Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

 

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION de Blenz The Canadian Coffee Company Ltd. à la demande no 1,277,655 produite par AW Holdings Corp. en vue de l’enregistrement de la marque de commerce GOTCHA MATCHA

 

[1]          Le 31 octobre 2005, AW Holdings Corp. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce GOTCHA MATCHA (la Marque), fondée sur l’emploi projeté de la marque au Canada. L’état déclaratif des marchandises est formulé ainsi : « thés; boissons à base de thé sans alcool; boissons fouettées contenant des tisanes, des fruits, des légumes, des yogourts glacés, des sorbets et des suppléments nutritifs; nommément vitamines, minéraux, aminoacides et suppléments aux herbes, nommément églantier, échinacée, hydraste du Canada, graine de guarana, pollen d’abeilles, graine de lin, noix de kola, spiruline, herbe d’orge, son de blé, germe de blé, alfafa, ginko biloba, feuille de myrtille, ginseng et aubépine » (les Marchandises de la Requérante).

 

[2]          La Requérante a renoncé au droit à l’usage exclusif du mot MATCHA en dehors de la Marque.

 

[3]          La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 7 mars 2007. Le 7 mai 2007, Blenz The Canadian Coffee Company Ltd. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. L’Opposante a invoqué des motifs d’opposition fondés sur les alinéas 38(2)a), c) et d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi).

 

[4]          La Requérante a produit et fait signifier une contre‑déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante.

 

[5]          À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit un affidavit souscrit par Brian Noble. La Requérante n’a pas demandé à contre‑interroger M. Noble.

 

[6]          À l’appui de sa demande, la Requérante a produit une copie certifiée conforme du dossier de poursuite de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada se rapportant à la demande visée par l’opposition.

 

[7]          Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit. Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante fait valoir que la preuve de la Requérante est inadmissible parce que non étayée par un affidavit ou une déclaration solennelle. La position de l’Opposante est clairement erronée. Comme l’affirme la Requérante, le paragraphe 42(1) du Règlement sur les marques de commerce prévoit expressément la présentation d’éléments de preuve conformément à l’article 54 de la Loi, c’est‑à‑dire qu’une personne peut produire une copie certifiée conforme de tout document en la garde officielle du registraire sans avoir à obtenir un affidavit ou une déclaration solennelle s’y rattachant.

 

[8]          Les parties n’ont pas demandé la tenue d’une audience.

 

Fardeau de preuve

[9]          C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’Opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

 

Motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 38(2)a)

[10]      Les deux premiers motifs d’opposition sont fondés sur l’article 30 de la Loi.

 

[11]      L’Opposante fait valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30e) parce que la Requérante n’a pas l’intention d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises de la Requérante. Il n’existe cependant aucune preuve étayant une telle conclusion. Ce motif est donc rejeté au motif que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve initial.

 

[12]      L’Opposante fait également valoir que la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30i) parce que la Requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada vu l’emploi antérieur de la marque de commerce GOTCHA MATCHA par l’Opposante. Toutefois, lorsqu’un requérant fournit la déclaration exigée par l’alinéa 30i), un motif fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, notamment lorsque la mauvaise foi du requérant est établie [Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155]. Étant donné que l’Opposante n’a pas établi la mauvaise foi de la Requérante, ce motif est également rejeté.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)c)

[13]      L’Opposante soutient que, eu égard à l’article 16, la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce que, au moment de la production de la demande, la Marque de la Requérante créait de la confusion avec la marque de commerce non déposée GOTCHA MATCHA de l’Opposante antérieurement employée au Canada depuis le 12 juillet 2004 en liaison avec les marchandises suivantes : [traduction] « thé; thé et boissons à base de thé sans alcool; concentrés et boissons à base de thé sans alcool aromatisés aux fruits; friandises congelées au thé et/ou aromatisées aux fruits; laits et boissons fouettés; crème glacée; mélanges à boissons liquides et en poudre employés dans la préparation de boissons sans alcool; sirops aromatisants employés dans la préparation de boissons à base de thé sans alcool » (les Marchandises de l’Opposante).

 

[14]      En ce qui concerne ce motif d’opposition, l’Opposante doit démontrer qu’elle a employé sa marque avant le 31 octobre 2005 et que celle‑ci n’avait pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande de la Requérante (paragraphe 16(5)).

 

[15]      M. Noble, président et directeur de l’Opposante, nous indique que celle‑ci a commencé ses activités en 1992, à Vancouver, et qu’elle a pris de l’expansion depuis si bien qu’elle compte maintenant 52 emplacements en Colombie‑Britannique, ainsi que plusieurs autres partout dans le monde. Il ne précise pas en quoi consiste l’entreprise de l’Opposante, mais il ressort des pièces qu’il a fournies qu’il s’agit d’exploitation et/ou de franchisage de cafés‑restaurants.

 

[16]      M. Noble affirme que la marque de commerce GOTCHA MATCHA de l’Opposante a été employée en liaison avec les Marchandises de l’Opposante. Il fournit la preuve d’une [traduction] « promotion GOTCHA MATCHA » faite par celle‑ci en 2004, laquelle comprend ce qui suit :

  une brochure de [traduction] « promotion de fin d’été » fournie aux emplacements de magasins de l’Opposante, à l’été 2004, qui indique que la promotion sera en vigueur du 12 juillet au 12 septembre 2004. La marque GOTCHA MATCHA figure partout dans cette brochure, qui précise qu’il existe des affiches, bannières, papillons publicitaires, chevalets, papillons publicitaires pour caisses enregistreuses et cartes à menu montrant la marque GOTCHA MATCHA [pièce B];

  M. Noble affirme que les documents de promotion ont été envoyés dans les emplacements au plus tard le 6 juillet 2004 et fournit une copie de chacun des affiches, bannières, papillons publicitaires, chevalets, papillons publicitaires pour caisses enregistreuses et cartes à menu [pièces C1 à C6];

  un communiqué de presse envoyé aux journaux le 12 juillet 2004 qui montre la marque GOTCHA MATCHA et annonce que l’Opposante [traduction] « est fière d’être la première à présenter le Matcha latté glacé à la côte Ouest » [pièce D];

  des annonces publicitaires parues dans les éditions du 15 août et du 1er septembre 2004 du The Vancouver Sun montrant la marque GOTCHA MATCHA [pièces E et F].

 

[17]      M. Noble affirme aussi que l’Opposante [traduction] « emploie la marque GOTCHA MATCHA dans le commerce depuis le 12 juillet 2004 » [paragraphe 13].

 

[18]      La Requérante soutient que la preuve de l’Opposante n’établit pas l’emploi, conformément à l’article 4 de la Loi, de la marque GOTCHA MATCHA en liaison avec les Marchandises de l’Opposante avant le 31 octobre 2005. Elle soutient également que la preuve n’établit pas que l’Opposante n’avait pas abandonné la marque GOTCHA MATCHA le 7 mars 2007.

 

[19]      L’article 4 est reproduit ci‑après :

       4. (1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

           (2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

           (3) Une marque de commerce mise au Canada sur des marchandises ou sur les colis qui les contiennent est réputée, quand ces marchandises sont exportées du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces marchandises.

 

[20]      La Requérante fait valoir qu’il n’y a aucune preuve établissant que la marque de l’Opposante était liée à des marchandises lors de la vente ou du transfert, comme l’exige le paragraphe 4(1).

 

[21]      La Requérante a raison de dire que les articles promotionnels ne suffisent généralement pas pour répondre aux exigences du paragraphe 4(1), mais ce n’est pas le cas lorsque lesdits articles promotionnels sont montrés au point d’achat des marchandises. Je suis disposée à admettre que des articles comme les papillons publicitaires pour caisses enregistreuses et les cartes à menu peuvent servir à établir la liaison nécessaire entre une marque et des marchandises lors du transfert ou de la vente.

 

[22]      Cependant, je suis d’accord avec la Requérante pour dire que l’Opposante n’a pas établi que des ventes des Marchandises de l’Opposante ont été réalisées à quelque moment que ce soit, et encore moins avant le 31 octobre 2005. Le paragraphe 4(1) exige qu’il y ait un « transfert de la propriété ou de la possession [des] marchandises » pour qu’il y ait emploi. Aucun élément de preuve n’établit qu’il y a eu transfert. Pour cette raison, je rejette le motif fondé sur l’article 16 parce que l’Opposante n’a pas réussi à s’acquitter de son fardeau de preuve initial.

 

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)d)

[23]      L’Opposante fait valoir que, eu égard à l’article 2, la Marque de la Requérante n’est pas distinctive de la Requérante pas plus qu’elle n’est adaptée à distinguer les Marchandises de la Requérante de celles de l’Opposante au Canada.

 

[24]      Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’à la date de production de l’opposition, sa marque était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé [Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la page 58 (C.F. 1re inst.)]. Il n’est pas nécessaire de démontrer que la marque de l’Opposante est bien connue au Canada au sens de l’article 5. La preuve de l’Opposante lui permet de s’acquitter de ce fardeau initial.

 

[25]      Une marque n’est pas adaptée à distinguer les marchandises d’un requérant si, au moment où sont engagées les procédures d’opposition, elle est déjà connue comme la marque de quelqu’un d’autre en liaison avec des marchandises semblables [Andres Wines Ltd. c. E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.)]. C’est clairement le cas en l’espèce. Les marques des parties sont identiques, leurs marchandises sont identiques ou semblables, et seule la marque de l’Opposante avait acquis une certaine réputation à la date pertinente.

 

[26]      Le motif d’opposition relatif au caractère distinctif est donc retenu.

 

Décision

[27]      Exerçant les pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

 

 

 

FAIT À TORONTO (ONTARIO), LE 5 NOVEMBRE 2009.

 

 

 

Jill W. Bradbury

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

Traduction certifiée conforme

Diane Provencher, LL.B.

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