Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2013 COMC 165

Date de la décision : 2013-10-01
TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45 engagée à la demande de la Compagnie de la Baie d’Hudson, visant l’enregistrement no LMC522655 de la marque de commerce BAYWATCH au nom de The Baywatch Production Company

[1]               Le 22 mars 2011, à la demande de la Compagnie de la Baie d’Hudson (la Partie requérante), le Registraire a envoyé un avis aux termes de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce (L.R.C. [1985], ch. T -13) (la Loi) à The Baywatch Production Company (le Propriétaire), le propriétaire inscrit de l’enregistrement LMC522655 pour la marque de commerce BAYWATCH (la Marque).

[2]               La Marque est enregistrée en vue de son emploi en liaison avec les marchandises et services suivants :

Marchandises [TRADUCTION] : lotion après-rasage, eau de Cologne, parfum; assainisseur d’air; bulletins pour le fan-club; bandes dessinées; livres pour enfants; cartes postales; livres d’images éducatifs; autocollants; stylos-bille, cartables, livres d’exercices, livres d’images, carnets de notes, collection de livres (fiction et non-fiction), étuis à crayons, autocollants pour parechoc, calendriers, cartes à échanger; stylos, boîtes à crayons; calendrier quotidien, journaux intimes, taille-crayons, affiches, articles de papeterie pour lettres et correspondance écrite; sacs de sport, sacs de sport polyvalents, sacs de gymnastique, sacs de plage, sacs à dos, sacs de randonnée, sacs banane; porte-clés en métal, en matériaux non métalliques et en plastique; boutons ornementaux; serviettes; vêtements, nommément tabliers, souliers de sport, chaussures nommément souliers, bottes, pantoufles, baskets, sandales; bandeaux, bandeaux à transpiration, bandes élastiques pour poignets, bonnets de douche, maillots de bain, vêtements de plage et sortie de bain, bikinis, ceintures, bermudas, blazers, blouses, manteaux, gants, shorts de sport, manteaux de cuir, vestons, parkas, vêtements d’hiver, polos, ponchos, chandails, imperméables, chemises, jupes, pantalons, survêtements, nommément pantalons en molleton, chandail en molleton, shorts en molleton, pull-overs, chandail à manches courtes, débardeurs, chandails, combinaison humide, vestons, jeans, costumes et ensembles de course, vêtements de réchauffement, ensembles de course, survêtements, combinaisons, justaucorps, bas de réchauffement, ensemble de ski, pantalons de ski, dossards de ski, manteaux de ski, ensembles, pantalons, shorts, chandails, manteaux, manteaux de sport, chandails de sport, tricots, vestes, combinaisons pour femmes, par-dessus, coupe-vent, couvre-chefs, nommément chapeaux visières, capuches, cache-oreilles, bérets; accessoires pour le cou, nommément cravates, tours de cou, foulards; tenues de nuit nommément robes de nuit, robes, pyjamas, vêtements de nuit; vêtements imperméables nommément gants, mitaines, caoutchoucs; lingerie, petites culottes, sous-vêtements, sous-vêtements longs, caleçons, sous-vêtements, shorts boxeurs, maillots de corps, bretelles, bonneterie, chaussettes; jouets de bain gonflables; jouets à chevaucher gonflables; poupées, poupées remplies de grains, poupées de chiffon, poupées souples, accessoires pour poupées et ensembles, notamment valises pour poupées, vêtements de poupée, maisons de poupées et meubles, costumes de poupée; véhicules-jouets motorisés à commandes électroniques; camions-jouets; piscines gonflables pour fins récréatives; produits alimentaires pour collations, nommément bonbons.

Services [TRADUCTION] : divertissement sous la forme d’une série télévisée dans le domaine de l’action-aventure.

[3]               Selon l’article 45 de la Loi, le propriétaire inscrit de la marque de commerce doit, à l’égard de chacune des marchandises et de chacun des services énumérés dans l’enregistrement, indiquer si la marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l’avis, et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période au cours de laquelle l’emploi doit être établi s’étend du 22 mars 2008 au 22 mars 2011.

[4]               Les définitions pertinentes du terme « emploi » sont énoncées ainsi aux paragr. 4(1) et 4(2) de la Loi :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des marchandises si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces marchandises, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les marchandises mêmes ou sur les colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux marchandises à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[5]               Il est bien établi que, dans le contexte de la procédure prévue à l’article 45, de simples affirmations d’emploi ne suffisent pas à prouver qu’il y a eu emploi [Plough (Canada) Ltd c. Aerosol Fillers Inc (1980), 53 C.P.R. (2d) 62 (CAF)]. Même si, dans une telle instance, le seuil pour établir l’emploi d’une marque est relativement peu exigeant [Woods Canada Ltd c. Lang Michener (1996), 71 C.P.R. (3d) 477 (C.F. 1re inst.)] et qu’il n’est pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 C.P.R. (2d) 56 (C.F. 1re inst.), le propriétaire doit présenter des faits suffisants pour que le Registraire puisse conclure à l’emploi de la marque de commerce au cours de la période pertinente en liaison avec chacune des marchandises et chacun des services énumérés dans l’enregistrement.

[6]               En réponse à l’avis du Registraire, le Propriétaire a déposé l’affidavit d’Amanda Chacon, secrétaire générale du Propriétaire, fait sous serment le 24 octobre 2011. Seul le Propriétaire a produit un plaidoyer écrit; il n’y a pas eu d’audience orale.

Preuve d’utilisation en liaison avec les marchandises

[7]               Dans son affidavit, Mme Chacon résume les antécédents commerciaux du Propriétaire et explique qu’elle [TRADUCTION] « travaille activement aux activités commerciales connexes à la populaire émission télévisée BAYWATCH depuis 1995 ». Elle confirme que le Propriétaire a conclu un [TRADUCTION] « accord de représentation pour le marchandisage » avec son seul actionnaire, FremantleMedia North America (Fremantle); aux termes de cet accord, Fremantle a reçu le droit exclusif d’accorder à des titulaires de licences l’autorisation de produire, d’utiliser et de vendre des produits portant la Marque au Canada et aux États-Unis. Elle affirme par ailleurs que l’American Greetings Corporation (AGC) a obtenu une licence de Fremantle pour utiliser la Marque en liaison avec divers produits vendus au Canada. Cette entente prévoit notamment le droit d’utiliser la Marque en liaison avec des cartes de souhaits, lesquelles correspondent selon elle aux marchandises enregistrées [TRADUCTION] « articles de papeterie pour lettres et correspondance écrite ».

[8]               À cet égard, la preuve 5 jointe à l’affidavit de Mme Chacon est constituée de copies représentatives des cartes de souhaits vendues au Canada en 2010. Je constate que la Marque figure au dos des cartes et que ces cartes mentionnent qu’elle appartient au Propriétaire. Comme preuve de vente au Canada durant la période pertinente, Mme Chacon a fourni des copies de rapports partiels sur les redevances produits par AGC pour le quatrième trimestre de 2010 et le premier trimestre de 2011; ces rapports, selon elle, prouvent la vente de cartes de souhaits arborant la Marque.

[9]               Selon l’information qui m’a été présentée, je suis convaincu que le Propriétaire a prouvé l’emploi de la Marque en liaison avec les marchandises « articles de papeterie pour lettres et correspondance écrite », au sens des articles 4 et 45 de la Loi.

[10]           En ce qui a trait aux autres marchandises, le Propriétaire n’a déposé aucune preuve quant à l’emploi de la Marque et n’a pas soumis d’explication relevant des circonstances particulières qui justifieraient ce défaut d’emploi. L’enregistrement sera modifié en conséquence.

Circonstances particulières pour le défaut d’emploi des services

[11]           En ce qui a trait aux services, aucune preuve d’emploi durant la période visée n’a été déposée. Toutefois, le Propriétaire a allégué qu’il y avait des circonstances particulières justifiant ce défaut d’emploi.

[12]           En général, les circonstances particulières qui justifient un défaut d’emploi sont des « circonstances de nature inhabituelle, peu courantes et exceptionnelles » [voir John Labatt Ltd c Cotton Club Bottling Co (1976), 25 C.P.R. (2d) 115 (C.F. 1re inst.)]. L’examen pour déterminer s’il y a des circonstances spéciales qui justifient le défaut d’emploi nécessite la prise en considération de trois critères : le premier est la durée pendant laquelle la marque n’a pas été employée, le deuxième est de savoir si le défaut d’emploi était attribuable à des circonstances indépendantes de la volonté du propriétaire inscrit et le troisième est de savoir s’il existe une intention sérieuse de reprendre dans un bref délai l’emploi de la marque [selon l’arrêt Registraire des marques de commerce c Harris Knitting Mills Ltd (1985), 4 C.P.R. (3d) 488 (CAF)].

[13]           La Cour d’appel fédérale a éclairci l’interprétation du deuxième critère en indiquant qu’il doit être rempli pour que l’on puisse conclure à l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi d’une marque. [Smart & Biggar c Scott Paper Ltd (2008), 65 C.P.R. (4th) 303 (CAF)]. En d’autres mots, les deux autres facteurs sont pertinents, certes, mais ne sauraient à eux seuls constituer des circonstances spéciales. Finalement, l’intention de reprendre l’emploi doit être étayée par la preuve [voir Arrowhead Spring Water Ltd c Arrowhead Water Corp (1993), 47 C.P.R. (3d) 217 (C.F. 1re inst.); NTD Apparel Inc c Ryan (2003), 27 C.P.R. (4th) 73 (C.F. 1re inst.)].

Période de défaut d’emploi

[14]           Mme Chacon confirme que l’émission BAYWATCH a été diffusée au Canada et aux États-Unis de 1989 à 2001, et qu’elle a été, par la suite, souscrite et rediffusée dans 148 pays partout sur la planète. En ce qui a trait au Canada, elle souligne que l’émission a été diffusée pour la dernière fois, avec l’autorisation du Propriétaire, à un moment en 2007, alors que les reprises étaient diffusées sur le canal « Drive-In Classics ». Je constate que bien que l’affidavit contienne des énoncés contradictoires au sujet de la date précise du dernier emploi de la Marque (c.-à-d. le 31 mai 2007 au paragraphe 26, puis le 31 décembre 2007 au paragraphe 36), la période de défaut d’emploi avant l’envoi de l’avis aux termes de l’article 45 était d’environ 4 ans.

Raisons du défaut d’emploi

[15]           Pour ce qui est de la question à savoir si les raisons de défaut d’emploi étaient indépendantes de la volonté du propriétaire enregistré, Mme Chacon allègue que [TRADUCTION] « Au cours des quatre dernières années, [le Propriétaire a] activement cherché des sociétés de télédiffusion pour diffuser BAYWATCH au Canada. Toutefois, dans chaque cas, les négociations n’ont pas abouti à un accord définitif, pour une raison ou pour une autre. » Elle explique que [TRADUCTION] « C’est un lieu commun que la diffusion de séries télévisées est de nature cyclique. Il est normal qu’une série soit inactive pendant plusieurs années, sans qu’elle ne soit pour autant abandonnée, avant que la rediffusion ne soit lancée. » 

[16]           J’aimerais souligner que l’affirmation vague de Mme Chacon au sujet de l’échec des négociations avec de possibles titulaires de licence « pour une raison ou pour une autre » ne me permet pas de déterminer si ces raisons sont ou non indépendantes de la volonté du Propriétaire. Ainsi, il semble que la raison du défaut d’emploi était l’incapacité du Propriétaire à trouver une société de diffusion en raison de la « nature cyclique » de l’industrie. 

[17]           Nonobstant l’absence de preuve devant moi pour étayer cette affirmation simpliste sur l’industrie de la télédiffusion, même si je croyais sur parole ce que dit Mme Chacon, ces circonstances ne sont pas, par définition, « de nature inhabituelle, peu courantes et exceptionnelles » dans le secteur du Propriétaire [selon l’arrêt John Labatt, supra; consulter également CPI-Centre de Propriété Intellectuelle/IPC-Intellectual Property Centre c Nada Fashion Designs Inc (2010), 86 C.P.R. (4th) 310 (COMC)].

[18]           Néanmoins, le Propriétaire souligne que la Cour fédérale a tranché que la nature cyclique d’une industrie peut être une circonstance indépendante de la volonté du propriétaire [selon l’arrêt McFadden, Fincham, Marcus & Allen c Canada (Registraire des marques de commerce) (1990), 34 C.P.R. (3d) 70 (C.F. 1re inst.)]. Toutefois, même si la [TRADUCTION] « nature cyclique de l’industrie de la mode » était bien citée dans McFadden, ce n’était pas la seule raison justifiant le défaut d’emploi dans cette cause, on comptait également des difficultés découlant de la démission d’employés clés et [TRADUCTION] « une décision commerciale sensée de prendre le temps nécessaire pour bien élaborer » la gamme de produits. Il difficile de cerner laquelle des raisons a guidé la décision, si une d’entre elles était bien le facteur principal; il en ressort toutefois que la nature cyclique de l’industrie n’était pas le seul facteur examiné.

[19]           En outre, je constate que les conditions peu favorables ou mauvaises du marché ne sont généralement pas perçues comme des circonstances particulières justifiant le défaut d’emploi [voir Harris Knitting, supra; Rogers, Bereskin & Parr c Registraire des marques de commerce (1987), 17 C.P.R. (3d) 197 (C.F. 1re inst.); Lander Co Canada Ltd c Alex E Macrae & Co (1993), 46 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.)]. De même, dans les cas où le propriétaire n’a pas l’intention d’abandonner sa marque au Canada, mais n’a pas obtenu de commandes de clients canadiens durant la période pertinente, cette incapacité n’était pas, en soi, suffisante pour maintenir l’enregistrement [voir Garrett c Langguth Cosmetic GMBH (1991), 39 C.P.R. (3d) 572 (COMC)]. 

[20]           Dans le présent cas, le Propriétaire fait de simples allégations, mais ne fournit pas de détails quant à la nature cyclique de l’industrie de la télédiffusion ni de preuves claires et précises à l’égard de l’incidence de cette nature sur sa capacité à utiliser la Marque en liaison avec les services. Bien que je comprenne que le Propriétaire hésite à déposer comme preuve des informations précises sur ses efforts de négociation, il m’est impossible de conclure si les raisons du défaut d’emploi de la Marque durant la période pertinente étaient réellement indépendantes de la volonté du Propriétaire.

Intention réelle de reprendre l’emploi

[21]           De même, à l’égard du troisième critère, il est impossible de conclure combien de temps ce défaut d’emploi se prolongera. Comme je l’ai mentionné plus haut, Mme Chacon allègue que les titulaires de licences du Propriétaire ont activement cherché de nouvelles sociétés de télédiffusion pour diffuser la série BAYWATCH au Canada. Pour étayer ses dires, elle a déposé, comme preuves 12 à 16, des copies d’extraits de correspondance électronique portant diverses dates entre 2007 et 2011. Mme Chacon affirme que les courriels « résument » ou « soulignent » les discussions qui ont eu lieu entre le porteur de licence du Propriétaire, Media Group International (MGI), et diverses sociétés de diffusion canadiennes au sujet de la diffusion de BAYWATCH au Canada. Même si les preuves ont été lourdement censurées, la plupart des courriels échangés entre MGI et Fremantle semblent être des mises à jour pour le projet.

[22]           En se basant sur l’arrêt Ridout & Maybee c Sealy Canada Ltd (1999), 87 C.P.R. (3d) 307 (C.F. 1re inst.), le Propriétaire affirme qu’il serait incohérent avec l’intention de la Loi de retirer une marque de commerce alors qu’il y a une possibilité raisonnable qu’elle soit utilisée. Dans un tel cas, le Propriétaire affirme que, compte tenu de la nature cyclique de l’industrie et de ses efforts de négociation continus, la série [TRADUCTION] « sera fort certainement rediffusée au Canada ». Toutefois, comme les courriels soumis en preuve sont sérieusement caviardés, ils sont peu utiles pour déterminer la nature des « négociations actives » du Propriétaire avec des sociétés de diffusion qui pourraient être intéressées au produit. Comme je le souligne plus haut, Mme Chacon n’a donné aucun renseignement ou indice quant au moment où la Marque pourrait être utilisée à nouveau au Canada.

[23]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincu que le Propriétaire a prouvé des circonstances particulières justifiant le défaut d’emploi de la Marque durant la période pertinente. 

Règlement

[24]           Par conséquent, en vertu des pouvoirs qui me sont conférés aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions prévues à l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera modifié afin d’effacer l’énoncé des services et de retirer toutes les marchandises à l’exception de « articles de papeterie pour lettres et correspondance écrite ».

[25]           L’énoncé des marchandises modifié se lira comme suit : « articles de papeterie pour lettres et correspondance écrite ».

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Andrew Bene

Agent d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Catherine Dussault, trad. a.

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