Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION

 

 

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 TMOB 227

Date de la décision : 2012-11-23

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Heather Ruth McDowell à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1 450 491 pour la marque de commerce HONEYFIG & Dessin au nom de 2103214 Ontario Inc.

[1]               Le 3 septembre 2009, 2103214 Ontario Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce HONEYFIG & Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous; la demande est fondée sur l’emploi de la Marque au Canada depuis au moins le 30 juin 2006 en liaison avec les « services de vente au détail en ligne, portant sur des produits de soins personnels, des cosmétiques, des articles de toilette, de piscine thermale, des produits pour les soins de la peau et des produits de beauté, des produits parfumés pour la maison et des accessoires de soins personnels » (les Services).

HONEYFIG Design

[2]               La demande a été annoncée dans le Journal des marques de commerce du 10 mars 2010, aux fins d’opposition.

[3]               Le 10 août 2010, Heather Ruth McDowell (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. Le 17 août 2010, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition modifiée, dont la permission lui a été accordée le 27 octobre 2010. Les motifs d’opposition peuvent être résumés comme suit :

         la Marque n’est pas distinctive des Services et n’est pas adaptée à le devenir pour les raisons suivantes : l’Opposante est propriétaire des deux marques de commerce enregistrées au Canada : HONEY & Dessin (TMA767 134) et HONEY (TMA767 075) (Marques HONEY de l’Opposante), décrites comme suit :

a.       HONEY & Dessin – soumise le 22 avril 2003; enregistrée le 18 mai 2010 - TMA767 134

HONEY & DESIGN

b.      HONEY – soumise le 10 décembre 2002; enregistrée le 18 mai 2010 - TMA767 075.

Les deux marques enregistrées sont liées aux marchandises et services ci-après :

Marchandises : vêtements, à savoir, pantalons, jeans, pantalons en molleton, pantalons de yoga, vêtements d’exercice, pantalons, chandails, chandails en molleton, chemises polo, chemises, jupes, blouses, robes, articles de bonneterie, vestes, blazers, manteaux, vestes de ski, vestes à duvet, vestes de fourrure, manteaux en laine, shorts, maillots de bain, vêtements de détente; lingerie; articles chaussants, à savoir, souliers, sandales, bottes, pantoufles; chaussures en cuir pour hommes, femmes et enfants, chaussures en suède ou en soie, à savoir escarpins, talons hauts, chaussures habillées de tous genres, chaussures de sport, chaussures de course, chaussures de basketball, chaussures de golf, chaussures d’entrainement, chaussures de tennis, chaussures de course, chaussures de plage, à savoir sandales, sandales de plage et tongs; couvre-chefs, à savoir chapeaux, casquettes, fichus, bandeaux, visières; bijoux; accessoires de mode, à savoir foulards, châles, sacs à main, gants, montres, accessoires pour cheveux, à savoir, peignes, brosses, bandeaux en tissu ou en plastique, barrettes, élastiques en tissus, clips pour queues de cheval, clips à cheveux, épingles à cheveux, ornements pour cheveux; ceintures, lunettes de soleil, produits de maquillage, à savoir, fonds de teint liquides ou en poudre, crèmes pour visage, fards à joues, fards à paupières, eye-liner, mascara, rouges à lèvres, brillants à lèvres, crayons à lèvres, sacs de maquillage vendus vides; articles de cadeaux, à savoir, lampes, plateaux, vases; bibelots et figurines en céramique, en porcelaine, en verre, bonbonnières

 

Services : services de vente au détail, à savoir, exploitation d’un magasin de vêtements, de chaussures, de couvre-chefs, d’accessoires de mode et d’articles de cadeaux.

 

(Marchandises et services de l’Opposante)

         la Marque n’est pas enregistrable au titre de l’alinéa 12(1)(d) de la Loi sur les marques de commerce, RSC 1985, c T-13 (la Loi), en ce sens que l’emploi de la Marque ferait croire au public que la Requérante a reçu autorisation ou licence de l’Opposante, ce qui n’est pas le cas. En conséquence, tout emploi de la Marque par la Requérante crée ou risque de créer la confusion avec l’emploi par l’Opposante de ses marques de commerce.

         la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque au titre des alinéas 16(1)(a) et (b) de la Loi, parce que l’emploi de la Marque laisserait croire au public que la Requérante a reçu autorisation ou licence de l’Opposante, ce qui n’est pas le cas. En conséquence, tout emploi de la Marque par la Requérante crée ou risque de créer la confusion avec l’emploi par l’Opposante de ses marques de commerce.

         la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’alinéa 30(i) de la Loi, en ce sens que, à la date de la demande ou la date supposée du premier emploi, une recherche du Registre des marques de commerce aurait révélé l’existence des marques de l’Opposante qui y figurent et, en conséquence, la Requérante n’aurait pas pu être convaincue, aux termes de l’alinéa 30(i), qu’elle a le droit d’employer la Marque si elle a une connaissance préalable de l’emploi et de la notoriété des marques de l’Opposante.

         la demande n’est pas conforme aux dispositions de l’alinéa 30(b) de la Loi, en ce sens que la Requérante n’a pas employé la Marque depuis la date supposée du premier emploi, voire pas du tout au Canada. Ou alors, si la Marque a été ou est employée au Canada, il s’agit d’un emploi par une tierce partie, et n’est pas conforme aux dispositions de la section 50 de la Loi. L’Opposante s’élève contre tout emploi de la Marque qui, compte tenu de ce qui précède, serait un emploi prêtant à confusion, contraire à la Loi.

[4]               La Requérante a produit et soumis une contre-déclaration, dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante et exige de celle-ci qu’elle en fasse la preuve stricte.

[5]               À l’appui de son opposition, l’Opposante a présenté un affidavit d’Elenita Anastacio, une chercheuse de marques de commerce employée par l’agent de l’Opposante, qui a prêté serment le 14 février 2011 avec les Pièces A – C. Mme Anastacio n’a pas été soumise à un contre-interrogatoire sur son affidavit.

[6]               La Requérante n’a pas présenté de preuve à l’appui de sa demande.

[7]               Aucune des parties n’a produit d’argumentation écrite. Une audience a eu lieu, où seule l’Opposante était représentée.

Fardeau de la preuve et dates pertinentes

[8]               La Requérante a le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux dispositions de la Loi. Cependant, l’Opposante a le fardeau initial de présenter des preuves recevables suffisantes qui permettent raisonnablement de conclure que les faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition existent bien [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CFTD) à la page 298].

[9]               Les dates pertinentes applicables aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         alinéa 38(2)(a)/30 - la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp c. Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 à la page 475 (TMOB) et Tower Conference Management Co c. Canadian Exhibition Management Inc (1990), 28 CPR (3d) 428 à 432 (TMOB)].

         alinéas 38(2)(b)/12(1)(d) - la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)]

         alinéas 38(2)(c)/16(1) - la date déclarée de premier emploi [voir alinéa 16(1) de la Loi].

         alinéas 38(2)(d)/2 - la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc c. Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Motifs d’opposition liés à la Section 30

Non-conformité à l’alinéa 30(b) de la Loi

[10]           Le fardeau initial de l’Opposante est léger pour ce qui est de la question de non-conformité à l’alinéa 30(b) de la Loi, parce que les faits concernant le premier emploi par la Requérante sont particulièrement bien connus de la Requérante [voir Tune Masters c. Mr. P.’s Mastertune Ignition Services Ltd (1986), 10 CPR (3d) 84 (TMOB) à la page 89].

[11]           L’alinéa 30(b) de la Loi exige un emploi continu de la marque de commerce faisant l’objet de la demande durant le cours normal du commerce depuis la date déclarée jusqu’à la date pertinente [voir Labatt Brewing Co c. Benson & Hedges (Canada) Ltd (1996), 67 CPR (3d) 258 (CFTD) à la page 262].

[12]           À l’appui de ce motif d’opposition, l’Opposante s’est fondée sur les recherches menées par Mme Anastacio le 3 février 2011 dans la base de données de FP Infomart et les archives en ligne de Wayback Machine.

[13]           Mme Anastacio a effectué ses recherches dans la base de données de FP Infomart, qu’elle décrit comme étant (Traduction) « le plus grand fournisseur au Canada de données de suivi des médias et des entreprises, incluant plus de 275 sources d’information situées d’un bout à l’autre du pays ». Mme Anastacio a cherché dans la base de données les termes « HONEY FIG » en liaison avec « 2103214 Ontario » pour la période allant du 1er janvier 2005 au 3 février 2011, qui couvre la date pertinente. Mme Anastacio déclare n’avoir trouvé aucune mention des termes recherchés durant la période en question. Je suis convaincue que Mme Anastacio a démontré la fiabilité de la base de données de FP Infomart.

[14]           Mme Anastacio s’est servie des archives en ligne de Wayback Machine pour retrouver les versions archivées du site web de la Requérante, http://honeyfig.com. Mme Anastacio indique que la version archivée la plus ancienne trouvée sur le site Wayback Machine était datée du 22 août 2006.

[15]           À l’audience, l’Opposante a admis que les recherches sur internet sont généralement considérées comme ouï-dire et ne peuvent être garantes de la véracité du contenu. L’Opposante a cependant fait valoir que les preuves de cette nature ont été acceptées dans des situations où les recherches ont été menées par le déposant lui-même, lorsqu’il est difficile pour l’Opposante de trouver toutes autres preuves pour s’acquitter de son fardeau et que la Requérante a la possibilité de répondre aux preuves [voir Effigi Inc c. HBI Branded Apparel Limited, Inc 2010 TMOB 160].

[16]           L’Opposante a prétendu que les preuves trouvées sur internet et présentées dans l’affidavit de Mme Anastacio devraient avoir un certain poids puisque chacune de ces circonstances s’applique au cas présent. Plus précisément, c’est Mme Anastacio qui a mené les recherches elle-même, les Services sont offerts sur internet, ce qui rend appropriées les preuves trouvées en ligne et la Requérante a eu la possibilité de présenter ses propres preuves ou de contre-interroger Mme Anastacio et a choisi de ne pas le faire. C’est pourquoi l’Opposante prétend que l’affidavit d’Anastacio devrait être recevable et suffisant pour démontrer que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial pour ce motif d’opposition. L’Opposante a souligné par ailleurs qu’elle ne vise pas à se fonder sur des preuves trouvées sur internet pour soutenir la conclusion catégorique que la date du premier emploi de la Requérante n’est pas exacte, mais simplement pour s’acquitter de son fardeau de preuve.

[17]           Les preuves produites par le site Wayback Machine indiquant la situation des sites web dans le passé se sont avérées généralement fiables [voir Candrug Health Solutions Inc c. Thorkelson (2007), 60 CPR (4th) 35 (CF); renversée pour d’autres motifs 2008 CAF 100]. En particulier, la recevabilité des preuves de Wayback Machine à l’appui d’un motif d’opposition lié à l’alinéa 30(b) a été commentée comme suit par le membre de la Commission Bradbury dans Royal Canadian Golf Assn c. O.R.C.G.A. (2009), 72 CPR (4th) 59 (TMOB), aux pages 64-65 :

(Traduction) Je comprends qu’il peut y avoir des limites à l’exactitude de Wayback Machine, incluant sans s’y limiter la question du ouï-dire. Toutefois, aux fins du léger fardeau initial de l’Opposante au titre de l’alinéa 30(b), je trouve que les résultats des recherches sont suffisants pour soulever un doute quant à l’exactitude de la date du premier emploi déclarée par la Requérante […]. La Requérante avait eu la possibilité de produire des preuves pour réfuter les résultats des recherches sur Wayback Machine, mais elle avait choisi de s’en abstenir.

[18]           Dans le cas présent, je trouve que les résultats des recherches sur Wayback Machine soulèvent effectivement un doute sur l’exactitude de la déclaration de la Requérante, selon laquelle elle avait employé la Marque en liaison avec les Services au Canada depuis le 30 juin 2006. Les Services sont l’exploitation d’un magasin de vente au détail en ligne, et il semble donc impossible qu’un tel magasin de fonctionner en l’absence d’un site web actif. La preuve trouvée sur Wayback Machine semble indiquer que le site web de la Requérante n’était peut-être pas actif à la date de premier emploi déclarée et qu’il ne l’est devenu que deux mois après. Ceci met en question l’affirmation que la Requérante aurait offert les Services à la date pertinente.  

[19]           Bien que je ne trouve pas que les résultats des recherches sur FPInfomart soient probants, j’estime qu’en combinaison avec les résultats des recherches sur Wayback Machine, ils contribuent à créer des doutes accrus sur la présence de la Requérante sur les marchés canadiens à la date pertinente.

[20]           Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que l’Opposante s’est acquittée de son léger fardeau de preuve.

[21]           Il revient à la Requérante d’établir qu’elle a employé la Marque en liaison avec les Services depuis la date déclarée de premier emploi, soit depuis le 30 juin 2006. Comme la Requérante n’a produit aucune preuve, je ne considère pas que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de preuve et en conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30(b) de la Loi est accepté.

Non-conformité à l’alinéa 30(i) de la Loi

[22]           Lorsqu’un requérant a produit la déclaration requise au titre de l’alinéa 30(i), un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30(i) ne devrait être accepté que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il y a preuve de mauvaise foi de la part de la Requérante [voir Sapodilla Co Ltd c. Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (TMOB) à la page 155]. La Requérante a produit la déclaration requise et le présent cas n’est nullement exceptionnel; par conséquent, le motif d’opposition lié à l’alinéa 30(i) est rejeté.

 

Motif d’opposition fondé sur l’absence de droit d’enregistrement – Alinéa 12(1)(d) de la Loi

[23]           Un opposant s’est acquitté de son fardeau initial concernant un motif d’opposition lié à l’alinéa 12(1)(d) si les enregistrements invoqués sont en règle à la date de la déclaration d’opposition. Le Registraire a le pouvoir discrétionnaire de vérifier dans le registre pour confirmer l’existence des enregistrements sur lesquels s’est fondé un opposant [voir Quaker Oats of Canada Ltd/La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée v Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (TMOB)]. J’ai exercé ce pouvoir discrétionnaire et je confirme que les enregistrements des marques HONEY de l’Opposante restent valides.

[24]           Le test de confusion repose sur la première impression et la réminiscence imparfaite. D’après l’alinéa 6(2) de la Loi, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises ou les services liés à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[25]           En appliquant le test de confusion, le Registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment celles qui sont spécifiquement énumérées dans l’alinéa 6(5) de la Loi, à savoir : (a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; (b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; (c) le genre de marchandises, services ou entreprises; (d) la nature du commerce; et (e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Le même poids n’est pas nécessairement accordé à ces facteurs énumérés. [voir, en général, Mattel, Inc c. 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (SCC) et Masterpiece Inc c. Alavida Lifestyles Inc (2011), 96 CPR (4th) 361 (SCC).]

Section 6(5)(a) – caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et mesure dans laquelle ils sont devenus connus

[26]           La Marque est constituée des mots communs du dictionnaire HONEY et FIG qui ont été fusionnés pour former le mot inventé HONEYFIG. Je constate que les mots composants n’ont aucune signification évidente particulière liée aux Services. La Marque comprend également des éléments de dessin sous forme de caractères cursifs et décoratifs. Je note que les éléments du dessin sont tels que les mots HONEY et FIG sont écrits avec des cursives différentes, donnant l’apparence de deux mots distincts. Tous ces facteurs mènent à la conclusion que la Marque possède un certain degré de caractère distinctif inhérent.

[27]           Les Marques HONEY de l’Opposante sont constituées du mot commun du dictionnaire HONEY, et pour ce qui est du dessin, d’un simple cercle entourant ce mot. Comme dans le cas de la Marque, le mot HONEY n’a aucune signification particulière évidente par rapport aux Marchandises et aux Services de l’Opposante. L’Opposante a avancé que le mot pourrait possiblement être considéré comme évoquant certaines des marchandises de l’Opposante, par exemple, les cosmétiques, où le miel pourrait être un des ingrédients de ces produits, en déclarant cependant qu’une telle interprétation serait une exagération. Sur cette base, l’Opposante a affirmé que ses Marques HONEY présentent le même degré de caractère distinctif inhérent.

[28]           Je trouve que la Marque possède un degré de caractère distinctif inhérent quelque peu supérieur aux Marques HONEY de l’Opposante, du fait que la Marque est un mot inventé.

[29]           Une marque de commerce peut acquérir un caractère distinctif par l’emploi ou par la promotion. Toutefois, dans le cas présent, aucune des parties n’a produit de preuve pour démontrer l’emploi ou la promotion de ses marques. S’il est vrai que l’un des enregistrements de l’Opposante indique un emploi au Canada dès le 15 mars 2003 (TMA767,134) et que l’autre a inclus ultérieurement une déclaration d’emploi au 28 avril 2010 (TMA767,075), cela me permet tout au plus de supposer un emploi de minimis des marques HONEY de l’Opposante [voir Entre Computer Centers Inc. c. Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (TMOB) à la page 430]. L’emploi de minimis ne permet pas de conclure que les marques HONEY de l’Opposante sont devenues connues à un degré notable.

Alinéa 6(5)(b) – période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage

[30]           La demande d’enregistrement de la Marque a été produite sur la base d’un emploi au Canada depuis au moins le 30 juin 2006; or, la Requérante n’a présenté aucune preuve d’emploi de la Marque.

[31]           L’Opposante a argué qu’aux fins de déterminer la période durant laquelle les Marques HONEY sont devenues connues, je devrais utiliser comme date supposée de premier emploi la date de soumission du mot HONEY de la marque (10 décembre 2002) et comme date déclarée de premier emploi le 15 mars 2003 pour le dessin de la marque HONEY. L’Opposante cite la section 3 de la Loi à l’appui de sa soumission concernant la date supposée de premier emploi pour le mot HONEY de la marque. Je ne suis pas d’accord avec une telle méthode. La date d’emploi la plus antérieure que je serais prête à accepter pour le mot de la marque serait la date de soumission de la déclaration d’emploi, c’est-à-dire le 28 avril 2010. De toute façon, comme il a été expliqué plus haut dans l’analyse du facteur de l’alinéa 6(5)(a), les enregistrements de l’Opposante ne me permettent de supposer qu’un emploi de minimis des marques HONEY de l’Opposante. Et, s’il est vrai qu’un emploi de minimis est mieux qu’aucun emploi, faute de preuve d’emploi des marques des deux parties, ce facteur ne favorise aucune des parties.

Alinéas 6(5)(c) et (d) – genre de marchandises, services ou entreprises

[32]           C’est la déclaration des marchandises de la Requérante définies dans sa demande par rapport aux marchandises enregistrées de l’Opposante qui guide ma détermination de ce facteur [voir Esprit International c. Alcohol Countermeasure Systems Corp (1997), 84 CPR (3d) 89 (TMOB)]. La Marque fait l’objet de la demande en liaison avec des services uniquement, tandis que les Marques HONEY de l’Opposante sont enregistrées aux fins d’emploi en liaison avec des marchandises et des services.

[33]           L’Opposante affirme que (traduction) « les services de vente au détail de l’Opposante, à savoir l’exploitation d’un point de vente de vêtements, d’articles chaussants, de couvre-chefs, d’accessoires de mode et d’articles cadeaux » sont suffisamment vastes pour couvrir les services de vente au détail en ligne de la Requérante, créant ainsi un chevauchement exact entre les genres de marchandises et des services des deux parties. Je ne suis pas d’accord, pour deux raisons. D’abord, je ne suis pas prête, en l’absence de preuve des services effectifs des parties, à convenir d’un chevauchement entre un magasin physique et un magasin en ligne. Ensuite, et encore plus important, je constate que les services de vente au détail indiqués par l’Opposante couvre la vente de marchandises de genre différent comparé aux marchandises vendues par la Requérante par le biais de ses Services. En conséquence, je ne trouve pas qu’il y ait un chevauchement entre les services des parties.

[34]           L’Opposante a affirmé par ailleurs qu’il y a un chevauchement direct créé entre les marchandises et les services des parties, du fait que les marchandises de l’Opposante incluent les marchandises vendues par la Requérante par le biais des Services. Plus précisément, les marchandises de l’Opposante comprennent des cosmétiques. Les Services inclut la vente de cosmétiques aussi bien que des produits de soins personnels, des articles de toilette, de, cuves thermales, des produits de soins de beauté et de la peau; je suis prête à convenir que tout ceci crée un chevauchement avec les cosmétiques de l’Opposante.

[35]           L’Opposante affirme que, puisque nous n’avons aucune preuve de la nature exacte des produits vendus par le biais des Services, on peut concevoir que des cosmétiques de la marque HONEY de l’Opposante puissent être vendus par le magasin de détail en ligne de la Requérante. L’Opposante souligne que cela risque de causer de la confusion auprès des consommateurs qui pourraient croire que les cosmétiques de marque HONEY appartiennent à Requérante, et non pas à l’Opposante.

[36]           Je suis prête à trouver qu’il y a un chevauchement entre les marchandises et les services des parties, en ce qui concerne les « services de vente au détail offerts en ligne par la Requérante et couvrant des produits de soins personnels, des cosmétiques, des articles de toilette, des cuves thermales, des produits de soins de beauté et de la peau, … et des accessoires de soins personnels ».

[37]           L’Opposante soutient qu’il y aurait également chevauchement entre les « produits parfumés pour la maison » de la Requérante et les « lampes, plateaux et vases » de l’Opposante. Je ne suis pas d’accord.

[38]           Bien que je n’aie pas reçu de preuve des voies commerciales des parties, il est concevable que les cosmétiques de l’Opposante puissent être vendus par un magasin de détail en ligne, ce qui créerait également un chevauchement potentiel dans les voies commerciales des parties.

Alinéa 6(5)(e) – degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent

[39]           Dernièrement, dans l’affaire Masterpiece, la Cour suprême du Canada a examiné l’importance du facteur de l’alinéa 6(5)(e) en menant une analyse des probabilités de confusion entre les marques des parties, au titre de la section 6 de la Loi (voir par. 49):

(Traduction) … bien qu’il soit le dernier facteur énuméré à l’alinéa 6(5), le degré de ressemblance est un critère énoncé dans la loi qui risque souvent d’avoir le plus grand effet sur l’analyse de la confusion … si les marques ou les noms ne se ressemblaient pas, il serait peu probable que même une conclusion ferme sur les facteurs restants puisse donner lieu à la confusion. Les autres facteurs ne deviennent importants que s’il s’avérait que les Marques sont identiques ou très similaires. […]

[40]           Durant l’audience, l’Opposante a cité le passage ci-après de l’affaire Masterpiece concernant la démarche appropriée à suivre pour déterminer le degré de ressemblance entre les marques des parties [au par. 64]:

Si, dans certains cas, le premier mot peut être le plus important pour déterminer le caractère distinctif, je pense qu’une meilleure approche serait de déterminer en premier lieu si la marque de commerce présente un aspect qui est particulièrement remarquable, voire unique.

[41]           Dans le cas présent, l’Opposante soutient que l’élément remarquable ou unique dans la Marque est le mot HONEY qui est aussi la première partie de la Marque et qui est également identique à la Marque HONEY complète de l’Opposante. L’Opposante affirme sur cette base que l’impression essentielle créée par les marques des parties est la même. Puisque HONEY et FIG sont tous deux des mots désignant des produits alimentaires, l’addition du mot FIG au mot HONEY pour former la Marque ne crée pas une différence notable entre les marques des parties.

[42]           Je ne suis pas d’accord avec l’Opposante à l’effet que le mot HONEY dans la Marque est unique ou remarquable. C’est un mot commun du dictionnaire qui, à mon avis, pourrait suggérer certains des services et marchandises connexes (par exemple, comme ingrédient dans des cosmétiques). Je ne pense pas non plus que l’inclusion du mot HONEY dans la Marque suffise pour créer un degré notable de similitude entre les marques des parties, du fait que je considère que ni le mot HONEY ou le mot FIG ne sont particulièrement unique ou remarquable.

[43]           Ayant examiné les preuves en dossier et les soumissions des parties, je trouve en fin de compte que l’addition du mot FIG, qui fait de la Marque un mot inventé, et l’addition des dessins à la Marque, bien que mineures, est déterminante pour créer la différence entre les marques des parties, en termes de présentation, de son et d’idées suggérées.

Autres circonstances de l’espèce – Consommateur moyen

[44]           Durant l’audience, l’Opposante a évoqué l’affaire Mattel à l’appui de son argument, selon lequel le consommateur moyen des marchandises et des services du genre couvert par les marques des parties est généralement pressé dans ses activités et ne fait pas beaucoup attention aux détails.

[45]           Je suis d’accord avec l’Opposante quant à la nature du consommateur moyen des marchandises et des services des parties, mais je ne partage pas l’opinion de l’Opposante que cela renforce les risques de confusion entre les marques des parties. Il s’agit simplement du test de confusion standard.

Conclusion

[46]           En appliquant le test de confusion, j’ai mis l’accent sur les éléments de première impression et de réminiscence imparfaite. Tout en reconnaissant qu’il existe un certain degré de similitude entre les marchandises et les services des parties, du fait que les marchandises couvertes par les enregistrements de l’Opposante sont similaires aux marchandises supposément vendues par le biais des Services, je note, comme il est mentionné précédemment, que le degré de ressemblance est souvent considéré comme le critère énoncé dans la Loi qui aurait probablement le plus d’effet sur l’analyse de confusion. Comme signalé plus haut, j’ai trouvé que si l’on considère les faits dans leur ensemble, il y a des différences entre les marques des parties, qui m’empêchent de conclure que les marques des parties sont très similaires dans la présentation, le son et les idées suggérées.

[47]           En conséquence et compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, je suis convaincue que la Requérante s’est acquittée de son fardeau de preuve en démontrant que, selon la prépondérance des probabilités, il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques HONEY de l’Opposante.

[48]           Je signale que mes conclusions auraient pu être différentes si l’Opposante avait produit la preuve d’une réputation pour ses marques HONEY, notamment en liaison avec les produits de cosmétiques de l’Opposante.

[49]           Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)(d) est refusé.

Motifs d’opposition fondés sur la non-autorisation d’enregistrer

Alinéa 16(1)(a) de la Loi

[50]           Indépendamment du fardeau de preuve de la Requérante de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques HONEY de l’Opposante, l’Opposante a le fardeau initial de prouver qu’une ou plusieurs des marques de commerce supposément à l’appui de son motif d’opposition lié à l’alinéa 16(1) de la Loi a été employée au Canada antérieurement à la date de premier emploi déclarée (30 juin 2006) et qu’elle n’a pas été abandonnée à la date de l’avis de demande pour la Marque (10 mars 2010) [alinéa 16(5) de la Loi].

[51]           L’Opposante n’a pas produit de preuve démontrant l’emploi de ses marques HONEY. Par ailleurs, toute référence à un tel emploi dans les enregistrements de l’Opposante n’est pas suffisante pour répondre au fardeau de preuve de l’Opposante au titre de l’alinéa 16(1)(a) de la Loi [voir Rooxs, Inc c. Edit-SRL (2002), 23 CPR (4th) 265 (TMOB)].

[52]           Compte tenu de ce qui précède, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve au titre de l’alinéa 16(1)(a) de la Loi et ce motif d’opposition est rejeté en conséquence.

 

Alinéa 16(1)(b) de la Loi

[53]           Indépendamment du fardeau de preuve de la Requérante de démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques HONEY de l’Opposante, l’Opposante a le fardeau initial de prouver que les demandes d’enregistrement des marques de commerce supposément à l’appui de son motif d’opposition lié à l’alinéa 16(1)(b) de la Loi étaient en instance à la date déclarée de premier emploi de la Marque (30 juin 2006), et qu’elles restaient en instance à la date de l’avis de demande d’enregistrement pour la Marque (10 mars 2010) [alinéa 16(5) de la Loi]. 

[54]           Le Registraire a le pouvoir discrétionnaire, dans l’intérêt du public, de vérifier dans le registre la présence des demandes invoquées par un opposant [voir Royal Appliance Mfg Co c. Iona Appliance Inc (1990), 32 CPR (3d) 525 (TMOB)]. J’ai exercé ce pouvoir discrétionnaire pour vérifier les demandes de l’Opposante pour ses Marques HONEY. Bien que les Marques HONEY de l’Opposante aient été enregistrées depuis, les demandes ont été produites antérieurement à la date pertinente et étaient en instance à la date d’avis de la demande, de sorte que l’Opposante s’est bien acquittée de son fardeau de preuve en ce qui concerne ce motif d’opposition.

[55]           La différence dans les dates pertinentes n’est pas majeure et mes conclusions sur le motif d’opposition lié à l’alinéa 12(1)(d) s’appliquent ici également. Je suis donc convaincue que la Requérante s’est bien acquittée de son fardeau de démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques HONEY de l’Opposante et, en conséquence, je rejette également le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)(b) de la Loi.

Motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif – Alinéa 38(2)(d) de la Loi

[56]           Indépendamment du fardeau de preuve de la Requérante de démontrer que la Marque est adaptée pour distinguer ou qu’elle permet effectivement de distinguer ses Services de ceux d’autres entreprises dans tout le Canada [voir Muffin Houses Incorporated v The Muffin House Bakery Ltd. (1985), 4 CPR (3d) 272 (TMOB)], l’Opposante a le fardeau initial d’établir les faits à l’appui du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

[57]           Dans le cadre de ce fardeau de preuve, l’Opposante a l’obligation de démontrer que, à la date de production de la déclaration d’opposition, une ou plusieurs de ses Marques HONEY est devenue suffisamment connue pour éliminer le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c. Bojangles Café Ltd (2004), 40 CPR (4th) 553, affirmé (2006), 48 CPR (4th) 427 (CF)].

[58]           Comme l’Opposante n’a pas produit de preuve de l’emploi ou de la réputation de ses Marques HONEY, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve et ce motif d’opposition est rejeté.

Disposition

[59]           En vertu de l’autorité qui m’est déléguée au titre de l’alinéa 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement en application de l’alinéa 38(8) de la Loi.

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Andrea Flewelling

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

 

TRADUCTION CERTIFIÉE CONFORME

Lenga Nguyen

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