels, d’articles de lunetterie, de lunettes de soleil, de lunettes et d’accessoires, d’articles en cuir, de valises, de sacs, d’étuis et d’accessoires vestimentaires.

 


 

Annexe « C »

 

Produits

[traduction] Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements de sport, vêtements d’exercice, vêtements imperméables, vêtements de golf, vêtements de ski, vêtements de protection, nommément imperméables, manteaux de fourrure, manteaux, vestes, vestes sans manches, costumes, chemises, jupes, robes, chemisiers, sorties de bain, robes de chambre, cardigans, chandails, tenues habillées pour hommes, gants, tenues d’entraînement, pantalons en similicuir, jupes en similicuir, vestes en similicuir, jerseys, kilts, knickerbockers, pantalons de cuir, jupes en cuir, vestes de cuir, salopettes, pardessus, parkas, pantalons de golf, pochettes pour vêtements, chandails, pyjamas, foulards, châles, étoles, écharpes, shorts, maillots, chandails de sport, chemises sport, complets sur mesure, hauts, pantalons, tee-shirts, pulls d’entraînement, tuniques, gilets de corps, gilets, barboteuses, cravates, ceintures pour vêtements, sous-vêtements, sous-vêtements contre la transpiration, gaines, slips, camisoles, jupons, sous-vêtements absorbant la transpiration, jupons, caleçons, gilets de corps, jupons, corsets, combinés-slips, sous-vêtements longs, chaussettes, maillots, bas, collants, maillots de bain; articles chaussants, nommément chaussures, bottes, pantoufles; couvre-chefs, nommément chapeaux, casquettes, fichus, cache-oreilles, bandeaux.

 

Services

[traduction] Vente en gros et au détail dans des magasins et par Internet de vêtements.

 


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2020-08-11

COMPARUTIONS

Sanjukta Tole

Pour l’Opposante

Madeleine A. Hodgson

Pour la Requérante

AGENTS AU DOSSIER

Marks & Clerk

Pour l’Opposante

Norton Rose Fulbright Canada LLP

Pour la Requérante

 

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