Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 185

Date de la décision : 2015-10-19

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

 

Ridout & Maybee LLP

Partie requérante

et

 

Residential Income Fund L.P.

Propriétaire inscrite

 

 

 



 

LMC627,628 pour MAÎTRE VENDEUR & Dessin

 

Enregistrement

[1]               Le 26 février 2014, à la demande de Ridout & Maybee LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Residential Income Fund L.P. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l'enregistrement no LMC627,628 de la marque de commerce MAÎTRE VENDEUR & Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous :

[2]               La Marque est enregistrée aux fins d'emploi en liaison avec les services suivants : [Traduction] « Services immobiliers, nommément services de courtage en immeuble, services d'agence immobilière, offre de conseils concernant l'achat et la vente d'immeubles; offre de programmes d'incitatifs et de reconnaissance aux professionnels de l'immobilier ».

[3]               L’article 45 de la Loi exige que le propriétaire inscrit de la marque de commerce indique, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’il précise la date à laquelle la marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour établir l’emploi s’étend du 26 février 2011 au 26 février 2014.

[4]               La définition pertinente d'« emploi » en liaison avec des services est énoncée à l'article 4(2) de la Loi, comme suit :

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[5]               Il est bien établi que de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le critère relatif à la preuve d’emploi soit peu exigeant dans le cadre de la procédure prévue à l'article 45 [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst) à la p 480] et qu’il ne soit pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], il faut néanmoins produire des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure à un emploi de la marque de commerce en liaison avec chacun des services spécifiés dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

[6]               Lorsqu’il s’agit de services, la présentation de la marque dans l’annonce des services est suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2), dès que le propriétaire de la marque de commerce offre et est prêt à exécuter les services au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[7]               En réponse à l'avis du Registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit de Philip Soper, assermenté le 22 mai 2014 à Toronto en Ontario. Les parties ont toutes deux produit des observations écrites et étaient toutes deux représentées à une audience.

La preuve de la Propriétaire

[8]               Dans son affidavit, M. Soper atteste qu'il est le président de Residential Income Fund General Partner Limited, partenaire générale de la Propriétaire. Il atteste que le partenariat – par l'entremise de ses partenaires et de ses licenciés – offre les services immobiliers visés par l'enregistrement. M. Soper explique que de tels services immobiliers sont offerts au public par l'entremise d'agents et de courtiers immobiliers qui sont embauchés par des franchisés du partenariat, exerçant leurs activités en vertu d'une licence et étant autorisés à afficher les marques de commerce de la Propriétaire. Une copie de l'accord de licence intitulé « Royal LePage Independant Agency Agreement » est jointe en pièce A de son affidavit. M. Soper confirme que cet accord prévoit que la Propriétaire exerce un contrôle sur les services offerts par ses licenciés.

[9]               En ce qui concerne les services relatifs aux [Traduction] « programmes d'incitatifs et de récompense » visés par l'enregistrement, M. Soper affirme que la Marque « est l'une de nombreuses marques de commerce employées par le partenariat afin de promouvoir ses services immobiliers, par la reconnaissance des réalisations individuelles des agents immobiliers dans l'offre de ces services ». Il atteste que le titre que représente la Marque [Traduction] « est remis de façon continue » depuis 1985 et que le partenariat reconnaît les agents et courtiers qui satisfont à certains critères de vente prédéfinis « par l'attribution du titre de MAÎTRE VENDEUR » et confère à ces agents et courtiers « le droit de publier la marque de commerce sur leurs documents promotionnels ».

[10]           M. Soper affirme que les agents et courtiers ont normalement des sites Web personnels pour faire la promotion de leurs services et des propriétés pour lesquelles ils ont le mandat de vente; de plus, ce titre apparaît sur le site Web de ceux qui reçoivent ledit titre.

[11]           Il atteste aussi que les détenteurs des titres attribués par la Propriétaire sont autorisés à reproduire ces titres sur leurs cartes de visite et sur d'autres documents promotionnels, ce qui se fait fréquemment. Cependant, M. Soper ne produit aucune preuve à l'appui de son affirmation.

[12]           Les seules preuves d'affichage réel de la Marque sont des imprimés des sites Web de deux personnes qui, selon M. Soper, sont des sites utilisés par des licenciés de la Propriétaire.

[13]           La pièce B est un imprimé du site www.suzannecharpentier.com, que M. Soper atteste être le site Web de l'agent d'immeuble, Suzanne Charpentier. On peut voir sur le site Web une série de liens qui semblent liés à des services immobiliers, y compris les suivants : « Accueil », « Ma région », « Propriétés », « Info » et « Liens ». La Marque est apposée au centre de la page Web en pièce jointe, sous le texte « ATTESTATION DE MAÎTRE - VENDEUR ».

[14]           Bien que cette pièce semble avoir été imprimée après la période pertinente, soit en mai 2014, le moment où Mme Charpentier a reçu ce titre ou a commencé à afficher la Marque ne figure pas sur la page Web. Les seules références concernant les dates que l'on peut voir indiquent que Mme Charpentier a choisi de vivre dans les Cantons de l'Est au Québec en 2000, et qu'elle est agente d'immeuble depuis plus de 11 ans. Cependant, M. Soper déclare ceci dans son affidavit : « Mme Charpentier me l'a dit et je crois fermement que son site Web arbore la marque de commerce depuis 2008 ». Comme il en est question plus longuement ci-dessous, on ne sait pas si Mme Charpentier a obtenu le titre en 2008 et a simplement continué d'en faire mention sur son site Web, ou si elle a également obtenu le titre à un moment donné, pendant la période pertinente.

[15]           De la même façon, la pièce C est un imprimé du site www.jeanyvespellerin.com, que M. Soper atteste être le site Web de l'agent d'immeuble Jean-Yves Pellerin. La page Web en pièce jointe indique que M. Pellerin est agent d'immeuble depuis 1996; on peut y voir une série de liens vers des services immobiliers, dont les suivants : « Accueil », « Propriétés », « Informations », « Calculatrices », « Liens » et « Recherché ».

[16]           Comme dans le cas du site Web de Mme Charpentier, la pièce C semble avoir été imprimée en mai 2014. Cependant, contrairement au site Web de Mme Charpentier, le texte qui figure sur la page indique de façon plus précise que M. Pellerin a été détenteur du titre de « maître-vendeur » de 2006 à 2011. En outre, une variante de la Marque (en minuscules) apparaît à quatre reprises au bas de la page, suivie de l'année à laquelle le titre a été obtenu (mais seulement pour les années 2006, 2007, 2008 et 2010). On peut aussi voir les prix suivants : « PALME D’OR DU PRÉSIDENT GOLD AWARD » (daté de 2005) et « VENDEUR ÉMÉRITE » (daté de 2009).

[17]           Bien que M. Soper affirme que « M. Pellerin me l'a dit, et je crois fermement que son site Web arbore la marque de commerce depuis 1996 », cette déclaration ne semble pas compatible avec le contenu de la page Web produite en pièce.

[18]           Quoi qu'il en soit, M. Soper n'atteste pas clairement l'exécution des services visés par l'enregistrement par Mme Charpentier ou M. Pellerin pendant la période pertinente, ni n'atteste l'accès ou l'utilisation des sites Web par les clients pendant la période pertinente.

Octroi de licences

[19]           Dans ses observations, la Partie requérante fait valoir que tout emploi démontré de la Marque par Mme Charpentier et M. Pellerin ne s'applique pas à l'avantage de la Propriétaire.

[20]           À cet égard, la Partie requérante soutient que l'accord produit en pièce A ne satisfait pas aux exigences de l'article 50(1) de la Loi parce que l'accord ne fait pas précisément référence à la Marque. De la même façon, elle fait valoir que, comme Mme Charpentier et M. Pellerin ne sont pas eux-mêmes des licenciés de la Propriétaire, tout emploi de la Marque par ces derniers ne satisfait pas aux exigences prévues à l'article 50(1).

[21]           Comme l'a indiqué la Cour fédérale, il y a, pour le propriétaire inscrit d’une marque de commerce, essentiellement trois manières de démontrer l’effectivité de son contrôle afin de se conformer à l'article 50(1) de la Loi. D'abord, il peut explicitement affirmer qu’il exerce effectivement le contrôle prévu. Ensuite, il peut produire des preuves démontrant qu’il exerce effectivement le contrôle nécessaire, ou encore il peut produire une copie du contrat de licence qui prévoit l’exercice d’un tel contrôle [Empresa Cubana Del Tabaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, 91 CPR (4th) 248 au paragraphe 84].

[22]           En l'espèce, je suis convaincu que la preuve de la Propriétaire répond à ces trois critères. M. Soper a correctement expliqué la relation entre la Propriétaire et Mme Charpentier et M. Pellerin, ces derniers étant les employés d'un licencié. Il indique aussi que les récipiendaires du titre en question ont le droit d'afficher la Marque dans leurs documents de promotion. Bien que l'accord produit en pièce ne fasse pas précisément référence à la Marque, M. Soper confirme que ces accords prévoient le contrôle requis sur les services offerts par les licenciés de la Propriétaire. Aux fins de la présente procédure, il n'en faut pas plus pour satisfaire aux exigences prévues à l'article 50(1) de la Loi. Nonobstant les observations de la Partie requérante, étant donné qu'une déclaration claire du contrôle suffit aux fins de la procédure prévue à l'article 45, la forme précise de contrôle ou la mesure dans laquelle le contrôle est effectivement exercé par la Propriétaire ne s'appliquent pas dans la présente procédure. Ainsi, je suis convaincu que tout emploi démontré de la Marque par les employés d'un licencié s'appliquerait en faveur de la Propriétaire.

Ouï-dire

[23]           La Partie requérante prétend également que les déclarations que contient l'affidavit de M. Soper concernant les activités des [Traduction] « présumés franchisés/licenciés de la Propriétaire ou les employés de ces tiers » constituent du ouï-dire. À cet égard, elle soutient qu'il n'existe aucun fondement sur lequel on puisse s'appuyer pour confirmer que M. Soper est personnellement au courant des activités des licenciés, ni de celles de Mme Charpentier et de M. Pellerin. Essentiellement, la Partie requérante fait valoir qu’une grande partie de l'affidavit de M. Soper constitue une preuve par ouï-dire inadmissible.

[24]           Au cœur des observations de la Partie requérante concernant la preuve par ouï-dire se trouvent les déclarations susmentionnées de M. Soper, selon lesquelles [Traduction] « Mme Charpentier me l'a dit ... que son site Web arbore la marque de commerce depuis 2008 » et de la même façon, [Traduction] « M. Pellerin me l'a dit ... que son site Web arbore la marque de commerce depuis 1996 ».

[25]           La Partie requérante soutient que ces déclarations constituent une preuve par ouï-dire en ce qui concerne la question de savoir si la Marque figurait sur l'ensemble des sites Web, y compris pendant la période pertinente. Par ailleurs, la Propriétaire convient que les déclarations constituent en soi du ouï-dire, mais seulement en ce qui concerne le moment où les sites Web ont été mis en ligne pour la première fois, et non en ce qui a trait à la question de savoir si les sites Web arboraient la Marque pendant la période pertinente.

[26]           Quoi qu'il en soit, étant donné que M. Soper est une personne qui exploite l'entreprise de la Propriétaire, la Propriétaire soutient que ses déclarations, y compris les deux susmentionnées, sont fiables.

[27]           Cependant, bien que l'explication de la Propriétaire soit plausible en ce qui concerne le site Web de Mme Charpentier, je noterais que la déclaration selon laquelle le site Web de M. Pellerin [Traduction] « arbore la marque de commerce depuis 1996 » semble incompatible avec la page Web produite en pièce. Comme il a été mentionné précédemment, bien que la page Web produite en pièce C indique que M. Pellerin est agent d'immeuble depuis 1996, il ne semble pas avoir été récipiendaire du titre en question avant 2006.

[28]           Si M. Soper avait l'intention de déclarer qu'il [Traduction] « croit fermement » que le site Web de M. Pellerin est en ligne depuis 1996 et qu'il arborait la Marque pendant la période pertinente, ce n'est simplement pas ce qu'il déclare dans son affidavit.

[29]           Bien sûr, la preuve doit être considérée dans son ensemble et, à la limite, la question de savoir si M. Soper avait l'intention de déclarer que le site Web de M. Pellerin arbore la Marque depuis 1996 ou depuis 2006 n'est pas pertinente. La page Web produite en pièce montre la variante de la Marque, laquelle précède les années indiquées, soit 2006, 2007, 2008 et 2010. On peut raisonnablement inférer ici que la page Web a probablement été mise à jour périodiquement entre 2006 et 2011 pour y ajouter des références aux titres reçus par M. Pellerin.

[30]           Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne le ouï-dire, je suis d'accord avec la Propriétaire pour dire que la nature sommaire des procédures en annulation est telle que des préoccupations relatives à des preuves par ouï-dire devraient généralement porter seulement sur le poids accordé à la preuve plutôt qu’à l’admissibilité [voir Derby Cycle Werke GmbH c Infinité Cycle Works Ltd, 2013 COMC 134, 113 CPR (4th) 412; Eva Gabor International Ltd c 1459243 Ontario Inc, 2011 CF 18, 90 CPR (4th) 277; et Wishbuds Inc c Sandoz GmbH, 2013 COMC 208, CarswellNat 4700]. En outre, étant donné la nature de son poste dans l'entreprise que représente la Propriétaire, j'accepte que M. Soper soit généralement au courant des questions pour lesquelles il a fait ses déclarations.

[31]           Ainsi, je ne suis pas prêt à conclure que les déclarations susmentionnées ni toute portion de l'affidavit de M. Soper constituent une preuve par ouï-dire inadmissible. Cependant, le fait que M. Soper s'appuie, à certains égards, sur une telle preuve pour « établir » l'emploi de la Marque, dénote la qualité de la preuve fournie.

[32]           À cet égard, je souligne que M. Soper ne fournit que peu, voire aucun détail concernant l'exécution des services visés par l'enregistrement que sont les [Traduction] « programmes d'incitatifs et de reconnaissance » pendant la période pertinente. Bien qu'il atteste l'objectif et la nature générale des titres remis par la Propriétaire – des sujets qu'il devrait connaître étant donné la nature de son poste – il affirme simplement que le titre en question est remis « de façon continue » depuis 1985, sans fournir de détails concernant sa remise pendant la période pertinente.

[33]           En ce qui concerne les services immobiliers visés par l'enregistrement, il ne fournit pas non plus de détails concernant l'exécution de ces services par les licenciés de la Propriétaire ou, plus particulièrement, par Mme Charpentier et M. Pellerin. Comme la preuve produite ne nous permet pas vraiment de conclure à quoi que ce soit, mais plutôt de supposer et d'inférer les faits, la question ne concerne pas tant le fait que les portions de l'affidavit de M. Soper constituent une preuve par ouï-dire, mais plutôt qu'en l'absence d'autres détails, comme il en est question ci-dessous, elle ne permet pas de démontrer une preuve à première vue d'un cas d'emploi de la Marque pendant la période pertinente en ce qui a trait aux services visés par l'enregistrement.

Services relatifs aux programmes de reconnaissance

[34]           D'abord, en ce qui concerne les services relatifs aux « programmes d'incitatifs et de reconnaissance , comme il a été mentionné précédemment, M. Soper atteste que le titre de [Traduction] « Maître Vendeur et Dessin est remis de façon continue depuis 1985 ». Cependant, il ne fournit aucune pièce démontrant la manière dont le titre de « Maître Vendeur » a été remis pendant la période pertinente, ni d'ailleurs à tout autre moment. Bien qu'il ne s'agisse pas d'un élément déterminant, M. Soper n'explique pas le fonctionnement du programme, par exemple s'il y a une cérémonie de remise ou si le titre est simplement obtenu « automatiquement » à l'atteinte d'un certain niveau de ventes. Même là, on ne sait pas comment les agents et les courtiers sont mis au courant de ce titre. Par exemple, la Propriétaire n'a produit aucun dépliant, matériel promotionnel ou d’autres documents remis aux courtiers individuels concernant le titre de « Maître Vendeur ».

[35]           En l'espèce, la seule preuve d'affichage de la Marque est la présence de celle-ci sur les pages Web produites en pièce. Cependant, nonobstant l'affirmation de la Propriétaire, je ne considère pas la présence de la Marque affichée de la manière présentée comme constituant un affichage en liaison avec les services que sont : [Traduction] « offre de programmes d'incitatifs et de reconnaissance aux professionnels de l'immobilier ». Au plus, les sites Web font référence à des services immobiliers, mais pas à un programme de reconnaissance.

[36]           En outre, on ne sait pas si Mme Charpentier ou M. Pellerin ont effectivement reçu le titre de Maître Vendeur pendant la période pertinente. La seule date mentionnée sur la page Web produite en pièce B est 2000, et la page ne contient aucune référence à des dates s'inscrivant dans la période pertinente.

[37]           Étrangement, même le site Web de M. Pellerin ne fait référence qu'à des dates qui précèdent la période pertinente. Bien qu'il soit indiqué dans un texte sur la page Web produite en pièce C que M. Pelerin a reçu le titre de « maître vendeur » en 2011, la variante de la Marque n'apparaît pas en liaison avec la date, contrairement aux années 2006, 2007, 2008 et 2010. Si le site Web de M. Pellerin était actif pendant la période pertinente, on ne sait pas pourquoi l'imprimé produit en pièce, datant de 2014, ne reflétait aucune mise à jour pendant la période pertinente.

[38]           Bien qu'il ne s'agisse pas d'un élément déterminant en soi, cela laisse entendre deux possibilités : la référence à 2011 sur la page Web était une erreur; bien que le titre de « Maître Vendeur » était en quelque sorte remis pendant la période pertinente, la Marque en soi n'était plus employée en liaison avec ce titre.

[39]           Bref, si le titre de « Maître Vendeur » était effectivement remis pendant la période pertinente, on ne peut pas le confirmer clairement à partir de la preuve. Quoi qu'il en soit, bien que la Marque ait été apposée sur les pages Web produites en pièce, elle n'était pas clairement affichée en liaison avec les services relatifs aux « programmes d'incitatifs et de reconnaissance ».

[40]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a établi l’emploi de la Marque en liaison avec les services que sont : [Traduction] « offre de programmes d'incitatifs et de reconnaissance aux professionnels de l'immobilier » au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi. De plus, la Propriétaire n'a produit aucune preuve de l'existence de circonstances spéciales justifiant ce défaut d'emploi.

Services immobiliers

[41]           En ce qui concerne les services immobiliers visés par l'enregistrement, M. Soper atteste que les pages Web produites en pièce [Traduction] « sont typiques de la manière dont la marque de commerce a été publiée en ligne de 1990 à aujourd'hui ». Cependant, il est étrange que, comme preuve d'emploi de la Marque, la Propriétaire ait choisi de s'appuyer principalement sur deux imprimés de sites Web qui, même s'ils ont été imprimés après la date pertinente, ne font aucunement référence à la période pertinente elle-même.

[42]           La Propriétaire fait valoir que la preuve d'emploi suivant la date d'avis est pertinente, afin d'établir la continuité d'emploi. Elle soutient que l'emploi fait après la date pertinente est important lorsque celle-ci est considérée de pair avec l'emploi fait avant ou pendant la période pertinente [citant Boutique Progolf Inc c Marks and Clerk (1993) 54 CPR (3d) 451 (CAF)].

[43]           Toutefois, même s'il est raisonnable de conclure que les deux agents ont exécuté des services immobiliers avant la période pertinente, il n'en ressort pas manifestement qu'ils ont continué d'offrir de tels services pendant la période pertinente.

[44]           Bien qu'il soit raisonnable d'inférer que Mme Charpentier et M. Pellerin peuvent avoir exécuté des services immobiliers pendant la période pertinente, on ne sait pas exactement dans quelle mesure ils peuvent l'avoir fait par l'entremise des sites Web produits en pièce.

[45]           En effet, les sites Web produits en pièce peuvent constituer, au mieux, une preuve d'annonce de services immobiliers en liaison avec la Marque. Cependant, je considère tout de même que la preuve dans son ensemble ne suffit pas pour établir l'emploi de la Marque en liaison avec les services immobiliers visés par l'enregistrement pendant la période pertinente.

[46]           À cet égard, je note que dans Cornerstone Securities Canada Inc c Canada (Registraire des marques de commerce) (1994), 58 CPR (3d) 417 (CF 1re inst), le tribunal a décidé que le propriétaire de la marque de commerce était incapable d'établir l'emploi de sa marque de commerce parce que la preuve n'a pas suffi à persuader le tribunal que les publicités étaient, dans les faits, distribuées à des clients potentiels. En particulier, le tribunal a fait remarquer que [Traduction] « il n'existe aucune preuve que les publicités étaient distribuées à qui que ce soit... Pas plus que des personnes n'ont été identifiées comme les personnes à qui ont été envoyées les publicités » [au para 420].

[47]           Même si les pages Web ne sont pas comme des annonces imprimées, en ce sens qu'elles ne peuvent pas être concrètement distribuées de la même façon, elles doivent tout de même « être distribuées » à des clients potentiels, ou être accessibles par ceux-ci, pour constituer une annonce [voir à titre d'exemple Shift Law c Jefferies Group, Inc, 2014 COMC 277, CarswellNat 6223]. Ainsi, pour que les pages Web produites en pièce constituent une annonce des services visés par l'enregistrement, il doit y avoir une certaine preuve d'accès à ces pages Web. Une déclaration claire peut suffire. En revanche, il doit exister une certaine preuve à partir de laquelle on peut raisonnablement conclure que les clients ont accédé aux pages Web. La question de savoir si une telle preuve est alors suffisante pour établir l'emploi d'une marque de commerce en liaison avec des services en particulier au sens des articles 4 et 45 de la Loi dépend des faits de chaque cas.

[48]           Toutefois, comme un dépliant imprimé, mais non distribué, la simple existence d'une page Web ne suffit pas en soi pour constituer l'annonce au sens de l'article 4(2) de la Loi, contrairement, par exemple, à un panneau d'affichage près d'une autoroute achalandée, on ne peut pas présumer que le site Web est consulté par le public.

[49]           En l'espèce, la simple existence des pages Web produites en pièce ne suffit pas pour établir que de telles pages Web ont été consultées par des clients potentiels pendant la période pertinente. M. Soper ne fait aucune déclaration concernant l'accès aux pages Web. En effet, étant donné qu'il semble s'appuyer sur le « ouï-dire » susmentionné relativement aux sites Web, on peut se demander s'il est possible qu'il ait fait une telle déclaration positive.

[50]           En outre, la Propriétaire n'a produit aucune preuve d'accès pendant la période pertinente (ou à tout autre moment) et je ne suis pas prêt à faire d'inférence en faveur de la Propriétaire et à dire que les sites Web ont ainsi été consultés pendant la période pertinente. À cet égard, je note et répète ce qui suit :

         M. Soper semble s'appuyer sur les déclarations par « ouï-dire » susmentionnées de Mme Charpentier et de M. Pellerin concernant le contenu des sites Web et la période pendant laquelle ils ont existé.

         Les sites Web ont été imprimés après la période pertinente, mais toutes les dates qui y sont affichées précèdent la période pertinente.

         M. Soper ne fournit aucune explication concernant l'absence apparente de mises à jour des sites Web produits en pièce pendant la période pertinente.

         M. Soper ne fait aucune déclaration et ne produit aucune preuve concernant le nombre de visites sur les sites Web produits en pièce.

         Aucun volume de ventes n'est présenté, ni détails sur les clients de Mme Charpentier et de M. Pellerin pendant la période pertinente, à partir desquels on aurait pu conclure que les sites Web produits en pièce ont au moins été consultés par quelques clients canadiens pendant la période pertinente.

         M. Soper n'affirme même pas que les sites Web ont été consultés par des clients pendant la période pertinente.

[51]           En l'absence de preuve indiquant que les pages Web produites en pièce ont effectivement été consultées par des Canadiens pendant la période pertinente, je ne considère pas que les pages Web produites en pièce, soit celles tirées des sites Web de Mme Charpentier et de M. Pellerin, constituent une annonce des services immobiliers visés par l'enregistrement.

[52]           Même si les sites Web peuvent être considérés comme une annonce de services immobiliers (en ce sens qu'ils peuvent effectivement être consultés par des clients potentiels), je note à nouveau que ni M. Soper ni les pages Web produites en pièce ne parlent des activités des agents pendant la période pertinente. En l'absence de preuve démontrant que Mme Charpentier et M. Pellerin étaient prêts à exécuter les services immobiliers visés par l'enregistrement pendant la période pertinente, toute annonce qu'ils font ne suffit pas pour satisfaire aux exigences prévues à l'article 4(2) de la Loi [conformément à Wenward,précitée].

[53]           Par conséquent, je ne peux pas conclure que les pages Web produites en pièce établissent l'emploi de la Marque en liaison avec les services immobiliers visés par l'enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[54]           À la lumière de la preuve dans son ensemble, il semblerait que même si la Marque peut avoir constitué un élément actif des activités de la Propriétaire avant la période pertinente, à un certain moment, elle a perdu ce statut. L'affidavit de M. Soper ne contient pas suffisamment de détails pour que l'on puisse tirer une conclusion en faveur de la Propriétaire. Ainsi, je considère ses déclarations selon lesquelles le titre que représente la Marque est remis « de façon continue » depuis 1985 et a été publiée en ligne « à compter des années 1990 » ne sont que de simples allégations d'emploi (du point de vue du droit) plutôt que des allégations de faits établissant l'emploi [voir Mantha & Associés/Associates c Central Transport, Inc (1995), 64 CPR (3d) 354 (CAF)].

[55]           Compte tenu de tout ce qui précède, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque en liaison avec les services visés par l'enregistrement au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi. Qui plus est, la Propriétaire n'a produit aucune preuve de l'existence de circonstances spéciales justifiant ce défaut d'emploi.

La décision

[56]           En conséquence, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera radié, conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi.

____________________________

Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

Date de l’audience : 2015-09-09

 

Comparutions

 

David Allsebrook                                                                    Pour la Propriétaire inscrite

 

Mitchell B. Charness                                                               Pour la Partie requérante

 

Agents au dossier

 

Ludlow Law                                                                            Pour la Propriétaire inscrite

 

Ridout & Maybee LLP                                                            Pour la Partie requérante

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