Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS LAFFAIRE DE LOPPOSITION

de Cadbury Adams USA LLC à la demande

no 1270554 produite par Wm. Wrigley Jr. Company

en vue de lenregistrement de la marque de commerce

EXTREME

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[1]  Le 31 août 2005, Wm. Wrigley Jr. Company a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce  EXTREME, fondée sur l’emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises suivantes :

 

confiseries, nommément gomme à mâcher, gomme à claquer,

                             bonbons et menthes non médicamenteux.

 

 

La Section de l’examen du Bureau des marques de commerce a soulevé des objections relativement à la marque qui fait l’objet de la demande, au motif que celle-ci créait de la confusion avec plusieurs marques déposées et autres demandes en instance composées en tout ou en partie de l’élément EXTREME (ou de variations de ce terme). La requérante a répondu en faisant valoir que les différences, dans la présentation ou le son ou dans les idées suggérées, entre les marques invoquées et la marque visée par la demande, distinguaient la marque demandée de chacune des marques invoquées. 

 


[2]  La marque EXTREME visée par la demande a ensuite été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 16 août 2006, puis a fait l’objet d’une opposition de la part de Cadbury Adams USA LLC le 3 octobre 2006. Je signale en passant que l’opposante est propriétaire de l’une des demandes en instance (pour la marque BUBBA XTREME) initialement invoquées par le Bureau. Le registraire a transmis une copie de la déclaration d’opposition à la requérante le 17 octobre 2006, ainsi que l’exige le paragraphe 38(5) de la Loi sur les marques de commerce. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre‑déclaration.

 

[3]             La preuve de l’opposante consiste en l’affidavit souscrit par Agata Maria Luczkiewicz. La preuve de la requérante se compose des affidavits de Dan Alvo et de Laura L. Thompson ainsi que de copies certifiées conformes d’enregistrements de marques de commerce constituées en tout ou en partie de l’élément EXTREME (ou de variations de ce terme) et qui se rapportent notamment à des articles de confiserie. Chacune des deux parties a produit un plaidoyer écrit, mais ni l’une ni l’autre  n’a demandé la tenue d’une audience.

 

déclaration dopposition

[4]  Selon le premier et le deuxième motifs d’opposition, fondés respectivement sur les alinéas 30e) et i) de la Loi sur les marques de commerce, [traduction] « le mot EXTREME n’est pas une marque de commerce »; par conséquent, la requérante n’avait pas l’intention d’utiliser ce terme à titre de marque de commerce, et elle ne pouvait donc pas avoir été convaincue qu’elle avait le droit de l’employer à titre de marque de commerce.

 


Le troisième motif d’opposition, fondé sur l’alinéa 12(1)b) de la Loi, repose sur la prétention que la marque visée par la demande donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des marchandises de la requérante, [traduction] « à savoir que les marchandises ont une saveur “ extrême ” ».

 

[5]  Le quatrième motif d’opposition, fondé sur l’article 10 et l’alinéa 12(1)e) de la Loi, énonce que la marque visée par la demande n’est pas enregistrable parce qu’elle est devenue [traduction] « reconnue comme désignant le genre ou la qualité de marchandises, à savoir des marchandises qui ont une saveur “ extrême ” ».

 

Dans son dernier motif d’opposition, fondé sur l’article 2 et l’alinéa 38(2)d), l’opposante allègue que la marque visée par la demande n’est pas adaptée à distinguer les marchandises de la requérante [traduction], « compte tenu de l’usage répandu du mot “ EXTREME ” comme élément descriptif ou, subsidiairement, à titre de marque de commerce, de celles de nombreux autres propriétaires ».

 

preuve de lopposante

Agata Maria Luczkiewicz


[6]  Mme Luczkiewicz atteste qu’elle est stagiaire au sein du cabinet qui représente l’opposante. La preuve qu’elle a soumise se compose en partie des résultats de recherches sur Internet concernant le terme « extreme » en combinaison avec les termes « flavour » [saveur], « candy »[bonbon], « gum » [gomme], « confectionery » [confiserie], « mint » [menthe] et « taste » [goût]. Les résultats de ses recherches incluent : EXTEREME FLAVOUR SHOTS (pour des garnitures de frites), METEO EXTREME FUDGE (pour des biscuits), EXTREME DARK (pour des barres de chocolat) et DANISSIMO EXTREME (pour du yogourt). Mme Luczkiewicz a aussi repéré plusieurs produits de confiserie dans des magasins à Toronto, parmi lesquels :WARHEADS EXTREME SOUR (pour des bonbons), ZIP ROCKS EXTREME POPPING (pour des bonbons) et BLOWPOP EXTREME LEMONADE (pour des bonbons). L’affidavit de Mme Luczkiewicz présente en outre une liste de publicités diffusées à la télévision ou à la radio canadiennes dans lesquelles le terme « extreme » est associé à des articles de confiserie ou à  d’autres produits alimentaires.

 

 Preuve de la requérante

Dan Alvo

[7]  Dan Alvo atteste qu’il est directeur du marketing chez Wrigley Canada ( ci‑après, WC), située à Don Mills, en Ontario. WC a été constituée en 1979 sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions et elle emploie les marques de commerce de la requérante en vertu d’un contrat de licence qui a pris effet en juillet 1998. WC confectionne, commercialise et vend des produits de confiserie au Canada pour le compte de la requérante, qui en contrôle les caractéristiques et la qualité. WC commercialise et vend les gommes de marques EXTREME au Canada, au titre de la licence mentionnée ci-dessus, depuis décembre 2005. Ces produits ont été vendus dans chacune des provinces canadiennes et leurs ventes ont totalisé 5 millions de dollars pour la période de décembre 2005 à septembre 2006 inclusivement. Les pièces jointes à l’affidavit de M. Alvo montrent le mot EXTREME présenté en évidence sur l’emballage des produits. 

 


 

Laura Thompson

L’affidavit de Mme Thompson sert uniquement à introduire en preuve des définitions de dictionnaire pour le mot « extreme ».

 

Motifs dopposition fondés sur larticle 30 et lalinéa 12(1)b)

[8]  La date pertinente pour l’examen des circonstances afférentes à l’inobservation de l’article 30 et de l’alinéa 12(1)b) est celle de la production de la demande : voir les décisions Georgia‑Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 468 (COMC), et Fiesta Barbecues Ltd. c. General Housewares Corp. (2003), 28 C.P.R. (4th) 60 (C.F.), respectivement. 

 

Les premier et deuxième motifs d’opposition sont fondés sur la prémisse que le terme EXTREME, employé seul, [traduction] « n’est pas une marque de commerce ». Une interprétation raisonnable de la déclaration d’opposition dans son ensemble et de la preuve soumise par l’opposante révèle que les deux premiers motifs d’opposition sont liés au troisième, selon lequel la marque visée par la demande donne une description claire ou une description fausse et trompeuse et ne peut, de ce fait, être employée comme marque de commerce.

 


[9]  La question de savoir si la marque visée par la demande donne une description claire doit être examinée en fonction de la première impression et selon le point de vue à cet égard du consommateur moyen des marchandises en cause.  Une marque donne une description claire si elle décrit un aspect, un trait ou une caractéristique des marchandises d’une manière qui est  [traduction] « facile à comprendre, évidente ou simple » : voir Wool Bureau of Canada Ltd. c. Registraire des marques de commerce, 40 C.P.R. (2d) 25, aux pages 27 et 28; Promotions Atlantiques Inc. c. Registraire des marques de commerce, 2 C.P.R. (3d) 183, à la page 186;  Drackett Co. of Canada Ltd. c. American Home Products Corp. (1968), 55 C.P.R. 29, à la page 34.

 

[10]            La requérante a fait valoir dans son plaidoyer écrit que le terme EXTREME, employé seul, n’a qu’une valeur suggestive et que le consommateur type, en regardant une confiserie vendue sous la marque de commerce EXTREME, est susceptible de se demander si le produit a une saveur ou un goût prononcé, une saveur ou un goût durable, une couleur ou un format remarquable, ou une saveur ou un goût inhabituel.  Par ailleurs, la requérante s’appuie sur la preuve de l’opposante pour établir que le terme EXTREME (ou des variations de ce terme) a été adopté par d’autres commerçants à titre de marque de commerce, comme élément d’une marque de commerce ou comme terme descriptif sur l’emballage d’un produit ou dans une publicité modifiant une caractéristique du produit. Par conséquent, conclut la requérante, rien ne permet d’affirmer que le terme EXTREME donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de produits de confiserie. De plus, la requérante met en avant sa propre preuve pour prouver son intention d’employer le terme EXTREME à titre de marque de commerce, faisant remarquer qu’elle a commencé à ce faire peu après avoir produit la demande contestée en l’espèce.


[11]            La requérante a attiré mon attention sur la décision rendue par la Commission dans Les Brasseries Molson, Société en nom collectif c. John Labatt Limitée (1999), 3 C.P.R. (4th) 543, dans laquelle la Commission s’est penchée sur la question de savoir si la marque  EXTREME ICE donnait une description claire ou une description fausse et trompeuse de boissons alcoolisées fabriquées en brasserie. Dans cette décision, la Commission a examiné des définitions de dictionnaire pour le mot « extreme » et a conclu que [traduction] « le mot “ extreme ” ne revêt aucun sens particulier par rapport aux boissons alcoolisées fabriquées en brasserie ». Après avoir examiné la preuve versée en l’espèce ainsi que des définitions de dictionnaire, je conclus de même que le terme  EXTREME ne revêt aucun sens particulier ou spécifique par rapport aux produits de confiserie. À mon avis, ce terme exprime un éloge imprécis.

 

[12]            Dans son plaidoyer écrit, l’opposante soutient que la requérante a bien employé le terme EXTREME en soi à titre de marque de commerce, mais en le combinant à d’autres termes. Je ne suis pas d’accord. Il appert des documents joints comme pièces à l’affidavit de M. Avlo que le terme EXTREME, sur l’emballage du  produit de la requérante, est affiché en caractères plus gros et dans une police différente des autres mots, de sorte qu’il serait perçu comme une marque de commerce en soi : voir la décision rendue par la Commission dans Nightingale Interloc c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R.(3d) 535, à la page 538, sous le titre Principle 1 [premier principe]. De plus, le fait pour la requérante de procéder à un double marquage de ses produits ne  cause aucun préjudice, et c’est ce qu’elle semble avoir fait en l’espèce.       


Dans l’ensemble, je souscris aux arguments de la requérante exposés ci-dessus et, compte tenu de ce qui précède, les trois premiers motifs d’opposition sont rejetés.

 

Motif dopposition fondé sur larticle 10

[13]            Suivant le quatrième motif d’opposition, la marque de commerce visée par la demande n’est pas enregistrable parce que, ainsi que le prévoit l’alinéa 12(1)e), elle contrevient à l’article 10 de la Loi sur les marques de commerce, dont voici le libellé :

10.  Si une marque, en raison d’une pratique commerciale ordinaire et authentique, devient reconnue au Canada comme désignant le genre, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, le lieu d’origine ou la date de production de marchandises ou services, nul ne peut l’adopter comme marque de commerce en liaison avec ces marchandises ou services ou autres de la même catégorie générale, ou l’employer d’une manière susceptible d’induire en erreur, et nul ne peut ainsi adopter ou employer une marque dont la ressemblance avec la marque en question est telle qu’on pourrait vraisemblablement les confondre.

 

Il semble que la date pertinente pour apprécier la « pratique commerciale ordinaire et authentique » au regard de la marque, pour l’application de l’article 10, soit la date de ma décision : voir l’arrêt Olympus Optical Company Ltd. c. Canadian Olympic Association (1991), 38 C.P.R. (3d) 1, aux pages 3 et 4 (C.A.F.).

 


[14]            Pour statuer sur le quatrième motif d’opposition, il faut décider si le caractère générique d’une expression ou d’un mot particulier, le fait que cette expression ou ce mot est communément employé dans le secteur d’activités visé ou que, pour une autre raison, il n’est pas distinctif, en empêche l’enregistrement. Comme il a été mentionné plus tôt, la preuve établit que le terme EXTREME est employé à titre de qualificatif pour préciser diverses caractéristiques de produits alimentaires et de divers aliments, ou (avec des variations) comme élément de marques de commerce. La preuve en revanche n’établit pas que, dans le domaine particulier de la confiserie ou dans celui des produits alimentaires en général, le terme EXTREME a été employé de manière telle qu’il est devenu reconnu comme désignant un genre, une qualité ou une caractéristique particulière de produits comestibles. À mon avis, la preuve en l’espèce est loin d’être suffisante pour établir que le terme EXTREME tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 10. Le quatrième motif est en conséquence rejeté.

 

Motif dOpposition fondé sur le caractère distinctif

[15]            La date pertinente pour l’examen des circonstances afférentes au caractère distinctif est la date de production de la déclaration d’opposition, en l’occurrence le 3 octobre 2006 :  voir Re Andres Wines Ltd. et E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R.(2d) 126, à la page 130 (C.A.F.);  Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R.(3d) 412, à la page 424 (C.A.F.). La requérante a le fardeau ultime de démontrer que sa marque est adaptée à distinguer ou distingue véritablement ses marchandises de celles de l’opposante et d’autres propriétaires, partout au Canada : voir Muffin Houses Inc. c. The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 C.P.R. (3d) 272 (COMC). L’existence d’un fardeau ultime de preuve signifie que, si une conclusion précise ne peut être arrêtée une fois toute la preuve soumise, la question doit être tranchée contre la requérante.

 


[16]            L’opposante avance que la marque visée par la demande n’est pas distinctive en raison

i) de l’emploi répandu du terme en cause à titre d’élément descriptif par d’autres commerçants, et ii) de l’emploi de ce terme à titre de marque de commerce par de nombreuses personnes. Quant au premier point, la preuve montre qu’il existe une myriade d’emplois du terme « extreme » se rapportant à toute une gamme de caractéristiques. Autrement dit, ce terme ne sert pas à décrire certaines marchandises, mais est souvent employé pour qualifier diverses caractéristiques des marchandises. Toutefois, le simple fait que le terme « extreme » est un mot ordinaire d’usage courant n’empêche pas nécessairement qu’il puisse servir à distinguer les marchandises de la requérante de celles d’autrui.

 

[17]            L’opposante s’appuie également sur la preuve de la requérante concernant l’état du registre, résumée ci‑dessous, pour étayer l’allégation portant que le terme EXTREME est couramment utilisé à titre de marque de commerce dans le domaine de la confiserie.

 

Marque déposée

 

Propriétaire

 

EXTREME CLEAN

 

SmithKline Beecham plc

 

XXX-TREEM MINTS

 

Société Des Produits Nestlé S.A.

 

XTREME

 

Unilever Canada Inc.

 

EXTREME CREAM

 

Unilever Canada Inc.

 

 

 

 

 

 

Unilever Canada Inc.

 

 

 

 

 

Frisk International N.V.

 

EXTREME DARK

 

Schokinag Chocolate North America, Inc.

 

AIRHEADS XTREMES

 

Perfetti Van Melle Benelux B.V.

 

 

Perfetti Van Melle Benelux B.V.

 

X-TREME FRUIT

 

Brookside Foods Ltd.

 

[18]            J’estime que cette preuve est insuffisante pour étayer l’allégation de l’opposante, pour les motifs suivants : i) il existe des différences considérables entre la plupart des marques répertoriées ci-dessus et la marque visée par la demande; ii) on n’a dénombré que sept propriétaires de marques de commerce différents; iii) l’opposante n’a pas établi l’emploi réel des marques déposées relevées ci‑dessus dans le marché. Compte tenu de ce qui précède, le cinquième motif est rejeté.

 

Décision

[19]            Chaque motif d’opposition ayant été rejeté, l’opposition est par conséquent rejetée. Cette décision est rendue conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

FAIT EN LA VILLE DE GATINEAU (QUÉBEC), LE 23 JUILLET 2009.

 


                                                                                                                                                     

 

Myer Herzig

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

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