Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

Référence: 2012 COMC 10

Date de la décision: 2012-01-31

 

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Bereskin & Parr LLP visant l’enregistrement no LMC483,466 de la marque de commerce BODY PILLOW.

 

[1]               Le 8 décembre 2008, à la demande de Bereskin & Parr LLP (la partie requérante), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), à Beco Industries Ltd., propriétaire inscrit de l’enregistrement no LMC483,466 pour la marque de commerce BODY PILLOW (la Marque) enregistrée en liaison avec les marchandises suivantes : « Literie, nommément oreillers » (les Marchandises).

[2]               Selon l’article 45 de la Loi, le propriétaire inscrit d’une marque de commerce doit démontrer, à l’égard de chacune des marchandises que spécifie l’enregistrement, que la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis. Dans la négative, le propriétaire inscrit doit démontrer la date où la marque a été employée en dernier lieu et expliquer la raison de son défaut d’emploi. La période pertinente en l’espèce se situe entre le 8 décembre 2005 et le 8 décembre 2008.

[3]               L’emploi en liaison avec des marchandises est décrit comme suit à l’article 4(1) de la Loi :

4.(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[4]               Il est bien établi que l’article 45 a pour objet de prévoir une procédure simple, sommaire et expéditive visant à débarrasser le registre du « bois mort ». Les observations formulées par le juge Russell dans Uvex Toko Canada Ltd. c. Performance Apparel Corp. (2004), 31 C.P.R. (4e) 270 (C.F.) illustre parfaitement ce principe :

86. Nous savons que l’objet de l’article 45 est de débarrasser le registre du « bois mort ». Nous savons que la simple affirmation par le propriétaire de l’emploi de sa marque de commerce ne suffit pas et que le propriétaire doit « indiquer » quand et ou la marque a été employée. Il nous faut des éléments de preuve suffisants pour être en mesure de nous former une opinion en vertu de l’article 45 et d’appliquer cette disposition.

[5]               S’il est vrai que le fardeau de la preuve applicable à l’établissement de l’emploi de la marque de commerce est de nature à éviter la surabondance de preuve, il n’en faut pas moins communiquer des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a bel et bien été employée durant la période pertinente. La preuve doit permettre au registraire d’arriver à la conclusion que chacune des marchandises ou services spécifiés dans l’enregistrement ont été employés au sens de l’article 4 de la Loi. De plus, le fardeau de preuve incombe en totalité au propriétaire inscrit [88766 Inc. c. George Weston Ltd. (1987), 15 C.P.R. (3e) 260 (C.F. 1ere inst.)], et toute ambigüité dans la preuve doit être interprétée contre celui-ci [Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1980), 53 C.P.R. (2e) 62 (C.A.F.)].

[6]               En réponse à l’avis du registraire, Beco Industries LP a produit l’affidavit de Luc Olivier, Chef des opérations (CFO), daté du 8 juin 2009 (l’Affidavit). Des pièces ont été jointes à l’Affidavit afin d’indiquer l’emploi de la Marque. Ensuite, la partie requérante et Beco Industries LP ont soumis des argumentations écrites. Les deux parties ont également demandé d’être entendues lors d’une audience qui s’est tenue le 21 juin 2011.

[7]               Une seule facture peut être suffisante afin d’établir l’emploi de la Marque (Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. et al. (1987), 13 C.P.R. (3e) 289 (C.F.)).  Beco Industries LP  a soumis plusieurs factures et bons de commande qui sont pertinents pour la période requise. Cependant, la marque de commerce BODY PILLOW se retrouve rarement sur les documents présentés. En effet, comme le souligne la partie requérante, on retrouve plutôt des abréviations qui décrivent les produits tels que : « ASST BODYCASE AST », « BPLW », « BOD PILLW ». 

[8]               La jurisprudence nous indique qu’une marque de commerce n’est pas employée par le propriétaire lorsque celle-ci est altérée par des abréviations ou des éléments descriptifs du produit [Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3e) 535 (C.O.M.C.].  Mais, dans le cas d’espèce, Beco Industries LP  a clairement établi au paragraphe 13 de l’Affidavit et pièce « B » que ces acronymes réfèrent à des coussins vendus pour la période concernée par la titulaire et ses prédécesseurs en titre sous la Marque. Le registraire accepte cette assertion comme preuve au dossier.

[9]               La partie requérante fait valoir que l’exemplaire de l’emballage en plastique (la pièce justificative « B ») annexé à l’Affidavit ne permet pas de démontrer l’emploi de la Marque.  Mais, comme le soutient Beco Industries LP, la Marque est bien en vue sur l’exemplaire de l’emballage qui a servi à empaqueter et commercialiser les coussins (la pièce justificative « B »).  La Marque était donc bien apposée sur l’emballage du produit lors du transfert de propriété.  Ainsi, à la lumière de l’ensemble de la preuve fournie, je considère que l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises a été démontré eu égard à l’article 4 de la Loi.

[10]           Cependant, une précision majeure mérite d’être apportée. En effet, suite à l’analyse des éléments présentés, il a été déterminé que la preuve soumise par Beco Industries LP démontre son utilisation de la Marque. Toutefois, tel que mentionné précédemment, le propriétaire inscrit figurant dans le registre des marques de commerce n’est pas Beco Industries LP, mais plutôt Beco Industries Ltd.   En guise d’explication, M. Olivier soutient aux paragraphes 3 à 5 de l’Affidavit, les faits suivants :

         Beco Industries Ltd. était le propriétaire inscrit de la Marque au Canada pour les Marchandises.

         Le 5 décembre 2005 (soit deux ans avant que l’affiant entre dans ses fonctions), la Marque fût cédée une première fois à une compagnie qui, pour reprendre les mots de l’affiant, fait des affaires sous le nom de Prince Apparel Limited Partnership.

         Le même jour, la Marque fût cédée une deuxième fois, mais cette fois-ci à Beco Industries LP.

[11]           Il faut donc conclure que, selon l’Affidavit, Beco Industries Ltd. était le propriétaire inscrit jusqu'au 5 décembre 2005, date des deux cessions. Ultimement, par l’effet cumulatif de ces cessions, Beco Industries LP, devint le nouveau propriétaire de la Marque.

[12]           Aucun document n’a été fourni en annexe afin d’appuyer les cessions précitées. De plus, dans son argumentation écrite, Beco Industries LP s’est limité à réitérer la nature sommaire de la procédure sous l’article 45 et n’a pas fourni d’autres éléments permettant d’éclaircir les faits allégués.

[13]           La Loi ne contient aucune disposition qui rend obligatoire l’enregistrement d’une cession auprès du registraire afin d’entériner le changement de propriétaire.  La partie qui l’invoque peut fournir une preuve, comme une copie certifiée ou un original de l’acte de cession ou tout autre élément qui soit considéré satisfaisant, afin d’appuyer ses assertions de cession. Bien qu’aucune de ces démarches ne soit obligatoire, elles auraient été grandement utiles dans l’analyse du présent dossier.

[14]           Il est clairement établi qu’afin de satisfaire le registraire le souscripteur d’affidavit doit fournir une preuve suffisamment précise et détaillée de la cession ou des pièces à l'appui qui peuvent permettre de conclure qu’il y a bel et bien eu transfert de la marque de commerce. [Gowling Lafleur Henderson LLP c. Midland Walwyn Capital Inc. /Capital Midland Walwyn Inc. (2011) 90 C.P.R. (4d) 181 (C.O.M.C.)]. En ce sens, M. Olivier fournit aux paragraphes 4 et 5 de l’Affidavit des déclarations suffisamment claires et précises pour permettre de conclure que Beco Industries Ltd. à céder la Marque à Beco Industries LP.

[15]           Pour cette raison, je suis convaincue que la preuve démontre l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises, au sens du paragraphe 4 et de l’article 45 de la Loi.

Décision

[16]           Par conséquent, en vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement no. LMC483,466 pour la marque de commerce BODY PILLOW est maintenu conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

 

 

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Darlene H. Carreau

Présidente

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

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