Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRANSLATION/TRADUCTION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2010 COMC 115

Date de la décision : 2010‑07‑14

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de Farleyco Marketing, Inc., visant l’enregistrement n° LMC442464 de la marque de commerce MESMERIZE au nom d’Avon Products, Inc.

[1]               Le 13 mai 2008, à la demande de Farleyco Marketing, Inc. (la Partie requérante), le registraire a envoyé l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi) à Avon Products, Inc. (l’Inscrivante), propriétaire inscrite de la marque de commerce citée en rubrique (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour un emploi en liaison avec les marchandises suivantes : « Fragrances pour femmes, nommément désodorisants, poudres de talc, crèmes parfumées, lotions, aérosols pour le corps, gels pour le bain et la douche ».

[3]               L’article 45 de la Loi prévoit que le propriétaire inscrit est tenu d’établir que la marque de commerce a été employée au Canada à l’égard de chacune des marchandises et de chacun des services que spécifie l’enregistrement à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. La période pertinente en l’espèce va du 13 mai 2005 au 13 mai 2008 (la période pertinente).

[4]               La définition de l’« emploi » en liaison avec des marchandises figure aux paragraphes 4(1) et (3) de la Loi :

4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[…]

(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

En l’espèce, le paragraphe 4(1) de la Loi s’applique.

[5]               En réponse à l’avis du registraire, l’Inscrivante a produit les affidavits d’Anthony M. Santini, vice‑président et conseiller juridique adjoint de l’Inscrivante, souscrit le 6 août 2008, et de Colleen Leithman, conseillère juridique principale d’Avon Canada Inc. (Avon Canada), souscrit le 6 août 2008, accompagnés des pièces A à D. Seule l’Inscrivante a présenté des observations écrites; il n’a pas été demandé d’audience.

[6]               Il est de droit constant que l’article 45 de la Loi a pour objet et pour effet d’offrir une procédure simple, sommaire et rapide pour débarrasser le registre du bois mort, et que pour cette raison, le critère préliminaire est très peu exigeant. Comme l’a dit le juge Russell dans la décision Uvex Toko Canada Ltd. c. Performance Apparel Corp. (2004), 31 C.P.R. (4th) 270 :

68. […] Nous savons que l’objet de l’article 45 est de débarrasser le registre du « bois mort ». Nous savons que la simple affirmation par le propriétaire de l’emploi de sa marque de commerce ne suffit pas et que le propriétaire doit « indiquer » quand et où la marque a été employée. Il nous faut des éléments de preuve suffisants pour être en mesure de nous former une opinion en vertu de l’article 45 et d’appliquer cette disposition. Également, nous devons maintenir le sens des proportions et éviter la preuve surabondante. Nous savons également que le genre de preuve exigée varie d’une affaire à l’autre, en fonction d’une gamme de facteurs tels que la nature du commerce et les pratiques commerciales du propriétaire de la marque de commerce.

 

[7]               Si l’on passe à la preuve d’emploi de la Marque par l’Inscrivante, Mme Leithman déclare dans son affidavit qu’Avon Canada est l’utilisateur sous licence de la Marque au Canada. L’affirmation de Mme Leithman est corroborée par l’affidavit de M. Santini, qui traite seulement de la question du contrôle sur les caractéristiques et la qualité des marchandises vendues par Avon Canada sous la Marque. Plus précisément, M. Santini affirme que [traduction] « [l]es caractéristiques et la qualité des marchandises vendues par Avon Canada sous la [Marque] sont sous le contrôle de [l’Inscrivante] ». La déclaration sous serment de M. Santini est suffisante pour que l’Inscrivante puisse se fonder sur le paragraphe 50(1) de la Loi et que l’emploi de la Marque par Avon Canada s’applique au profit de l’Inscrivante [Nissan c. MAAX Canada Inc. (2007), 65 C.P.R. (4th) 99 (C.O.M.C.)].

[8]               Mme Leithman dit que l’Inscrivante, par l’entremise de sa licenciée Avon Canada, a employé la Marque [traduction] « visée par l’enregistrement n° LMC442464, notamment dans les trois ans précédant la date de l’[a]vis [prévu à l’article] 45 ». Mme Leitman explique en particulier que les [traduction] « [p]roduits portant la [Marque] sont offerts à la vente et vendus par plus de 65 000 représentantes commerciales Avon dans chacune des provinces et chacun des territoires du Canada qui présentent des catalogues et des échantillons Avon à des clients potentiels. Les représentantes commerciales Avon distribuent directement les catalogues aux clients existants et potentiels au Canada ». Mme Leitman explique ensuite que [traduction] « les [c]onsommateurs canadiens qui souhaitent commander des produits offerts à la vente dans les catalogues Avon passent des commandes auprès des représentantes commerciales Avon, qui les transmettent à Avon Canada. Sur réception des produits commandés à Avon Canada, les représentantes commerciales Avon livrent ensuite les produits au consommateur final, qui règle alors son achat à la représentante commerciale Avon ». Les consommateurs peuvent également passer directement une commande à Avon Canada en utilisant un numéro de téléphone sans frais, indiqué dans les catalogues Avon et sur le site Web opérationnel d’Avon Canada à l’adresse « www.avon.ca ».

[9]               Mme Leithman fournit le nombre de catalogues Avon distribués dans chaque province et chaque territoire du Canada au cours de la période pertinente, qui varie entre 15 000 000 et 32 000 000 de catalogues par an. Elle joint à son affidavit, à titre de pièce C, des copies [traduction] « du plat recto, du plat verso et de pages de catalogues Avon représentatifs de la période [pertinente] […], offrant à la vente les produits MESMERIZE » et, à titre de pièce D, des copies [traduction] « du plat recto, du plat verso et de pages d’un catalogue Avon représentatif d’une date postérieure au 13 mai 2008, offrant à la vente les produits MESMERIZE et attestant l’intention de poursuivre l’emploi de cette marque de commerce ».

[10]           Mme Leithman fournit également [traduction] « les ventes annuelles des produits portant la [Marque] dans chaque province et chaque territoire du Canada » pour les années 2007 et 2008, qui excèdent 1 800 $ et 120 000 $ respectivement. Elle joint à titre de pièce B des [traduction] « [é]chantillons représentatifs de factures au Canada pour la [période pertinente] concernant les produits MESMERIZE ».

[11]           Mme Leithman expose la pratique normale du commerce de l’Inscrivante et fournit des déclarations de faits touchant l’emploi de la Marque au Canada pendant la période pertinente, accompagnées de pièces justificatives, mais elle ne fait pas mention expressément de chacune des marchandises telles qu’elles sont spécifiées dans l’enregistrement. Mme Leithman renvoie toujours de manière générale aux [traduction] « produits MESMERIZE ». Cela m’amène à examiner de façon plus détaillée la nature des marchandises associées à la Marque, à la lumière de la preuve produite dans le cadre de la procédure.

[12]           Les factures de la pièce B établissent toutes la vente de flacons aérosols d’eau de cologne MESMERIZE portant le numéro de produit 081‑990, numéro qui correspond à celui du produit dans les catalogues Avon.

[13]           Les copies des catalogues produites à titre de pièce C indiquent clairement comment la Marque est affichée sur le bouchon d’un flacon aérosol d’eau de cologne pour femme offert à la vente dans la section des fragrances pour femmes de ces catalogues. Il est également fait mention de la Marque dans l’un de ces catalogues, qui indique [traduction] « Non présentés dans la présent catalogue… mais toujours disponibles » au sujet d’un désodorisant et d’une savonnette sur corde. La Marque est également affichée sur des savons liquides pour les cheveux et le corps et un conditionneur après‑rasage pour hommes offerts à la vente dans les catalogues. Toutefois, la savonnette sur corde et les produits pour hommes mentionnés ici ne figurent pas à l’état déclaratif de l’enregistrement.

[14]           Les copies du catalogue produites à titre de pièce D font aussi voir la Marque affichée sur le bouchon d’un flacon aérosol d’eau de cologne pour femme. En particulier, le flacon aérosol d’eau de cologne MESMERIZE est offert à la vente dans un trio de produits qui comprend aussi la [traduction] « poudre pour le corps chatoyante » et la [traduction] « lotion régénératrice parfumée pour le corps » MESMERIZE. La Marque est affichée sur la poudre pour le corps. La Marque paraît aussi clairement associée à la lotion régénératrice parfumée pour le corps offerte dans le catalogue. Ce dernier catalogue est daté du 21 juillet 2008, soit environ deux mois passé la période pertinente, mais je note que Mme Leithman dit aux paragraphes 17 et 18 de son affidavit qu’il est fourni comme exemple d’un catalogue Avon représentatif qui atteste l’intention de l’Inscrivante [traduction] « de continuer à employer [la Marque] au Canada, comme elle l’a fait par le passé, et notamment [pendant la période pertinente] ».

[15]           Considérant l’ensemble de la preuve  ainsi que l’objet et l’effet de l’article 45, je suis persuadée de l’emploi de la Marque au sens de l’article 45 et du paragraphe 4(1) de la Loi en liaison avec des « [f]ragrances pour femmes, nommément désodorisants, poudres de talc, crèmes parfumées, lotions, aérosols pour le corps ». À cet égard, je suis disposée à conclure que l’emploi de la Marque en liaison avec une [traduction] « lotion régénératrice parfumée pour le corps » équivaut à l’emploi de la Marque en liaison avec des « crèmes parfumées, lotions ». Toutefois, je ne suis pas disposée à conclure que l’emploi de la Marque en liaison avec des « [f]ragrances pour femmes, nommément, … gels pour le bain et la douche » a été établi. D’après l’examen que j’ai fait de la preuve ci‑dessus, Mme Leithman n’a fait aucune déclaration précise attestant de manière claire l’emploi de la Marque avec chacune des marchandises et il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve factuels sur la base desquels on pourrait déduire cet emploi. L’exigence d’établir l’emploi à l’égard de chacune des marchandises que spécifie l’enregistrement en l’espèce n’aurait pas imposé un fardeau déraisonnable à l’Inscrivante [voir l’arrêt John Labatt c. Rainier Brewing Co. et al, (1984) 80 C.P.R. (2d) 228 (C.A.F.) au sujet du principe général selon lequel, dans le cas où le propriétaire inscrit choisit d’inscrire une liste de marchandises, on doit présumer qu’une marchandise est différente de l’autre et, par conséquent, qu’il faut alors établir l’emploi de la marque à l’égard de chaque marchandise; voir aussi les décisions Aerosol Fillers Inc. c. Plough (Canada) Ltd. (1980), 45 C.P.R. (2d) 194 et Wrangler Apparel Corp. c. Pacific Rim Sportswear Co. (2000), 10 C.P.R. (4th) 568 (C.O.M.C.) pour le principe général selon lequel toute ambiguïté dans la preuve au dossier doit être résolue à l’encontre des intérêts du propriétaire inscrit]. Comme aucune preuve d’emploi n’a été produite à l’égard de ces deux marchandises et qu’il n’a pas été invoqué de circonstances spéciales qui justifieraient le défaut d’emploi, l’inscription de ces marchandises devrait être supprimée de l’enregistrement.

[16]           Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que l’emploi de la Marque au sens de l’article 45 et du paragraphe 4(1) de la Loi a été établi en liaison avec des « [f]ragrances pour femmes, nommément désodorisants, poudres de talc, crèmes parfumées, lotions, aérosols pour le corps » seulement. En vertu des pouvoirs qui me sont délégués aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera donc modifié par la suppression des « gels pour le bain et la douche » de l’état déclaratif, faute de preuve d’emploi selon l’article 45 de la Loi.

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Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 

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