Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 160

Date de la décision : 2016-09-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

Smuglers LLP

Partie requérante

et

 

Richard Cook

Propriétaire inscrit

 

 

 



LMC783,659 pour la marque de commerce ICE SKIN

Enregistrement

[1]               Le 25 juin 2014, à la demande de Smuglers LLP, Inc. (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Ice Skin Inc., qui était alors la propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC783,659 de la marque de commerce ICE SKIN (la Marque). Suivant l'envoi de l'avis, le registraire a porté au registre un changement dans la propriété de l'enregistrement au profit de Richard Cook (le Propriétaire).

[2]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants [Traduction] :

Vêtements, nommément vêtements de dessous qui éloignent l'humidité du corps.

 

[3]               L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce indique, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’il précise la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 25 juin 2011 au 25 juin 2014.

[4]               La définition pertinente d'« emploi » en liaison avec des produits est énoncée à l'article 4(1) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[5]               En réponse à l'avis du registraire, le Propriétaire a produit son propre affidavit, souscrit le 26 janvier 2015 à Vancouver, en Colombie-Britannique. Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites; la tenue d'une audience n'a pas été sollicitée.

La preuve du Propriétaire

[6]               Dans son affidavit, M. Cook atteste qu’il est le président d’Ice Skin Inc. (ISI), qu’il désigne comme étant une petite entreprise qu’il exploite à partir de son domicile à Toronto, en Ontario. Il atteste qu’ISI a pour unique activité la fabrication et la vente des produits visés par l’enregistrement, qui se trouvent être des vêtements de dessous qui éloignent l'humidité du corps. M. Cook affirme que, pendant la période pertinente, ISI a vendu ses produits de vêtements à des clients, qui sont principalement des équipes de hockey amateur, au Canada en liaison avec la Marque. À cet égard, M. Cook atteste que la Marque figurait sur des étiquettes fixées aux vêtements de dessous, de même que sur les emballages dans lesquels les vêtements de dessous ont été vendus. Il atteste également que les clients ont été facturés au moment de la livraison.

[7]               À l’appui, M. Cook joint les pièces suivantes à son affidavit :

         La pièce A se compose de trois photographies de ce que M. Cook atteste sont des spécimens d’emballages des produits visés par l’enregistrement, à savoir des [Traduction] « tee-shirts à manches longues de taille très petite pour enfants (lesquels sont des vêtements de dessous) qui... éloignent l'humidité du corps ». Il confirme que les emballages illustrés sont représentatifs des emballages utilisés par ISI pendant la période pertinente.
Le mot ICESKIN figure sous les lettres stylisées « iS » sur une étiquette visible à travers l’emballage plastique transparent du tee-shirt. M. Cook explique que le logo « iS » est une autre marque de commerce employée par ISI. Le logo « iS », sans le mot ICESKIN au-dessous, est également visible sur les vêtements de dessous mêmes.

         La pièce B se compose d'une photographie d’une étiquette qui, M. Cook atteste, est fixée aux tee-shirts présentés en pièce A. L’étiquette présente « ICE SKIN » au-dessous du même logo « iS » stylisé qui est visible dans la pièce A. M. Cook confirme que l’étiquette illustrée est représentative de celles fixées aux produits visés par l’enregistrement vendus pendant la période pertinente.

         La pièce C se compose de photographies de huit factures manuscrites qui, M. Cook atteste, ont toutes été rédigées de sa main pour la vente des produits visés par l’enregistrement à des équipes de sport amateur en Ontario. M. Cook explique que, en tant que petite entreprise, ISI a employé des factures manuscrites plutôt que des factures officielles préimprimées. Les factures portent toutes une date comprise dans la période pertinente. Le nom d’ISI ne figure sur aucune des factures, mais la Marque y inscrite, également de façon manuscrite, dans le coin supérieur gauche de six des factures.

Analyse - statut juridique du Propriétaire

[8]               À titre préliminaire, la Partie requérante met en doute le statut juridique d’ISI, la propriétaire inscrite pendant la période pertinente.

[9]               À cet égard, dans ses représentations écrites, la Partie requérante joint une copie d’un certificat de dissolution d’Ice Skin Inc., délivré par Industrie Canada et daté du 12 novembre 2011. À ce titre, la Partie requérante demande au registraire d’admettre d’office cette dissolution par souci d'intérêt public. Compte tenu de cette apparente dissolution, la Partie requérante soutient que, contrairement aux prétentions de M. Cook, ISI n’aurait pas pu employer la marque de commerce de façon continue pendant toute la période pertinente ou, à vrai dire, n’aurait pu agir d’aucune des façons alléguées par M. Cook. La Partie requérante soutient à plusieurs reprises que les déclarations contenues dans l’affidavit de M. Cook concernant les activités d’ISI sont [Traduction] « fausses, puisque l'entreprise a été dissoute le 12 novembre 2011 ».

[10]           En réponse à la tentative de la Partie requérante [Traduction] « de présenter sa propre preuve à l’égard du statut d’entreprise » d’ISI, le Propriétaire souligne qu'aucun élément de preuve d’une partie requérante n'est admissible dans le contexte d’une procédure prévue à l’article 45 de la Loi [citant Berg Equipment Co c Merdith & Finlayson, 1991 CarswellNat 335 (CAF)].

[11]           Je souligne qu’il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour éliminer le « bois mort » du registre et qu'à ce titre, le niveau de preuve auquel le propriétaire inscrit doit satisfaire est peu élevé [Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004), 2004 CF 448, 31 CPR (4th) 270]. On doit accorder une grande crédibilité aux déclarations faites dans un affidavit [Ogilvy Renault c Compania Roca-Radiadores SA, 2008 CarswellNat 776 (COMC)] et la preuve doit être considérée dans son ensemble; le fait de se concentrer sur des éléments de preuve individuels n'est pas la bonne approche [Kvas Miller Everitt c Compute (Bridgend) Ltd (2005), 47 CPR (4th) 209 (COMC)]. Enfin, la procédure prévue à l'article 45 n'est pas censée prévoir un moyen supplémentaire de contester une marque de commerce autre que la procédure litigieuse courante visée par l’article 57 [Meredith & Finlayson c Canada (Registraire des marques de commerce) (1991), 40 CPR (3d) 409 (CAF)].

[12]           À mon avis, admettre ceci d’office dans la mesure et pour l'objet allégués par la Partie requérant serait contraire à ces principes généraux. Un propriétaire inscrit aurait alors à fournir une surabondance d'éléments de preuve afin de répondre à des questions qui débordent de la portée restreinte de la présente procédure et il aurait les mains liées si une admission d’office était faite nonchalamment, puisque le propriétaire inscrit n’a pas le droit de soumettre de preuve en réponse à de tels avis imprévus.

[13]           De même, une partie requérante n’a pas le droit de soumettre sa propre preuve dans une procédure prévue à l’article 45. À ce titre, elle ne devrait pas avoir la possibilité de faire au moyen de demandes d'admission d’office ce qu’elle n’est autrement autorisée à faire par la production d'une preuve ou par contre-interrogatoire. À titre de procédure sommaire et expéditive, une procédure prévue à l’article 45 n’est pas un forum approprié pour ce genre de [Traduction] « preuve ». En effet, je souligne qu’il existe peut-être d’autres dossiers concernant le statut d’entreprise d’ISI pendant la période pertinente qui n’ont pas été présentés au registraire.

[14]           Quoi qu’il en soit, la question de savoir si les activités d’ISI attestées par M. Cook après sa dissolution apparente en novembre 2011 respectaient autrement la réglementation provinciale ou fédérale dépasse la portée de la présente procédure [voir Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst)]. La Cour fédérale a insisté sur l’importance de veiller à ce que les exigences techniques ne deviennent pas [Traduction] « un piège pour qui ne se méfie pas », dans les cas où il est évident qu’une marque de commerce a été employée par son propriétaire légitime [selon Baume & Mercier SA c Brown (1985), 4 CPR (3d) 96 (CF 1re inst)]. Même si cette affaire concernait les aspects techniques des affidavits, compte tenu du niveau de preuve requis dans une procédure prévue à l’article 45 [selon Uvex, supra], je considère que le principe général s'applique en l'espèce [voir également Riches Mckenzie & Herbert LLP c Chaussures M & M Inc/M & M Footwear Inc, 2013 COMC 222, 117 CPR (4th) 234)].

[15]           En l’espèce, comme nous le verrons de façon plus approfondie ci-dessous, la preuve démontre que la Marque était clairement employée pendant la période pertinente par ISI et/ou M. Cook lui-même. Bien qu'il ne s'agisse pas d'un élément déterminant, j’aimerais également souligner que, comme la preuve indique que M. Cook était en fait l’unique propriétaire d’ISI, la question de savoir si l'entreprise a été dissoute à un certain moment est sans portée pratique.

Présentation de la Marque

[16]           Dans ces représentations écrites, la Partie requérante soutient qu’aucune des photographies jointes en pièce A ne fait réellement voir la Marque telle qu'elle est enregistrée. À cet égard, elle soutient que la marque de commerce qui figure sur les produits est une combinaison du logo stylisé « iS » et d'« ICESKIN » en plus petits caractères, en un seul mot et en lettres majuscules.

[17]           En ce qui concerne la présentation d'ICESKIN en un mot, j’aimerais d’abord souligner que la Partie requérante décrit de façon incorrecte la Marque comme étant [Traduction] « Ice Skin avec seulement le I et le S en lettres majuscules ». En fait, la Marque est la marque verbale ICE SKIN.

[18]           Quoi qu’il en soit, j’estime que la présentation d'ICESKIN en un seul mot plutôt qu'en deux sur les emballages produits en pièce ne constitue qu'une variation mineure par rapport à la Marque telle qu'elle est enregistrée [selon Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie international pour l'informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF)].

[19]           De plus, l'emploi d'une marque verbale en combinaison avec des mots ou des éléments graphiques supplémentaires constitue un emploi de la marque verbale si le public, à la première impression, percevrait que la marque verbale en soi est employée [Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 (COMC); 88766 Canada Inc c National Cheese Co (2002), 24 CPR (4th) 410 (COMC)]. Il s'agit là d'une question de fait qui dépend de celles de savoir si la marque verbale se démarque des éléments supplémentaires, par exemple par l'emploi d'une police ou d'une taille de caractères différente, ou si les autres éléments seraient perçus comme étant clairement descriptifs ou comme constituant une marque de commerce ou un nom commercial distincts [voir Nightingale, supra]. De plus, un enregistrement d’une marque verbale peut être étayé par l'emploi de cette marque sous une forme stylisée ou dans une couleur quelconque [voir Stikeman, Elliott c Wm Wrigley Jr Co (2001), 14 CPR (4th) 393 (COMC)] et rien n'empêche de présenter plusieurs marques de commerce sur des produits ou sur leur emballage [voir AW Allen Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst)].

[20]           En l’espèce, je conviens avec le Propriétaire que les différences dans la taille, le style et la police de caractères entre ICESKIN et le logo « iS », en plus de la présentation distincte du logo « iS », indiquent clairement que les deux éléments sont distincts et que la Marque en soi est employée sur les emballages des vêtements de dessous.

[21]           Quoi qu’il en soit, j’admets que la présentation d’ICE SKIN sur les factures produites en pièce constitue une présentation de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement.

[22]           Pour sa part, la Partie requérante soutient qu'« ICE SKIN » inscrit sur les factures produites en pièce renvoie à Ice Skin Inc., faisant valoir que le texte figure dans [Traduction] « la partie de la facture généralement réservée au nom de l’entreprise ». En réponse, le Propriétaire soutient que rien dans la preuve ne suggère que cette mention renvoie à la dénomination sociale « Ice Skin Inc. » plutôt qu’à une marque de commerce.

[23]           Je soulignerais en premier lieu que l'emploi d'une marque de commerce et l'emploi d'un nom commercial ne s'excluent pas nécessairement [voir Consumers Distributing Co/Cie Distribution aux Consommateurs c Toy World Ltd, 1990 CarswellNat 1398 (COMC), au paragraphe 14].

[24]           De plus, la Cour d’appel fédérale a statué que la présentation d’une marque de commerce au haut d’une facture qui accompagne des produits au moment de leur transfert dans la pratique normale du commerce peut, dans certaines circonstances, constituer un emploi de cette marque de commerce en liaison avec les produits énumérés dans la facture [voir Hortilux Schreder BV c Iwasaki Electric Co, 2012 CAF 321, CarswellNat 4836]. La principale considération demeure celle de [Traduction] « savoir si la marque de commerce est employée comme marque de commerce pour décrire les marchandises énumérées dans la facture donnant ainsi à la personne à qui sont transférées les marchandises un avis suffisant de cet emploi » [selon Tint King of California Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 144, 56 CPR (4th) 223, au para 32]. À cet égard, il est important de tenir compte de l'importance de la place qu'occupe la marque de commerce au haut de la facture et de vérifier si d'autres marques de commerce figurent dans la facture, que ce soit dans le corps de celle-ci ou autrement [selon Hortilux, supra, au para 12].

[25]           En l’espèce, M. Cook atteste que les clients sont [Traduction] « facturés au moment de la livraison ». De plus, la Marque figure au haut de certaines des factures produites en pièce, sans qu’aucune autre marque de commerce ne figure sur aucune des factures. Comme l’a attesté M. Cook, les seuls produits vendus par ISI pendant la période pertinente étaient les produits visés par l’enregistrement.

[26]           Quoique la Partie requérante attire l’attention sur le fait que les factures produites en pièce ne présentent aucune description de produit autre que [Traduction] « articles » et « ensembles » de produits, les descriptions renvoient à diverses tailles de vêtements, ce qui rejoint la déclaration de M. Cook portant que les seuls produits vendus par ISI étaient des vêtements de dessous.

[27]           Conjointement avec les déclarations de M. Cook, j’admets que les factures produites en pièce montrent des transferts de vêtements de dessous de marque ICE SKIN, tels que montrés sur les photographies produites en pièce. Ainsi, je suis convaincu que le Propriétaire a établi l'emploi de la Marque au Canada pendant la période pertinente en liaison avec les produits visés par l'enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Décision

[28]           Compte tenu de tout ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

______________________________

Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme
Nathalie Tremblay, trad.


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

Aucune audience tenue

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Blake, Cassels & Graydon LLP                                              POUR LE PROPRIÉTAIRE

INSCRIT

 

Smuglers LLP                                                                          POUR LA PARTIE

REQUÉRANTE

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