Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 14

Date de la décision : 2016-01-27

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45

 

 

Survival Systems Training Limited

Partie requérante

et

 

Survival Systems Holdings Limited

Propriétaire inscrite

 

 

 



LMC500,051 pour la marque de commerce M.I.R.T.

Enregistrement

[1]               Le 16 octobre 2013, à la demande de Survival Systems Training Limited (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Survival Systems Holdings Limited (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC500,051 pour la marque de commerce M.I.R.T. (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits [Traduction] « simulateur d'entraînement mobile sophistiqué en sécurité industrielle, qui est monté sur un châssis de remorque conventionnel et est employé pour faire faire des entraînements simulés dangereux et non dangereux en sécurité et en sauvetage aux travailleurs des secteurs industriel, institutionnel, municipal, de la fabrication d'équipement lourd et des services d'urgence ».

[3]               La Marque est également enregistrée pour emploi en liaison avec les services [Traduction] « prestation de cours d'entraînement liés à des entraînements pratiques en sécurité industrielle et en sauvetage ».

[4]               L'avis exigeait que la Propriétaire fournisse une preuve établissant que la Marque avait été employée au Canada en liaison avec chacun des produits et des services spécifiés dans l'enregistrement à un moment quelconque entre le 16 octobre 2010 et le 16 octobre 2013. Si la Marque n'avait pas été ainsi employée, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[5]               Les définitions d'emploi en liaison avec des produits et des services sont énoncées comme suit à l'article 4 de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, au moment du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les colis dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

4(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des produits ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces produits sont exportés du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces produits.

[6]               Il est bien établi que de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi dans le contexte de la procédure prévue à l'article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l'emploi dans le cadre de cette procédure soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu'il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve [Union Electric Supply Co c le Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il n'en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et des services spécifiés dans l'enregistrement au cours de la période pertinente.

[7]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit d'Ian Crowe, directeur financier de la Propriétaire, souscrit le 15 mai 2014. Seule la Propriétaire a produit des représentations écrites et était représentée à l'audience qui a été tenue.

La preuve de la Propriétaire

[8]               Dans son affidavit, M. Crowe atteste que la Propriétaire, par l'intermédiaire de sa société d'exploitation licenciée, Survival Systems Limited, fabrique des simulateurs spécialisés, y compris des [Traduction] « simulateurs d'entraînement à l'évacuation sous l'eau, simulateurs d'extincteur d'incendie, simulateurs d'évacuation d'hélicoptère haute fidélité, simulateurs d'entrée en espace clos », de même que des [Traduction] « systèmes d'ascension pour l'industrie pétrolière mondiale, les applications militaires et industrielles dans le secteur maritime et le secteur de l'industrie lourde »

[9]               M. Crowe atteste également que la Propriétaire met au point des programmes d'entraînement exclusifs reliés à la sécurité en espace clos et à l'emploi des simulateurs et de l'équipement de la Propriétaire.

[10]           Il confirme que la Propriétaire [Traduction] « contrôle les caractéristiques et/ou la qualité des marchandises vendues et des services exécutés en liaison avec [la Marque] ».

[11]           M. Crowe affirme que la Marque est employée de manière continue au Canada depuis 1993. Il atteste que la Propriétaire et ses sociétés affiliées ont vendu environ 200 simulateurs, dont sept [Traduction] « simulateurs d'entraînement en espace clos » vendus en liaison avec la Marque. Il affirme que ces simulateurs ont été vendus dans divers pays, ainsi que dans la province du Québec. M. Crowe décrit le [Traduction] « simulateur mobile de sauvetage industriel » comme un simulateur d'entraînement à la sécurité, composé d'une remorque, d'un véhicule remorqueur ou d'un véhicule d'entreposage et d'un ensemble d'équipements.

[12]           M. Crowe reconnaît que la dernière vente d'équipement en liaison avec la Marque au Canada a été faite en septembre 2009, avant la période pertinente. Il explique que, [Traduction] « en raison de la nature hautement spécialisée des produits, le cycle de vente de la prise de contact initiale avec le client au contrat final et à la livraison peut varier de une à 15 années ». Il atteste que la Propriétaire a reçu des demandes de renseignements à propos de la fourniture d'équipement M.I.R.T. d'une société australienne en 2012 et d'une société du Royaume-Uni en 2013. Néanmoins, il atteste que la Propriétaire a annoncé, et continue d'annoncer, et est prête à vendre ses produits au Canada.

[13]           En ce qui concerne les services de cours d'entraînement visés par l'enregistrement, M. Crowe atteste qu'un simulateur M.I.R.T. a été installé aux installations de la Propriétaire en 2013 en vue d'offrir un entraînement à la sécurité en espace clos. Il explique que, depuis l'installation du simulateur, la Propriétaire a conclu un contrat avec Falck Safety Services Canada Incorporated pour autoriser sous licence Falck à fournir des services d'entraînement au moyen de l'équipement M.I.R.T. M. Crowe confirme que la Propriétaire contrôle les caractéristiques et la qualité des services d'entraînement offerts dans l'équipement. Il atteste que, en 2013, 48 participants ont fait un entraînement dans l'équipement M.I.R.T., un total de 32 610 $ ayant été facturé par Falck à ses clients.

[14]           Comme preuve d'emploi de la Marque, M. Crowe joint les pièces suivantes à son affidavit :

         La Pièce A comprend une photographie de l'entrée du simulateur M.I.R.T. installé sur la propriété de la Propriétaire en 2013. Un document encadré, dont une copie est également incluse dans la pièce, est affiché sur la porte. Le document affiche les logos de la Propriétaire et de Falck au-dessus de la Marque, de l'adresse et du site Web de la Propriétaire.

         La Pièce B se compose d'imprimés du site Web de la Propriétaire qui décrivent le simulateur M.I.R.T. Des descriptions d'autres simulateurs, commercialisés sous différentes marques de commerce, figurent également dans les pages Web.

         La Pièce C se compose d'une facture datée de septembre 2009, laquelle, atteste M. Crowe, se rapporte à [Traduction] « un droit ponctuel de fabriquer un simulateur sous [la Marque] accordé à une société appelée Survival Systems Training Limited ». Je souligne que la description de la facture indique ce qui suit : « MIRT TECHNOLOGY – One time use of MIRT technology as agreed between J Swaine and I Crowe » (TECHNOLOGIE MIRT – Usage unique de la technologie MIRT tel que convenu entre J. Swaine et I. Crowe).

         La Pièce D se compose d'une brochure de vente qui montre différents types de simulateurs offerts par la Propriétaire, dont un simulateur M.I.R.T. M. Crowe atteste que la brochure est représentative du matériel publicitaire de la Propriétaire pour le simulateur M.I.R.T. depuis 1993.

         La Pièce E se compose de copies de 20 factures, lesquelles, atteste M. Crowe, [Traduction] « ont été émises pour la fourniture de services d'entraînement M.I.R.T. dans l'équipement M.I.R.T. produit en Pièce A ». Les factures proviennent de la licenciée de la Propriétaire, Falck, et sont adressées à divers clients au Canada, comme la NS Firefighters School (école des pompiers de la Nouvelle-Écosse), située en Nouvelle-Écosse. Bien que 12 factures portent une date postérieure à la période pertinente, huit factures sont datées de juillet à septembre 2013.

Analyse – Services

[15]           En ce qui concerne les services visés par l'enregistrement, je soulignerais en premier lieu que les pages Web et la brochure de vente produites en preuve montrent généralement la Marque en lien avec l'équipement d'entraînement – soit les produits visés par l'enregistrement –, plutôt que les programmes d'entraînement, soit les services visés par l'enregistrement. De plus, je souligne que la Marque ne figure pas du tout sur les factures de Falck produites en Pièce E.

[16]           Cependant, en l'absence de représentations de la partie requérante, je reconnais que l'affichage de la Marque sur le simulateur d'entraînement, comme le montre la Pièce A, constitue un affichage de la Marque dans l'exécution des services visés par l'enregistrement. À cet égard, la Marque est affichée à l'entrée du simulateur d'une manière qui peut constituer un affichage en liaison à la fois avec le simulateur lui-même et avec les services d'entraînement exécutés au moyen du simulateur. Compte tenu du genre particulier des services et du fait que le simulateur M.I.R.T. fait partie intégrante de cet entraînement, je reconnais que les travailleurs à l'entraînement au moyen du simulateur lieraient l'affichage de la Marque à leur entraînement.

[17]           Par conséquent, je suis convaincu que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque en liaison avec les services visés par l'enregistrement pendant la période pertinente au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi.

Analyse – Produits

[18]           En ce qui concerne les produits visés par l'enregistrement eux-mêmes, cependant, M. Crowe reconnaît que la Propriétaire n'a pas vendu de simulateur M.I.R.T. pendant la période pertinente. Comme il n'y a aucune preuve d'emploi de la Marque au Canada pendant la période pertinente, la question qui se pose est celle de savoir si, aux termes de l'article 45(3) de la Loi, il existait des circonstances spéciales qui justifient le défaut d'emploi.

[19]           En règle générale, le défaut d'emploi sera sanctionné par la radiation, mais il peut y avoir une exception lorsque le défaut d'emploi est justifié en raison de circonstances spéciales [Smart & Biggar c Scott Paper Ltd, 2008 CAF 129, 65 CPR (4th) 303].

[20]           Afin de déterminer si des circonstances spéciales ont été démontrées, le registraire doit d'abord déterminer, à la lumière de la preuve produite, les raisons pour lesquelles la marque de commerce n'a pas été employée pendant la période pertinente. En second lieu, le registraire doit déterminer si les raisons du défaut d'emploi constituent des circonstances spéciales [tel qu'établi dans Registraire des marques de commerce c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 CPR (3d) 488 (CAF)]. La Cour fédérale a statué que des circonstances spéciales sont des circonstances ou des raisons qui sont [Traduction] « rares, peu communes ou exceptionnelles » [John Labatt Ltd c The Cotton Club Bottling Co (1976), 25 CPR (2d) 115 (CF 1re inst), au para 29].

[21]           Si le registraire détermine que les raisons du défaut d'emploi constituent des circonstances spéciales, le registraire doit encore déterminer si ces circonstances justifient la période de défaut d'emploi. Cette détermination repose sur l'examen de trois critères : (i) la durée de la période pendant laquelle la marque n'a pas été employée; (ii) si les raisons du défaut d'emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit; et (iii) s'il existe une intention sérieuse de reprendre l'emploi de la marque à court terme [tel qu'établi dans Harris Knitting Mills, précité].

[22]           La Cour d'appel fédérale a apporté des précisions quant à l'interprétation du deuxième critère, à savoir que ce critère doit obligatoirement être rempli pour que l'on puisse conclure à l'existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi d'une marque de commerce [Scott Paper Ltd, précité]. En d'autres termes, les deux autres critères sont pertinents, mais ils ne sauraient à eux seuls constituer des circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi.

[23]           En outre, l'intention de reprendre l'emploi doit être corroborée par la preuve [voir Arrowhead Spring Water Ltd c Arrowhead Water Corp (1993), 47 CPR (3d) 217 (CF 1re inst); et NTD Apparel Inc c Ryan 2003, CFPI 780, 27 CPR (4th) 73].

Raisons du défaut d'emploi

[24]           Dans ses représentations écrites, la Propriétaire soutient que [Traduction] « la nature du commerce des simulateurs d'entraînement hautement spécialisés » constitue une circonstance spéciale. À cet égard, la Propriétaire soutient que ses simulateurs [Traduction] « sont des produits hautement spécialisés et sophistiqués qui empruntent des voies de commercialisation spécialisées », et pour lesquels il existe un marché très limité. Elle soutient également que [Traduction] « le mouvement des produits de l'acheteur au vendeur sur ce marché est très lent (pouvant prendre jusqu'à 15 ans dans certains cas…) ». Elle fait valoir que :

[Traduction]
…étant donné le domaine restreint des acheteurs potentiels… conjugué aux longs délais d'approvisionnement qui précèdent les ventes de cet équipement spécialisé, il est tout à fait raisonnable de conclure que ces circonstances ont fait en sorte que [la Propriétaire] n'a pas été en mesure de vendre un simulateur M.I.R.T. pendant la Période pertinente.

[25]           La Propriétaire soutient que les conditions du marché sur lequel les simulateurs de la Propriétaire sont vendus (plus précisément, le domaine restreint des acheteurs et le temps nécessaire pour conclure une vente) sont indépendantes de sa volonté. La Propriétaire fait valoir qu'elle [Traduction] « ne devrait pas être pénalisée par la perte de son enregistrement simplement parce qu'elle exerce ses activités sur un marché sur lequel au moins une vente tous les trois ans risque de ne pas être conclue ».

[26]           La Propriétaire se compare favorablement au propriétaire inscrit dans l'affaire Country-Wide Automotive Ltd c CWA Constructions SA (1994), 57 CPR (3d) 435 (COMC). Dans cette affaire, le propriétaire inscrit se livrait à la fabrication et à la vente de véhicules tractés par câble et sur rails, comme des télécabines, des téléphériques, des navettes et des monorails. Dans son examen de la preuve de circonstances spéciales, le registraire a affirmé ce qui suit :

[Traduction]
Je suis d'avis que l'affidavit de M. Frech fait état de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi de la marque déposée. Étant donné la nature dispendieuse et sophistiquée des marchandises vendues par le propriétaire inscrit, il n'est pas surprenant qu'il y ait eu une période de défaut d'emploi assez longue. Comme l'a démontré M. Frech, des ventes de véhicules tractés par câble au Canada ont été faites en 1965, en 1969, en 1970, en 1974, en 1979, en 1981, en 1986 et en 1989. Conformément à ce modèle, M. Frech affirme que des négociations sont actuellement en cours pour la vente en 1993 de télécabines qui seront employées à Mont-Tremblant, au Québec. Ainsi, le propriétaire inscrit a donné une bonne raison pour expliquer pourquoi il y a eu une période de défaut d'emploi de sa marque et il a également démontré une intention sérieuse de reprendre l'emploi de sa marque. [p 428]

[27]           De façon plus générale, cependant, il a été établi que des conditions de marché défavorables et des décisions d'affaires volontaires ne font pas partie du genre de circonstances rares, peu communes ou exceptionnelles qui constituent des circonstances spéciales [voir Harris Knitting, précité; Lander Co Canada Ltd c Alex E Macrae & Co (1993), 46 CPR (3d) 417 (CF 1re inst)]. Dans les cas où le propriétaire inscrit n'avait pas l'intention d'abandonner sa marque au Canada, mais n'avait reçu aucune commande pour ses produits pendant la période pertinente, il a été déterminé qu'une telle situation n'était pas, en soi, suffisante pour maintenir l'enregistrement en question [voir Garrett c Langguth Cosmetic GMBH (1991), 39 CPR (3d) 572 (COMC) et Bereskin & Parr c Magnum Marine Corp, 2011 COMC 68, 93 CPR (4th) 327].

[28]           En outre, un propriétaire doit donner des raisons suffisantes pour expliquer pourquoi la période de défaut d'emploi était raisonnable [Blake, Cassels & Graydon LLP c Canadian Western Bank, 2011 COMC 201, 97 CPR (4th) 324]. Cependant, les allégations concernant les « conditions de marché » sont nécessairement liées, du moins en partie, aux décisions d'affaires et aux efforts de promotion du propriétaire de la marque de commerce. Dans la mesure où ces décisions et ces efforts ne sont pas rendus manifestes dans la preuve, il est difficile de conclure que des conditions précises du marché étaient, dans les faits, la raison du défaut d'emploi.

[29]           En l'espèce, bien que M. Crowe affirme que les ventes de son simulateur peuvent prendre jusqu'à 15 ans à conclure, il ne fournit pas suffisamment de détails pour expliquer pourquoi les ventes du produit peuvent prendre autant de temps. Je souligne également que la Propriétaire commercialise une gamme de simulateurs sous différentes marques de commerce. Ainsi, on ne sait pas clairement dans quelle mesure l'emploi de la Marque est restreint par les décisions commerciales volontaires de la Propriétaire, plutôt que par la nature du marché sur lequel elle exerce ses activités.

[30]           En tout état de cause, pour les raisons énoncées ci-dessous, même si je reconnaissais que la raison du défaut d'emploi de la Marque était la nature précise du marché des simulateurs de la Propriétaire, tel que l'atteste M. Crowe, j'estime que ces circonstances ne justifient pas la période de défaut d'emploi.

[31]           À cet égard, j'examinerai la question de savoir si le [Traduction] « marché limité » démontré constitue une circonstance spéciale justifiant le défaut d'emploi de la Marque à la lumière des trois critères énoncés par la Cour d'appel fédérale [tels qu'établis dans Harris Knitting, précité].

Période

[32]           Bien que M. Crowe atteste qu'une vente d'un simulateur M.I.R.T. a été conclue au Canada en 2009, je souligne que la preuve à l'appui n'indique pas clairement la nature de cette vente. À cet égard, M. Crowe atteste que la Propriétaire [Traduction] « a accordé un droit ponctuel de fabriquer un simulateur sous [la Marque] à une société appelée Survival Systems Training Limited ». La description présentée dans la facture produite à l'appui en Pièce C mentionne ce qui suit : « MIRT TECHNOLOGY – One time use of MIRT technology » (TECHNOLOGIE MIRT – Usage unique de la technologie MIRT). Ainsi, on ne sait pas clairement si cette vente alléguée constitue un transfert dans la pratique normale du commerce du produit visé par l'enregistrement, plutôt que la simple vente d'une licence.

[33]           En conséquence, dans les cas comme en l'espèce dans lesquels la date du dernier emploi n'est pas mentionnée ou n'est pas claire, la date de l'enregistrement est considérée comme la date pertinente aux fins du premier critère [voir Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Rath 2010 COMC 34, 82 CPR (4th) 77]. Par conséquent, comme la Marque a été enregistrée le 4 septembre 1998, la période de défaut d'emploi est d'environ 15 ans.

[34]           En tout état de cause, même si je reconnaissais que la date du dernier emploi est 2009, comme je l'expliquerai ci-après, j'estime que la Propriétaire n'a pas satisfait aux deux autres critères énoncés par la Cour d'appel fédérale.

Si les raisons du défaut d'emploi étaient indépendantes de la volonté de la Propriétaire

[35]           De manière analogue à l'analyse qui précède en ce qui concerne les raisons du défaut d'emploi, le problème que pose l'allégation d'un [Traduction] « marché limité » comme circonstance spéciale est que la Propriétaire exerce un contrôle sur certains aspects de son entreprise sur ce marché, de sorte qu'on ne peut pas dire que les raisons du défaut d'emploi sont indépendantes de sa volonté. Bien que M. Crowe atteste que des ventes peuvent être faites dans l'année ou dans les deux années suivant la prise de contact initiale, il affirme que les ventes des simulateurs de la Propriétaire peuvent prendre jusqu'à 15 ans à conclure; cependant, il ne fournit aucun détail pour expliquer adéquatement pourquoi les ventes peuvent prendre autant de temps. Ainsi, il est difficile de conclure que l'absence de ventes pendant la période pertinente était, dans les faits, indépendante de la volonté de la Propriétaire, plutôt que le résultat de ses décisions d'affaires volontaires.

[36]           Par exemple, comme je l'ai déjà souligné, la preuve démontre que la Propriétaire commercialise une gamme de simulateurs sous différentes marques de commerce. La décision d'employer la Marque seulement en liaison avec un sous-ensemble restreint de sa gamme de produits sur un marché déjà limité ne devrait pas être qualifiée d'indépendante de la volonté de la Propriétaire.

[37]           De même, il semble que la Propriétaire se soit concentrée au moins en partie sur l'offre de services d'entraînement à la sécurité pendant la période pertinente, plutôt que de se concentrer sur la vente des simulateurs eux-mêmes. S'il pouvait s'agir d'une sage décision d'affaires, aux fins de mon analyse, on peut mieux la qualifier de décision d'affaires volontaire.

[38]           Enfin, le registraire a déjà décrit la priorisation des marchés étrangers comme étant une décision d'affaires volontaire qui n'est pas indépendante de la volonté du propriétaire de la marque de commerce [voir, par exemple, 1471706 Ontario Inc c Momo Design srl, 2014 COMC 79, CarswellNat 2439; StarragHeckert GmbH c World, LLC, 2014 COMC 179, CarswellNat 4368; et Gowling Lafleur Henderson LLP c Procter & Gamble Company, 2012 COMC 228, CarswellNat 5444].

[39]           En l'espèce, M. Crowe fournit peu de détails à propos des ventes par la Propriétaire de ses simulateurs dans d'autres pays. Ainsi, on ne sait pas clairement si ces ventes satisferaient aux exigences de l'article 4(1) ou de l'article 4(3) de la Loi. En conséquence, bien que la Propriétaire soit une société canadienne, la mesure dans laquelle la Propriétaire a orienté ses efforts de commercialisation vers l'étranger est pertinente. Encore une fois, sans autres détails, il est difficile de conclure que l'absence de ventes au Canada était dans les faits indépendante de la volonté de la Propriétaire, plutôt que le résultat d'une décision d'affaires volontaire de donner la priorité aux autres marchés avant celui du Canada.

[40]           Compte tenu de tout ce qui précède, je ne suis pas convaincu que les raisons du défaut d'emploi en l'espèce étaient indépendantes de la volonté de la Propriétaire.

Intention sérieuse de reprendre l'emploi

[41]           En ce qui concerne la question de savoir si la Propriétaire a démontré une intention sérieuse de reprendre l'emploi, M. Crowe atteste que la Propriétaire [Traduction] « continue d'annoncer et est prête à vendre l'équipement M.I.R.T. au Canada ».

[42]           Cependant, j'estime que nous sommes laissés dans l'ignorance quant à savoir pendant combien de temps encore perdurera le défaut d'emploi en l'espèce. Un simulateur pourrait être vendu en liaison avec la Marque au Canada dans des années, des décennies, voire jamais.

[43]           Contrairement à l'affaire Country-wide, précitée, la Propriétaire n'a pas établi de modèle évident de ventes des produits visés par son enregistrement. En l'absence d'un tel modèle, il n'est pas possible de déterminer si la reprise des ventes au Canada est probable. Du reste, l'absence de modèle rend impossible de déterminer si l'absence de ventes pendant la période pertinente était attribuable à des circonstances indépendantes de la volonté de la Propriétaire.

[44]           Ainsi, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a suffisamment corroboré son intention de reprendre l'emploi de la Marque à court terme [conformément à Arrowhead, précitée, et NTD Apparel, précitée].

[45]           Compte tenu de tout ce qui précède, je ne suis pas convaincu que les circonstances en l'espèce justifient le défaut d'emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l'enregistrement.

Décision

[46]           Par conséquent, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, et conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi, l'enregistrement sera modifié de manière à radier les produits visés par l'enregistrement. L'enregistrement sera maintenu en ce qui concerne les services visés par l'enregistrement seulement.

______________________________

Andrew Bene

Agent d'audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L'AUDIENCE : 2015-09-22

 

COMPARUTIONS

 

Janet Fuhrer                                                                             POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

Aucune comparution                                                               POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

AGENTS AU DOSSIER

 

Ridout & Maybee LLP                                                            POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

Pillar IP, Inc.                                                                            POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

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