Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 191

Date de la décision : 2016-12-20
[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

 

Prollenium Medical Technologies, Inc.

 

Partie requérante

et

 

Teoxane, S.A.

Propriétaire inscrite

 

 

 

 

 

LMC732,828 pour la marque de commerce KISS

Enregistrement

[1]  Le 19 décembre 2014, à la demande de Prollenium Medical Technologies, Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Teoxane, S.A., la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC732,828 de la marque de commerce KISS (la Marque).

[2]  La marque est enregistrée pour emploi en liaison avec des « produits stériles implantables destinés au comblement des rides, ridules, dépressions cutanées et à l’augmentation du volume des lèvres ». Les produits visés par l’enregistrement ont été traduits en anglais comme suit dans le Journal des marques de commerce « implantable sterile products to fill wrinkles, fine lines, and skin dimples and to increase lip volume ».

[3]  L’avis enjoignait à la propriétaire inscrite de fournir une preuve établissant que la Marque a été employée au Canada, en liaison avec les produits spécifiés dans l’enregistrement, à un moment quelconque entre le 19 décembre 2011 et le 19 décembre 2014.

[4]  La définition pertinente d’« emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l’article 4(1) de la Loi, lequel est libellé comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, au moment du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]  En réponse à l’avis du Registraire, Teoxane, S.A. a produit l’affidavit de Claire Boichot. Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites et étaient toutes deux représentées à l’audience qui a été tenue.

[6]  Dans son affidavit, Mme Boichot affirme qu’elle est la conseillère juridique de Teoxane, S.A. et qu’en cette qualité, elle a connaissance des faits présentés dans son affidavit. Dans ses représentations écrites, la Partie requérante soutient qu’il s’agit là d’une [Traduction] « affirmation imprécise et vague », car la déposante n’a pas attesté [Traduction] « de quoi que ce soit qui puisse s’apparenter à une supervision du développement des produits, à un accès ou à une connaissance de l’historique des ventes, de la commercialisation et de la promotion des [produits visés par l’enregistrement] par [Teoxane, S.A.], ou à une surveillance des voies de commercialisation par lesquelles les [produits visés par l’enregistrement] ont été fournis au Canada ». La Partie requérante soutient, en outre, que, puisque Mme Boichot réside en France, [Traduction] « on ne peut pas présumer de sa connaissance spécifique de la commercialisation, des ventes et de l’envoi des [produits visés par l’enregistrement] au Canada ».

[7]  Je ne suis pas de cet avis. Il est bien établi que l’article 45 de la Loi a pour objet et portée d’offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort » et qu’à ce titre, le niveau de preuve auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est peu élevé [Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004), 31 CPR (4th) 270 (CF)]. Comme je l’ai souligné ci-dessus, Mme Boichot affirme clairement dans son affidavit qu’elle a connaissance des faits décrits dans son affidavit. Lorsque je tiens compte du fait qu’elle agit à titre de conseillère auprès de Teoxane, S.A. et de la nature de la preuve décrite ci-dessous, en gardant à l’esprit l’objet et la nature sommaire de la procédure prévue à l’article 45, j’admets que Mme Boichot aurait généralement connaissance des activités de Teoxane, S.A. et qu’elle serait au courant des faits présentés dans son affidavit.

[8]  Selon Mme Boichot, depuis ses débuts il y a plus de 10 ans, Teoxane, S.A., qui fait affaire sous le nom Laboratoires Texoana Geneva (la Propriétaire), développe, fabrique et commercialise des produits de soins cosmétiques et des produits injectables à base d’acide hyaluronique servant au comblement des rides. Plus particulièrement, Mme Boichot affirme que la Marque est employée au Canada depuis 2006 en liaison avec deux gels injectables destinés à combler les rides, les ridules et les dépressions cutanées, à accroître le volume des lèvres et à corriger les commissures des lèvres; dont un avec lidocaïne, et l’autre sans (les Produits KISS).

[9]  En ce qui concerne la façon dont la Marque a été employée en liaison avec les produits visés par l’enregistrement pendant la période pertinente, Mme Boichot affirme que la Marque figurait sur l’emballage des Produits KISS vendus au Canada. À l’appui, est jointe comme pièce CB-1 une photo de deux emballages des Produits KISS représentatifs des emballages utilisés pendant la période pertinente au Canada.

[10]  En ce qui a trait à la pratique normale du commerce de la Propriétaire, Mme Boichot explique que les Produits KISS sont fabriqués en Suisse, puis distribués à travers le monde, y compris au Canada, en paquets de deux seringues d’un millilitre chacune. Au Canada, la Propriétaire vend les Produits KISS à Clarion Medical Technologies Inc. (Clarion), un distributeur canadien de produits médicaux qui, à son tour, les vend à des hôpitaux, des cliniques de chirurgie esthétique et des cliniques médicales privées.

[11]  Dans ses représentations écrites et à l’audience, la Partie requérante a soutenu que la photo de la pièce CB-1 ne montre pas l’emploi de la Marque, car les dates et les faits présentés dans l’affidavit de Mme Boichot [Traduction] « ne sont ni précis ni fiables, et sont extrêmement peu détaillés ». Plus précisément, la Partie requérante prétend que Mme Boichot n’indique pas à quel moment la photo a été prise ni à quel endroit, et qu’elle ne précise pas les dates auxquelles ces emballages représentatifs ont été utilisés ni s’ils ont été utilisés avec les produits vendus au distributeur canadien Clarion conformément aux factures jointes comme pièce 9, dont il est question ci-dessous. À l’appui, la Partie requérante invoque Smart & Biggar c Jarawan 2006 CF 1254.

[12]  Lorsque je considère l’affidavit de Mme Boichot dans son ensemble, je ne souscris pas à la prétention de la Partie requérante selon laquelle la pièce CB-1 soit peu fiable ou ambiguë. Les faits de la présente espèce diffèrent des faits en cause dans l’affaire Jarawan, car Mme Boichot, dans son affidavit, fait des déclarations sous serment claires en ce qui concerne la façon dont la Marque a été employée en liaison avec les produits visés par l’enregistrement pendant la période pertinente au Canada. Lorsque je considère ces déclarations conjointement avec la photo jointe comme pièce CB-1, j’admets que les emballages montrés sont représentatifs de ceux utilisés avec les Produits KISS vendus au Canada pendant la période pertinente.

[13]  Dans ses représentations écrites et à l’audience, la Partie requérante a également soutenu que l’affichage de « TEOSYAL KISS » et de « TEOSYAL PURSENSE KISS », comme on peut le voir aux pièces CB-1, 2, 4 et 5, ne constitue pas un emploi de la Marque en soi. À cet égard, la Partie requérante fait valoir que, dans ces cas, la Marque n’est pas reconnaissable parce que l’ajout de « TEOSYAL » ou de « TEOSYAL PURESENSE » constitue une caractéristique importante qui est plus dominante que « KISS ». À ce titre, la Partie requérante soutient que [Traduction] « un acheteur non averti serait porté à croire que les produits arborant la mention TEOSYAL KISS ou TEOSYAL PURSENSE KISS ont une origine différente de celle des produits arborant uniquement la mention KISS ». À l’appui, la Partie requérante cite la décision du registraire dans 88766 Canada Inc c Coca-Cola Ltd (2006), 52 CPR (4th) 50 (COMC).

[14]  La Partie requérante soutient en outre qu’aux pièces CB-5 et 7, [Traduction] « KISS est employé dans une brochure et sur un emballage de la même façon que sont employés ULTIMATE, ULTRA DEEP, GLOBAL ACTION », « des mots pour lesquels [la Propriétaire] ne détient pas d’enregistrement de marque de commerce ». À ce titre, la Partie requérante soutient que [Traduction] « un consommateur moyen percevrait KISS comme étant simplement un mot descriptif, plutôt qu’une marque de commerce, à la vue de cette gamme de produits sur le site Web de Clarion (pièce 7) et sur le matériel promotionnel (pièce 5) ». La Partie requérante attire également l’attention sur la présence [Traduction] « d’avis incohérents quant à la propriété des marques de commerce » dans les pièces où un avis sous la forme du symbole ® est donné à l’égard de « TEOSYAL », mais pas à l’égard de « KISS », [Traduction] « ce qui, a priori, donne l’impression que l’unique marque de commerce à être employée est TEOSYAL et non la Marque ».

[15]  Premièrement, je souligne que la question de savoir si la Propriétaire détient des enregistrements de marque de commerce distincts pour ULTIMATE, ULTRA DEEP et GLOBAL ACTION n’a aucune incidence sur la présente procédure.

[16]  Deuxièmement, il est bien établi que la procédure prévue à l’article 45 n’a pas pour objet de déterminer des droits fondamentaux tels que la propriété, le caractère distinctif, le caractère descriptif ou l’abandon d’une marque de commerce déposée [voir United Grain Growers Ltd c Lang Michener (2001) 2001 CAF 66, 12 CPR (4th) 89 et Philip Morris Inc c Imperial Tobacco Ltd (1987), 13 CPR (3d) 289 (CF 1re inst)].

[17]  Troisièmement, la présence d’un symbole de marque de commerce n’est pas nécessairement déterminante. La présence du symbole ® à la suite de « Teosyal » indique simplement que TEOSYAL est une marque de commerce; il ne détermine pas si d’autres marques de commerce sont employées au non. Je souligne que tous les cas signalés par la Partie requérante, dans lesquels le symbole ® est employé à la suite de TEOSYAL, se rapportent à l’annonce de ces produits. Or, l’affidavit de Mme Boichot comprend des pièces qui montrent que la Marque est employée avec TEOSYAL sans la présence d’un quelconque symbole ® – sur l’emballage des Produits KISS (pièce CB-1) ainsi que dans d’autres documents publicitaires (pièces CB-2, 3, 4, 5, 6 et 8).

[18]  Enfin, quant à la question de savoir si l’affichage de « TEOSYAL KISS » ou de « TEOSYAL PURSENSE KISS » constitue un emploi de la Marque en soi, je reproduis partiellement ci-dessous les pièces CB-1 et CB-5 à titre de référence.

 

  Pièce CB-1  Pièce CB-5

[19]  En règle générale, l’emploi d’une marque nominale en conjugaison avec d’autres mots ou éléments graphiques constitue un emploi de la marque nominale si le public, sous le coup de la première impression, y voit un emploi de la marque nominale en soi [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC); 88766 Canada Inc c National Cheese Co (2002), 24 CPR (4th) 410 (COMC)]. Il s’agit d’une question de fait qui dépend de facteurs tels que la question de savoir si la marque de commerce se démarque des autres éléments et si les autres éléments seraient perçus comme étant purement descriptifs ou comme constituant une marque de commerce ou un nom commercial distincts [voir Nightingale, supra; et Conseil canadien des ingénieurs c Ing Loro Piana & C SPA, 2009 CF 1096, CarswellNat 3400].

[20]  En l’espèce, je conviens avec la Propriétaire que la Marque se démarque des autres éléments écrits qui figurent sur l’emballage des Produits et qu’elle créerait, par conséquent, une impression distincte dans l’esprit du public compte tenu de son emplacement à l’écart de « TEOSYAL » et de « PURESENSE » sur l’emballage représentatif se trouvant sur le dessus à la pièce CB-1, ainsi que de sa taille et de sa police de caractères différentes comparativement à « TEOSYAL » sur les deux emballages représentatifs [voir Canada (le Registraire des marques de commerce) c Compagnie International pour l’informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF); Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF)].

[21]  À cet égard, il est bien établi que rien n’empêche d’employer deux marques de commerce simultanément en liaison avec les mêmes produits [voir AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst)]. Bien que la Marque puisse ne pas être la marque de commerce la plus dominante sur les emballages représentatifs, je considère néanmoins que la Marque est affichée sur les produits d’une manière telle qu’elle demeure reconnaissable et ne perd pas son identité. Quant à la décision Coca-Cola citée par la Partie requérante, je soulignerai simplement que les mêmes principes concernant la question de la variation ont été énoncés dans cette affaire et que chaque affaire doit être jugée en fonction de son bien-fondé et des faits qui lui sont propres.

[22]  En ce qui concerne les transferts des produits visés par l’enregistrement dans la pratique normale du commerce, Mme Boichot atteste que la Propriétaire a vendu environ 8 700 seringues contenant les Produits KISS à son distributeur canadien Clarion pendant la période pertinente. À l’appui, sont jointes comme pièce CB-9 des factures représentatives émises par la Propriétaire pendant la période pertinente. Je souligne que le nom commercial de la Propriétaire, Laboratoires Texoane Geneva, figure dans le coin supérieur gauche des factures. Toutes les factures jointes contiennent l’adresse de facturation de Clarion au Canada, laquelle est également son adresse de livraison. Les factures comprennent des descriptions d’articles identifiés de la manière suivante : « Teosyal PureSense Kiss (2X1ml) » et « Teosyal Kiss (2X1ml) ». Le nom de la Propriétaire figure également au bas des factures, accompagné de ses renseignements bancaires.

[23]  Dans ses représentations écrites, la Partie requérante fait valoir que les factures représentatives ne constituent pas une preuve d’emploi suffisante, car il n’y a aucune indication que les factures accompagnaient les produits lors du transfert de leur propriété. Néanmoins, j’admets que cette preuve a simplement pour but de démontrer que les produits visés par l’enregistrement ont été distribués, vendus et transférés dans la pratique normale du commerce au Canada pendant la période pertinente. Les factures produites en pièce corroborent les déclarations de Mme Boichot en ce qui concerne les ventes au Canada des produits visés par l’enregistrement par la Propriétaire à Clarion pendant la période pertinente, dans des emballages arborant la Marque comme je l’ai indiqué ci-dessus.

[24]  Compte tenu de l’affidavit de Mme Boichot dans son ensemble, je suis convaincue que la Propriétaire a établi l’emploi de la marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement dans la pratique normale du commerce au Canada pendant la période pertinente au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[25]  En conséquence, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu, conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

______________________________

Pik-Ki Fung

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L’AUDIENCE : 6 décembre 2016

 

COMPARUTIONS

 

Daphne Maravei  POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

Christian Bolduc  POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Ridout & Maybee LLP  POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

Smart & Biggar  POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

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