Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 174

Date de la décision : 2016-10-27

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

 

Barilla G. e R. Fratelli – Societa per Azioni

 

Opposante

et

 

Nam Phuong V.N. Company Limited

Requérante

 

 

 



1,603,823 pour la marque de commerce BARONA & Dessin de chef



 

Demande

Contexte

[1]               Le 26 novembre 2012, la Requérante a produit la demande d’enregistrement n1,603,823 à l’égard de la marque de commerce BARONA & Dessin de chef (la Marque), reproduite ci-dessous.

BARONA & Chef Design

[2]               La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce : les lignes sont noires, l’ovale autour du mot « BARONA » est rouge, et l’ombre autour de l’ovale est jaune.

[3]               La Requérante revendique la priorité en vertu de l’article 34 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T‑13, (la Loi) au motif qu’une demande d’enregistrement à l’égard de la même, ou sensiblement la même, marque de commerce a été produite au Vietnam le 2 novembre 2012, sous le numéro de série no 4-2012-24714.

[4]               La demande est fondée sur un emploi projeté au Canada en liaison avec les produits suivants [Traduction] : « Bouillon, soupes; épices, assaisonnements en poudre, sauce tomate, chutney, sauce soya ».

[5]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 4 septembre 2013 et, le 4 novembre 2013, l’Opposante s’y est opposée en vertu de l’article 38 de la (Loi) aux motifs suivants : i) elle n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) et/ou de l’article 30e) de la Loi, parce que la Requérante n’a pas employé et n’a pas l’intention d’employer ou, subsidiairement, a employé la Marque en liaison avec les produits avant la date de production du 26 novembre 2012; ii) la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30i) de la Loi; iii) la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque suivant les articles 16(3)a), b) et c) de la Loi; iv) la Marque n’est pas enregistrable suivant l’article 12(1)d) de la Loi; et v) la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi.

[6]               À l’exception du motif fondé sur l’article 30b) et/ou l’article 30e), les motifs d’opposition sont fondés sur la confusion avec la famille de marques de commerce BARILLA de l’Opposante, qui sont présentées aux annexes « A » et « B » ci-jointes, ou son nom commercial Barilla G. e R. Fratelli – Societa Per Azioni qui, selon ses prétentions, aurait été employé antérieurement au Canada.

[7]               Dans une contre-déclaration en date du 10 janvier 2014, la Requérante a nié chacune des allégations formulées dans la déclaration d’opposition.

[8]               Comme preuve au soutien de son opposition, l’Opposante a produit l’affidavit d’Eric Devenny. Comme preuve au soutien de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Maureen Crawford. En réponse, l’Opposante a produit l’affidavit de Jamie-Lynn Kraft. Aucun des déposants n’a été contre-interrogé.

[9]               Seule l’Opposante a produit un plaidoyer écrit et était présente à l’audience qui a été tenue.

[10]           Pour les motifs qui suivent, la demande d’enregistrement est repoussée.

Fardeau de preuve

[11]           La Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298].

Motifs d’opposition rejetés sommairement

Non-conformité à l’article 30i) de la Loi

[12]           L’Opposante a allégué que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d’avoir droit d’employer la Marque au Canada à la date de production de la demande car la Requérante doit être réputée avoir eu connaissance de l’existence des marques de commerce de l’Opposante.

[13]           L’article 30i) de la Loi exige simplement que tout requérant déclare dans sa demande être convaincu d’avoir droit à l’enregistrement de sa marque de commerce. Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration exigée, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p 155]. La simple connaissance de l’existence des marques de commerce de l’Opposante ne soutient pas en soi une allégation que la Requérante ne pouvait pas être convaincue de son droit à l’emploi de la Marque [voir Woot, Inc c Woot Restaruants Inc Les Restaurants Woot Inc 2012 COMC 197 (CanLII)].

[14]           En l’espèce, l’allégation portant que la Requérante était au courant de l’emploi des marques de commerce de l’Opposante ne soutient pas en soi un motif d’opposition fondé sur l’article 30i). Pour cette raison, le motif d’opposition fondé sur l’article 30i) est rejeté sommairement.

Absence de droit à l’enregistrement – articles 16(3)a) et 16(3)c) de la Loi

[15]           En ce qui concerne ces motifs d’opposition, l’Opposante a le fardeau de preuve initial de démontrer que ses marques de commerce ou son nom commercial étaient employés avant la date de priorité de production revendiquée par la Requérante et de démontrer qu’elle n’avait pas abandonné sa marque [sic] ou ses noms commerciaux [sic]  à la date de l’annonce de la demande de la Requérante [article 16(5)]. L’Opposante n’a produit aucune preuve d’emploi de ses marques de commerce ou de son nom commercial. En conséquence, ces motifs sont également rejetés parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée du fardeau de preuve initial qui lui incombait.

Absence de caractère distinctif – articles 38(2)d) et 2 de la Loi

[16]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif fondé sur l’absence de caractère distinctif, l’Opposante doit démontrer que ses marques étaient devenues suffisamment connues au moment où la procédure d’opposition a été engagée pour faire perdre à la marque visée par la demande son caractère distinctif [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF) et Motel 6, Inc c No. 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44, à la p 58 (CF 1re inst)].

[17]           Comme je l’ai indiqué précédemment, l’Opposante n’a produit aucune preuve d’emploi de ses marques de commerce. De plus, je souligne que le simple fait de produire un certificat d’enregistrement d’une marque de commerce ne suffit pas pour satisfaire au fardeau de preuve initial d’un opposant relativement à un motif fondé sur l’absence de caractère distinctif [voir Rooxs, Inc c Edit-SRL (2002), 23 CPR (4th) 265 (COMC)].

[18]           L’Opposante ne s’est donc pas acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif. Par conséquent, ce motif d’opposition est également rejeté.

Analyse des autres motifs d’opposition

[19]           J’analyserai maintenant les autres motifs d’opposition

Enregistrabilité – article 12(1)d) de la Loi

[20]           L’Opposante a allégué que la Marque n’est pas enregistrable suivant l’article 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec une ou plusieurs de ses marques de commerce déposées. Je souligne ici que, même si la demande no 1,554,885 de l’Opposante pour la marque de commerce FOOD SERVICE BARILLA & Dessin de TOQUE DE CHEF a été enregistrée depuis la date de production de la déclaration d’opposition, étant donné que l’Opposante n’a pas produit de déclaration d’opposition modifiée afin d’y inclure cette marque au titre de son motif fondé sur l’article 12(1)d), cette marque ne peut pas être examinée au titre de ce motif.

[21]           À mon avis, la marque BARILLA & Dessin de l’Opposante (enregistrement no LMC623,996), reproduite ci-dessous, constitue l’argument le plus solide de l’Opposante parce que j’estime que cette marque ressemble davantage à la Marque que les autres marques déposées de l’Opposante invoquées au titre de ce motif. Par conséquent, si l’Opposante n’obtient pas gain de cause à l’égard de cette marque, elle n’obtiendra pas non plus gain de cause à l’égard de ses autres marques.

BARILLA & Colour Design

[22]           La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. Le terme BARILLA paraît en blanc sur un ovale en rouge. Un ovale plus grand, qui encercle le tout, est également en rouge, et la zone comprise entre les deux ovales est en blanc. La marque BARILLA est enregistrée en liaison avec les produits et services suivants [Traduction] :

PRODUITS :

(1) Viande, poisson, volaille et gibier; extraits de viande; fruits et légumes séchés, cuits et en conserve; gelées, confitures, compotes; œufs, lait et produits laitiers, nommément fromage, yogourt, beurre; huiles et graisses alimentaires; café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédané de café; farine et préparations à base de céréales moulues, nommément, pain, pâtes alimentaires, biscuits à levure chimique, pâtisseries et confiseries, nommément friandises, glaces; miel, mélasse; levure, levure chimique; sel, moutarde; vinaigre, sauces (condiments), nommément sauce Worcestershire, ketchup, sauce soja et mayonnaise, sauce pour pâtes; épices; glace.

SERVICES :

(1) Gestion des affaires en franchisage; gestion dans le domaine des restaurants, nommément restaurants, restaurants libre-service et restaurants-minute; franchisage de restaurants; services de fourniture d’aliments et de boissons, nommément services de restaurant et de bar; hébergement temporaire.

[23]           Une copie des détails de l’enregistrement de l’Opposante est jointe à l’affidavit de M. Devenny (il en sera question plus en détail ci-dessous). J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour confirmer que l’enregistrement existe [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif en ce qui concerne cette marque.

[24]           Comme l’Opposante s’est acquittée du fardeau de preuve qui lui incombait, la Requérante doit établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque de commerce de l’Opposante.

[25]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L’article 6(2) de la Loi porte que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[26]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC); et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

[27]           La date pertinente pour l’appréciation d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) de la Loi est la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

Article 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[28]           Les marques des parties sont toutes deux intrinsèquement fortes. Toutefois, j’estime que la Marque possède un caractère distinctif inhérent plus faible que la marque de commerce de l’Opposante, parce que le dessin de chef ouvragé, élément graphique de la marque de la Requérante, suggère en quelque sorte des produits alimentaires.

[29]           Une marque de commerce peut aussi acquérir un caractère distinctif par l’emploi ou la promotion. Cependant, aucune des parties n’a produit de preuve d’emploi. Bien que l’enregistrement de l’Opposante soit fondé sur l’emploi, cela ne me permet que de supposer un emploi de minimis [voir Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC) à la p 430]. Une conclusion selon laquelle la marque est devenue connue dans une mesure significative ou la marque a nécessairement été employée de façon ininterrompue depuis la date revendiquée ne peut pas être fondée sur un emploi de minimis.

Article 6(5)b) – période pendant laquelle les marques ont été en usage

[30]           La marque de commerce de l’Opposante a été enregistrée sur la base d’un emploi au Canada depuis au moins aussi tôt que 2002. Cependant, comme je l’ai indiqué précédemment, une conclusion selon laquelle la marque a été employée de façon ininterrompue depuis la date indiquée ne peut pas être fondée sur un emploi de minimis. Ainsi, comme je ne dispose d’aucune preuve d’emploi de la Marque de la Requérante, ce facteur ne favorise aucune des parties.

Articles 6(5)c) et d) – le genre de produits, services ou entreprises; et la nature du commerce

[31]           Mon appréciation de ce facteur est fonction de l’examen de l’état déclaratif des produits de la Requérante tel qu’il figure dans la demande d’enregistrement par rapport aux produits et services visés par l’enregistrement de l’Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktein c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr. Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF); Miss Universe Inc c Bohna (1994), 58 CPR (3d) 381 (CAF)].

[32]           Comme les deux marques concernent des produits alimentaires, il y a recoupement des produits liés aux marques des parties. Aucune des parties n’a produit de preuve concernant le genre de son entreprise ou la pratique normale du commerce. Toutefois, compte tenu du fait que les produits des parties sont semblables, il est raisonnable de conclure que leurs voies de commercialisation se recouperaient également.

Article 6(5)e) – degré de ressemblance entre les marques de commerce

[33]           Dans la plupart des cas, le facteur dominant pour l’appréciation de la question de la confusion concerne le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent; les autres facteurs en jeu jouent un rôle secondaire dans l’ensemble des circonstances de l’espèce [voir Beverly Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstery Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145, conf par 60 CPR (2d) 70 (CF 1re inst)]. Ce principe a été confirmé par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Masterpiece, où la Cour a en outre souligné qu’il est préférable, au moment de comparer des marques de commerce, de se demander d’abord si les marques présentent un aspect particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, au para 64].

[34]           En l’espèce, il existe une certaine ressemblance entre les marques dans le son, parce que les marques des deux parties contiennent des éléments nominaux distinctifs qui commencent par le préfixe BAR, comportent trois syllabes et se terminent par la lettre A. En outre, dans les marques des deux parties, cet élément nominal commence par la lettre B en majuscules suivie de lettres minuscules; il apparaît en caractères d’imprimerie blancs inclinés vers la droite sur un fond ovale rouge entouré d’un deuxième ovale de couleur pâle avec un contour foncé.

[35]           Cependant, lorsque les marques sont examinées dans leur totalité, j’estime qu’elles sont plus différentes que semblables. À cet égard, l’élément dominant de la marque de l’Opposante est le mot BARILLA. Par ailleurs, la Marque contient deux éléments qui sont sensiblement aussi dominants l’un que l’autre – l’élément nominal BARONA et le dessin d’un chef ouvragé portant sa toque et une longue moustache frisée et formant avec son pouce et son index le signe « délicieux ». Ces éléments apportent des différences importantes entre les marques quant à la présentation.

[36]           Les idées suggérées sont également différentes, en ce que la Marque suggère des produits alimentaires, alors que la marque de l’Opposante n’évoque aucune idée particulière en anglais ou en français.

Circonstances de l’espèce

La famille de marques de commerce de l’Opposante

[37]           À l’audience, l’Opposante a tenté de faire valoir qu’elle était propriétaire d’une famille d’enregistrements et de demandes BARILLA, ce qui lui conférerait une protection étendue. Au soutien de cet argument, l’Opposante invoque l’affidavit Devenny. M. Devenny est un recherchiste en marques de commerce à l’emploi du cabinet de l’agent de l’Opposante. Son affidavit est constitué des résultats d’une recherche de marques de commerce effectuée dans la base de données Saegis, pour l’ensemble des marques de commerce actives dans le Registre canadien des marques de commerce comprenant le terme BARILLA, ainsi que le terme Barilla dans le nom du propriétaire. La recherche de M. Devenny a produit 25 résultats. Une copie des résultats de la recherche est jointe comme pièce « B » à son affidavit, et les pages complètes des enregistrements correspondant à chacun des 25 résultats sont jointes comme pièce « C ».

[38]           Je souligne que pour bénéficier des avantages que confère une famille de marques, un opposant doit établir l’emploi des membres qui composent cette famille [voir Ultramar Ltd c Gold Eagle Co 2011 COMC 149, au para 26]. En l’espèce, l’Opposante n’en a rien fait; il m’est donc impossible de tenir compte de l’effet cumulatif éventuel de ses marques de commerce BARILLA.

État du registre

[39]           Au soutien de sa demande, la Requérante a produit une preuve de l’état du registre en l’affidavit de Maureen Crawford, souscrit le 9 décembre 2014. L’affidavit Crawford présente les résultats sur l’état du registre de la recherche qu’elle a effectuée pour relever des marques de commerce comportant des marques figuratives contenant un chef en liaison avec des produits alimentaires, des marques de commerce comportant des dessins d’ovales en liaison avec des produits alimentaires, et des marques de commerce comportant des éléments nominaux qui commencent par l’élément BAR et qui sont enregistrées pour emploi en liaison avec des produits alimentaires. L’ensemble des recherches se limitait aux enregistrements plutôt qu’aux demandes, et se limitait aux enregistrements qui sont actifs plutôt qu’inactifs à la date d’entrée en vigueur de ces dossiers, laquelle était indiquée sur ceux-ci.

[40]           La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en dégager des conclusions sur l’état du marché, et l’on ne peut tirer de conclusions sur l’état du marché que si l’on relève un grand nombre d’enregistrements pertinents [voir Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst.); Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[41]           D’emblée, je tiens à souligner que les produits et les services liés à certaines des marques de commerce relevées par Mme Crawford pendant sa recherche sont quelque peu différents de ceux qui sont liées aux marques de commerce des parties. Cela dit, j’estime tout de même qu’il existe un nombre raisonnable d’enregistrements pertinents, de sorte que je puisse conclure que les consommateurs seraient habitués à voir des marques de commerce comportant le dessin d’un chef ou d’un ovale, ou commençant par l’élément BAR, en liaison avec des produits et services identiques ou semblables à ceux des parties en cause.

[42]           Bien que la Requérante ait démontré que les marques qui commencent par l’élément BAR ou celles qui comportent le dessin d’un ovale ou le dessin d’un chef ont été fréquemment adoptées sur le marché, aucune des marques (à l’exception de celles des parties) n’inclut à la fois le préfixe BAR et le dessin d’un ovale, et ce sont ces deux éléments que les marques de commerce des parties ont en commun.

[43]           Compte tenu de ce qui précède, je ne considère pas que la preuve de l’état du registre produite par la Requérante soit une circonstance de l’espèce très significative dans cette affaire.

Juridictions étrangères

[44]           Comme autre circonstance de l’espèce, l’Opposante a produit une preuve établissant que la Requérante avait tenté de faire enregistrer aux États-Unis la même marque que celle en cause (la seule différence étant la revendication de couleur légèrement différente pour la marque américaine), mais qu’elle a abandonné sa demande après que l’Opposante s’y soit opposée (affidavit Kraft, pièces C1 à C9). Par ailleurs, la Requérante a produit une preuve qui établirait que la Marque a été enregistrée au Vietnam à la suite d’une opposition de l’actuelle Opposante qui n’a pas été accueillie (affidavit Crawford, pièces G et H).

[45]           La preuve de la Requérante comporte de nombreuses limites qu’il ne m’est pas nécessaire de mentionner ici. Même si je pouvais accorder la pleine valeur probante à cette preuve, il a été établi précédemment que peu de poids est accordé à la coexistence dans les registres de marques de commerce étrangers [voir Quantum Instruments, Inc c Elinca SA, 60 CPR (3d) 264 aux pages 268 et 269 (COMC)]. À cet égard, il peut exister d’autres facteurs qui justifient la coexistence de deux marques dans un registre étranger qui n’existent pas au Canada (p. ex. des différences dans le droit, un état du registre différent, etc.).

[46]           En ce qui concerne la preuve de l’Opposante, je n’estime pas que la situation aux États-Unis constitue une circonstance de l’espèce pertinente au soutien du dossier de l’Opposante, puisque je ne peux pas spéculer sur les motifs qui expliquent le retrait par la Requérante de sa demande aux États-Unis.

[47]           Je considère donc qu’aucune des situations ci-dessus ne constitue une circonstance de l’espèce au soutien de la position de l’une ou l’autre des parties.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[48]           Après examen de l’ensemble des circonstances de l’espèce, j’estime, selon la prépondérance des probabilités, que la confusion entre les marques est peu probable. Comme je l’ai indiqué précédemment, dans la plupart des cas, le facteur dominant pour l’appréciation de la question de la confusion concerne le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent; les autres facteurs en jeu jouent un rôle secondaire dans l’ensemble des circonstances de l’espèce [voir Beverly Bedding, supra]. En l’espèce, bien que la marque de l’Opposante soit intrinsèquement plus forte que la Marque, et que les produits des parties se recoupent, je suis d’avis que la différence globale entre les marques des parties dans la présentation et les idées qu’elles suggèrent est suffisamment importante pour faire pencher la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante. Par conséquent, j’estime que le consommateur ordinaire ne penserait pas, sous le coup de la première impression, que les produits et services liés à l’alimentation employés en liaison avec les marques des parties proviennent d’une même source.

[49]           Comme la Requérante s’est acquittée de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce de l’Opposante, ce motif est rejeté.

Absence de droit à l’enregistrement – article 16(3)b) de la Loi

[50]           L’Opposante a allégué au titre de ce motif que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que celle-ci crée de la confusion avec les marques de commerce de l’Opposante déjà visées par une demande, présentées à l’annexe B des présentes. J’estime que la plus pertinente de ces marques est FOOD SERVICE BARILLA & dessin de toque de chef (demande no 1554885) reproduite ci-dessous. L’Opposante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait au titre de ce motif, puisqu’une demande pour cette marque a été produite le 2 décembre 2011 (avant la date de priorité de production revendiquée par la Requérante) et qu’elle était toujours en instance à la date de l’annonce de la demande de la Requérante (soit le 4 septembre 2013).

FOODSERVICE Barilla & Design

[51]           Cette marque est demandée pour un emploi en liaison avec les produits et services suivants [Traduction] :

PRODUITS :

Pâtes alimentaires; sauces (condiments), nommément sauces pour pâtes alimentaires.

SERVICES :

Services de restauration (alimentation), nommément services de restaurant et de bar.

[52]           La date pertinente pour ce motif est la date de priorité de production de la demande, soit le 2 novembre 2012.

[53]           Je considère que les marques respectives des parties possèdent un caractère distinctif inhérent équivalent, car les deux marques suggèrent quelque peu les produits et services avec lesquelles elles sont liées. La période pendant laquelle les marques ont été en usage ne favorise aucune des parties, puisque ni l’une ni l’autre des parties n’a établi l’emploi de sa marque.

[54]           Les produits des parties sont semblables. Comme je l’ai indiqué précédemment en ce qui concerne le motif fondé sur l’article 12(1)d), compte tenu du fait que les produits des parties sont semblables, il est raisonnable de conclure que leurs voies de commercialisation se recouperaient également.

[55]           En ce qui concerne le degré de ressemblance entre les marques, j’estime qu’il existe un degré de ressemblance assez élevé entre les marques des parties, tant dans la présentation que dans le son. Les marques des deux parties contiennent deux éléments distincts – un élément nominal distinct ayant pour préfixe BAR et un dessin distinct d’un chef ou d’une toque de chef. Bien que le dessin de chef de la Requérante soit plus ouvragé que le dessin de toque de chef de l’Opposante, je souligne que les deux toques de chef sont inclinées vers la gauche et sont considérablement plus grandes que l’élément nominal que contient chaque marque. En outre, comme je l’ai indiqué précédemment, l’élément nominal distinct de la marque de chaque partie (soit BARONA ou BARILLA) est présenté de façon identique dans un ovale semblable, et dans les deux dessins le mot apparaît à la droite du visage du chef ou de la toque du chef.

Autres circonstances de l’espèce

[56]           L’examen des autres circonstances de l’espèce en date du 2 novembre 2012 plutôt qu’en date d’aujourd’hui n’a pas d’incidence significative sur mon analyse précédente des circonstances de l’espèce dans cette affaire au titre du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) susmentionné.

Conclusion quant à la probabilité de confusion

[57]           Lorsque j’ai appliqué le test en matière de confusion, j’ai considéré que ce dernier tenait de la première impression et du souvenir imparfait.

[58]           En l’espèce, j’estime que la Requérante a employé plus d’éléments semblables à la marque de l’Opposante que d’éléments différents. Les deux éléments les plus distinctifs de la marque de l’Opposante sont l’élément nominal (reproduit dans un ovale semblable) et le dessin d’une toque de chef. Ces deux éléments ont été intégrés à la Marque de manière presque semblable à la façon dont ils apparaissent dans la marque de commerce de l’Opposante. Compte tenu de ces similitudes, et étant donné que les marques de commerce des parties sont destinées à être apposées sur des produits semblables, j’estime que la probabilité de confusion est également partagée entre la conclusion qu’il existe une probabilité de confusion entre les marques de commerce des parties et la conclusion qu’il n’existe pas de probabilité de confusion. Comme j’ai tiré cette conclusion, je ne peux conclure que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif.

[59]           En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)b) est accueilli.

Décision

[60]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

______________________________

Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Sophie Ouellet, trad.a.

Traduction certifiée conforme

 


Annexe A

Marques de commerce déposées de l’Opposante

 

Marque de commerce

No d’enregistrement

 

ACADEMIA BARILLA L'ARTE DELLA GASTRONOMIA ITALIANA & Design

 

LMC703,164

 

BARILLA & DESIGN

 

 

LMC172,693

BARILLA & Colour Design

LMC623,996

 

BARILLA CENTER FOR FOOD & NUTRITION & Design

 

 

LMC863,003

 

BARILLA FOODSERVICE AND DESIGN

 

LMC566,496

BARILLA PICCOLINI

LMC670,329

BARILLA PICCOLINI & Design (Colour)

LMC670,328

BARILLA PLUS

LMC760,358

Barilla Professional & DESIGN

LMC607,665

BARILLA; DESIGN

LMC289,294

RADIÉE, 6 nov. 2014

 


 

Annexe B

Marques visées par la demande de l’Opposante

 

Marque de commerce

Demande no

BARILLA

1,559,307

Barilla The Italian Food Company. Since 1877. Design

1,504,155

BARILLA THE TASTE OF ITALY

1,538,749

CASA BARILLA

1,517,949

FOODSERVICE Barilla & Design

1,554,885

Italian Culinary Travel By Academia Barilla & Design

1,588,215

MULINO BIANCO BARILLA & Design (in colour)

1,551,881

 


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L’AUDIENCE : 2016-09-29

 

COMPARUTIONS

 

Victoria Carrington                                                                  POUR L’OPPOSANTE

 

Aucune comparution                                                               POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Shapiro Cohen LLP                                                                 POUR L’OPPOSANTE

 

Dennison Associates                                                                POUR LA REQUÉRANTE

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