Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 123

Date de la décision : 2015-07-07

TRADUCTION

DANS L'AFFAIRE DE L'OPPOSITION

 

 

Kayu Canada Inc

Opposante

et

 

KAYU International, Inc

Requérante

 

 

 



 

1,571,267 pour la marque de commerce KAYU

 

Demande d'enregistrement

[1]               Kayu Canada Inc s'oppose à l'enregistrement de la marque de commerce KAYU (la Marque), qui est l'objet de la demande no 1,571,267 produite par KAYU International, Inc.

[2]               La demande, produite le 30 mars 2012, est fondée sur l'emploi de la Marque au Canada (i) depuis au moins aussi tôt que le 4 octobre 2001, en liaison avec du « [Traduction] bois d'œuvre » et (ii) depuis au moins aussi tôt que le 18 janvier 1996 en liaison avec des « [Traduction] matériaux de construction, nommément platelage en bois, moulures en bois, revêtements de sol en bois et carreaux de terrasse en bois; montants de porte ».

[3]               Dans sa déclaration d'opposition, l'Opposante allègue que : (i) la demande n'est pas conforme aux exigences prévues à l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi); (ii) la Marque n'est pas enregistrable en vertu de l'alinéa 12(1)c) de la Loi; (iii) la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque en vertu de l'article 16 de la Loi; et (iv) la Marque ne possède pas un caractère distinctif au sens de l'article 2 de la Loi. Le corps de la déclaration d'opposition a été reproduit à l'annexe A de la décision.

[4]               À l'audience, l'Opposante a annoncé qu'elle abandonnait les motifs d'opposition fondés sur les alinéas 30a), 30c), 30d) et 12(1)c) de la Loi. Elle a également abandonné les motifs d'opposition portant sur les allégations selon lesquelles la Requérante n'a pas employé ni révélé la Marque au Canada, dans un argument sur le droit à l'enregistrement au titre du paragraphe 16(1) [alinéa 1d) de la déclaration d'opposition]

[5]               Pour les raisons exposées ci-dessous, je repousse cette demande d'enregistrement.

Le dossier

[6]               L'Opposante a produit sa déclaration d'opposition le 12 juillet 2013. La Requérante a ensuite produit et signifié sa contre-déclaration le 11 décembre 2013 dans laquelle elle conteste l'ensemble des motifs d'opposition.

[7]               À l'appui de son opposition, l'Opposante a produit l'affidavit de Jim Labelle, codirecteur de l'Opposante. M. Labelle n'a pas été contre-interrogé. La Requérante a choisi de ne pas produire d'élément de preuve à l'appui de sa demande.

[8]               Seule l'Opposante a produit un plaidoyer écrit et était représentée à l'audience.

Fardeau de preuve incombant à chacune des parties

[9]               C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l'Opposante de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l'existence des faits allégués à l'appui de chacun des motifs d'opposition [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd. (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst.), p. 298].

La demande d'enregistrement est-elle conforme aux exigences de l'alinéa 30b) de la Loi?

[10]           L'Opposante allègue que contrairement à l'alinéa 30b) de la Loi, la Requérante « [Traduction] n'avait pas employé la [Marque] connue au Canada telle qu'alléguée, ni autrement, ou avait subséquemment abandonné la [Marque] ».

[11]           La question visée par l'alinéa 30b) n'est pas celle de savoir si la Requérante a abandonné sa Marque à la date de production de la demande, mais simplement de savoir si elle a employé de manière continue la Marque dans la pratique normale du commerce, à compter des dates de premier emploi alléguées jusqu'à la date pertinente [voir Immuno AG c Immuno Concepts, Inc (1996) 69 CPR (3d) 374 (COMC); Labatt Brewing Co c Benson & Hedges (Canada) Ltd (1996), 67 CPR (3d) 258 (CF 1re inst.) page 262 et Corporativo de Marcas GJB, SA de CV c Bacardi & Company Ltd 2014 CF 323]. La date pertinente pour l'évaluation d'un motif invoqué en vertu de l'article 30 est la date de production de la demande, soit le 30 mars 2012 [voir Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC) page 475].

[12]           L'Opposante a le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour corroborer l'allégation selon laquelle la demande n'est pas conforme à l'alinéa 30b) de la Loi, car les faits en rapport avec le premier emploi de la marque par la Requérante relèvent essentiellement des connaissances de celle-ci [voir Tune Masters c Mr Ps Mastertune Ignition Services Ltd (1996), 10 CPR (3d) 84 (COMC) page 89 et Corporativo de Marcas, supra]. Si l'Opposante réussit à s'acquitter du fardeau de preuve initial qui lui incombe, la Requérante doit ensuite, à titre de réponse, corroborer sa revendication d'emploi pendant la période pertinente.

[13]           En l'espèce, la seule question à trancher au titre du motif invoqué en vertu de l'alinéa 30b) est celle de savoir si l'Opposante s'est acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait. Dans l'affirmative, la demande en cause sera repoussée, puisque la Requérante a choisi de ne produire aucune preuve. Je vais maintenant déterminer si la preuve présentée par l'Opposante est suffisante pour qu'elle s'acquitte du fardeau de preuve initial qui lui incombe.

[14]           M. Labelle déclare dans son affidavit que l'Opposante a démarré son entreprise sous le nom Labco Construction Ltd dans les années 1990. Elle a ensuite été constituée en société, le 1er septembre 2004, sous le nom Labco Wood Products Ltd, et a finalement changé son nom pour Kayu Canada Inc (Kayu Canada) le 5 mai 2008.

[15]           Selon M. Labelle, Labco Construction Ltd a d'abord commencé à importer au Canada du bois d'œuvre cultivé en Malaisie et en Indonésie, en 1994 ou 1995, auprès d'une entreprise connue sous le nom de Contact international, située aux États-Unis. Le bois d'œuvre était appelé Philippine Mahogany ou Dark Red Meranti. Il était mis en marché et vendu ainsi par l'Opposante au Canada à cette période-là. M. Labelle indique qu'il a depuis appris que le terme malais qui désigne ce type de bois est « Kayu Batu » ce qui, selon sa compréhension, signifie « bois de pierre ». Il explique aussi que le mot « Kayu » signifie « bois » en malais. De la même façon, je note que dans la demande en cause, il est indiqué que « [Traduction] la traduction fournie par la Requérante du mot indonésien KAYU est bois d'œuvre ».

[16]           En ce qui concerne les dates de premier emploi alléguées de la Requérante, M. Labelle affirme qu'il n'est au courant d'aucun emploi de la Marque par la Requérante au Canada en 1996. À cet égard, le déposant explique qu'en 1996, Steve Wilson, un directeur de la Requérante, a vendu au Canada des moulures apprêtées faites d'un bois appelé Light Red Meranti, mais que ce bois n'était pas décrit comme étant du « Kayu Batu » ou du « Kayu ». M. Labelle ajoute qu'il n'a entendu parler de la vente de bois ou de bois d'œuvre au Canada en liaison avec le mot « Kayu » employé comme marque de commerce ou nom commercial, ou même comme terme pour désigner le bois en question, que « [Traduction] beaucoup plus tard ».

[17]           M. Labelle affirme que Contact International est par la suite devenue insolvable; l'Opposante a donc commencé à importer de l'acajou des Philippines auprès de la Requérante vers 1997, alors que celle-ci venait tout juste de démarrer son entreprise aux États-Unis. M. Labelle déclare qu'à cette époque, la Requérante décrivait le bois comme étant du « Red Balau » ou du « Kayu Batu », expressions adoptées depuis par l'Opposante.

[18]           M. Labelle explique que les produits du bois achetés auprès de la Requérante étaient généralement livrés à des endroits aux États-Unis. Ils étaient ensuite ramassés par des compagnies de camionnage ou des courtiers au nom de l'Opposante, puis importés au Canada par l'Opposante. M. Labelle ajoute qu'il n'a jamais été au courant du fait que la Requérante exploitait son entreprise au Canada directement ni que la Requérante employait le nom commercial et la marque de commerce KAYU au Canada.

[19]           M. Labelle mentionne que l'Opposante a continué d'importer du « Kayu Batu » auprès de la Requérante depuis les États-Unis vers le Canada « [Traduction] pendant plusieurs années ». Par la suite, l'Opposante a commencé à commander du bois directement de l'Asie et le bois était expédié directement à l'Opposante au Canada, par l'entremise de la Requérante qui organisait l'envoi et le paiement des frais de courtage, compris dans le prix de vente. Aucun autre détail concernant cette entente particulière n'a été fourni.

[20]           M. Labelle déclare qu'après que la relation entre les parties s'est dissoute en raison de problèmes avec les modalités de paiement et la qualité du bois commandé, l'Opposante a commencé à acheter le même bois auprès d'autres fournisseurs aux États-Unis, en vue de l'importation au Canada.

[21]           M. Labelle explique que les parties avaient négocié une nouvelle entente commerciale au moins aussi tôt qu'en 1998, l'Opposante cherchant à obtenir un droit exclusif pour la vente de bois fourni par la Requérante au Canada. Cependant, M. Labelle mentionne que la Requérante n'était pas d'accord avec de tels droits exclusifs et aucune entente définitive à cet égard n'a pu être conclue entre les parties. Le déposant affirme aussi que même si différentes ébauches d'ententes possibles ont été échangées entre les parties, aucune entente n'a été signée.

[22]           Quoi qu'il en soit, en 2008, l'Opposante a envisagé de changer son nom pour Kayu Canada Inc, M. Labelle affirme que la Requérante a informé l'Opposante qu'elle détenait les droits au Canada et qu'elle avait « [Traduction] inscrit Kayu Batu dans la liste des marques de commerce ». L'Opposante a ensuite obtenu l'autorisation écrite de la Requérante pour « [Traduction] employer le nom KAYU au Canada ». En échange, l'Opposante a accepté de « n'acheter qu'auprès de Kayu et de ne vendre que du bois de Kayu » [voir les copies des courriels échangés jointes en pièce 4]. M. Labelle ajoute qu'il ne croit plus que les affirmations de la Requérante concernant ses droits au Canada soient exactes.

[23]           M. Labelle affirme que la Requérante n'a jamais exercé de contrôle sur les efforts de marketing de l'Opposante au Canada, la nature ou la qualité des produits ou des services fournis par l'Opposante au Canada, ni sur l'emploi par l'Opposante des termes « Kayu » et « Kayu Batu ». Même si les parties semblent s'entendre au sujet de l'emploi du terme KAYU, comme je n'ai aucune preuve du contrôle requis énoncé au paragraphe 50(1) de la Loi, je suis d'avis que l'emploi de la Marque par l'Opposante au Canada ne peut pas s'appliquer en faveur de la Requérante.

[24]           J'ajouterais que, d'après la preuve fournie par M. Labelle et en l'absence de toute preuve du contraire, l'Opposante ne semble pas agir simplement en tant que distributrice de la Requérante au Canada [voir Manhattan Industries Inc c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CF 1re inst.) concernant l'emploi d'une marque de commerce par un distributeur]. Même s'il existait une forme de relation exclusive avec la Requérante à un moment donné, l'Opposante semble exploiter une entreprise indépendante et importer des produits de bois exotique au Canada en son propre nom, puis en fait la promotion et les vend à ses propres clients canadiens, également en son propre nom.

[25]           Lorsque la preuve de l'Opposante est prise globalement, en incluant la relation d'affaires entre l'Opposante et la Requérante pendant la période pertinente qui explique l'étroite connaissance qu'a l'Opposante des activités de la Requérante au Canada, ou l'absence de telles activités, à ce moment-là, je suis convaincu que l'Opposante a présenté des faits suffisants pour mettre en doute l'emploi allégué de la Marque au Canada par la Requérante depuis au moins aussi tôt que le 4 octobre 2001 en liaison avec du « bois d'œuvre », et depuis au moins aussi tôt que le 18 janvier 1996 en liaison avec des « matériaux de construction, nommément platelage en bois, moulures en bois, revêtements de sol en bois et carreaux de terrasse en bois; montants de porte », ainsi que tout emploi de la Marque par la Requérante au Canada par la suite.

[26]           Comme l'Opposante s'est acquittée du fardeau initial qui lui incombait au titre de ce motif d'opposition, et compte tenu du fait que la Requérante a choisi de ne produire aucune preuve à cet égard, la Requérante ne s'est pas acquittée du fardeau ultime qui lui incombait.

[27]           Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition invoqué en vertu de l'alinéa 30b) est accueilli.

La Requérante était-elle la personne ayant droit à l'enregistrement de la Marque?

[28]           Dans sa déclaration d'opposition, l'Opposante allègue que la Requérante n'est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que celle-ci créait de la confusion avec un ou plusieurs noms commerciaux précédemment employés au Canada par l'Opposante, nommément Kayu, Kayu Canada, Kayu Canada Inc et Kayu Batu, au titre des alinéas 38(2)c) et 16(2)c) de la Loi.

[29]           À l'audience, l'Opposante a précisé que le motif fondé sur le droit à l'enregistrement tel que plaidé contenait une erreur typographique et devait renvoyer au paragraphe 16(1) plutôt qu'au paragraphe 16(2) de la Loi. Étant donné que la demande en cause est exclusivement fondée sur l'emploi de la Marque au Canada, je suis prêt à accepter cette modification.

[30]           Puisque le motif d'opposition que l'Opposante a invoqué en vertu de l'alinéa 30b) a été accueilli, la date pertinente pour l'évaluation de la probabilité de confusion relativement à ce motif fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement est la date de production de la demande en cause, à savoir le 30 mars 2012 [American Cyanamid Co c Record Chemical Co Inc (1972), 6 CPR (2d) 278 à la page 280 (COMC)].

[31]           Malgré le fardeau de preuve qu'a la Requérante d'établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les noms commerciaux de l'Opposante, l'Opposante a le fardeau initial de démontrer qu'au moins un de se noms commerciaux était employé avant le 30 mars 2012 et n'avait pas été abandonné à la date de l'annonce de la demande d'enregistrement, soit le 15 mai 2013, en vertu du paragraphe 16(5) de la Loi. Je commencerai par un examen de la preuve relativement à l'emploi par l'Opposante de ses noms commerciaux.

[32]           Comme il a été mentionné précédemment, l'Opposante a changé son nom pour Kayu Canada Inc le 5 mai 2008 [voir la copie du certificat de modification de l'Opposante jointe en pièce 2 de l'affidavit de M. Labelle]. Sont jointes en pièce 5 des copies de recherches effectuées à l'aide d'Internet Archive Wayback Machine montrant les coordonnées du site Web de la Requérante, situé à l'adresse www.kayu.com tel qu'il existait en février et en mai 2008. Je remarque que la Requérante est identifiée sur les imprimés, de même que ses coordonnées aux États-Unis; on y voit aussi la personne-ressource pour les ventes au Canada (Canadian Sales Contact ), « Jim Labelle - Labco Wood Products » en février 2008. En mai 2008, cet énoncé a été subséquemment mis à jour pour que l'on puisse y lire « Jim Labelle - Kayu Canada ».

[33]           Selon M. Labelle, l'Opposante vend de grandes quantités de produits du bois sous le nom commercial Kayu Canada depuis 2008, ce qui dépasse le million de dollars chaque année, pour un total de plus de 12 millions de dollars d'octobre 2007 à 2014. Jointe en pièce 12 figure une copie de la liste de prix « Vancouver Dealer 2010 Price List » de l'Opposante, dans laquelle la marque de commerce de l'Opposante, Kayu Canada Inc, est placée bien en évidence.

[34]           M. Labelle affirme ensuite que l'Opposante a dépensé beaucoup de fonds en publicité. Une ventilation des dépenses en publicité de l'Opposante entre octobre 2008 et le 31 décembre 2013 est jointe en pièce 9, pour un total de plus de 250 000 dollars pendant cette période. En pièces 10 et 11 figurent une liste partielle d'annonces papier achetées par l'Opposante et des articles sur celle-ci et ses produits au Canada entre mai 2007 et mars 2013, ainsi que des copies d'annonces et d'articles qui présentent le nom commercial de l'Opposante Kayu Canada Inc. Même si la plupart des annonces et des articles n'affichent pas de date, je remarque qu'une annonce en particulier est parue dans le numéro de février-mars 2012 de Home Décor and Renovations, dans lequel on peut voir le nom Kayu Canada Inc de l'Opposante. Enfin, en pièce 3 se trouvent des imprimés du site Web de l'Opposante datés du 9 avril 2014, où l'on peut voir le nom commercial Kayu Canada Inc bien en évidence dans la partie supérieure de chaque page.

[35]           Si l'on examine la preuve globalement, je suis convaincu que l'Opposante a exploité une entreprise sous le nom commercial Kayu Canada Inc en liaison avec des produits de bois au Canada avant le 30 mars 2012 et qu'elle n'avait pas abandonné son nom commercial au 15 mai 2013.

Test en matière de confusion

[36]           L'Opposante s'étant acquittée de son fardeau de preuve initial, il s'agit maintenant de déterminer si la Requérante s'est acquittée de son fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et le nom commercial Kayu Canada Inc de l'Opposante.

[37]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(3) de la Loi porte que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à cette marque de commerce et ceux associés à l'entreprise exploitée sous le nom commercial sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[38]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent de la marque de commerce et du nom commercial et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou les noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. On n'attribue pas nécessairement un poids égal à ces facteurs [Voir Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée et al (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC); et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC) pour un examen exhaustif des principes généraux qui régissent le test en matière de confusion.]

[39]           Je vais maintenant me pencher sur l'évaluation de la probabilité de confusion entre la Marque et le nom commercial de l'Opposante Kayu Canada Inc relativement aux circonstances de l'espèce.

Alinéa 6(5)a) le caractère distinctif inhérent de la marque de commerce et du nom commercial et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus

[40]           L’examen global du facteur énoncé à l'alinéa 6(5)a), qui réunit les caractères distinctifs inhérents et acquis de la marque de commerce et du nom commercial des parties, favorise l’Opposante.

[41]           J'estime que le caractère distinctif inhérent de la Marque et du nom commercial de l'Opposante est équivalent, en ce sens que la Marque et le nom commercial présente un caractère distinctif inhérent étant donné le terme KAYU. Même si les deux parties ont fourni des déclarations indiquant que le terme KAYU décrit des caractéristiques inhérentes des produits en malais et en indonésien, notamment qu'il s'agisse de « bois » ou de « bois d'œuvre », il n'existe aucune preuve indiquant que le consommateur moyen au Canada connaîtrait ces langues. Je n'estime pas que les mots « Canada » et « Inc » contribuent au caractère distinctif inhérent du nom commercial de l'Opposante, étant donné leur nature suggestive/descriptive.

[42]           Une marque de commerce ou un nom commercial peut acquérir une force accrue en devenant connue au Canada par la promotion ou l'emploi. Comme susmentionné, il n'y a aucune preuve d'emploi ou de promotion de la Marque par la Requérante au Canada jusqu'à maintenant. En revanche, l'Opposante a produit une preuve d'emploi de son nom commercial au Canada avant la date pertinente.

Alinéa 6(5)b) la période pendant laquelle la marque de commerce et le nom commercial ont été en usage

[43]           L'examen global du facteur énoncé à l'alinéa 6(5)b) favorise l'Opposante. Comme susmentionné, il n'y a aucune preuve d'emploi de la Marque par la Requérante au Canada jusqu'à maintenant. En revanche, l'Opposante a présenté certaines preuves d'emploi du nom commercial Kayu Canada Inc en liaison avec une entreprise liée aux produits du bois au Canada depuis 2008.

Alinéas 6(5)c) et d) le genre de produits et d'entreprises; la nature du commerce

[44]           Les facteurs énoncés aux alinéas 6(5)c) et d), lesquels concernent le genre de produits et la nature du commerce, s'appliquent en faveur de l'Opposante.

[45]           Les parties offrent des produits de bois identiques ou étroitement reliés. La demande d'enregistrement relative à la Marque couvre le bois d'œuvre et divers matériaux de construction faits de bois, y compris le platelage, les moulures, les revêtements de sol et les carreaux. Selon M. Labelle, l'entreprise de l'Opposante concerne les matériaux de construction en bois, comme les revêtements de sol, le platelage, les clôtures et le bardage.

[46]           En ce qui concerne les voies de commercialisation, M. Labelle affirme que l'Opposante est située à Calgary et a des fournisseurs en Alberta, en Colombie-Britannique, au Manitoba et en Saskatchewan [voir les imprimés du site Web de l'Opposante joints en pièce 3]. L'affidavit de M. Label contient d'autres preuves indiquant que l'Opposante vend des matériaux de construction en bois pour des projets de construction/rénovation, ainsi que pour des projets commerciaux et publics intérieurs.

[47]           En l'absence de preuve de la part de la Requérante et étant donné que les produits des parties sont identiques ou étroitement reliés, pour l'examen de la probabilité de confusion, j'en arrive à la conclusion qu'il y a un risque de recoupement dans les voies commerciales des parties.

Alinéa 6(5)e) le degré de ressemblance entre la marque de commerce et le nom commercial dans la présentation ou le son, ou dans les idées quils suggèrent

[48]           Dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a souligné l'importance que revêt le facteur énoncé à l'alinéa 6(5)e) dans l'analyse de la probabilité de confusion. Plus précisément, la Cour a fait observer que, parmi les facteurs prévus par la loi, le degré de ressemblance est souvent le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse de la probabilité de confusion; les autres facteurs ne devenant importants que si les marques de commerce ou les noms commerciaux sont jugés identiques ou très similaires.

[49]           Il est bien établi en droit que, lorsqu'il s'agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques de commerce et des noms commerciaux, ceux-ci doivent être considérés dans leur ensemble. Bien qu'il faille éviter de placer les marques et les noms commerciaux côte à côte dans le but de les comparer et de relever les similitudes ou les différences entre leurs éléments constitutifs, il demeure néanmoins possible de s’attarder à des caractéristiques particulières susceptibles d’avoir une influence déterminante sur la perception que le public a de la marque ou du nom commercial [voir United Artists Corp c Pink Panther Beauty Corp (1998), 80 CPR (3d) 247, p. 263 (CAF)]. Lorsqu’il s’agit de comparer des marques et des noms commerciaux entre eux, il est préférable de se demander d’abord si l’un des aspects de la marque de commerce ou du nom commercial est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece au para 64].

[50]           La marque de commerce de la Requérante et le nom commercial de l'Opposante partagent le même élément frappant : KAYU. Étant donné que le terme KAYU n'est pas un mot ordinaire de la langue anglaise ou française, il ne suggère aucune idée particulière à part qu'il peut s'agir d'un mot inventé ou d'un mot de langue étrangère. En outre, comme il a été mentionné précédemment dans l'analyse du facteur énoncé à l'alinéa 6(5)a), étant donné que les mots « Canada Inc » dans le nom commercial de l'Opposante sont de nature suggestive/descriptive, ils ne peuvent pas servir à distinguer le nom commercial.

[51]           J'estime qu'il existe un degré de ressemblance important, lorsque la marque de commerce et le nom commercial des parties sont pris globalement. Par conséquent, le facteur énoncé à l'alinéa 6(5)e) favorise l'Opposante.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[52]           En appliquant le test en matière de confusion, j'ai considéré qu'il s'agissait d'une question de première impression et de souvenir imparfait. Compte tenu des circonstances de l'espèce, en particulier de la forte ressemblance entre la marque de commerce et le nom commercial des parties dans la présentation, le son et les idées qu'ils suggèrent, de la preuve d'emploi du nom commercial de l'Opposante au Canada, de la similitude des produits des parties, et de la possibilité de recoupement des voies commerciales, je ne suis pas convaincu que la Requérante s'est acquittée de son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et le nom commercial Kayu Canada Inc.

Autres motifs d'opposition

[53]           Comme j'ai déjà accueilli deux motifs d'opposition distincts, je n'analyserai pas les motifs d'opposition restants.

La décision

[54]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande d'enregistrement au titre du paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Pik-Ki Fung

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

Date de l'audience : 19 juin 2015

 

Comparutions

 

M. Swanson                                                                             Pour l'Opposante

 

Aucune comparution                                                               Pour la Requérante



Agents au dossier

 

Burnet, Duckworth & Palmer LLP                                         Pour l'Opposante


Clark Wilson LLP                                                                    Pour la Requérante


Annexe A

 

DANS L'AFFAIRE DE

l'opposition produite par Kayu Canada Inc (l'Opposante)

à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1571567 pour KAYU (la Demande) produite le 30 mars 3012 par Kayu

International Inc (la Requérante).

 

 

DÉCLARATION D'OPPOSITION

 

1.      L'Opposante, qui a un principal bureau ou siège d'affaires dont l'adresse postale complète est Kayu Canada Inc [...], donne avis d'opposition à l'enregistrement projeté de la marque de commerce qu'annonce, sous le numéro ci-dessus indiqué, l'édition du Journal des marques de commerce du 15 mai 2013. Les motifs d'opposition sont les suivants :

 

(a)    La demande n'est pas conforme aux exigences prévues à l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 (la « Loi »), parce que :

(i)     contrairement à l'article 30a) de la Loi, la demande d'enregistrement ne comprend pas de déclaration dans les termes ordinaires du commerce concernant les marchandises spécifiques en liaison avec lesquelles l'emploi de la marque de commerce est projeté.

(ii)   contrairement aux alinéas 38(2)a) et 30b) de la Loi, à la date de dépôt de la demande, la Requérante n'avait pas employé la marque de commerce connue au Canada telle qu'alléguée, ni autrement, ou avait subséquemment abandonné la marque de commerce;

(iii) contrairement aux alinéas 38(2)a) et 30c) de la Loi, à la date de dépôt de la demande, la Requérante n'avait pas employé la marque de commerce dans un pays de l'Union, ni n'avait révélé la marque de commerce au Canada telle qu'alléguée, ni autrement, ou avait subséquemment abandonné la marque de commerce;

(iv) contrairement aux alinéas 38(2)a) et 30d) de la Loi, à la date de dépôt de la demande, la Requérante n'avait pas employé la marque de commerce dans un pays de l'Union tel qu'allégué, ni autrement, ou avait subséquemment abandonné la marque de commerce;

(b)   La marque de commerce visée dans la demande ne peut être enregistrée en vertu des alinéas 38(2)b) et 12(1)c) de la Loi, parce qu'il s'agit d'un nom en indonésien qui désigne les marchandises en liaison avec lesquelles la marque de commerce est employée ou projetée d'être employée;

(c)    La Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce puisque :

(i)     eu égard aux dispositions des alinéas 38(2)c) et 16(2)a) de la Loi, à la date de production de la Demande, la marque de commerce créait de la confusion avec une ou plusieurs marques de commerce ayant déjà été employées au Canada ou révélées au Canada par l'Opposante, à savoir :

                                                       (A)      KAYU;

                                                        (B)      KAYU CANADA;

                                                        (C)      KAYU CANADA INC; et

                                                       (D)      KAYU BATU;

(ii)   eu égard aux dispositions des alinéas 38(2)c) et 16(2)c) de la Loi, à la date de production de la Demande, la marque de commerce créait de la confusion avec un ou plusieurs noms commerciaux ayant déjà été employés au Canada par l'Opposante, à savoir :

                                                       (A)      KAYU;

                                                        (B)      KAYU CANADA;

                                                        (C)      KAYU CANADA INC; et

                                                       (D)      KAYU BATU;

(iii) eu égard aux dispositions des alinéas 38(2)c) et 16(2)c) de la Loi, à la date de production de la Demande, la marque de commerce créait de la confusion avec une ou plusieurs marques de commerce ayant déjà été employées au Canada par d'autres parties, y compris des fournisseurs tiers de bois d'œuvre au Canada, en liaison avec des produits identiques ou semblables, à savoir :

                                                       (A)      KAYU;

                                                        (B)      KAYU BATU.

(d)   La Requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce puisque :

(i)     eu égard aux dispositions du paragraphe 16(1) et de l'alinéa 38(2)c) de la Loi, ni la Requérante ni ses prédécesseurs en titre n'ont employé la marque de commerce au Canada;

(ii)   eu égard aux dispositions du paragraphe 16(1) et de l'alinéa 38(2)c) de la Loi, ni la Requérante ni ses prédécesseurs en titre n'ont révélé la marque de commerce au Canada;

(e)    La marque de commerce visée par la demande n'est pas distinctive, pour les raisons qui suivent :

(i)     eu égard aux dispositions de l'alinéa 38(2)d) et de l'article 2 de la Loi (la définition de « distinctif »), elle ne permet pas réellement de distinguer, ni ne peut distinguer, les marchandises et les services de la Requérante de ceux des autres, particulièrement de ceux de l'Opposante sous les marques de commerce et noms commerciaux énumérés au paragraphe 1c) ci-dessus, ni n'est adaptée à établir cette distinction;

(ii)   les marques de commerce et noms commerciaux de l'Opposante sont connus au Canada et ont acquis une réputation au Canada qui est importante et qui suffit pour annuler le caractère distinctif de la marque de commerce telle quelle figure dans la Demande.

 

2.      En outre, l'Opposante ajoute ceci :

(a)      s'agit-il d'une « personne » ou d'une « personne intéressée », dans la mesure où c'est nécessaire au sens de l'article 2 de la Loi;

(b)     il détient un statut adéquat au sens du paragraphe 38(1) de la Loi pour s'opposer à la présente Demande produite par la Requérante pour l'enregistrement de la marque de commerce;

(c)      les marques de commerce ou les noms commerciaux allégués par l'Opposante n'ont pas été abandonnés et ne l'étaient pas non plus pendant la période pertinente;

(d)     cette opposition est produite sans préjudice aux droits et recours de l'Opposante et sans aveu, quel qu'il soit.

 

3.      L'Opposante nomme Burnet, Duckworth & Palmer LLP [] à titre de cabinet à qui peut être signifié tout document relativement à l'opposition en son nom.

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