Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de SmarTan Salons Inc. à la demande n1171936 produite par International Smart Tan Network, Inc. concernant la marque de commerce SMART TAN                

 

Le 21 mars 2003, International Smart Tan Network, Inc. (la « Requérante ») a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce SMART TAN (la « Marque ») fondée sur l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec la « fourniture d’information ayant trait au bronzage sécuritaire, fourniture d’information ayant trait aux méthodes de bronzage sécuritaires » depuis décembre 1995. La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 23 mars 2005.

 

Le 16 août 2005, SmarTan Salons, Inc. (l’« Opposante ») a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande. Le seul motif d’opposition invoqué par l’Opposante est que la Marque n’est pas distinctive en ce qu’elle ne distingue pas véritablement les services de la Requérante des services d’autres propriétaires, ni n’est adaptée à les distinguer ainsi. Cette allégation se fonde sur l’exploitation de salons de bronzage intérieurs par l’Opposante sous la marque SMARTAN depuis la fin de 2002.

 

La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration, dans laquelle elle niait les allégations de l’Opposante.

 

La preuve de l’Opposante se compose des affidavits de Michael Kilbach et de Ken Isotti. La preuve de la Requérante est constituée de l’affidavit de Matt D. Russell. Aucun des auteurs d’affidavit n’a été contre-interrogé.

 

La Requérante et l’Opposante ont toutes deux produit un plaidoyer écrit. Aucune audience n’a été tenue en l’espèce.

 

 

La date pertinente qui s’applique au motif d’opposition fondé sur le caractère distinctif est la date de la production de l’opposition (voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)).

 

La jurisprudence pertinente concernant le fardeau de preuve de l’Opposante et le fardeau que la loi impose à la Requérante relativement à ce motif d’opposition a été résumé de manière concise dans la décision récente Bojangles’ International, LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F. 1re inst.), à la p. 443:

  • La charge de la preuve incombe à la partie qui allègue que la réputation de sa marque empêche la marque de l’autre partie d’être distinctive;
  • Toutefois, il incombe encore à l’auteur de la demande d’enregistrement de prouver que sa marque est distinctive;
  • Une marque devrait être connue au Canada au moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif d’une autre marque;
  • Subsidiairement, une marque pourrait annuler le caractère distinctif d’une autre marque si elle est bien connue dans une région précise du Canada;
  • Le propriétaire d’une marque de commerce étrangère ne peut pas simplement affirmer que sa marque de commerce est connue au Canada; il doit plutôt présenter une preuve claire à ce sujet;
  • La réputation de la marque peut être prouvée par n’importe quel moyen; elle n’est pas limitée aux moyens précis mentionnés à l’article 5 de la Loi; il appartient au décideur de soupeser la preuve sur une base individuelle.

 

Le motif fondé sur le caractère distinctif en l’espèce renvoie à la question de la confusion entre la Marque et la marque SMARTAN de l’Opposante.

 

Le test en matière de confusion

Le test en matière de confusion en est un de première impression et de souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi indique que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Lorsqu’il applique le critère de la confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, notamment celles énumérées expressément au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer le même poids à ces différents facteurs.

 

La Cour suprême du Canada s’est prononcée sur la méthode à appliquer pour apprécier l’ensemble des circonstances de l’espèce à prendre en compte pour déterminer s’il y a de la confusion entre deux marques de commerce dans les arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401. C’est avec ces principes généraux à l’esprit que j’apprécierai maintenant l’ensemble des circonstances de l’espèce.

 

Al. 6(5)a) - le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

Ni la marque de la Requérante ni celle de l’Opposante ne sont intrinsèquement fortes puisque toutes deux suggèrent les marchandises et les services en liaison avec lesquelles elles sont employées. On peut soutenir que l’inclusion d’un dessin à la marque de l’Opposante ainsi que le fait que la marque de l’Opposante soit un mot inventé accroissent le caractère distinctif inhérent de la marque de l’Opposante.

 

Il est possible d’accroître la force d’une marque de commerce en la faisant connaître par la promotion ou l’usage.

 

L’affidavit de M. Kilbach, produit par l’Opposante, peut se résumer comme suit :

 

         l’Opposante a commencé à employer SMARTAN en liaison avec des services de salon de bronzage le 18 novembre 2002, et elle continue à le faire;

         l’Opposante possède deux salons de bronzage à Calgary, en Alberta, et sa marque est clairement affichée tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des deux commerces;

         en février et mars 2004 et en novembre et décembre 2004, des dépliants promotionnels faisant la publicité des salons de l’Opposante ont été distribués dans 20 000 foyers et entreprises de la région de Calgary

         entre novembre 2002 et mai 2005, plus de 14 000 membres ont fréquenté les deux commerces de l’Opposante, et plus de 200 000 séances de bronzage ont été offertes au cours de cette période.

 

Par ailleurs, l’affidavit de M. Russell, produit par la Requérante, établit ce qui suit :

 

         la Requérante fournit de l’information sur les pratiques de bronzage sécuritaires à l’intention de l’industrie du bronzage intérieur au Canada depuis au moins que 1995;

         la Requérante dispense de la formation sur les pratiques de bronzage sécuritaires au Canada en liaison avec la Marque à des exploitants de salon de bronzage et à leurs employés dans le cadre de cours par correspondance (depuis 1995), d’enseignement en classe (depuis 1998) et par Internet (depuis avant 2002);

         depuis qu’elle a commencé à offrir des cours de formation en classe sous la marque SMART TAN, la Requérante a donné sa formation sous la marque SMART TAN au Canada, y compris à Calgary, sans interruption depuis 1998, et les classes de formation ont compté de 10 à 400 employés;

         le programme d’adhésion offert par la Requérante à l’intention des salons de bronzage intérieur clients a commencé au Canada en 1995 ou vers cette époque;

         en 1995, la Requérante comptait 50 membres au Canada, et le nombre de membres s’élève maintenant à 415 au Canada; bon nombre des salons de bronzage qui sont membres du réseau de la Requérante affichent dans leur salon le certificat ou l’autocollant de la Requérante arborant la Marque;

         chaque année depuis au moins en 1997, la Requérante a distribué à des salons de bronzage intérieur situés au Canada, y compris dans la ville de Calgary et les environs, des publications imprimées fournissant de l’information concernant les pratiques de bronzage sécuritaires;

         depuis 1995, la Requérante distribue la revue Tanning Trends (qui est la publication officielle du réseau de la Requérante, et qui mentionne la Requérante et contient des publicités de la Requérante) à 1800 salons de bronzage canadiens chaque mois depuis 1995.

 

Compte tenu des renseignements qui précèdent, je conclus que la Marque était mieux connue que la marque de l’Opposante au Canada en date du 16 août 2005.

 

Al. 6(5)b) - la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

L’Opposante soutient que la preuve de la Requérante ne permet pas à celle‑ci de démontrer l’emploi de sa marque au Canada en liaison avec les services visés par sa demande. Le paragraphe 4(2) de la Loi définit comme suit ce qui constitue un « emploi » en liaison avec des services :

 

« Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services. »

 

Compte tenu des éléments de preuve produits, je suis convaincue que la Requérante a démontré un emploi de la Marque en liaison avec les services visés par sa demande au sens du paragraphe 4(2). Premièrement, la Requérante a démontré que ses services par correspondance et ses services de formation avaient été annoncés en liaison avec la Marque au Canada, et que des cours de formation en salle de classe en liaison avec la Marque avaient été donnés au Canada. Deuxièmement, pour ce qui concerne l’exécution de ses services, M. Russell affirme que les clients canadiens qui reçoivent la formation en classe ou par correspondance de la Requérante reçoivent le manuel de cours SMART TAN CERTIFICATION MANUAL, dont un exemplaire est joint à titre de pièce 2 à son affidavit. Il ressort d’un examen de cet élément de preuve que le participant lit le manuel au Canada, répond ensuite à un examen à choix multiples, et le poste à la Requérante une fois terminé. À mon avis, lorsque la Requérante dispense une formation par correspondance et en classe en liaison avec la Marque à des propriétaires et des employés de salons de bronzage au Canada, elle fournit les services visés par la demande (c.-à-d., la fourniture d’information ayant trait au bronzage sécuritaire, fourniture d’information ayant trait aux méthodes de bronzage sécuritaires). Par conséquent, compte tenu des éléments de preuve fournis, je suis convaincue que la Requérante a démontré un emploi de la Marque en liaison avec les services visés par la demande au Canada au sens du paragraphe 4(2) de la Loi.

 

La période pendant laquelle chaque marque a été en usage favorise la Requérante puisque celle-ci a commencé à employer sa marque en décembre 1995, tandis que l’Opposante a commencé à employer sa marque le 18 novembre 2002.

 

Al. 6(5)c) et d) - le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce

Les services de la Requérante sont liés aux marchandises et services de l’Opposante puisque tous visent le même secteur. Les marchandises et services des parties diffèrent dans la mesure où la Requérante fournit des services visant à donner de l’information sur le bronzage intérieur tandis que l’Opposante offre des services proprement dit de salon de bronzage. La nature du commerce se recoupe, comme le démontre la preuve de l’Opposante. Par exemple, la preuve de l’Opposante indique que des employés de l’Opposante ont pris part à des séances d’information de la Requérante.

 

Al. 6(5)e) - le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

Les marques des parties sont essentiellement identiques dans le son et les idées qu’elles suggèrent. Les marques présentent également un degré élevé de ressemblance dans la présentation.

 

Conclusion quant à la probabilité de confusion

Comme je l’ai indiqué précédemment, bien que la loi impose à la Requérante le fardeau d’établir que la Marque est distinctive, il incombe à l’Opposante de prouver les faits qu’elle invoque au soutien de ce motif. Compte tenu qu’en l’espèce, l’emploi de la Marque par la Requérante est antérieur à l’emploi de sa marque par l’Opposante, et que l’Opposante a seulement démontré un emploi de sa marque dans une région précise, il me semble que l’Opposante devrait démontrer que sa marque était bien connue à Calgary en date du 16 août 2005 pour pouvoir annuler le caractère distinctif de la Marque de la Requérante. À mon avis, le degré de réputation de la marque SMARTAN de l’Opposante démontré en l’espèce au soutien de la prétention selon laquelle une marque de commerce subséquente a une incidence sur le caractère distinctif d’une marque de commerce antérieure n’est pas suffisant. En conséquence, le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est rejeté.

 

 

Décision

En vertu des pouvoirs que m’a délégués le registraire en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition conformément au paragraphe 38(8).

 

 

FAIT À Gatineau (Québec), le 23 février 2009.

 

C.R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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