Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

 

Citation: 2010 COMC 002

 

DANS LAFFAIRE DE LOPPOSITION de Mel Adler

à la demande no 1,263,849 produite par IP Holding LLC

en vue de lenregistrement de la marque de commerce BONGO

 

 

[1]        Le 7 juillet 2005, la requérante, IP Holdings LLC, a produit une demande denregistrement pour la marque de commerce BONGO fondée sur lemploi projeté de la marque au Canada. La demande a été annoncée aux fins de la procédure dopposition le 4 janvier 2006, et elle vise les marchandises suivantes :

Cosmétiques, nommément parfum, eau de Cologne, eau de toilette, crèmes pour le corps, lotions et poudres; savons pour les soins personnels; huile et sels pour le bain, gels pour le rasage et la douche; crèmes, lotions et gels pour le rasage; déodorants personnels et produits antisudorifiques; produits nettoyants pour le corps et les cheveux; huiles de massage et huiles corporelles; tatouages parfumés pour le corps; shampoing, revitalisant et gel pour les cheveux; vernis à ongles; huiles essentielles pour les soins du corps, écran solaire et préparations pour le bronzage; exfoliants pour le visage et masques de beauté; articles de lunetterie, nommément lunettes, lunettes de soleil, étuis à lunettes, chaînettes pour lunettes, montures de lunettes, lentilles de lunettes; bijoux et montres.

 

 

[2]        Le 6 mars 2006, lopposant, Mel Adler, a produit sa déclaration dopposition, dont copie a été transmise à la requérante le 11 mai 2006. Suivant le premier motif dopposition, la requérante na pas droit à lenregistrement, aux termes de lalinéa 16(3)a) de la Loi sur les marques de commerce, parce quà la date de production de sa demande, sa marque créait de la confusion avec la marque de commerce identique BONGO de lopposant, antérieurement employée au Canada en liaison avec des vêtements et des articles chaussants.


 

 

 

[3]        Suivant le deuxième motif dopposition, la requérante na pas droit à lenregistrement de sa marque, aux termes de lalinéa 16(3)b) de la Loi sur les marques de commerce, parce quà la date à laquelle elle a produit la demande, sa marque créait de la confusion avec la marque de commerce BONGO de lopposant, pour laquelle une demande dextension de létat déclaratif (no 526,531-1) avait antérieurement été produite le 4 février 2002 afin dajouter les articles chaussants à la liste de marchandises. Suivant le troisième motif dopposition, la marque visée par la demande denregistrement nest pas enregistrable, aux termes de lalinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, parce quelle crée de la confusion avec la marque de commerce BONGO de lopposant, enregistrée sous le no 310,225 pour emploi en liaison avec des :

vêtements pour hommes et garçons, nommément jeans, manteaux, vestes, pantalons, gilets, vareuses, tee‑shirts, vêtements pour femmes et filles, nommément robes, jupes, chemisiers, jeans, pantalons, vestes, paletots, vareuses et tee‑shirts.

 


[4]        Suivant le quatrième motif dopposition, la marque de commerce de la requérante nest pas distinctive car elle crée de la confusion avec la marque de commerce de lopposant. Lopposant allègue dans le cinquième motif que la demande nest pas conforme aux exigences de lalinéa 30e) de la Loi parce quà la date à laquelle elle a produit sa demande, la requérante navait pas lintention demployer sa marque en liaison avec les marchandises qui y étaient mentionnées. Enfin, le sixième motif allègue que la demande nest pas conforme aux exigences de lalinéa 30i) de la Loi, car la requérante ne pouvait être convaincue davoir le droit demployer sa marque de commerce au Canada puisquelle savait que lemploi de la marque de lopposant au Canada remontait à une date antérieure.

 

[5]        La requérante a produit et signifié une contre‑déclaration. La preuve de lopposant est constituée de laffidavit de ce dernier. La requérante na pas soumis de preuve. Seul lopposant a produit un plaidoyer écrit. Une audience a été tenue le 10 décembre 2009, à laquelle lopposant seul était représenté.  

 

[6]        Le sixième motif dopposition nest pas fondé car il ne comporte pas dallégations de fait suffisantes pour étayer largument de non‑conformité aux exigences de lalinéa 30i) de la Loi. Ce nest pas parce que la requérante est au courant de lemploi de la marque de lopposant quelle ne peut honnêtement faire la déclaration exigée à lalinéa 30i). En conséquence, le sixième motif dopposition est rejeté.

 

[7]        Le cinquième motif dopposition non plus nest pas bien fondé, parce quil nest pas suffisamment étayé par des allégations de fait et quil nest pas conforme à lalinéa 38(3)a) de la Loi. Ce motif est donc lui aussi écarté.           

 


[8]        La date pertinente pour lexamen des circonstances relatives à la question de la confusion soulevée par le troisième motif dopposition est la date de la décision en cette matière : voir Conde Nast Publications Inc. c. Canadian Federation of Independent Grocers (1991), 37 C.P.R. (3d) 538, aux pages 541-542 (C.O.M.C.). En outre, cest sur la requérante que repose le fardeau de persuasion relativement à ce motif; elle doit démontrer quil nexiste aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause. Enfin, il faut prendre en compte toutes les circonstances en cause, dont celles qui sont expressément prévues au paragraphe 6(5) de la Loi, lorsquon applique le test en matière de confusion prévu au paragraphe 6(2).

 

[9]     Sagissant du facteur prévu à lalinéa 6(5)a) de la Loi, les marques des deux parties possèdent un caractère distinctif inhérent. Comme la requérante na pas produit de preuve, je dois conclure que sa marque projetée nest pas du tout devenue connue au Canada.  Il appert en revanche de laffidavit Adler que la marque BONGO de lopposant visant des vêtements et articles chaussants est largement employée depuis longtemps. Suivant M. Adler, les chiffres daffaires les plus récents afférents à la vente de vêtements BONGO par le truchement des 600 boutiques Stitches du Canada sont globalement de lordre de 20 millions de dollars par année. Les ventes de chaussures BONGO ont elles aussi été substantielles. Je puis donc conclure que la marque de lopposant est devenue passablement connue au Canada.  


[10]    Pour ce qui est du facteur énoncé à lalinéa 6(5)b) de la Loi, la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage favorise clairement lopposant puisque M. Adler atteste que les vêtements de marque BONGO sont vendus au Canada depuis 1986 au moins. Relativement aux facteurs prévus aux alinéas 6(5)c) et d) de la Loi, ce sont létat déclaratif des marchandises de la requérante et létat déclaratif joint à lenregistrement no 310,225 qui sont déterminants : voir Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3, aux pages 10-11 (C.A.F.), Henkel Kommanditgesellschaft c. Super Dragon (1986), 12 C.P.R. (3d) 110, à la page 112 (C.A.F.) et Miss Universe, Inc. c. Dale Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381, aux pages 390-392 (C.A.F.). Toutefois, ces états déclaratifs doivent être interprétés en vue de déterminer le genre probable dentreprise ou de commerce que les parties avaient lintention dexploiter plutôt que lensemble des commerces pouvant être visés par le libellé.  À cet égard, la preuve relative aux commerces réels des parties est utile : voir larrêt McDonalds Corporation c. Coffee Hut Stores Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 168, à la page 169 (C.A.F.).

 


[11]    Les marchandises visées par lenregistrement de lopposant diffèrent de celles qui font lobjet de la demande denregistrement. Toutefois, lopposant a récemment diversifié ses produits, lesquels englobent maintenant des articles chaussants, des ceintures et des articles de lunetterie, articles qui font aussi partie des marchandises visées par la demande denregistrement. Depuis 2000, les produits BONGO sont exclusivement vendus par les boutiques Stitches, en vertu dune entente de licence passée avec YM Sales Inc. Comme lindique M. Adler, outre les marchandises BONGO, ces boutiques vendent des articles de lunetterie, des sacs à main, des ceintures et des bijoux, et ce, depuis 1990. Par conséquent, il existe à tout le moins un certain chevauchement dans les voies de commercialisation des parties.

 

[12]    Sagissant du facteur prévu à lalinéa 6(5)e) de la Loi, les marques en cause sont identiques.

 

[13]    Jai appliqué le test en matière de confusion en considérant quil sagit dune question de première impression et de souvenir imparfait. Compte tenu des conclusions que jai formulées plus haut et compte tenu, plus particulièrement, de lidentité des marques des parties, de la réputation de la marque de lopposant, de labsence de réputation et demploi de la marque de la requérante et du chevauchement potentiel entre les marchandises et commerces des parties, je suis davis que les probabilités de confusion sont égales pour chaque partie. Puisque le fardeau ultime de prouver labsence de probabilité raisonnable de confusion repose sur la requérante, je dois conclure à lencontre de cette dernière sur cette question. Le troisième motif dopposition est donc accueilli.

 


[14]    Relativement au quatrième motif dopposition, il incombe à la requérante de démontrer que sa marque est adaptée pour distinguer ses marchandises de celles dautres personnes au Canada ou quelle les distingue véritablement : voir Muffin Houses Incorporated c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (C.O.M.C.). En outre, la date pertinente pour lexamen de cette question est celle de la production de lopposition (c.‑à‑d. le 6 mars 2006) : voir Andres Wines Ltd. c. E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporatio c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, à la page 424 (C.A.F.).  Enfin, lopposant a le fardeau de prouver les allégations de fait appuyant le motif dopposition fondé sur labsence de caractère distinctif.

 

[15]    Le quatrième motif dopposition concerne essentiellement la question de la confusion entre la marque projetée de la requérante et la marque de commerce BONGO de lopposant. Les conclusions que jai formulées au sujet du troisième motif dopposition sappliquent en grande partie au quatrième motif. Il sensuit que la requérante na pas démontré suivant la prépondérance des probabilités que sa marque ne créait pas de confusion avec celle de lopposant à la date de production de lopposition. Le quatrième motif dopposition est donc accueilli lui aussi.

 

[16]    Lopposant assumait, à légard du premier motif dopposition, le fardeau initial de prouver quil employait sa marque avant la date à laquelle la requérante a produit sa demande denregistrement et quil ne lavait pas abandonnée à la date de publication de la demande. Il sest acquitté de ce fardeau avec laffidavit quil a souscrit, lequel fait état de lemploi antérieur et continu de la marque en liaison avec des vêtements et avec des articles chaussants. Il reste donc à trancher la question de la confusion en fonction de la date pertinente, en lespèce, la date de production de la demande denregistrement.

 


[17]    Encore une fois, les conclusions relatives au troisième motif sont également applicables au présent motif. La requérante ne sest donc pas acquittée du fardeau de prouver que sa marque ne créait pas de confusion avec la marque BONGO de lopposant à la date de production de la demande denregistrement. Le premier motif dopposition est lui aussi accueilli, ce qui rend inutile lexamen du deuxième motif.

 

[18]    En conséquence, en vertu du pouvoir qui ma été délégué sous le régime du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande de la requérante.

  

FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 8 JANVIER 2010.

 

 

David J. Martin,

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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