Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 260

Date de la décision : 2012-12-05

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION par Advance Magazine Publishers Inc. à l’encontre de l’enregistrement n1410321 pour la marque de commerce VOGUE au nom de Miles Industries Ltd.

 

[1]               Le 11 septembre 2008, Miles Industries Ltd. (le Requérant) a déposé une demande d’enregistrement de la marque de commerce VOGUE fondée sur un emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises suivantes : Foyers; éléments chauffants pour foyers encastrables; pièces de foyer, nommément revêtements de briques, chenets, portes, garnitures, charnières, aimants, barres, déflecteurs (les Marchandises).

[2]               La demande en cause a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 1er juillet 2009.

[3]               Le 17 novembre 2009, Advance Magazine Publishers Inc. (l’Opposant) a produit une déclaration d’opposition. Une déclaration d’opposition modifiée a été produite le 18 mars 2010 et accueillie le 16 juin 2010. Les motifs d’opposition allégués, en résumé, sont 

(a)    Suivant l’alinéa 12(1)(d) Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), la Marque n’est pas enregistrable, car elle crée de la confusion avec les enregistrements nos UCA4268, LMCD42009, UCA19676, LMC346637, LMC388687, LMC468713, LMC576133, LMC561966, LMC576327, LMC595905 et LMC641823.

(b)   Suivant l’alinéa 16(3)(a) de la Loi, le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec l’emploi par l’Opposant de ses marques de commerce VOGUE.

(c)    Suivant l’alinéa 16(3)(b) de la Loi, le Requérant n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que, à la date de production de la demande, elle créait de la confusion avec les demandes nos 856582, 1198832, 1269486, 1418746, 1458146 et 1467908, propriétés de l’Opposant.  

(d)   Suivant l’article 2 de la Loi, la Marque n’est pas distinctive du Requérant.

(e)    Suivant l’alinéa 30(i) de la Loi, le Requérant ne pouvait pas être convaincu d'avoir le droit d'employer la Marque au Canada étant donné quune recherche effectuée dans le registre aurait permis de repérer les marques de lOpposant et que le Requérant était au courant ou aurait dû être au courant de lemploi, de lenregistrement et de la notoriété des marques de lOpposant, avant la date de production de sa demande.

[4]               Le Requérant a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle il nie les allégations de lOpposant.

[5]               À l’appui de son opposition, l’Opposant a produit un affidavit d’Elenita Anastacio. Le Requérant a produit des affidavits de Mike Powell et d’Arwen Mendoza. M. Powell et Mme Mendoza ont été contre-interrogés. La transcription des contre-interrogatoires, les réponses aux engagements et les pièces connexes ont été versées au dossier. Le Requérant a produit un plaidoyer. L’Opposant était présent à l’audience du 24 juillet 2012.

Questions préliminaires concernant les éléments de preuve

[6]               Lors de l’audience, l’Opposant a soulevé plusieurs questions concernant les éléments de preuve de Mike Powell, dont :

       L’affidavit est fondé sur une preuve par ouï-dire puisque certains renseignements contenus ont été demandés par M. Powell plutôt que connus de lui (contre-interrogatoire de M. Powell, Q 61 à 63).

       Certaines preuves ont été recueillies par autrui (Q 28 à 31).

       Il existe des incohérences dans les pièces décrites (Q 52 à 54).   

M. Powell se présente comme le directeur général du Requérant (paragr. 1). Dans le Canadian Oxford Dictionary (éd. 1998), la définition de « général » comprend : « chef ou principal; doté de l’autorité d’ensemble (directeur général; secrétaire général) ». Compte tenu du poste et des explications sur la façon dont les éléments de preuve ont été recueillis en contre-interrogatoire, je ne suis pas disposée à rejeter la preuve dans son ensemble. Selon les éléments de preuve de M. Powell, un certain poids, tout en admettant le fait que certaines pièces et certains renseignements compris lui ont été envoyés, est cohérent avec des arrêts précédents du Registraire dont Cascades Canada Inc c. Wausau Paper Towel & Tissue, LLC (2010), 89 C.P.R. (4th) 79 (COMC). Selon les paragraphes 29 à 31 de l’arrêt Cascades Canada :

[29] Dans la décision Union Electric Supply Co. Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.)], aux pages 59 et 60, le juge Mahoney a fait la déclaration suivante en ce qui a trait à la connaissance que l’on doit attribuer à un dirigeant d’une entreprise : « Le déposant était manifestement dans une situation où il avait une connaissance personnelle des faits, autant par son expérience chez l'appelante que par son poste ». Dans la décision Scott Paper Limited c. Georgia-Pacific Consumer Products LP (2010), 8 C.P.R. (4th) 273 (C.F.), au paragraphe 35, le juge O’Keefe déclare : « L’auteur d’un affidavit peut témoigner de faits dont il a une connaissance personnelle (voir l’article 81 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106). La Cour a admis que le poste occupé par l’auteur d’un affidavit peut à l’évidence lui permettre d’avoir une connaissance personnelle des faits dont il témoigne, sans être nécessairement un témoin direct de tel ou tel événement (voir la décision Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd., [1987] A.C.F. n° 26, 13 C.P.R. (3d) 289) ».

[30] Dans l’ensemble, je suis convaincue que malgré son erreur pour ce qui est de savoir si certaines épiceries en particulier étaient parmi celles qui vendaient les produits de l’Opposante initiale à un moment donné, M. Tocchet semble avoir une connaissance personnelle de l’entreprise de l’Opposante initiale. Il me semble, dans l’ensemble, que, tout bien considéré, M. Tocchet était manifestement dans une situation où, autant par son poste que par son expérience chez l’Opposante initiale, « il avait une connaissance personnelle des faits ». Il n’y a aucune raison de penser que M. Tocchet n’aurait pas été en mesure de fournir des éléments de preuve de nature générale pour appuyer les déclarations qu’il a faites dans son affidavit, si la Requérante lui avait demandé d’en produire (comme les registres de l’entreprise concernant les ventes de l’Opposante). Je rejette par conséquent la prétention de la Requérante selon laquelle le témoignage de M. Tocchet devrait être écarté intégralement. Cependant, je conviens que je devrais accorder à certains éléments de preuve une importance réduite.

[31] J’ajouterai que je ne considère pas comme un problème le fait que M. Tocchet n’a pas personnellement pris les photographies du produit OPTIMA, imprimé les pages du site Web ou rassemblé les chiffres d’affaires qu’il a fournis dans son affidavit. De toute évidence, il connaissait bien ces renseignements.

 

Nonobstant ce qui précède, je suis d’avis que certains éléments de preuve de M. Powell ne devraient pas être considérés lorsque le contre-interrogatoire de M. Powell a présenté des incohérences. Au départ, je remarque qu’aucun élément de preuve ne m’a servi à tirer mes conclusions concernant la cause en question.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[7]               Le Requérant a le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande satisfait aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposant de s’acquitter du fardeau initial consistant à présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 98].

[8]               Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

- Alinéas 38(2)(a), 30(e) et 30(i) – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (COMC), p. 475].

 

- Alinéas 38(2)(b) et 12(1)(d) de la Loi – la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (CAF)].

 

- Alinéa 38(2)(c) et paragraphe 16(3) de la Loi la date de production de la demande.

 

-    Alinéa 38(2)(d) de la Loi la date de production de la déclaration dopposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (CF)].

 

Motifs d’opposition pouvant être rejetés sommairement

[9]                     Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30(i) allègue que le Requérant ne pouvait être convaincu d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada puisque le Requérant était au courant ou aurait dû être au courant de l’emploi, de l’enregistrement et de la notoriété des marques de commerce de l’Opposant. Lorsque le Requérant a fourni la déclaration exigée par l’alinéa 30(i), le motif fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve de mauvaise foi de la part du requérant [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (COMC), au paragr. 155]. Comme la demande renferme la déclaration exigée et qu’il n’y a aucune allégation ni aucune preuve de mauvaise foi ou d’autres circonstances exceptionnelles, ce motif est rejeté.

[10]           Les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 16(3)(a) et l’article 2 sont rejetés parce que l’Opposant ne s’est pas acquitté de son fardeau initial. L’Opposant n’a pas démontré que ses marques étaient employées ou connues au Canada aux dates pertinentes. Le simple fait que de nombreux enregistrements de marques de commerce de l’Opposant composées ou comprenant VOGUE font mention de leur emploi n’est pas suffisant pour permettre à l’Opposant de s’acquitter de son fardeau de preuve [Rooxs, Inc. c. Edit-SRL (2002), 23 C.P.R. (4th) 265 (COMC), au paragr. 268].

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d)

[11]           L’Opposant a produit l’affidavit d’Elenita Anastacio, employée de ses agents de marques de commerce. Mme Anastacio fournit des copies papier des détails de chaque enregistrement visé par la demande. Les enregistrements les plus semblables sont énumérés ci-après. Si je considère qu’il n’y a aucune ressemblance entre la Marque et ces enregistrements, il ne peut y avoir de probabilité de confusion entre la Marque et les autres enregistrements de l’Opposant. J’ai exercé le pouvoir discrétionnaire qui m’est conféré pour consulter le registre et confirmer que chacun de ces enregistrements est en vigueur [Quaker Oats Co of Canada Ltd c.Menu Foods Ltd (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (COMC)].  

Numéro

d’enregistrement

Marque de

commerce

Marchandises et services

UCA4268

VOGUE

Magazines et publications similaires.

LMC388687

VOGUE
DECORATION

Publications imprimées, nommément magazines.

LMC576133

VOGUE

Magazines et publications distribués sous forme électronique au
moyen de l’Internet; exploitation d’un site Web de l’Internet qui
permet aux consommateurs de s’abonner aux magazines de
consommateurs et qui permet aux annonceurs de promouvoir
leurs biens et services au moyen de l’Internet.

LMC561966

VOGUE DESIGN

Publications imprimées, nommément magazines, livres et
périodiques.

Services au moyen de l’Internet, nommément fournir des informations sur la mode et le style au moyen de l’Internet.

[12]           Le test applicable pour trancher la question de la confusion est énoncé au paragraphe 6(2) de la Loi et prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Pour déterminer la probabilité de confusion, je dois prendre en compte toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5) : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[13]           Cette énumération n’est pas exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces critères varie selon les circonstances de l’espèce [Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006) (C.S.C.), au paragr. 54]. Je me fie également à l’affirmation de la Cour suprême du Canada dans Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (C.S.C.), au paragr. 49, que le critère de l’alinéa 6(5)(e), la ressemblance entre les marques, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse de la probabilité de confusion.

Caractère distinctif inhérent

[14]           Quoi qu’il en soit, je peux prendre connaissance d’office des définitions du dictionnaire [Tradall SA c. Devil's Martini Inc (2011), 92 C.P.R. (4th) 408 (COMC) au paragr. 29]. Le Canadian Oxford Dictionary (éd. 1998) définit « vogue », entre autres, comme « l’état de ce qui est à la mode » et « décoration », entre autres, comme « un objet qui décore ou sert d’ornement ». Compte tenu de ces définitions, aucune des marques des parties n’a un très grand caractère distinctif. 

Degré de ressemblance

[15]           La Marque est identique aux enregistrements VOGUE de l’Opposant (nos UCA4268 et LMC576133) et est identique dans le son à l’enregistrement du dessin-marque VOGUE de l’Opposant (no LMC561966). La Marque a un degré élevé de ressemblance à la marque de commerce VOGUE DECORATION de l’Opposant. Le terme DECORATION de la marque de l’Opposant ne réduit pas la ressemblance entre les marques des parties puisqu’il décrit les caractéristiques des marchandises enregistrées [Reno-Dépôt Inc c. Homer TLC Inc (2009), 84 C.P.R. (4th) 58 (COMC) au paragr. 58]. En ce qui concerne les idées suggérées, les marques des parties suggèrent différentes idées lorsqu’elles sont prises en considération en conjonction avec leurs marchandises et services respectifs. La Marque suggère un foyer à la mode ou de style et des composantes accessoires connexes, alors que les marques de l’Opposant suggèrent des périodiques et des magazines liés à la mode et au style.

Période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage

[16]           Quoique les enregistrements de l’Opposant soient fondés sur l’emploi, cela me permet seulement de présumer d’un emploi de minimis [Entre Computer Centers Inc c. Global Upholstery Co (1991), 40 C.P.R. (3d) 427 (COMC) au paragr. 430]. L’emploi de minimis ne permet pas de conclure que la marque est devenue connue dans une mesure appréciable, pas plus que les marques ont été employées de façon continue depuis la date annoncée.

[17]           M. Powell affirme qu’en 2009, le Requérant a lancé sa gamme de foyers au gaz VOGUE (paragr. 8). Au départ, je remarque que je considère l’emploi de la marque de commerce VOGUE SERIES comme un emploi de la Marque [Canada (Registraire des marques de commerce) c. Cie internationale pour l'informatique CII Honeywell Bull, SA (1985), 4 C.P.R. (3d) 523 (CAF)]. La marque de commerce VOGUE apparaît sur les brochures, les listes de prix et les emballages (pièces A et C). Depuis le lancement de la gamme VOGUE, le Requérant a vendu 900 unités (paragr. 20). Cependant, aucun renseignement n’a été fourni à savoir si ces unités ont été vendues au Canada. Par conséquent, il m’est impossible de conclure si la marque est devenue connue dans une réelle mesure au Canada.       

Genre de marchandises et services

[18]           Dans son affidavit, M. Powell affirme que le Requérant est un fabricant de foyers (paragr. 3). La marque VOGUE comprend des foyers, doublages, enceintes, pierres ornementales, interrupteurs muraux et panneaux de verre (pièce B). Les produits du Requérant sont présentés comme étant décoratifs : « pour un design contemporain épuré, impossible de battre le Vogue de Valor » (pièce B); et paraissent dans des magazines comme Patio & Hearth Products Report (pièce 2 du contre-interrogatoire de Mike Powell). Les produits du Requérant sont vendus uniquement par des dépositaires et nécessitent une installation spécialisée (Q 39 à 44 et 49), cependant, les Marchandises ne comprennent aucune restriction dans ce sens.

[19]           Les marchandises et services enregistrés de l’Opposant sont des magazines, des livres et des périodiques, ainsi que des renseignements sur la mode et le style offerts au moyen d’Internet. Bien que ces marchandises et services puissent comprendre des articles et des publicités concernant la décoration intérieure, il n’y a aucun élément de preuve dans ce sens, pas plus que d’élément de preuve démontrant que l’Opposant vend ce genre d’articles. Les marchandises et services de l’Opposant sont bien différents des foyers et des pièces pour foyers et il n’y a aucune raison de croire que les voies commerciales se chevauchent.  

[20]           Quoique les magazines et la fourniture de renseignements soient bien différents des foyers et des pièces pour foyers, l’Opposant affirme qu’il peut exister un lien du fait que les foyers du Requérant puissent être le genre de produits de haute qualité et de style présentés, publicisé ou traités dans les magazines et sur les sites Web de l’Opposant [voir, par exemple, Advance Magazine Publishers Inc c. Peintures MF (1972) Inc (1995), 66 C.P.R. (3d) 375 (COMC) au paragr. 379; Advance Magazine Publishers Inc c. Masco Building Products Corp (1999), 86 C.P.R. (3d) 207 aux paragr. 218 et 219]. Cependant, en l’absence de preuves de tels articles et publicités permettant aux consommateurs de penser qu’il y a chevauchement des marchandises, je ne suis pas d’accord. Je me reports aux observations de la membre Bradbury dans Advance Magazine Publishers Inc c. Louver-Lite Ltd 2012 COMC 161 (COMC) au paragr. 44. 

 

Je ne suis pas non plus convaincue qu’il faut accorder un poids déterminant à l’argument selon lequel la Requérante pourrait annoncer ces marchandises dans les publications de l’Opposante. Après tout, il ne semble pas exister de restrictions quant aux types de marchandises qui peuvent être annoncés dans les publications de l’Opposante et, je le répète, admettre un tel argument équivaudrait à accorder aux marques de l’Opposante une protection étendue que la preuve produite ne justifie pas.

Circonstance additionnelle – famille de marques de commerce

[21]           Lors de l’audience, l’Opposant a affirmé que l’effet cumulatif de ses marques de commerce VOGUE qui créerait de la confusion. L’Opposant semble faire valoir qu’il possède sa propre famille de marques de commerce VOGUE qui devrait recevoir une protection plus étendue. Cependant, aucun élément de preuve d’une telle famille n’a été présenté. Pour se prévaloir d’une famille de marques, l’Opposant doit prouver l’emploi de chacune des marques de la famille invoquée. [Ultramar Ltd. c. Gold Eagle Co.; 2011 COMC 149 au paragr. 26]. Puisque l’Opposant ne l’a pas fait, il ne peut se prévaloir d’un effet cumulatif de ses marques de commerce VOGUE.

 

Circonstance additionnelle – existence de la demande d’enregistrement TEEN VOGUE

[22]           L’Opposant affirme que les autres demandes d’enregistrement de l’Opposant, y compris la demande VOGUE jointe à l’affidavit de Mme Anastacio démontrent qu’il y a un prolongement naturel de la marque VOGUE dans une gamme de domaines. La plus pertinente de ces demandes d’enregistrement est la demande no 1458146 de TEEN VOGUE pour un emploi en liaison avec les biens suivants. Je remarque que les documents joints à l’affidavit de Mme Anastacio démontrent que cette demande est à l’étape de l’examen.

(1) Articles de literie; draps, douillettes, courtepointes, jetées, couvertures, volants de lit, oreillers.

(2) Mobilier; accessoires de fenêtre, tapis, chaises, ottomans, siège-sacs.

(3) Produits de rangement, paniers pliants, cubes, tiroirs, paniers à linge.

(4) Luminaires et luminaires de table, lampes à lave, veilleuses.

[23]            En l’absence de preuve de ventes de tels biens de décoration intérieure par l’Opposant, je ne crois pas que l’existence de cette demande permet de conclure que les consommateurs considéreraient que le prolongement naturel de la marque VOGUE de l’Opposant comprendrait les Marchandises.  

Circonstance additionnelle – état du registre et du marché

[24]           Le Requérant a produit l’affidavit d’Arwen Mendoza, qui a obtenu et joint à son affidavit des copies de différentes demandes et différents enregistrements de marques de commerce (paragr. 1, pièce A), de recherches sur GOOGLE et sur des sites Web (paragr. 2 à 7, pièces B à G) et des recherches de sociétés (paragr. 8 et 9, pièces H et I). La preuve relative à l’état du registre ne joue pas en faveur du Requérant puisqu’il ne dénombre que deux marques de commerce enregistrées en liaison avec des produits pour la maison [Welch Foods Inc c. Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Maximum Nutrition Ltd c. Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (CAF)]. De plus, les recherches sur GOOGLE, les sites Web et les recherches de sociétés n’aident pas le Requérant à démontrer qu’il y a eu un emploi répandu du terme VOGUE comme marque de commerce ou nom commercial au Canada par des tiers dans le domaine des produits de décoration puisque ces éléments de preuve ne sont pas suffisants pour démontrer qu’il y ait eu un tel emploi au Canada [Conde Nast Publications Inc c. Hanz Schwarzkopf Gmbh (1988), 20 C.P.R. (3d) 176 (COMC) au paragr. 180; Mondo Foods Co c. Coppola (2011), 99 C.P.R. (4th) 20 (COMC) aux paragr. 57 et 58].

Circonstances additionnelles – coexistence sans confusion

[25]           M. Powell affirme qu’« aucune référence à toute probabilité de confusion entre les foyers au gaz de Miles et un magazine du même nom n’a été portée à l’attention de Miles » (paragr. 21). Une inférence négative peut être tirée quant à la probabilité de confusion lorsque la preuve démontre un emploi simultané significatif des marques en cause et que la partie opposante n’a présenté aucun élément de preuve confirmant l’existence de cas de confusion [Christian Dior, SA c. Dion Neckwear Ltd (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.), au paragr. 19]. Cependant, en l’espèce, comme aucun élément de preuve quant à l’emploi simultané significatif des marques des parties n’a été présenté en vue d’établir l’absence de probabilité de confusion, cette circonstance n’est pas pertinente.

Conclusion

[26]           J’estime donc, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les quatre enregistrements VOGUE de l’Opposant. Étant donné que les marques de commerce VOGUE de l’Opposant n’ont pas un grand caractère distinctif inhérent et qu’il n’y a aucune preuve que ces marques de commerce ont acquis un caractère distinctif, la différence entre les marchandises et services des parties suffit à rendre la confusion peu probable. 

Alinéa 16(3)(b)

[27]           L’Opposant a fait valoir que le Requérant n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque parce que celle‑ci crée de la confusion avec les demandes nos 856582, 1198832, 1269486, 1418746, 1458146 et 1467908. Toutes les demandes, sauf les nos 1418746, 1458146 et 1467908, étaient en instance aux dates de production et d’avis de la demande [paragraphe 16(4) de la Loi]. Ainsi, l’Opposant s’est acquitté de son fardeau de preuve en ce qui concerne les demandes nos 856582, 1198832 et 1269486, dont les détails sont présentés ci-après :

Numéro

Marque de commerce

Marchandises et services

856582

VOGUE

… publications électroniques, nommément

magazines, logiciels, nommément périodiques et magazines en version électronique.

1198832

VOGUE CAFÉ

Services de restaurant et de bar, de boîtes de nuit et

de cafés.

1269486

VOGUE

Services de diffusion… services de télécommunication… services de transmission par câble, … services de transmission par satellite, … offre de sonneries, de musique, de fichier MP3, d’images, de jeux, de vidéos, de photos et d’informations téléchargeables pour des appareils de communication mobile sans fil; offre de services de transmission sans fil pour permettre le téléversement et le téléchargement de sonneries, d'inserts parlés, de musique, de fichiers MP3, d'images, de jeux, de vidéos, de photos, d'information dans les domaines de la mode, du style et des nouvelles par un réseau informatique mondial vers un appareil de communication mobile sans fil; services de vote et de sondage par un appareil de communication mobile sans fil; envoi et réception de messages vocaux et textuels entre appareils de communication mobiles sans fil; offre d'un système de vote par Internet ou par un appareil de communication sans fil; services Internet… services de divertissement…

 

[28]           Compte tenu de mes conclusions en ce qui concerne le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d) relatif au caractère distinctif inhérent, à la mesure dans laquelle les marques sont connues, aux circonstances additionnelles et aux différences entre les Marchandises et les marchandises et services visés par les demandes de l’Opposant, je n’estime pas que la Marque crée de la confusion avec aucune des demandes pertinentes aux dates pertinentes. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.


Disposition

[29]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément aux dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi.

______________________________

Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay

 

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