Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Citation: 2017 COMC 124

Date de la décision: 2017-09-19

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45

 

Geox S.p.A.

Partie requérante

et

 

Giuseppe De Luca

Propriétaire inscrit

 

LMC375,888 pour ANIFIBIO & Dessin

Enregistrement

le dossier

[1]  Le 14 avril 2015, à la demande de Geox S.p.A. (la Partie requérante), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Giuseppe De Luca (le Propriétaire), titulaire de l’enregistrement no LMC375,888 pour la marque de commerce ANFIBIO & Dessin reproduite ci-après (la Marque) :

ANFIBIO & DESSIN

[2]  Cet avis enjoignait au Propriétaire de fournir un affidavit ou une déclaration solennelle démontrant que sa Marque a été employée au Canada à un moment quelconque entre le 14 avril 2012 et le 14 avril 2015 (la période pertinente), en liaison avec les produits spécifiés dans l’enregistrement, à savoir des « chaussures, nommément : bottes et souliers », et, dans la négative, la date à laquelle la Marque a été employée pour la dernière fois et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date.

[3]  En réponse à l’avis du registraire, le Propriétaire a produit deux affidavits, soit un souscrit par lui-même le 11 août 2015, et un souscrit le 13 novembre 2015 par Franco Rota, trésorier, contrôleur, et un des administrateurs de Chaussures De Luca Montréal Inc.

[4]  Les deux parties ont produit des représentations écrites et participé à une audience.

analyse

[5]  Il est bien établi que l’objet et la portée de l’article 45 de la Loi est de prévoir une procédure simple, sommaire et expéditive visant à débarrasser le registre du « bois mort »; c’est pourquoi le test applicable est peu exigeant. Comme l’a affirmé le juge Russell dans Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004), 31 CPR (4th) 270 (CF), à la page 282 :

[traduction] Nous savons que l’objet de l’article 45 est de débarrasser le registre du « bois mort ». Nous savons que la simple affirmation par le propriétaire de l’emploi de sa marque de commerce ne suffit pas et que le propriétaire doit « indiquer » quand et où la marque a été employée. Il nous faut des éléments de preuve suffisants pour être en mesure de nous former une opinion en vertu de l’article 45 et d’appliquer cette disposition. Également, nous devons maintenir le sens des proportions et éviter la preuve surabondante. Nous savons également que le genre de preuve exigée varie d’une affaire à l’autre, en fonction d’une gamme de facteurs tels que la nature du commerce et les pratiques commerciales du propriétaire de la marque de commerce.

[6]  Dans le présent cas, l’article 4(1) de la Loi définit l’emploi en liaison avec des produits comme suit :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7]  Ce qui m’amène à passer en revue la preuve fournie par le Propriétaire.

L’affidavit de Giuseppe De Luca

[8]  M. De Luca affirme avoir une grande connaissance de l’industrie de la chaussure. Il explique avoir une formation de cordonnier et avoir fondé sa manufacture de fabrication de chaussures à Montréal en 1968. Il affirme avoir été personnellement impliqué dans la création et la commercialisation des bottes et souliers portant la Marque depuis ses débuts. Partant, il affirme avoir une bonne connaissance de ce qui fait la qualité d’une botte ou d’un soulier. Il explique, de plus, être le fondateur de Chaussures De Luca et avoir vendu celle-ci en 1991 tout en conservant la propriété de la Marque.

[9]  M. De Luca affirme que, pendant la période pertinente, la Marque a été employée sous licence par Chaussures De Luca avec tous les produits décrits dans l’enregistrement. Il réfère collectivement à ceux-ci comme les « Produits », et affirme qu’« [i]l s’agit essentiellement de bottes et souliers d’hiver ».

[10]  M. De Luca affirme que la licence octroyée à Chaussures De Luca contient une clause à l’effet que les Produits doivent être de qualité. Il affirme contrôler directement ou indirectement la qualité et les caractéristiques des Produits qui portent la Marque par ses visites régulières de différentes boutiques de chaussures à Montréal, dont des visites pendant la période pertinente. Il affirme pouvoir ainsi voir les Produits portant la Marque et vérifier, au hasard, la qualité et les caractéristiques des Produits portant la Marque.

[11]  M. De Luca affirme que la Marque a été légèrement modifiée pour l’actualiser. Il affirme que les éléments essentiels de la Marque telle qu’enregistrée ont été conservés, soit le dessin d’un pingouin à gauche du mot ANFIBIO en lettres majuscules, et que les autres éléments de la marque actualisée sont uniquement pour informer les consommateurs qu’il s’agit de bottes imperméables.

L’affidavit de Franco Rota

[12]  M. Rota affirme que l’emploi de la Marque par Chaussures De Luca est régi par une convention d’utilisation exclusive depuis le 1er juin 1991 en liaison avec des bottes et souliers. Il réfère collectivement à ces produits comme les « Produits », et affirme qu’il s’agit de bottes et souliers en cuir imperméabilisés pour l’hiver. Il affirme que le propriétaire de la Marque est M. De Luca, qu’il connaît personnellement, et il produit comme pièce 1 au soutien de son affidavit une copie de la « Convention d’utilisation de la marque de commerce ʻANFIBIOʼ et le nom commercial ʻGRASSO 1 DE LUCAʼ » entrée en vigueur le 1er juin 1991 entre le Propriétaire et Chaussures De Luca (la « Licence »).

[13]  M. Rota réfère à certaines dispositions de la Licence et affirme notamment que tel que spécifié à la clause 6.4 de celle-ci, Chaussures De Luca se doit d’assurer la qualité des Produits, d’améliorer les Produits et de développer de nouveaux Produits possédant des caractéristiques similaires à celles des Produits déjà fabriqués. Il affirme que de ne pas le faire constituerait un défaut selon la Licence et que le Propriétaire peut y mettre fin en donnant un avis écrit à Chaussures De Luca. Il affirme de plus qu’en vertu de la Licence, Chaussures De Luca verse au Propriétaire des redevances annuelles basées sur les ventes des Produits.

[14]  M. Rota affirme que Chaussures De Luca a employé la Marque en liaison avec les Produits, au Canada, pendant la période pertinente. Il précise que Chaussures De Luca vend aux détaillants de chaussures et vend également directement aux consommateurs via le site Internet www.bottesanfibio.com.

[15]  M. Rota affirme que les Produits sont entièrement fabriqués au Canada et que Chaussures De Luca a un atelier situé à Montréal-Nord à ces fins. Il affirme que le but de Chaussures De Luca est de produire les bottes les plus chaudes et les plus luxueuses possible. Il explique que le cuir utilisé est certifié comme étant imperméable, ayant subi un traitement qui scelle les substances chimiques dans le cuir de façon permanente. De plus, toutes les coutures sont scellées pour éviter toute infiltration d’eau. Il affirme que les Produits sont de très grande qualité et correspondent aux exigences du Propriétaire. Il ajoute à cet égard que Chaussures De Luca n’a jamais reçu d’avis de défaut de la part du Propriétaire en ce qui concerne la qualité des Produits.

[16]  Au soutien de ses affirmations d’emploi de la Marque par Chaussures De Luca pendant la période pertinente, M. Rota produit les pièces suivantes :

  • Pièce 2, comprenant en liasse:

    • o une photo d’étiquette. M. Rota explique que pareille étiquette est attachée aux Produits et représente la façon dont Chaussures De Luca employait la Marque pendant la période pertinente. Il souligne que l’on peut voir, sur l’un des côtés de l’étiquette, la mention que les Produits sont fabriqués par Chaussures De Luca ainsi que l’adresse du site Internet www.bottesanfibio.com. Je reproduis les côtés recto verso de l’étiquette à l’Annexe A de ma décision;

    • o une photo d’une boîte dans laquelle sont emballés les Produits et arborant la Marque telle qu’illustrée sur l’étiquette reproduite à l’Annexe A. M. Rota explique que pareille boîte représente la façon dont Chaussures De Luca employait la Marque pendant la période pertinente; et

    • o des « copies de captures d’écran du site Internet de [Chaussures De Luca] archivées par Wayback Machine au 28 janvier 2012, 18 novembre 2012 et 17 février 2014 ainsi qu’un extrait du site Internet de [Chaussures De Luca] en date du 11 août 2015. » M. Rota explique que les extraits de Wayback Machine et du site Internet actuel de Chaussures De Luca montrent que la Marque apparaissant sur l’étiquette et la boîte est identique au moins depuis le 28 janvier 2012.

  • Pièce 3 : des copies de factures émises par Chaussures De Luca entre le 27 août 2012 et le 9 décembre 2014. M. Rota explique que le mot ANFIBIO est écrit sur les factures avec le numéro de style et la mention « botte ». Il affirme qu’il s’agit de factures pour la vente de Produits portant la Marque à différentes boutiques de chaussures au Canada et que les détaillants ont reçu les Produits dans des boîtes identiques à celles apparaissant sur la photo produite sous la pièce 2.

La position de la Partie requérante

[17]  La Partie requérante fait essentiellement valoir quatre arguments, à savoir :

  1. Qu’il y a absence de preuve d’emploi quelle qu’elle soit de la Marque en liaison avec les produits décrits dans l’enregistrement comme « souliers ».
  2. Que l’emploi démontré ne porte pas sur la Marque telle qu’enregistrée, mais sur une autre marque.
  3. Que pareil emploi ne fait pas voir comment la Marque est associée aux produits décrits dans l’enregistrement comme « bottes » lors du transfert de propriété.
  4. Que pareil emploi ne bénéficie pas au Propriétaire au sens de l’article 50 de la Loi.

[18]  Je discuterai de chacun de ces arguments à tour de rôle.

Absence de preuve d’emploi de la Marque en liaison avec des « souliers »

[19]  Tel que noté, à juste titre, par la Partie requérante, aucune des pièces fournies au soutien de l’affidavit de M. Rota ne fait voir la Marque employée en liaison avec des « souliers ».

[20]  Bien que MM. De Luca et Rota affirment tous deux que les produits associés à la Marque consistent en des bottes et souliers d’hiver, pareille affirmation générale d’emploi n’est pas supportée par la preuve au dossier − les descriptions et photographies de produits sous les pièces 2 et 3 référant uniquement à des « bottes ». Plus particulièrement :

  • Tant la Marque, telle qu’employée, que la description de produit retrouvée sur l’étiquette, réfèrent à des « bottes » seulement.

  • Les extraits du site Internet www.bottesanfibio.com décrivent tantôt des « BOTTES D’HIVER HOMME », tantôt des « BOTTES D’HIVER FEMMES », ou encore, vantent la fabrication canadienne des « bottes Anfibio et Contoura ».

  • Les factures réfèrent seulement à des « bottes hautes » et à des « bottes basses » pour hommes ou femmes.

[21]  Lors de l’audience, le Propriétaire a fait valoir que l’un des modèles de bottes reproduits dans les extraits Internet sous la pièce 2, à savoir le modèle pour femmes « JOELLE », pouvait s’apparenter à un soulier d’hiver puisque s’agissant d’une botte basse. Je ne suis pas d’accord.

[22]  Non seulement pareille position n’est-elle pas supportée par les descriptions de produits apparaissant sous les pièces 2 et 3, mais ayant établi une distinction entre les produits « bottes » et « souliers » par le fait de les avoir spécifiés séparément dans l’enregistrement, le Propriétaire se devait de fournir une certaine preuve d’emploi relativement à chacun de ces produits [voir John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF); et Sharp Kabushiki Kaisha c 88766 Canada Inc (1997), 1997 CanLII 16206 (CF), 72 CPR (3d) 195 (CF 1re inst]. Ainsi, pour pouvoir maintenir son enregistrement à l’égard des « souliers », le Propriétaire devait démontrer qu’il y a eu des ventes et des transferts autrement que par référence aux « bottes » mises en preuve.

[23]  Par conséquent, je ne suis pas convaincue que le Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les produits décrits dans l’enregistrement comme « souliers » au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[24]  Étant donné que le Propriétaire n’a fourni aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec ces produits, ils seront supprimés de l’enregistrement.

L’emploi de la Marque telle qu’enregistrée

[25]  Tel qu’expliqué par M. De Luca dans son affidavit, la Marque telle qu’employée « a été légèrement modifiée pour l’actualiser ». Les modifications décrites par M. De Luca consistent en celles illustrées à l’Annexe A des présentes.

[26]  Établissant un parallèle entre la présente affaire et la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Canada (Registraire des marques de commerce) c Compagnie Internationale pour l’Informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523, la Partie requérante soutient que la Marque n'est pas employée telle qu'elle est enregistrée.

[27]  Le test en matière de variation, tel qu’énoncé par la Cour dans l’affaire CII Honeywell Bull, supra, est le suivant :

[Traduction] Le test pratique qu’il convient d’appliquer pour résoudre un cas de cette nature consiste à comparer la marque de commerce qui est enregistrée avec la marque de commerce qui est employée et à déterminer si les différences entre ces deux versions de la marque sont à ce point minimes qu’un consommateur non averti conclurait, selon toute probabilité, qu’elles identifient toutes deux, malgré leurs différences, des produits ayant la même origine. [à la p 525]

[28]  Comme la Cour l’a souligné :

[Traduction] Il faut répondre par la négative à cette question sauf si la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les différences existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée. [à la p 525]

[29]  Pour trancher cette question, il faut se demander si les « caractéristiques dominantes » de la marque de commerce ont été préservées [voir Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF)].

[30]  En l’espèce, je conviens avec le Propriétaire que les caractéristiques dominantes de la Marque, telle qu’enregistrée, sont le dessin du pingouin et le mot ANFIBIO, et que ces caractéristiques ont été préservées dans la Marque telle qu’employée.

[31]  Tel qu’observé par le Propriétaire, dans la Marque telle qu’employée tout comme dans la Marque enregistrée, le pingouin est plus grand que les lettres du mot ANFIBIO écrit à la droite du pingouin en lettres majuscules. De plus, le pingouin est dessiné à peu près de la même façon, avec du noir et du blanc aux mêmes endroits, les deux ailes orientées vers le bas et le regard tourné à droite. La disparition de l’ellipse remplacée par une ligne droite sous le dessin est somme toute assez mineure. L’ajout des mots descriptifs « Bottes imperméables / Waterproof Boots » ne compromet pas l’emploi per se de la Marque.

[32]  Par conséquent, je suis convaincue que la Marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les différences existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée.

Comment la Marque est associée aux « bottes » lors du transfert de propriété

[33]  La Partie requérante soumet que la preuve ne démontre pas comment la Marque a été employée en liaison avec les bottes décrites à l’enregistrement, lors du transfert de propriété, dans la pratique normale du commerce, pendant la période pertinente. La Partie requérante soumet essentiellement que les photos d’étiquette et de boîte sous la pièce 2 ne font pas voir les bottes en question, et que les extraits Internet sous la pièce 2 suggèrent qu’une autre entité emploie la Marque, étant donné que l’avis de droit d’auteur « © » apposé au bas de l’écran du site Internet www.bottesanfibio.com réfère tantôt à la société « Arteca Design Inc. » (extraits de Wayback Machine), tantôt à « Bottes imperméables Anfibio » (extraits du site Internet actuel).

[34]  Je ne suis pas d’accord avec l’approche de la Partie requérante.

[35]  L’affidavit de M. Rota doit être lu dans son entièreté. Ce n’est pas parce que les photos d’étiquette et de boîte ne font pas voir l’étiquette attachée sur une vraie paire de bottes, ou encore n’incluent pas une photo de la boîte ouverte montrant une vraie paire de bottes à l’intérieur, que l’affidavit de M. Rota ne démontre pas de manière satisfaisante comment la Marque a été employée en liaison avec les bottes décrites dans l’enregistrement, lors du transfert de propriété, dans la pratique normale du commerce. Il ressort clairement de l’affidavit de M. Rota que pareille étiquette est attachée aux bottes en question, et que celles-ci sont emballées dans pareille boîte et ont été vendues par Chaussures De Luca à divers détaillants au Canada pendant la période pertinente, comme le démontrent les factures sous la pièce 3.

[36]  Qui plus est, le fait qu’un avis de droit d’auteur référant possiblement à une entité autre que le Propriétaire ou Chaussures De Luca apparaît au bas de l’écran du site Internet www.bottesanfibio.com ne change rien à la manière dont ces étiquette et boîte donnent un avis de liaison de la Marque et des bottes en question à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

Comment l’emploi de la Marque bénéficie au Propriétaire au sens de l’article 50 de la Loi

[37]  La Partie requérante soumet que l’emploi de la Marque ne bénéficie pas au Propriétaire au sens de l’article 50 de la Loi pour diverses raisons.

[38]  J’estime qu’il n’est pas nécessaire d’exposer celles-ci en détail pour les raisons suivantes.

[39]  L’article 50 de la Loi régit la question de l’emploi sous licence d’une marque de commerce. Le paragraphe pertinent aux fins de mon analyse est le suivant :

50(1) Pour l’application de la présente loi, si une licence d’emploi d’une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des produits et services, l’emploi, la publicité ou l’exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial — ou partie de ceux-ci — ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s’il s’agissait de ceux du propriétaire.

[40]  En l’espèce, MM. De Luca et Rota font tous deux état de l’existence d’une licence d’emploi de la Marque.

[41]  Outre le fait qu’une copie de cette licence référant expressément au présent enregistrement de marque de commerce, et contenant les clauses d’usage, telles celles confirmant la propriété de la Marque (clauses 1.2 et 1.5), celles concernant la qualité des produits (clauses 3.1 et 6.4), celles permettant au Propriétaire de mettre un terme à la Licence (clauses 8.1, 8.2 et 9.2), etc., est produite sous la pièce 1 de l’affidavit de M. Rota, j’estime que les affirmations de M. De Luca sont suffisantes en soi pour établir le contrôle, direct ou indirect, par celui-ci des caractéristiques ou de la qualité des produits vendus sous licence par Chaussures De Luca.

[42]  Tel que souligné par le Propriétaire, une licence d’emploi n’a pas besoin d’être écrite.

[43]  En l’espèce, le Propriétaire a signé une Licence dans laquelle il est notamment indiqué que les produits fabriqués sous la Marque doivent être de la même qualité que ceux fabriqués au moment de la signature de la Licence. Je conviens avec le Propriétaire qu’il y a là suffisamment de critères pour permettre au Propriétaire de contrôler adéquatement la qualité et les caractéristiques des Produits portant la Marque. Le Propriétaire, pendant la période pertinente, a contrôlé la qualité des produits portant la Marque en visitant différentes boutiques de chaussures à Montréal, et en profitant de ces visites pour vérifier la qualité des produits portant la Marque de façon aléatoire.

[44]  Le fait qu’aucune clause de la Licence n’autorise expressément le Propriétaire à visiter une usine n’est pas fatal en soi. Tel que souligné par le Propriétaire, la Loi n’édicte aucun critère quant à la nature ou l’intensité du contrôle de la qualité et des caractéristiques des produits portant une marque de commerce. En l’espèce, le Propriétaire a effectué des contrôles aléatoires en allant directement chez les détaillants vendant les produits portant la Marque pendant la période pertinente.

[45]  Le fait qu’aucune clause de la Licence ne prévoit expressément l’emploi d’une variante de la Marque telle qu’enregistrée n’est également pas fatal en soi. Tel qu’il ressort de mon analyse plus haut, l’actualisation de la Marque garde les éléments fondamentaux de la Marque enregistrée. Il s’agit toujours en fait de la même marque de commerce, tel qu’indiqué plus haut.

[46]  Enfin, le fait qu’un avis de droit d’auteur référant possiblement à une entité autre que le Propriétaire ou Chaussures De Luca apparaît au bas de l’écran du site Internet www.bottesanfibio.com, ne saurait être suffisant pour remettre en question la preuve d’emploi de la Marque par Chaussures de Luca, au bénéfice du Propriétaire, en liaison avec des bottes tel que démontré par les photos d’étiquette et boîte sous la pièce 2 et les factures sous la pièce 3. Même si l’on présumait de pareil avis de droit d’auteur que la Marque a été employée par une tierce partie en dehors du cadre établi par l’article 50 de la Loi, cela ne pourrait anéantir le volet de la preuve démontré par les photos d’étiquette et boîte sous la pièce 2 et les factures sous la pièce 3.

Décision

[47]  Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin de radier les produits suivants: «…et souliers » selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.


 

[48]  L’état déclaratif des produits modifié sera libellé comme suit : « Chaussures : nommément bottes ».

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada


Annexe A

Côtés recto verso de l’étiquette reproduite sous la pièce 2 de l’affidavit de M. Rota

 

 


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

DATE DE L’AUDIENCE 2017-07-19

COMPARUTIONS

Johanne Muzzo

POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

Thimothy C. Bourne

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

AGENTS AU DOSSIER

Guy & Muzzo Inc.

POUR LE PROPRIÉTAIRE INSCRIT

Ridout & Maybee LLP

POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

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