Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 52

Date de la décision : 28-03-2013

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Cameron IP visant l’enregistrement no LMC557 427 de la marque de commerce CLIFFHANGER au nom de Gary A. Jones

 

[1]               Le 2 août 2011, à la demande de Cameron IP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) à Gary A. Jones (l’Inscrivant), le propriétaire inscrit de l’enregistrement no LMC 557 427 de la marque de commerce CLIFFHANGER.

[2]               L’avis prévu à l’article 45 exigeait de l’Inscrivant qu’il fournisse des éléments de preuve démontrant qu’il a employé la Marque en liaison avec chacune des marchandises et chacun des services visés par l’enregistrement au cours de la période s’étendant du 2 août 2008 au 2 août 2011.

[3]               Les marchandises et services visés par l’enregistrement sont les suivants :

[TRADUCTION]
Marchandises :

 

(1) Jeux de société.

(2) Jeux et matériel de jeux, nommément planchettes de jeu, dés à jouer, règles de jeu, cartes d’introduction d’histoire, paquets de cartes, et jetons de jeu.

(3) Vêtements, nommément chapeaux, chaussettes, chaussures, robes, costumes, jupes, pantalons, chemises, vestes; tee-shirts sérigraphiés et à flocage, chemises sport, chandails et chemises molletonnées, chandails et pantalons, tee-shirts, débardeurs, robes en T, tenues de jogging, pyjamas polo, ensembles-shorts, sous-vêtements, hauts en tricot et chapeaux, casquettes, tuques, bandeaux et bandeaux antisudoripares.

(4) Jeux vidéo et composants, nommément tous les logiciels nécessaires pour les systèmes de jeux vidéo, nommément cartouches de jeu, tableaux de commande et panneaux d’attrait.

(5) Calendriers muraux, calendriers de bureau à feuilles mobiles, carnets de rendez-vous, supports pour blocs-notes, pots à crayons, livres vierges, agendas, carnets d’adresses, agendas de rendez-vous, sous-mains, blocs-notes, portefeuilles calepins, calepins, corbeilles à papier, planchettes à pince, ouvre-lettres, autocollants, papeterie autocollante, cartes postales, cartes de souhaits, albums à photos, carnets d’autographes, blocs de fiches, blocs-téléphone ainsi que tableaux d’affichage et babillards, album de découpures et signets

(6) Pièces de jeu métalliques, bijoux, montres, et horloges électroplaqués en or 14 carats.

(7) Casse-tête et casse-tête à image incrustée.

(8) Assiettes en papier et serviettes pour fêtes.

(9) Livres, nommément livres de dessins humoristiques, livres illustrés, brochures et affiches.

(10) Chopes à café, chaînes porte-clés, sous-verres, plateaux de service, cuillers-souvenirs, aimants pour réfrigérateur, décapsuleurs, verres, chopes à bière, verres de mesure à alcool et seaux à glace et poterie

(11) Serviettes de plage et sacs de sport.

 

            Services :


           
(1) Services de divertissement sous forme de jeux-questionnaires télévisés.

(2) Services de divertissement sous forme d’un jeu-questionnaire télévisé.

(3) Services de divertissement sous forme de jeux-questionnaires radiodiffusés.

(4) Services de divertissement sous forme d’un jeu-questionnaire radiodiffusé.

 

[4]               Les définitions pertinentes d’« emploi » sont énoncées aux paragraphes 4(1) et 4(2) de la Loi. Dans le cas des Marchandises, l’Inscrivant doit démontrer que la Marque était associée aux Marchandises lors du transfert dans la pratique normale du commerce. Dans le cas des Services, l’Inscrivant doit établir que la Marque était employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce des Services.

[5]                En l’espèce, toutefois, la principale question est celle de savoir si les éléments matériels fournis par l’Inscrivant peuvent être admis en preuve dans le cadre de la présente procédure.

L’« affidavit » de l’Inscrivant

[6]               En réponse à l’avis donné par le registraire, l’Inscrivant a d’abord produit deux lettres datées du 29 août 2011 – une lettre de présentation adressée au registraire et une lettre de deux pages adressée à la Partie requérante. Ces lettres comportaient toutes deux la ligne d’objet suivante : [TRADUCTION] « Objet – Affidavit concernant l’emploi de la marque de commerce "CLIFFHANGER" © MD ». Or, ni l’une ni l’autre n’a été produite sous la forme d’un affidavit ou d’une déclaration solennelle.

[7]               Dans une lettre en date du 13 septembre 2011, le registraire a informé l’Inscrivant que la preuve dans une procédure de radiation en vertu de l’article 45 doit être produite par voie d’affidavit ou de déclaration solennelle et que, par conséquent, ses lettres du 29 août 2011 ne constituaient pas une preuve admissible. Le registraire a insisté sur le fait que les déclarations contenues dans la lettre du 29 août 2011 ne semblaient pas avoir été faites sous serment devant une personne autorisée à faire prêter serment, tel un notaire public ou un commissaire à l’assermentation.

[8]               Le 27 septembre 2011, l’Inscrivant a de nouveau présenté essentiellement les deux mêmes lettres, mais en ayant pris soin cette fois de faire ajouter le sceau et la signature de Yasmin Nakhuda, une notaire publique, à la seconde page de la lettre de deux pages adressée à la Partie requérante. Je souligne que le sceau et la signature de Mme Nakhuda s’accompagnent de la déclaration suivante (plutôt que d’un constat d’assermentation) :

[TRADUCTION]
AUCUN CONSEIL FOURNI OU SOLLICITÉ
ASSERMENTATION UNIQUEMENT
J’ai vivement recommandé au déclarant d’obtenir
un avis juridique avant de faire la déclaration contenue
dans les présentes; le déclarant est conscient qu’une fausse
déclaration constitue une infraction criminelle.

[9]               Le 5 octobre 2011, les dernières lettres produites par l’Inscrivant, soit celles du 27 septembre 2011, ont néanmoins été versées au dossier et, en réponse, la Partie requérante a présenté des observations écrites datées du 6 février 2012.

Observations de la Partie requérante

[10]           Dans ses observations écrites, la Partie requérante soutient que les lettres en date du 27 septembre 2011 qu’a produites l’Inscrivant ne sont pas conformes aux règles de présentation d’un affidavit et qu’elles ne peuvent, par conséquent, être admises en preuve en tant qu’affidavits [la Partie requérante cite divers passages des Règles de procédure civile de l’Ontario, R.R.O. 1990 et des Règles des Cours fédérales DORS/98-106]. Plus précisément, la Partie requérante fait valoir que, entre autres irrégularités, les lettres de l’Inscrivant ne contiennent aucun passage indiquant que l’Inscrivant a attesté la véracité des déclarations contenues dans ses lettres. En outre, les lettres sont dépourvues d’un constat d’assermentation et ne contiennent aucune indication confirmant que « l’affidavit » a été fait sous serment devant la notaire publique, Mme Nakhuda.

[11]           En d’autres termes, la Partie requérante fait valoir qu’il ne suffit pas d’ajouter le terme « affidavit » dans la ligne d’objet d’une lettre pour en faire un affidavit conforme aux exigences de l’article 45.

Analyse concernant l’admissibilité de la preuve

[12]           Il convient en premier lieu de souligner que la Loi et le Règlement sur les marques de commerce sont muets en ce qui concerne la forme que doivent prendre les affidavits et les déclarations solennelles qui sont présentés devant le registraire dans le cadre d’une procédure d’opposition ou d’une procédure de radiation en vertu de l’article 45. Comme l’a déjà mentionné le registraire, bien qu’il soit souhaitable que la preuve soit conforme aux Règles des Cours fédérales, la conformité n’est pas une obligation [voir Tension 10 Inc c. Tension Clothing Inc (2004), 45 C.P.R. (4th) 136 (C.O.M.C.)]. En outre, dans le contexte des procédures de radiation en vertu de l’article 45 – qui se veulent sommaires et expéditives – il est fréquent que le registraire considère comme de simples détails techniques certaines des irrégularités que peuvent présenter les affidavits et déclarations solennelles [voir, à titre d’exemple, 88766 Canada Inc c. Tootsie Roll Industries Inc (2006), 56 .C.P.R. (4th) 76 (C.O.M.C.)]. 

[13]           En l’espèce, cependant, j’estime, comme le fait valoir la Partie requérante, que les irrégularités dans la preuve de l’Inscrivant vont bien au-delà du simple détail technique. Plus particulièrement, les lettres de l’Inscrivant ne contiennent aucun constat d’assermentation, de quelque nature que ce soit, et aucune déclaration de la notaire confirmant que la déclaration de l’Inscrivant a été faite en sa présence. Le fait que la notaire ait signé la lettre ne constitue pas, en soi, une attestation que les déclarations contenues dans la lettre ont été faites sous serment devant elle [voir 88766 Canada Inc c. 167407 Canada Inc (2010), 89 C.P.R. (4th) 293 (C.O.M.C.) en ce qui concerne le traitement de telles irrégularités].  

[14]           En l’absence d’observations de la part de l’Inscrivant, il m’apparaît évident que le document qualifié d’affidavit en l’espèce n’est, en réalité, ni un affidavit ni une déclaration solennelle. En effet, l’Inscrivant termine son « affidavit » en proposant à la Partie requérante de partager la Marque avec elle, à condition qu’elle ne l’emploie pas [TRADUCTION] « en liaison avec un produit similaire ».

[15]           Compte tenu de ce qui précède, je conclus que les lettres produites par l’Inscrivant ne peuvent être admises en preuve dans le cadre de la présente procédure; il s’ensuit que l’Inscrivant n’a pas démontré que la Marque a été employée en liaison avec les Marchandises et les Services au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

Analyse concernant les Marchandises et Services

[16]           Même si je considérais les déclarations contenues dans les lettres de l’Inscrivant comme une preuve admissible, ces déclarations n’en demeureraient pas moins insuffisantes pour établir l’emploi de la Marque au cours de la Période pertinente. À cet égard, je souligne que, dans ces lettres, l’Inscrivant mentionne uniquement les « jeux de société »; il ne fait aucune allusion aux autres Marchandises et Services.

[17]           Dans sa lettre adressée à la Partie requérante, il affirme que [TRADUCTION] « le présent affidavit confirme que nous employons la marque de commerce « CLIFFHANGER »” © MD de manière continue depuis 1998 ». Plus précisément, il soutient que les éléments exposés ci-dessous [TRADUCTION] « établissent » l’emploi de la Marque :

         la [TRADUCTION] « quantité importante de jeux de société » que l’Inscrivant a en stock;

         la [TRADUCTION] « existence » du site Web de l’Inscrivant, www.cliffhangerthegame.com;

         le [TRADUCTION] « fait » que le jeu est [TRADUCTION] « actuellement » offert en vente dans un magasin de détail de Toronto;

         le [TRADUCTION] « fait » que le jeu a été vendu lors de marchés et de ventes-débarras [TRADUCTION] « au cours des trois dernières années »;

         le [TRADUCTION] « fait » qu’une banderole longue de 10 pi [3 m] sur laquelle on peut lire CLIFFHANGER est utilisée pour promouvoir le jeu lors de tels événements.

[18]           Bien qu’il soit possible d’inférer de ces déclarations que l’Inscrivant a exercé des activités dans la pratique normale du commerce, je souligne une fois de plus que rien n’indique que l’Inscrivant a attesté sous serment la véracité des déclarations contenues dans ses lettres.

[19]           Quoi qu’il en soit, et comme le fait valoir la Partie requérante, l’Inscrivant n’a fourni, à l’appui de ses déclarations, aucune pièce et aucun élément de preuve pour démontrer que la Marque a réellement été employée, tels des étiquettes, des emballages ou des copies de factures portant la Marque. Dans ces circonstances, je suis contraint de considérer les déclarations de l’Inscrivant concernant le jeu de société « CLIFFHANGER » comme de simples affirmations et je conclus que l’Inscrivant n’a pas établi l’emploi de la Marque [voir Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 C.P.R. (2d) 62 (C.A.F.)].

Décision

[20]           Compte tenu de ce qui précède, en vertu des pouvoirs qui m'ont été délégués au titre du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera radié conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme
Judith Lemire

 

 

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