Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Référence : 2020 COMC 32

Date de la décision : 2020-04-15

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

LANAFORM LANA ALLPEAK S.A. (EXERÇANT ÉGALEMENT SES ACTIVITÉS SOUS LE NOM DE LANA S.A.)

Opposante

et

 

Prolana GmbH

Requérante

 

1,685,028 pour PROLANA

Demande

Introduction

[1]  Lanaform Lana Allpeak S.A. (exerçant également ses activités sous le nom de S.A.) (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce PROLANA (la Marque), laquelle est assujettie à la demande no 1,685,028, produite par Prolana GmbH (la Requérante) selon l’emploi proposé de la Marque au Canada en liaison avec :

Produits en bois, liège, jonc brut, osier, nommément mobilier de chambre, pièces de mobilier de chambre; matelas entièrement ou principalement faits de produits naturels, mobilier, notamment cadres de lit en bois; tissus et textiles, notamment couettes, protège‑matelas, coussins, feutre protecteur pour matelas, sacs de couchage pour enfants, linge de lit; tous les produits susmentionnés sont entièrement ou principalement faits de produits naturels; vêtements, nommément chemises, pantalons, manteaux, robes, vêtements de nuit, vêtements de dessous, vêtements pour nourrissons, vêtements pour bébés; articles chaussants, nommément pantoufles; couvre-chefs, nommément chapeaux, casquettes; tous les produits susmentionnés sont entièrement ou principalement faits de produits naturels; jeux et articles de jeu, nommément poupées et animaux rembourrés (jouets).

(les Produits)

[2]  Pour les raisons exposées ci-dessous, j’estime qu’il y a lieu de rejeter l’opposition.

Le dossier

[3]  La demande pour la Marque a été déposée le 14 juillet 2014 et a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 2 septembre 2015.

[4]  Le 1er novembre 2016, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Cette Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Tous les renvois aux présentes sont faits à la Loi dans sa version modifiée, à l’exception des renvois faits aux motifs d’opposition, qui renvoient à la Loi avant sa modification [voir l’article 70 de la Loi qui prévoit que l’article 38(2) de la Loi, dans sa version antérieure au 17 juin 2019, s’applique aux demandes annoncées avant cette date].

[5]  L’Opposante soulève les motifs d’opposition fondés sur les articles 30 (non-conformité), 12 (non-enregistrabilité), 16 (absence du droit à l’enregistrement) et 2 (absence de caractère distinctif) de la Loi, lesquels peuvent être résumés comme suit :

a)  La demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30e) de la Loi puisque, à la date de production de la demande, la Marque avait été précédemment employée par la Requérante au Canada ou, de manière alternative ou cumulative, la Requérante n’a pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Produits.

b)  La demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30i) de la Loi puisque la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque à la lumière de ses connaissances de l’emploi antérieur de la marque de commerce et du nom commercial de l’Opposante.

c)  La Marque n’est pas enregistrable en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi puisqu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce LANAFORM de l’Opposante, déposée sous le numéro LMC475,609, en liaison avec :

[traduction]

Vêtement pour l’amaigrissement, nommément bas-culottes, shorts bermuda, shorts de cyclistes, chausses, maillots, ceintures; souliers.

Gels et crèmes d’amaigrissement; huiles essentielles; bas pour la varice, gaines-culottes médicales; drap de dessous en laine contre l’ulcère de décubitus pour les lits et les chaises pour lutter contre les rhumatismes; talonnières, genouillères et coudières fabriquées de peaux de mouton naturelles pour atténuer les rhumatismes et pour prévenir et guérir l’ulcère de décubitus; stimulateurs de muscles portatifs; ceintures qui envoient des impulsions électriques afin de raffermir les muscles et prévenir la cellulite.

d)  La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en vertu de l’article 16(3)a) de la Loi puisque, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec la marque de commerce LANAFORM de l’Opposante antérieurement employée ou révélée au Canada.

e)  La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque en vertu de l’article 16(3)c) de la Loi puisque, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec le nom commercial Lanaform Lana Allpeak ou Lanaform antérieurement employé au Canada.

f)  La Marque n’est pas distinctive en vertu de l’article 2 de la Loi, puisqu’elle ne distingue pas, et n’est pas en mesure de le faire, les Produits de la Requérante de ceux de l’Opposante.

[6]  Le 16 mars 2017, la Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle conteste chacun des motifs d’opposition invoqués dans la déclaration d’opposition.

[7]  Afin d’appuyer son opposition, l’Opposante a produit une copie certifiée de l’enregistrement no LMC475,609 pour la marque de commerce LANAFORM.

[8]  Afin d’appuyer sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Lesley Gallivan, une agente de marques de commerce employée par la société représentant la Requérante, souscrit, il semble, le 14 février 2018 et comportant les Pièces A à F (l’affidavit Gallivan). Mme Gallivan introduit la preuve de l’état du registre sous la forme de recherches dans la Base de données sur les marques de commerce canadiennes. À titre de remarque préliminaire concernant la preuve de la Requérante, je note que l’affidavit Gallivan porte une date du 14 février 2017, alors que lesdites preuves sont en date du 14 février 2018. Cette erreur typographique dans la date de l’affidavit semble être une erreur d’inattention. Je note également que l’estampille du commissaire apposé sur l’affidavit Gallivan et sur les Pièces A et F incluses semble indiquer que la nomination du commissaire expire le 5 août 2016. Cependant, étant donné que l’Opposante n’a soulevé aucune objection, je traiterais ces défauts comme des déficiences techniques sans conséquence négative pour la Requérante [Rickitt Benckiser NV c Iron Out, Inc (2005) 49 CPR (4d) 372 (COMC); C-Gem Seafoods Inc c Pêcheries Belle-Ile Fisheries Ltée, 2008 CarswellNat 4339 (COMC)].

[9]  Seule la Requérante a produit un plaidoyer écrit; aucune audience n’a eu lieu.

Analyse

Le fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[10]  L’Opposante a le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, la Requérante doit s’acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition en question ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst); Dion Neckwear Ltd c Christian Dior SA et al, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155].

[11]  En appliquant ces principes à l’espèce, certains des motifs d’opposition peuvent être sommairement rejetés, puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial à leur égard, comme j’expliquerai ci-dessous.

Motifs d’opposition sommairement rejetés

Non-conformité de la demande à l’article 30 de la Loi

Non-conformité à l’article 30e) de la Loi

[12]  Il n’y a aucune preuve qui appuie ce motif d’opposition.

Non-conformité à l’article 30i) de la Loi

[13]  L’article 30i) de la Loi exige simplement que le requérant inclue dans sa demande une déclaration portant qu’il est convaincu d’avoir droit à l’enregistrement de sa marque de commerce. Lorsque le requérant a fourni cette déclaration, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [Sapodilla Co Ltd c Bristol Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC)]. La simple connaissance de l’existence de la marque de commerce ou du nom commercial d’un opposant n’appuie pas en soi une allégation selon laquelle un requérant n’aurait pas pu être convaincu de son droit d’employer sa marque [Woot, Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc, 2012 COMC 197]. La demande pour la Marque contient la déclaration exigée par l’article 30i) de la Loi et il n’y a aucune preuve que la présente espèce est un cas exceptionnel.

Absence du droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi

[14]  Un opposant s’acquitte de son fardeau de preuve à l’égard de ces motifs s’il démontre que, à la date de production de la demande du requérant, sa marque de commerce ou son nom commercial avait été précédemment employé au Canada et n’avait pas été abandonné en date de l’annonce de la demande du requérant [article 16(5) de la Loi]. L’opposant n’a produit aucune preuve d’emploi de sa marque de commerce ou de son nom commercial.

[15]  À cet égard, je note que l’enregistrement de l’Opposante de la marque de commerce LANAFORM est seulement fondé sur l’enregistrement de la marque auprès de l’Office Benelux de la Propriété Intellectuelle (PI) et l’emploi de la marque en Belgique, c’est-à-dire qu’il ne contient aucune déclaration d’emploi de la marque au Canada. Par conséquent, je ne suis même pas en mesure de déduire un emploi de minimis de cette marque de commerce [Gilmar SpA c Entertainment Holdings, Inc, 2010 COMC 148]. De plus, même si je devais déduire un emploi de minimis de la marque de commerce sur laquelle l’Opposante s’appuie, un tel emploi ne permettrait pas d’en déduire un emploi continu de la marque [Entre Computer Centers, Inc c Global Upholstery Co (1992), 40 CPR (3d) 427 (COMC)] et de satisfaire aux exigences de l’article 16 de la Loi [Rooxs, Inc c Edit-SRL (2002), 23 CPR (4th) (COMC)].

Absence d’un caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi

[16]  Un opposant s’acquitte de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif s’il démontre que sa marque de commerce était devenue connue au Canada en date de la production de la déclaration d’opposition de façon à annuler le caractère distinctif de la marque de commerce visée par la demande [Bojangles’ International LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657, 48 CPR (4th) 427]. Comme il a été précédemment mentionné, l’Opposante n’a produit aucune preuve démontrant l’étendue à laquelle sa marque de commerce LANAFORM est devenue connue au Canada.

Motif d’opposition restant – non-enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi

[17]  L’Opposante a plaidé que la Marque n’est pas enregistrable compte tenu des dispositions de l’article 12(1)d) de la Loi, puisqu’elle créait de la confusion avec la marque de commerce déposée LANAFORM de l’Opposante indiquée ci-haut.

[18]  J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire du registraire et je confirme que l’enregistrement de l’Opposante est en règle à la date d’aujourd’hui, laquelle est la date pertinente pour l’appréciation d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) [Park Avenue Furniture Corp c Wickers/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[19]  Ainsi, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition. Par conséquent, la Requérante doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce déposée de l’Opposante.

Le test en matière de confusion

[20]  Le test à appliquer pour déterminer s’il y a confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L’article 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[21]  Ainsi, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion portant à croire que les produits ou les services provenant d’une source proviennent d’une autre source. Dans l’espèce, la question est essentiellement de savoir si un consommateur, avec un souvenir imparfait de la marque de commerce LANAFORM de l’Opposante, qui voit les Produits de la Requérante en liaison avec la Marque, croirait qu’ils proviennent de l’Opposante ou qu’ils sont parrainés ou approuvés par elle.

[22]  Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et il importe de tenir compte de tous les facteurs pertinents. En outre, le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même et varie en fonction des circonstances [voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), CSC 22, 49 CPR (4th) 321; Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée (2006), CSC 23, 49 CPR (4th) 401; et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), CSC 27, 92 CPR (4th) 361 pour un examen approfondi des principes généraux qui régissent le test en matière de confusion].

Le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[23]  Dans leur ensemble, aucune des marques n’a une signification particulière et aucune ne se retrouve dans les dictionnaires anglais ou français communément utilisés. Ainsi, les deux marques ont un caractère distinctif inhérent. Dans son plaidoyer écrit, la Requérante observe que la partie FORM de la marque de l’Opposante peut faire allusion à la nature des produits comme étant employés à des fins d’amincissement (p. ex. aidant l’utilisateur à obtenir une forme du corps plus mince). Je peux prendre connaissance d’office des définitions du dictionnaire [Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65, 92 CPR (4d) 408 (COMC)] et, afin d’appuyer cet argument, je note que le terme FORM peut être défini dans le dictionnaire en ligne Oxford Learner’s Dictionaries par : [traduction] « la condition et la santé de quelqu’un; l’état d’être en bonne condition et en santé » et [traduction] « la forme de quelqu’un ou de quelque chose ». Alors que les marques en question ne devraient pas être disséquées dans leurs éléments constitutifs, je suis d’accord avec la Requérante que, dans la mesure que la partie FORM de la marque de l’Opposante suggère des vêtements d’amincissement et de mise en forme, son caractère distinctif inhérent est sans doute quelque peu diminué.

[24]  Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être renforcé en faisant en sorte qu’elle devienne connue par la promotion ou l’emploi. Cependant, il n’y a aucune preuve que les marques de commerce de l’une ou l’autre des parties ont été employées au Canada dans le sens de l’article 4 de la Loi ou que l’une ou l’autre des marques de commerce est devenue connue au Canada dans une mesure quelconque.

La période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[25]  Compte tenu de mes commentaires ci-dessus, ce facteur ne favorise aucune des parties plus que l’autre.

Le genre de produits, services ou entreprises; et la nature du commerce

[26]  Au moment d’examiner le genre de produits et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des produits de la Requérante avec l’état déclaratif des produits figurant dans l’enregistrement invoqué par l’Opposante [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Cet examen des états déclaratifs doit cependant être interprété dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par les parties et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober. Une preuve établissant la nature réelle des activités exercées par les parties est utile à cet égard [McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optional Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[27]  S’appuyant sur JINX, Inc c JINXD Yoga Essentials Inc (2016), 142 CPR (4th) 475 (COMC), la Requérante observe qu’il y a suffisamment de différences dans le genre des produits et la nature du commerce en question pour empêcher de créer de la confusion dans le marché. Bien qu’il soit possible de tirer certains parallèles, je trouve les circonstances de l’espèce distinctives de JINX, puisqu’une ample quantité de preuves a été fournie par les parties de cette affaire, contrairement à l’espèce.

[28]  Cela étant dit, je suis d’accord avec la Requérante que certains des produits couverts par les marques de commerce des parties sont complètement différents et non aucun lien. Par exemple, on peut mentionner les produits mobiliers, les coussins, sacs de couchage pour enfants, ainsi que les jeux et articles de jeu couverts par la Marque, lesquels n’ont aucun homologue dans l’enregistrement de l’Opposante pour la marque de commerce LANAFORM. De plus, bien qu’il y ait un certain chevauchement en ce qui a trait à certaines des catégories générales de produits des parties, puisqu’elles couvrent les vêtements et les articles chaussant, ainsi que les couvre-lits, j’ai tendance à être d’accord avec les observations de la Requérante que les produits qui partagent des similarités peuvent être distingués, puisque les produits visés par l’enregistrement de l’Opposante, décrits ci-haut, semblent essentiellement être des produits spécialisés utilisés à des fins d’amincissement et médicales. Par exemple, on peut mentionner les produits de l’Opposante décrits comme [traduction] « vêtement pour l’amaigrissement » ou [traduction] « bas pour la varice, gaines-culottes médicales; drap de dessous en laine contre l’ulcère de décubitus [...] pour lutter contre les rhumatismes », lesquels sans doute seraient achetés à des fins très précises. Cependant, étant donné qu’il existe un lien entre certaines des catégories générales de produits des parties, et dans l’absence de preuve contraire, il n’y a aucune raison de conclure que leurs voies de commercialisation ne pourraient pas potentiellement se chevaucher.

Le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent

[29]  Comme l’a fait remarquer la Cour suprême dans Masterpiece, précité, au paragraphe 49, « […] il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu [à l’article] 6(5) [de la Loi], [...] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire ».

[30]  De plus, comme il a été mentionné précédemment, il est bien établi dans la jurisprudence qu’une probabilité de confusion est une question de première impression et de souvenir vague. À cet égard, « [m]ême s’il faut examiner la marque comme un tout (et non la disséquer pour en faire un examen détaillé), il est tout de même possible d’en faire ressortir des caractéristiques particulières susceptibles de jouer un rôle déterminant dans la perception du public » [Pink Panther Beauty Corp c United Artists Corp, 1998, 80 CPR (3d) 247 (CAF), au para 34]. Je dois également tenir compte du fait que la première partie d’une marque de commerce est souvent considérée comme la partie la plus importante aux fins de la distinction [Conde Nast Publications Inc c Union des Éditions Modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)].

[31]  En appliquant ces principes à l’espèce, je conclus que les marques des parties n’ont peu ou pas de ressemblance.

[32]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante observe que :

[traduction]

51. Lorsqu’il est question d’évaluer la confusion, il n’est pas approprié, bien entendu, de disséquer les marques de commerce dans leurs parties constituantes; plutôt, les marques doivent être évaluées dans leur ensemble. Pourtant, dans l’espèce, disséquer un seul élément et porter son attention sur lui est ce qu’il est nécessaire de faire pour trouver toute similarité potentielle dans la présentation, le son et l’idée suggérée.

[…]

53. Les marques, aux fins de comparaison, sont LANAFORM et PROLANA. Bien que les deux marques partagent la partie LANA, les marques sont différenciées dans la présentation par la partie finale FORM en ce qui a trait à la marque de l’Opposante et par la première partie PRO en ce qui a trait à la marque de la Requérante.

54. La marque de la Requérante comprend une première partie différente, ce qui la rend distinctive du point de vue visuel et verbal de la marque de l’Opposante. Ce facteur sert à distinguer davantage la marque de la Requérante et de la marque de l’Opposante, puisqu’il est bien établi que la première partie d’une marque de commerce est la plus importante aux fins de la distinction […]

55. Évaluées dans leurs totalités respectives, les marques ne sont pas semblables compte tenu de la dominance de la première partie PRO dans la marque de la Requérante et de la partie finale FORM dans la marque de l’Opposante […]

56. Afin de conclure que les marques en question sont semblables dans la présentation, le son et l’idée suggérée, il serait requis de diviser les termes et de rechercher la partie commune LANA. Cependant, les marques sont complètement différentes et communiquent des idées distinctes.

[33]  Avec la distinction que, lorsque considérées dans leur ensemble, aucune des marques des parties ne me semble avoir une seule caractéristique dominante sur une autre, je suis en général d’accord avec la Requérante. Disséquer les marques des parties et se concentrer sur leurs deux syllabes communes dans un effort de trouver une ressemblance entre elles n’est pas l’approche appropriée. Les deux marques de commerce débutent et se terminent par des éléments différents, ce qui leur donne chacune une présentation et un son différents. Les deux marques de commerce sont vides de sens et, bien que l’élément FORM dans la marque de l’Opposante puisse suggérer les idées de santé et de bonne condition physique, il n’est pas nécessairement logique d’en déduire que LANAFORM a une signification simple et claire en tant que telle. En conclusion, bien que les marques de commerce des parties pourraient partager un élément commun, il y a d’importantes différences entre elles sur le plan visuel, dans le son, ainsi que dans les idées qu’elles peuvent suggérer.

Preuve de l’état du registre

[34]  Une preuve de l’état du registre peut être introduite pour montrer l’aspect commun ou distinct d’une marque de commerce ou d’une partie d’une marque de commerce par rapport au registre dans son ensemble et que les consommateurs sont par conséquent habitués à faire la distinction entre les marques de commerce en fonction de différences relativement petites. Cependant, une telle preuve n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en dégager des conclusions sur l’état du marché, des conclusions que l’on peut tirer seulement si l’on relève un grand nombre d’enregistrements pertinents [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst); et Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[35]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante observe que [traduction] « [l]e terme LANA est commun au commerce général des deux parties » et que [traduction] « les acheteurs potentiels sont clairement habitués à voir le terme LANA déposé et employé en liaison avec les produits pertinents ». Comme il a été susmentionné, la Requérante a produit une preuve de l’état du registre au moyen de l’affidavit Gallivan, lequel contient des imprimés de résultats de recherche de demandes d’enregistrement et d’enregistrements de marques de commerce actifs qui comportent l’élément LANA en liaison avec des produits qui correspondent aux classes de Nice 24 (textiles), 25 (vêtements, chaussures, chapellerie) et/ou 28 (jeux, jouets).

[36]  Les résultats de recherche dans l’affidavit Gallivan ne sont pas limités aux marques de commerce déposées, puisque je remarque qu’ils comprennent également des demandes en instance et des marques officielles. Je remarque également qu’aucune date n’est mentionnée dans l’affidavit de Mme Gallivan quant au moment auquel elle a mené les recherches mentionnées, excepté pour indiquer qu’une demande pour de telles recherches a été faite approximativement le 7 novembre 2017. Cela étant dit, puisque la date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de ma décision, cette faute n’est pas fatale pour la Requérante.

[37]  Dans son plaidoyer écrit, la Requérante attire particulièrement mon attention sur les 12 résultats de recherche suivants, montrant des marques de commerce déposées comportant l’élément LANA principalement en liaison avec les textiles et les vêtements, entre autres produits :

-  LANATEX (enregistrement NFLD2381) pour [traduction] « les linges et les tissus en général »;

-  LANA GATTO TOLLEGNO DAL 1900 & Dessin (enregistrement LMC647,623) pour, entre autres, « fils; produits en tissu, nommément [...]; couvertures de lit, [...]; articles vestimentaires, nommément [...] »;

-  LANA SPORT (enregistrement LMC570,612) pour « articles vestimentaires pour dames,
nommément [...] »;

-  WAI LANA et Wai Lana (enregistrements LMC862,028 et LMC845,934) pour, entre autres, « vêtements, nommément [...] »;

-  SVETLANA (enregistrement LMC717,224) pour « vêtements pour femmes, nommément [...] »;

-  COMOLANA Dessin (enregistrement LMC378,445) pour [traduction] « vêtements pour hommes, nommément [...] »;

-  LANA-LEE (enregistrement LMC939,241) pour « vêtements pour femmes, nommément [...] »;

-  ZEALANA (enregistrement LMC742,015) pour « matières textiles en fibres brutes; fibres animales; laine et fourrure brutes et traitées [...] »;

-  TRESLANA (enregistrement LMC431,368) pour [traduction] « jeans, pantalons, shorts de marche pour hommes, jeunes hommes et garçons [...] »;

-  SILANA (enregistrement LMC327,977) pour [traduction] « vêtements, nommément [...] »;

-  Alana (enregistrement LMC827,539) pour, entre autres, « [...] cuir et similicuir ainsi que produits faits de ces matières, nommément bottes, [...]; mobilier, nommément mobilier de chambre, [...]; tissus et produits textiles, nommément [...] linge de lit, [...]; couvre-lits et dessus de table; édredons, couvertures, couvrelits; [...]. Produits textiles (vêtements) faits exclusivement de matières premières naturelles, nommément [...] ».

[38]  Je remarque que trois des enregistrements mis en évidence par la Requérante sont présentement radiés, que quelques-uns appartiennent aux mêmes entités et que quelques autres contiennent des éléments figuratifs. Bien que je sois d’accord avec la Requérante que certains des résultats obtenus grâce aux recherches de Mme Gallivan peuvent, dans une certaine mesure, appuyer son argument ci-dessus (du moins en ce qui a trait aux vêtements), je ne suis pas prête à tirer des conclusions concernant l’état du marché compte tenu de la faible quantité d’enregistrements pertinents produits et sans aucune preuve d’emploi actuel. Quoi qu’il en soit, je juge qu’il n’est pas nécessaire de dépendre de l’affidavit Gallivan pour trancher en faveur de la Requérante.

Conclusion concernant la probabilité de confusion

[39]  En tenant compte de toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de montrer, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque ne créera probablement pas de confusion avec la marque de commerce LANAFORM de l’Opposante. J’arrive à cette conclusion puisque je détermine que les différences qui existent entre les marques de commerce des parties en termes de présentation, de son et d’idées suggérées l’emportent sur le potentiel de chevauchement en ce qui a trait à certains des produits des parties à leurs voies de commercialisation. Par conséquent, le motif d’opposition en vertu de l’article 12(1)d) est rejeté.


 

Décision

[40]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches


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