Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRADUCTION/TRANSLATION

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2011 COMC 166

Date de la décision : 2011-09-28

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45, engagée à la demande de Goudreau Gage Dubuc s.r.l., visant l’enregistrement no LMC564782 de la marque de commerce OPERA au nom de Royal Group Inc.

 

[1]               Le 13 janvier 2009, à la demande Goudreau Gage Dubuc LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), à Royal Group Inc. (l’Inscrivante), propriétaire inscrite de la marque de commerce OPERA enregistrée sous le no LMC564782 (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec des portes de patio (les Marchandises).

[3]               L’article 45 de la Loi oblige le propriétaire inscrit de la marque de commerce à indiquer si la marque a été employée au Canada en liaison avec chacune des marchandises et des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour l’établissement de l’emploi se situe entre le 13 janvier 2006 et le 13 janvier 2009 (la Période pertinente).

[4]               Les paragraphes 4(1) et (3) de la Loi définissent ainsi ce qu’est l’emploi d’une marque de commerce en liaison avec des marchandises :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

[5]               Il est bien établi que, dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45, il ne suffit pas de simplement déclarer qu’il y a eu emploi pour prouver celui‑ci [Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1979), 45 C.P.R. (2d) 194, confirmé par (1980), 53 C.P.R. (2d) 63 (C.A.F.)]. Bien que les exigences en matière de preuve d’emploi sous le régime de l’article 45 ne soient pas très élevées [Woods Canada Ltd. c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance de preuve [Union Electric Supply Co. Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.)], il faut néanmoins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée au cours de la période pertinente en liaison avec chacune des marchandises ou chacun des services spécifiés dans l’enregistrement.

[6]               En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit un affidavit souscrit le 9 juillet 2009 par Jacques L’Estage, directeur régional du marketing et des communications de cette dernière. Les parties ont toutes deux produit des observations écrites, et elles étaient présentes à l’audience tenue le 3 mai 2011.

[7]               M. L’Estage atteste dans son affidavit que l’Inscrivante fabrique et commercialise des matériaux de rénovation et de construction domiciliaires appartenant aux catégories générales de produits suivantes : profilés sur mesure et systèmes de portes et fenêtres, produits extérieurs, tuyaux et raccords, moulures et menuiserie préfabriquée et revêtements et accessoires. Il déclare que la division des portes et fenêtres est connue sous le nom de RoyalPlast.

[8]               M. L’Estage explique qu’après l’enregistrement de la Marque le 16 juillet 2002 au nom de Thermoplast Inc., la propriété en a été transférée à Royal Quebec Custom Limited le 1er octobre 2002 par suite d’une fusion entre cette dernière et Thermoplast Inc. En raison du changement du nom de la société, c’est Royal Group Technologies (Quebec) Inc. qui en a ensuite été propriétaire, puis l’enregistrement a été cédé à l’Inscrivante au mois de septembre 2006.

[9]               Pour ce qui est de la pratique normale du commerce, M. L’Estage déclare que la division RoyalPlast de l’Inscrivante vend ses portes de patio à des fabricants de portes et fenêtres, des centres de rénovation domiciliaire et des commerces de bois de construction partout au Canada et aux États‑Unis. Il indique qu’une étiquette portant la Marque est apposée sur les portes avant leur expédition. Il produit la pièce B à l’appui de cette déclaration; il s’agit de la photo d’une porte de patio portant une étiquette et d’une copie de l’étiquette apposée sur les portes. Le déposant déclare aussi que la Marque figure sur l’emballage protecteur des portes, mais il n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de cette affirmation. Enfin, il indique qu’un manuel d’installation portant la Marque, joint comme pièce C, accompagne toutes les portes de patio OPERA.

[10]           Pour établir la vente des marchandises, M. L’Estage a produit comme pièce D des fiches de vente constatant la vente de portes de patio de l’Inscrivante au Canada et aux États‑Unis de 2006 à 2008, et il atteste des chiffres de vente bruts suivants, afférents aux portes de patio OPERA : 2006 – 562 000 $; 2007 – 1 670 800 $; 2008 – 934 700 $. M. L’Estage a également joint à son affidavit les pièces E et F composées de factures représentatives constatant des ventes des Marchandises au Canada et aux États‑Unis, respectivement, pendant la Période pertinente. Je constate que la partie supérieure de la facture porte l’adresse de Royalplast, à côté d’un logo incorporant les mots « A division of Royal Group Inc.» en petits caractères sous ce qui semble être un autre nom commercial « Royal Window and Door Profiles ».

[11]           Dans ses observations écrites , la Partie requérante soutient que la preuve n’établit pas que la Marque était employée en liaison avec les Marchandises au moment du transfert de propriété. Elle affirme, plus particulièrement, qu’on ne voit pas la Marque sur la pièce B et qu’il n’a pas été établi clairement que le manuel d’installation est fourni avec les Marchandises au moment du transfert de propriété. Bien que la photo ne soit pas très nette et qu’une partie du mot OPERA soit occultée par une étiquette, je relève que la Marque figure bien sur la porte de patio, avec la même police de caractères que sur la page couverture du manuel formant la pièce C. En outre, bien que la Partie requérante ait exprimé des doutes à l’égard de la déclaration faite au paragraphe 11 de l’affidavit, selon laquelle le manuel d’installation accompagne les portes, j’estime, compte tenu de l’ensemble de l’affidavit et, plus particulièrement, de la description de la pratique normale du commerce figurant aux paragraphes 9 et 10, que l’Inscrivante a prouvé que la Marque figurait directement sur les Marchandises au moment du transfert de propriété, de même que sur le manuel qui y était joint.

[12]           Subsidiairement, la partie requérante soutient que, si preuve d’emploi il y a, l’emploi ne saurait être attribué à l’Inscrivante en application du par. 50(1) de la Loi. Cette disposition est ainsi conçue :

50(1) Pour l’application de la présente loi, si une licence d’emploi d’une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l’emploi, la publicité ou l’exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial — ou partie de ceux-ci — ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s’il s’agissait de ceux du propriétaire.

[13]           La preuve d’emploi présentée dans une instance relevant de l’article 45 doit établir que l’emploi de la marque est le fait du propriétaire inscrit lui‑même ou qu’il peut lui être imputé parce qu’il est attribuable à un titulaire de licence [voir p. ex. The House of Kwong Sang Hong International Ltd c. Borden Ladner Gervais, 31 C.P.R. (4th) 252 (C.F.); Tucumcari Aero, Inc c. Cassels, Brock & Blackwell LLP, 2010 C.F. 267, 81 C.P.R. (4th) 372 (C.F.)].

[14]           La Partie requérante soutient que la preuve n’établit pas clairement la source des Marchandises du fait que l’expéditeur est désigné sous de multiples noms commerciaux dans les factures. Elle ajoute qu’il appert de la preuve que RoyalPlast possède de nombreuses adresses, dont aucune ne correspond à celle qui est inscrite au registre concernant Royal Group Inc., qui est une adresse aux États‑Unis. Elle en tire l’argument qu’il appert des factures que la Marque est employée par une société canadienne du nom de RoyalPlast, et non par l’Inscrivante, qui est une société américaine.

[15]           L’Inscrivante a répondu à cet argument, dans son plaidoyer, en indiquant que [traduction] « le fait que la structure que s’est donnée l’Inscrivante comporte des divisions n’influe pas sur l’emploi de la marque de commerce » et qu’« il va de soi que les sociétés ont souvent plus d’un bureau ou établissement commercial dans le monde et qu’elles peuvent employer différentes adresses dans l’exploitation de leurs entreprises ». À l’audience, elle a ajouté que du fait que RoyalPlast est une division de l’Inscrivante, elle n’est pas une entité distincte de celle‑ci. Je relève que M. L’Estage déclare, dans son affidavit, que [traduction] « la division des portes et fenêtres de Royal est aussi connu sous le nom de RoyalPlast ». Bien qu’il eût pu être préférable que M. L’Estage déclare explicitement que cette division n’était pas une entité juridique distincte de l’Inscrivante et qu’elle était également appelée « Royal Window and Door Profiles » (comme l’indiquent les factures), j’estime qu’il ne s’agit pas d’un cas d’application de l’article 50. La Partie requérante a scruté la preuve à la loupe à la recherche de contradictions, mais je souligne que, dans une instance relevant de l’article 45, il y a lieu de considérer la preuve dans son ensemble et qu’il ne convient pas de mettre l’accent sur des éléments de preuve isolés [Kvas Miller Everitt c. Compute (Bridgend) Limited (2005), 47 C.P.R. (4th) 209 (C.O.M.C.)]. Après examen de l’ensemble de la preuve, j’estime raisonnable de conclure que l’emploi de la Marque mis en preuve est le fait de l’Inscrivante elle‑même et non un emploi par une entité distincte non autorisée par licence, comme l’a soutenu la Partie requérante.

[16]           Par conséquent, l’Inscrivante a établi que, pendant la Période pertinente, la Marque a été employée en liaison avec les Marchandises au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[17]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du par. 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu conformément aux dispositions de l’art. 45 de la Loi. 

______________________________

Darlene Carreau

Présidente

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.