Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 21

Date de la décision : 2012‑02‑08

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Gowling Lafleur Henderson LLP visant l’enregistrement no LMC574275 de la marque de commerce KING’S au nom de TEN REN TEA CO., LTD.

[1]               Le 22 juin 2009, à la demande de Gowling Lafleur Henderson s.r.l. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch.  T‑13 (la Loi), à Ten Ren Tea Co., Ltd., la propriétaire inscrite (l'Inscrivante) de l'enregistrement no LMC574275 pour la marque de commerce KING’S (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée en vue de son emploi en liaison avec les marchandises suivantes :

Thé, thé en sachets, feuilles de thé, gâteaux, garnitures à base de thé pour gâteaux et tartes, cacao, café, friandises [sic], biscuits.

[3]               L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce indique, à l’égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période au cours de laquelle l’emploi doit être établi s’étend du 22 juin 2006 au 22 juin 2009 (la Période pertinente).

[4]               La définition d’« emploi » applicable en l’espèce est énoncée au paragraphe 4(1) de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               Il est bien établi que l’objet et la portée de l’article 45 de la Loi sont d’établir une procédure simple, sommaire et expéditive visant à éliminer le bois mort du registre. Bien que de simples allégations d’emploi ne suffisent pas à établir l’emploi dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45 [voir Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1979), 45 C.P.R. (2d) 194, conf. (1980), 53 C.P.R. (2d) 63 (C.A.F.)], le critère relatif à la preuve d’emploi sous le régime de l’article 45 est peu exigeant [Lang, Michener, Lawrence & Shaw c. Woods Canada Ltd. (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.)], et il n’est pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.)]. Il faut néanmoins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée au cours de la période pertinente en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services spécifiés dans l’enregistrement.

[6]               En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit l’affidavit de Chi‑Wen Liu. Bien que les deux parties aient produit un plaidoyer écrit, seule la Partie requérante était représentée à l’audience tenue en l’espèce.

[7]               Dans son affidavit, M. Liu atteste qu’il est directeur adjoint de l’Inscrivante depuis le 1er septembre 2000. M. Liu explique que l’Inscrivante fabrique, distribue et exporte des produits, y compris du thé, en Asie, en Amérique du Nord et en d’autres pays. Il ajoute que l’Inscrivante vend du thé oolong portant la Marque, et qu’au cours de la Période pertinente, elle a exporté du thé de Taïwan qu’elle a ensuite vendu sous la Marque au Canada.

[8]               Comme preuve de cet emploi, M. Liu présente les éléments suivants :

         Pièce A : des photocopies d’une boîte de thé aplatie. Sur un côté de la boîte, on peut lire les mots « Ten Ren King’s Tea », au-dessous desquels se trouve une description du produit. Sur le même côté, il est indiqué que l’Inscrivante a emballé le produit et que Ten Ren Tea Co. (Toronto) Ltd. en est l’importateur canadien.

         Pièce B : une copie d’une déclaration douanière d’exportation, laquelle est exigée, explique M. Liu, par le gouvernement de Taïwan pour l’exportation du produit au Canada. La déclaration, dont la date s’inscrit dans la période pertinente, consigne l’exportation de 3 600 unités de thé par l’Inscrivante au Canada. L’acheteur figurant sur ce document est Ten Ren Tea Co., (Ontario) Ltd. Un des produits d’exportation décrits dans le document est le « Oolong Tea (103 King’s Tea) » [Thé oolong (103 King’s Tea)].  

         Pièce C : une copie du bordereau de marchandises qui accompagnait la cargaison de thé décrite dans la pièce B. Le premier produit qui figure sur cette liste est le « Oolong Tea (103 King’s Tea) ». Ten Ren Tea Co., (Ontario) Ltd. y est désigné en tant qu’acheteur.

         Pièce D : une copie d’une facture pour la cargaison de thé décrite dans les pièces B et C. Une fois de plus, je remarque que Ten Ren Tea Co., (Ontario) Ltd. est désigné en tant qu’acheteur.  

[9]               M. Liu termine son affidavit en déclarant que [traduction] « chacune des 3 600 unités de thé King’s qui ont été expédiées au Canada ainsi qu’il est indiqué dans les pièces B, C et D était contenue dans un emballage comme celui montré dans la pièce A ».

[10]           La Partie requérante fait observer que l’affidavit de M. Liu ne fait aucune tentative pour établir que l’Inscrivante a employé la Marque en liaison avec autre chose que du thé. Puisque je suis d’accord avec cet argument et qu’aucune circonstance spéciale n’a été avancée pour justifier l’absence d’un tel emploi, l’analyse qui suit se limitera à la question de savoir si l’emploi de la Marque a été démontré seulement en liaison, uniquement, avec du « thé » [voir John Labatt Ltd. c. Rainier Brewing Co. (1984), 80 C.P.R. (2d) 228 (C.A.F.)].

[11]           La Partie requérante fait valoir deux principaux arguments, le premier étant que l’Inscrivante n’a pas démontré l’emploi de sa marque telle qu’elle est enregistrée, et le second étant qu’il n’y a aucune preuve que l’Inscrivante ou un licencié a effectué quelque vente que ce soit au Canada dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante.

[12]           Plus précisément, au regard du premier argument, la Partie requérante soutient que l’emballage présenté dans la pièce A ne montre le mot « King’s » que dans l’expression « Ten Ren King’s Tea », où le mot « King’s » n’est pas séparé des autres mots ni ne s’en distingue. La Partie requérante s’appuie sur le même raisonnement pour soutenir que le mot « King’s », dans la phrase descriptive « Oolong Tea (103 King’s Tea) », que l’on voit dans les autres pièces, ne démontre pas l’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée.

[13]           En ce qui concerne l’emballage du produit, je constate que le nom complet de l’entreprise de l’Inscrivante y figure deux fois, assez près des mots « Ten Ren King’s Tea », ce qui indique clairement que l’Inscrivante est la source du produit. Par conséquent, je conviens avec l’Inscrivante qu’un consommateur penserait que les mots « Ten Ren » dans « Ten Ren King’s Tea » sont une abréviation du nom de l’Inscrivante et une référence à la source des marchandises et qu’ils constituent une marque de commerce ou un nom commercial distinct, non une partie de la marque de commerce en soi. La présentation de l’inscription « TenRen’sTEA », répétée en caractères de fantaisie sur le dessus de la boîte, où « TenRen » est différent, sur le plan visuel, du mot « TEA », peut d’autant plus influencer la perception du consommateur moyen à cet égard. Enfin, le mot descriptif « tea » qui suit « King’s » sert à décrire le produit contenu dans l’emballage et, de la même manière, ne serait pas perçu comme faisant partie de la marque de commerce en soi [voir Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (C.O.M.C.)]. Par conséquent, contrairement aux faits de l’affaire Registraire des marques de commerce c. Compagnie Internationale pour l’Informatique CII Honeywell Bull, il ne s’agit pas ici d’un cas où le consommateur penserait que l’inscription « Ten Ren King’s Tea » sur l’emballage est une marque composée; il penserait plutôt que « King’s » est une marque de commerce en soi [voir Mantha & Associates c. Old Time Stove Co. Inc. (1990), 30 C.P.R. (3d) 574 (C.O.M.C.); Comstock Ltd. c. Commodity Quotations Inc. (1997), 83 C.P.R. (3d) 240 (C.O.M.C.)].

[14]           Comme j’ai déjà conclu que l’emballage du produit présenté dans la pièce A fournit une preuve d’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée, je n’ai pas besoin d’examiner la présentation de la Marque dans les autres pièces.

[15]           En ce qui concerne le second argument, la Partie requérante fait valoir que M. Liu ne fournit aucune explication dans son affidavit quant au lien qui unit l’Inscrivante à l’entité (à savoir Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd.) qui figure en tant qu’importateur et acheteur du thé de l’Inscrivante dans les pièces B, C et D. Par conséquent, soutient la Partie requérante, la preuve n’indique pas clairement si Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd. est une licenciée de la Marque, si ces ventes s’inscrivent dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante, ni même quelle pourrait être la pratique normale du commerce de l’Inscrivante. De plus, ajoute la Partie requérante, la confusion et l’incertitude sont accrues du fait que la pièce A indique que l’importateur est Ten Ren Tea Co. (Toronto) Ltd. et non Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd., et qu’aucune explication n’est fournie quant au lien, s’il en est, qui unit l’Inscrivante, Ten Ren Tea Co. (Toronto) Ltd., et Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd.

[16]           Or, M. Liu décrit clairement la pratique normale du commerce de l’Inscrivante lorsqu’il indique que l’Inscrivante est un fabricant étranger et un exportateur de thé. En outre, lorsque l’on examine l’ensemble de la preuve, le lien entre l’Inscrivante et Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd. est évident; les pièces B, C, et D indiquent clairement que Ten Ren Tea Co. Ltd. est le fabriquant étranger, le vendeur et l’exportateur du thé, alors que Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd. en est l’importateur et l’acheteur canadien. Je ne vois rien qui puisse faire penser que ces documents ne représentent pas une transaction authentique qui s’inscrit dans la pratique normale du commerce de l’Inscrivante. Le fait que l’emballage du produit présenté en tant que pièce A indique que Ten Ren Tea Co. (Toronto) Ltd. est l’importateur du thé de l’Inscrivante ne suffit pas à mettre en doute l’ensemble de la preuve. En fait, la preuve montre que Ten Ren Tea Co. (Toronto) Ltd. et Ten Ren Tea Co. (Ontario) Ltd. partagent la même adresse, ce qui laisse entendre à tout le moins que ces entreprises sont liées.

Décision

[17]           Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’emploi de la Marque au cours de la période pertinente a été démontré en liaison avec les marchandises décrites comme du « thé », au sens des articles 45 et 4 de la Loi. Par conséquent, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié pour en radier les marchandises « thé en sachets, feuilles de thé, gâteaux, garnitures à base de thé pour gâteaux et tartes, cacao, café, friandises [sic], biscuits », conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Kathryn Barnett

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Dominique Lamarche, LL.L., trad. a.

 

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