Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 171

Date de la décision : 2015-09-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DES PROCÉDURES DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45

 

 

Gowling Lafleur Henderson LLP

Partie requérante

et

 

Carollyne Yardley, exerçant son activité sous la dénomination Carollyne Yardley Omnimedia

Propriétaire inscrite

 

 

 



 

LMC746,515 pour la marque de commerce CAROLLYNE

 

Enregistrement

[1]               La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l'égard de l'enregistrement no LMC746,515 de la marque de commerce CAROLLYNE (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants :

[Traduction] Peintures, illustrations, reproductions et caricatures; imprimés, nommément livres, cartes de souhaits, signets et cartes postales; décorations de Noël; vêtements, nommément vêtements pour enfants; jouets, nommément poupées, jouets en peluche; tasses à café; oreillers; casse-têtes.

La Marque est également enregistrée en liaison avec la [Traduction] « vente au détail d'objets d'art ».

[3]               Le 1er février 2013, à la demande de Gowling Lafleur Henderson LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch. T-13, à Carollyne Yardley, exerçant son activité sous la dénomination Carollyne Yardley Omnimedia (la Propriétaire). L'avis exigeait que la Propriétaire fournisse une preuve démontrant qu'elle avait employé la Marque au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l'avis en liaison avec chacun des produits et des services visés par l'enregistrement. Si la Marque n'avait pas été ainsi employée, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[4]               Les définitions pertinentes d'emploi sont énoncées aux articles 4(1) et 4(2) de la Loi, lesquels sont libellés comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les colis dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu'avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[5]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères pour établir l'emploi sont peu exigeants et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve. Il n'en faut pas moins, cependant, présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et des services visés par l'enregistrement au cours de la période pertinente [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004) CF 448, 31 CPR (4th) 270]. En outre, de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

[6]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit son propre affidavit, souscrit le 20 décembre 2013, accompagné des pièces A à J. Seule la Partie requérante a produit des observations écrites et était présente à l'audience qui a été tenue.

[7]               La Partie requérante soutient que l'enregistrement doit être maintenu en ce qui concerne les [Traduction] « cartes de souhaits » seulement. En bref, la Partie requérante soutient qu'il n'existe aucune preuve d'emploi, aucune preuve de transactions commerciales et/ou que la preuve d'emploi au cours de la période pertinente est ambiguë et n'est pas fiable en ce qui concerne les divers autres produits ainsi que les services.

[8]               Pour les raisons exposées ci-après, je conclus qu'il y a lieu de maintenir l'enregistrement dans son intégralité.

[9]               Avant d'exposer les motifs de ma décision, je présenterai un résumé de la preuve.

La preuve

[10]           Mme Yardley atteste que, au cours de la période pertinente, elle a employé la Marque avec et sans les éléments graphiques présentés dans la Pièce A jointe à son affidavit. La Pièce A se compose d'une version de la Marque intégrant un élément graphique ou l'embellissement de la lettre O suivant :

Elle désigne la Marque et la marque embellie présentée ci-dessus comme étant les [Traduction] « Marques CAROLLYNE ».

[11]           Elle décrit ensuite la nature de son entreprise d'art, attestant qu'elle a établi l'entreprise à propriétaire unique CAROLLYNE YARDLEY OMNIMEDIA en 2008 pour se concentrer sur la commercialisation de ses peintures, illustrations, caricatures et reproductions. Elle désigne les produits susmentionnés comme étant ses [Traduction] « Œuvres artistiques », qu'elle définit comme suit :

         les « illustrations » sont des peintures faites pour illustrer une histoire;

         une « caricature » est un portrait représentant une personne avec exagération, et la personne représente une personne réelle et non un personnage fictif;

         les « reproductions » sont des reproductions de grande qualité de ses peintures, illustrations et caricatures, et les reproductions englobent les giclées, les affiches et les imprimés.

[12]           Mme Yardley joint comme Pièces B1, B2, B3 et B4 des photographies de [Traduction] « certaines des peintures, d'une illustration, de caricatures et d'une reproduction, respectivement, vendues par l'Inscrivante sous au moins une des Marques CAROLLYNE au Canada au cours de la Période pertinente ».

[13]           En ce qui concerne la Marque figurant sur les produits présentés dans les photographies susmentionnées, elle atteste que les Œuvres artistiques arborent la Marque sur le devant et ont une étiquette au dos qui arbore au moins une des Marques CAROLLYNE, et qu'elles arboraient ainsi la Marque et étaient ainsi étiquetées lorsqu'elles ont été vendues au Canada au cours de la période pertinente. Elle atteste également qu'elle a aussi vendu certaines des Œuvres artistiques avec des certificats d'authenticité arborant au moins une des Marques CAROLLYNE au cours de la période pertinente. À l'appui, elle fournit comme Pièce C jointe à son affidavit des photographies d'une étiquette, d'un certificat d'authenticité et de l'emballage d'une peinture qui, affirme-t-elle, arborent tous au moins une des Marques CAROLLYNE et sont représentatives de ceux qui ont été employés en liaison avec les Œuvres artistiques qu'elle a vendues au Canada au cours de la période pertinente.

[14]           Mme Yardley atteste ensuite que, une fois qu'une Œuvre artistique est terminée, d'autres [Traduction] « produits dérivés » sont créés en fonction de cette œuvre, notamment des [Traduction] « imprimés comme des livres, cartes de souhaits, signets et cartes postales; décorations de Noël; vêtements, comme des vêtements pour enfants; jouets, comme des poupées et des jouets en peluche; tasses à café; oreillers; et casse-têtes ». Elle joint comme Pièces D1 à D10 des photographies de ce qu'elle atteste sont les produits suivants arborant au moins une des Marques CAROLLYNE qu'elle a vendus au Canada au cours de la période pertinente : un livre, des cartes de souhaits, des signets et des cartes postales, un oreiller, un casse-tête, des décorations de Noël, des vêtements pour enfants, une poupée et une tasse à café. Elle atteste qu'elle a vendu des anciennes versions du livre présenté dans la Pièce D1 au cours de la période pertinente. Elle atteste également que, si la Pièce D5 présente une taie d'oreiller, plutôt qu'un oreiller, la Propriétaire a vendu des oreillers au Canada au cours de la période pertinente dans un emballage semblable qui arborait au moins une des Marques CAROLLYNE.

[15]           En plus de l'emballage arborant au moins une des Marques CAROLLYNE visibles lors du transfert des produits présentés dans les Pièces D1 à D10, Mme Yardley fournit comme Pièce E jointe à son affidavit des copies d'étiquettes représentatives et d'une boîte d'expédition arborant au moins une des Marques CAROLLYNE employées par la Propriétaire au Canada au cours de la période pertinente sur l'emballage des produits.

[16]           Mme Yardley atteste que la Propriétaire a commercialisé, annoncé et vendu les produits visés par l'enregistrement sous au moins une des Marques CAROLLYNE par l'entremise des sites Web de la Propriétaire accessibles aux internautes canadiens; à l'occasion d'expositions d'art, d'événements de vente d'œuvres d'art et d'événements commerciaux tenus à Victoria, en Colombie-Britannique, et dans les environs; et dans des galeries d'art et chez des détaillants. Elle atteste que la Propriétaire a aussi transmis des bulletins électroniques et employé les médias sociaux pour commercialiser et annoncer les produits et services visés par l'enregistrement en liaison avec au moins une des Marques CAROLLYNE. À l'appui, elle joint comme Pièces F1 à F3 des instantanés du site Web de la Propriétaire (datés de février 2013 et de décembre 2013, [Traduction] « représentatifs de l'apparence et des fonctionnalités des sites Web au cours de la Période pertinente ») et des instantanés de bulletins transmis par la Propriétaire en 2010 et en 2011 pour commercialiser et annoncer les produits et services visés par l'enregistrement. Elle fournit des statistiques relatives à la consultation du site Web, dont le nombre de visiteurs uniques provenant du Canada qui ont consulté le site Web de la Propriétaire au cours de la période pertinente. Elle atteste également que la Propriétaire a expédié les produits achetés à partir de son site Web dans l'emballage présenté dans la Pièce C et dans la boîte d'expédition présentée dans la Pièce E jointes à son affidavit.

[17]           En ce qui concerne les autres voies de commercialisation employées par la Propriétaire au cours de la période pertinente, comme les événements de vente d'œuvres d'art, les expositions d'art et les événements commerciaux, Mme Yardley mentionne expressément ce qui suit : le festival annuel de peinture de la rue Moss à Victoria, en Colombie-Britannique; le salon des beaux-arts de Sooke tenu à Sooke, en Colombie-Britannique; et les réunions d'affaires de la section méridienne de Victoria de Business Network International. Pour décrire plus en détail un de ces événements, elle atteste que la Propriétaire a participé au festival de peinture de la rue Moss en juillet 2012 et 2013, qui présente les œuvres d'art et les marchandises commerciales connexes de différents artistes à plus de 30 000 participants chaque année. Elle affirme que la Propriétaire a vendu les produits visés par l'enregistrement, et qu'elle a commercialisé, annoncé et offert les services sous au moins une des Marques CAROLLYNE à l'occasion de cet événement. À l'appui, elle fournit une carte professionnelle qui, affirme-t-elle, a été distribuée aux participants à l'événement (Pièce G) et des photographies de la tente de la Propriétaire à l'occasion de l'événement de 2012 montrant les produits offerts en vente (Pièce H). Elle affirme que l'emballage des produits présentés dans la Pièce H portait des étiquettes au dos arborant au moins une des Marques CAROLLYNE et que les étiquettes étaient visibles par les participants lorsqu'ils ont acheté ces produits.

[18]           Mme Yardley atteste que, en outre, la Propriétaire a également vendu les produits visés par l'enregistrement au Canada au cours de la période pertinente dans des magasins, des galeries, à l'occasion d'expositions et chez des détaillants (les Revendeurs). Elle identifie 16 de ces Revendeurs et atteste que les clients emploieraient les étiquettes pour choisir les Œuvres artistiques qu'ils souhaiteraient acheter chez les Revendeurs. Elle joint comme Pièce I1 des photographies d'étiquettes montrant les Œuvres artistiques précises qui étaient mises en vente chez les Revendeurs, arborant au moins une des Marques CAROLLYNE, qui seraient représentatives de celles qui étaient employées chez les Revendeurs au cours de la période pertinente. Les étiquettes désignent le médium artistique comme étant une [Traduction] « huile sur toile », une « huile sur carton », une « giclée sur toile signée à tirage limité » et indiquent que [Traduction] « pour acheter un article, veuillez apporter cette carte à la caissière ». Elle joint également comme Pièce I2 des photographies prises chez deux des Revendeurs qui montrent des étalages garnis de certains des produits visés par l'enregistrement arborant au moins une des Marques CAROLLYNE qui, affirme-t-elle, sont représentatives des étalages de magasin chez ces deux Revendeurs au cours de la période pertinente.

[19]           En ce qui concerne les ventes des produits visés par l'enregistrement, Mme Yardley explique que certains des produits visés par l'enregistrement, comme les peintures, sont vendus en consignation chez les Revendeurs qui sont des galeries d'art, lesquelles galeries gardent une partie du prix de vente de ces produits lorsqu'ils sont vendus à des acheteurs.

[20]           En plus des chiffres de revenus annuels, Mme Yardley fournit des chiffres reliés aux ventes faites par les voies de commercialisation susmentionnées des produits visés par l'enregistrement suivants : des peintures, une illustration, des reproductions, des caricatures, des livres, des cartes de souhaits, des signets, des cartes postales, des décorations de Noël, des vêtements pour enfants, des poupées, des tasses à café, des oreillers et des casse-têtes. Elle atteste que tous ces produits arboraient au moins une des Marques CAROLLYNE, visible par l'acheteur lorsque l'acheteur en a pris possession. Comme autre preuve de la vente de ces produits visés par l'enregistrement, elle joint comme Pièce J un échantillon de factures, certaines d'entre elles montrant des ventes faites au [Traduction] « festival de peinture de la rue Moss ». Elle fournit un tableau pour établir des renvois aux factures qui se rapportent aux produits précis qui sont visés par l'enregistrement. Bien qu'une de ces factures mentionne la vente de [Traduction] « taies d'oreiller », elle atteste encore une fois que cette mention se rapporte en réalité à des oreillers.

[21]           Enfin, Mme Yardley fournit d'autres détails à propos des ventes des produits visés par l'enregistrement et de la pratique normale du commerce de la Propriétaire. Plus précisément, elle explique que, si les revenus annuels moyens de la Propriétaire au cours de la période pertinente peuvent sembler faibles comparativement à des activités commerciales à grande échelle, ces chiffres de vente s'inscrivent dans la pratique normale du commerce de l'entreprise de la Propriétaire. Elle explique que certaines Œuvres artistiques prennent beaucoup de temps à réaliser, exigent beaucoup de travail et sont fabriquées à la main, et ne sont pas produites en série; ainsi, elle peut seulement produire 11 peintures en moyenne dans une année civile, et seulement quelques-uns des articles faits à la main seraient mis en vente à un quelconque moment.

Analyse et motifs de la décision

[22]            À titre préliminaire, bien que la Partie requérante ne s'y soit pas opposée, j'aimerais souligner que j'estime que l'emploi de la Marque qui intègre un élément graphique ou l'embellissement de la lettre O (comme le montre le paragraphe 9 ci-dessus) constitue un emploi de la Marque telle qu'elle est enregistrée. J'estime que cet embellissement du lettrage de la Marque est une variation mineure [concernant l'embellissement des lettres, voir FAAM SpA c Fabrica Italiana Accumulatori Motocarri Montecchio, 2011 COMC 132, 95 CPR (4th) 184]. En effet, dans le cas d'une marque nominale, l'emploi du mot ou des mots servant de marque, qu'importe la forme ou la couleur employées, peut être considéré comme un emploi de la marque déposée [voir Stikeman, Elliott c Wm Wrigley Jr Co (2001), 14 CPR (4th) 393 (COMC)]. En tout état de cause, la Marque est employée d'une manière telle qu'elle n'a pas perdu son identité et qu'elle demeure reconnaissable, l'élément dominant de la Marque, soit CAROLLYNE, ayant été préservé [tel qu'établi dans Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF) et Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF)]. Ainsi, par souci de commodité dans le reste de la décision, j'appellerai simplement la Marque ce qui a préalablement été appelé les Marques CAROLLYNE.

[23]            J'examinerai maintenant les observations de la Partie requérante, à savoir que, outre les [Traduction] « cartes de souhaits » : i) il n'existe aucune preuve de transactions commerciales; ii) la preuve d'emploi au cours de la période pertinente est ambiguë et n'est pas fiable; et/ou 3) il n'existe absolument aucune preuve d'emploi en ce qui concerne les divers autres produits ainsi que les services. J'examinerai successivement chacune de ces observations.

i) Existe-t-il une preuve de transactions commerciales en ce qui concerne certains produits?

[24]           La Partie requérante a identifié les produits suivants pour lesquels elle soutient qu'il n'existe aucune preuve de transactions commerciales et, par conséquent, aucun emploi de la Marque dans la pratique normale du commerce au cours de la période pertinente : reproductions; imprimés, nommément signets et cartes postales, décorations de Noël, jouets, nommément poupées, jouets en peluche; tasses à café; oreillers; casse-têtes.

[25]           En particulier, dans un premier temps, la Partie requérante soutient que la seule preuve de la vente de ces articles est celle de la vente à une entité appelée « Moss Street Paint-In » (festival de peinture de la rue Moss) (conformément aux factures de la Pièce J). La Partie requérante fait valoir qu'il n'existe aucune preuve que le festival de peinture de la rue Moss, un organisme non constitué, était juridiquement en mesure de conclure un contrat de vente. En l'absence d'une telle preuve, la Partie requérante soutient-elle, la preuve ne démontre pas qu'il y a eu une vente dans la pratique normale du commerce. J'estime cependant que, compte tenu de la preuve dans son ensemble, la Partie requérante a adopté une démarche trop technique dans son analyse de la preuve qui est incompatible avec l'objet de la procédure prévue à l'article 45 [voir John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co et al (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. J'admets plutôt que ces articles ont été vendus à des participants à l'événement, plutôt qu'à l'événement lui-même; tel est le cas, compte tenu en particulier des déclarations de Mme Yardley faites aux paragraphes 16 et 17 de son affidavit à l'effet que des ventes ont été faites à l'occasion d'événements comme le festival de peinture de la rue Moss et des photographies montrant les produits offerts en vente aux participants à l'événement en 2012 (Pièce H). En tout état de cause, je souligne que les ventes faites à l'occasion du [Traduction] « festival de peinture de la rue Moss » ou au « festival de peinture de la rue Moss » ne représentent pas les seules ventes démontrées dans la preuve. Compte tenu de la preuve dans son ensemble, je n'ai aucune difficulté à admettre que des ventes de ces articles ont été faites dans la pratique normale du commerce par la Propriétaire au cours de la période pertinente.

ii) Existe-t-il une preuve d'emploi ambiguë et non fiable au cours de la période pertinente?

[26]           La Partie requérante soutient également qu'il convient de radier les produits [Traduction] « peintures, illustrations, caricatures; jouets, nommément poupées, jouets en peluche; vêtements, nommément vêtements pour enfants » de l'enregistrement parce que la preuve est ambiguë et n'est pas fiable (en plus des observations formulées ci-dessus). La Partie requérante regroupe ces produits comme suit et présente des observations distinctes à l'égard de chaque groupe : a) peintures, illustrations, caricatures; b) jouets, nommément poupées, jouets en peluche; et c) vêtements, nommément vêtements pour enfants.

[27]           En ce qui concerne les produits groupés sous le point a) ci-dessus, la Partie requérante soutient que la preuve n'est pas fiable et est contradictoire, car par exemple, malgré le fait que Mme Yardley définit chacun de ces produits dans son affidavit, aucune des pièces qui l'accompagnent n'est clairement étiquetée ou identifiée au moyen de ces désignations ou descriptions génériques. Ainsi, la Partie requérante fait-elle valoir, la Propriétaire n'a pas établi de lien entre les produits présentés dans la preuve et les produits décrits dans l'enregistrement. De plus, la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire en ce qui concerne les [Traduction] « peintures » est contradictoire et n'est pas fiable, comme Mme Yardley affirme que le coût minimal d'une [Traduction] « peinture » est de 500 $, pourtant les factures se rapportant aux [Traduction] « peintures » montrent que les prix unitaires étaient de 400 $ et de 475 $.

[28]           Cependant, Mme Yardley établit un lien entre les produits visés par l'enregistrement et ceux qui sont révélés dans la preuve, comme elle atteste qu'elle a joint à son affidavit [Traduction] « comme Pièces B1, B2, B3 et B4 des photographies de certaines des peintures, d'une illustration, de caricatures et d'une reproduction, respectivement […] » (je souligne). De plus, les produits présentés dans ces pièces sont compatibles avec les définitions que Mme Yardley a données de ces produits (paragraphe 6 de son affidavit). En outre, Mme Yardley a établi des renvois pour chacun des produits visés par l'enregistrement à des factures expressément identifiées (paragraphe 22 de l'affidavit, Pièce J). En ce qui a trait à l'écart du prix des [Traduction] « peintures » souligné par la Partie requérante, j'estime qu'il s'agit d'une contradiction mineure de la part de la déposante; en effet, les prix indiqués sur deux des trois factures pertinentes dépassent considérablement le seuil des 500 $, tandis que la troisième facture indique des prix unitaires qui sont relativement proches de ce seuil. J'estime que cet écart mineur ne devrait pas mettre en doute la fiabilité de la preuve et permettre de nier que ces ventes ont eu lieu.

[29]           En ce qui concerne les produits groupés sous le point b) ci-dessus, à savoir les [Traduction] « jouets, nommément poupées, jouets en peluche », la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire concernant ces produits est ambiguë, imprécise et contradictoire. Par exemple, la facture fournie à l'appui de ces produits (dans la Pièce J) mentionne de façon ambiguë la vente d'une [Traduction] « Marchandise – jouet ou poupée ». La Partie requérante fait valoir que, comme on ne sait pas clairement si la vente se rapporte à des [Traduction] « poupées » ou à des « jouets en peluche », cette ambiguïté doit être interprétée à l'encontre des intérêts de la Propriétaire. De plus, la Partie requérante soutient que le même produit ne peut satisfaire aux exigences de l'emploi en liaison avec deux produits distincts énoncés dans l'enregistrement, en l'absence de preuve contraire [voir John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. À titre subsidiaire, la Partie requérante fait-elle valoir, la preuve étaye au mieux l'emploi en liaison avec des [Traduction] « jouets en peluche ». À cet égard, la Partie requérante soutient que, si Mme Yardley identifie le produit présenté dans la photographie de la Pièce D9 comme étant une [Traduction] « poupée », l'article présenté dans la photographie semble plutôt être un [Traduction] « jouet en peluche ». Cependant, j'estime que le produit présenté dans la photographie de la Pièce D9 est une [Traduction] « poupée en peluche » et qu'il est en réalité conforme aux définitions présentées par la Partie requérante des termes [Traduction] « poupée » et « jouet en peluche ». À cet égard, la Pièce D9 semble représenter un [Traduction] « petit modèle d'être humain » qui est « cousu dans un tissu et rembourré au moyen d'un matériau souple ». Si je reconnais que les [Traduction] « jouets en peluche » englobent davantage que des [Traduction] « poupées », je souligne que Mme Yardley a également employé le terme [Traduction] « poupée » au sens large dans la preuve pour décrire un animal en peluche (voir les pages Web de la Pièce F). En conséquence, j'estime que l'emploi établi, surtout compte tenu des attestations de Mme Yardley à propos des produits dérivés, est représentatif à la fois des [Traduction] « poupées » et des « jouets en peluche ».

[30]           Enfin, en ce qui concerne les produits groupés sous le point c) ci-dessus, à savoir les vêtements pour enfants, la Partie requérante soutient que, si la preuve semble établir l'emploi de la Marque en liaison avec des vêtements, la preuve est insuffisante ou ambiguë en ce qui a trait aux vêtements pour enfants. Je souligne cependant que Mme Yardley a fait de nombreuses déclarations sous serment dans son affidavit relativement aux diverses pièces qui se rapportent aux vêtements (et en particulier à des tee-shirts), indiquant que ces produits sont destinés aux enfants. Par exemple, Mme Yardley atteste au paragraphe 8 de son affidavit que les tee-shirts présentés dans la Pièce D8 dans un emballage arborant clairement la Marque sont des [Traduction] « vêtements pour enfants ». Au paragraphe 20 de son affidavit, Mme Yardley atteste que 21 [Traduction] « vêtements pour enfants » ont été vendus. En outre, elle fournit des factures représentatives (dans la Pièce J), pour lesquelles elle atteste au paragraphe 22 de son affidavit que trois de ces factures témoignent de ventes de [Traduction] « vêtements pour enfants ». Je ne vois rien d'incohérent dans la preuve ni aucune raison de mettre en doute les déclarations sous serment de Mme Yardley selon lesquelles ces produits sont des [Traduction] « vêtements pour enfants »; par conséquent, j'accepte d'emblée ces déclarations sous serment [tel qu'il est établi dans Rubicon Corp c Comalog Inc (1990), 33 CPR (3d) 58 (COMC)].

iii) En ce qui concerne les divers autres produits, ainsi que les services, existe-t-il une preuve d'emploi?

[31]           La Partie requérante a identifié les [Traduction] « livres », « tasses à café », « oreillers » et la « vente au détail d'objets d'art » comme étant les produits et les services pour lesquels elle soutient qu'il n'existe absolument aucune preuve d'emploi de la Marque au cours de la période pertinente.

[32]           En particulier, en ce qui concerne les [Traduction] « livres », la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire à l'appui des ventes alléguées de livres se présente sous la forme d'un unique bon de commande ou d'une [Traduction] « précommande » écrite à la main reliée à sept livres et datée de janvier 2013, quelques jours seulement avant la fin de la période pertinente. La Partie requérante fait valoir qu'une commande de produits qui n'est pas étayée par la preuve que les produits ont vraiment été livrés ou ont ultérieurement été facturés n'est pas suffisante pour établir l'emploi d'une marque de commerce en liaison avec ces produits [citant à l'appui Shapiro Cohen c JMAX Global Distributors Inc, 2011 CarswellNat 2743, 2011 COMC 36, para. 12]. Cependant, je souligne que Mme Yardley a fait une déclaration sous serment selon laquelle la Propriétaire a également vendu des anciennes versions du livre au cours de la période pertinente. La Partie requérante soutient que cette déclaration est contredite plus loin dans l'affidavit de Mme Yardley, comme elle affirme que sept livres seulement ont été vendus au cours de la période pertinente. La Partie requérante fait valoir que cette déclaration ultérieure signifie que les seules ventes de livres qui ont été faites sont les sept livres [Traduction] « précommandés ». Si Mme Yardley avait pu être plus précise et indiquer le nombre d'anciennes versions du livre qui ont été vendues au cours de la période pertinente, j'estime que sa déclaration selon laquelle sept livres ont été vendus ne doit pas faire en sorte que sa déclaration antérieure selon laquelle des anciennes versions du livre ont également été vendues au cours de la période pertinente soit rejetée. Compte tenu de la preuve dans son ensemble, je ne vois en dernière analyse aucune incohérence dans les déclarations de Mme Yardley à cet égard.

[33]           En ce qui concerne maintenant les produits [Traduction] « tasses à café » et « oreillers », la Partie requérante soutient que les produits révélés dans la preuve ne correspondent pas à ces produits visés par l'enregistrement. Cependant, contrairement aux observations de la Partie requérante, j'estime que la mention des [Traduction] « grosses tasses » dans la preuve (comme le montrent les factures de la Pièce J) constitue une mention des [Traduction] « tasses à café » (comme le montre la photographie de la Pièce D10 et le mentionnent les paragraphes 8 et 22 de l'affidavit de Mme Yardley). De plus, j'accepte la déclaration sous serment de Mme Yardley selon laquelle, malgré la mention des [Traduction] « taies d'oreiller » dans la preuve, la Propriétaire [Traduction] « a vendu des oreillers (taie d'oreiller entourant la bourre d'oreiller) » et que la facture fournie à l'appui (dans la Pièce J) témoigne d'une telle vente (conformément à la déclaration sous serment faite au paragraphe 23 de l'affidavit de Mme Yardley).

[34]           Enfin, en ce qui concerne la [Traduction] « vente au détail d'objets d'art », la Partie requérante soutient que des services accessoires à la vente de produits (c.-à-d. la vente au détail de ses propres produits) ne constituent pas des « services » [citant à l'appui Carling O’Keefe Breweries of Canada Ltd c Anheuser-Busch Inc (1985), 4 CPR (3d) 216 (COMC)]. En l'espèce, cependant, la Propriétaire ne fournit pas simplement des services accessoires, comme l'annonce et la promotion de ses propres produits; la Propriétaire fournit dans les faits des services de vente au détail d'objets d'art par l'entremise de ses sites Web www.carollyne.com et www.etsy.com/ca/shop/carollyneyardley, tous deux arborant clairement la Marque en liaison avec une galerie d'art et un magasin en ligne. Je souligne que les sites Web comportent tous deux des fonctions de panier d'achats virtuel en ligne, et Mme Yardley atteste clairement que des ventes ont été faites par l'entremise des sites Web au cours de la période pertinente. De plus, rien ne limite les ventes au détail aux ventes faites par l'entremise d'un magasin traditionnel. En tout état de cause, la Cour d'appel fédérale a statué que rien à l'article 4(2) ne limite les services à ceux qui sont offerts au public de façon indépendante ou qui ne sont pas accessoires ou liés aux produits [Gesco Industries Inc c Sim & McBurney (2000), 9 CPR (4th) 480, p. 484].

[35]           Compte tenu de ce qui précède, j'estime que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits et des services visés par l'enregistrement.

Décision

[36]           En conséquence, dans l'exercice des pouvoirs qui me sont délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera maintenu, conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi.

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Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.

Date de l'audience : 11 mai 2015

 

Comparutions

 

Aucune comparution                                                               Pour la Propriétaire inscrite

 

Michael O’Neil                                                                        Pour la Partie requérante

 

Agents au dossier

 

Oyen Wiggs Green & Mutala LLP                                          Pour la Propriétaire inscrite

 

Gowling Lafleur Henderson LLP                                           Pour la Partie requérante

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