Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 46

Date de la décision : 2016-03-22

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L'AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L'ARTICLE 45

 

 

Blake, Cassels & Graydon LLP

Partie requérante

et

 

Commercial Pro, Inc.

Propriétaire inscrite

 

 

 

 

LMC721,681 pour la marque de commerce TELL THEM YOU MEAN BUSINESS

Enregistrement

[1]               Cette décision se rapporte à une procédure de radiation sommaire concernant l'enregistrement no LMC721,681 de la marque de commerce TELL THEM YOU MEAN BUSINESS, appartenant à Commercial Pro, Inc.

[2]               La marque de commerce TELL THEM YOU MEAN BUSINESS (la Marque) est enregistrée pour emploi en liaison avec des [Traduction] « services juridiques » (les Services).

[3]               Pour les raisons exposées ci-après, je conclus qu'il y a lieu de radier l'enregistrement.

La procédure

[4]               Le 7 mars 2014, le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Commercial Pro, Inc. (la Propriétaire). L'avis a été donné à la demande de Blake, Cassels & Graydon LLP (la Partie requérante).

[5]               L'avis exigeait de la Propriétaire qu'elle fournisse une preuve démontrant qu'elle avait employé la Marque au Canada à un moment quelconque entre le 7 mars 2011 et le 7 mars 2014 (la Période pertinente) en liaison avec les Services. Si la Marque n'avait pas fait l'objet d'un tel emploi, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[6]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères permettant d'établir l'emploi sont peu exigeants et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve. Cependant, il n'en faut pas moins présenter une preuve suffisante pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits ou des services spécifiés dans l'enregistrement [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004) CF 448, 31 CPR (4th) 270]. Comme le fardeau de preuve repose entièrement sur la Propriétaire, toute ambiguïté dans la preuve doit être interprétée contre elle [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184, 90 CPR (4th) 428 au para 16]. En outre, de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF) (Plough)].

[7]               La définition d'emploi en liaison avec des services est énoncée à l'article 4(2) de la Loi, qui prévoit qu'une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services. L'affichage de la marque de commerce dans l’annonce des services est suffisant pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2) de la Loi, du moment que le propriétaire de la marque de commerce offre et est prêt à fournir ces services au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[8]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit d'Edward Olender, daté du 6 octobre 2014 et accompagné des pièces A‑1 à A‑5.

[9]               Seule la Partie requérante a produit des représentations écrites.

[10]           Les deux parties étaient représentées à l'audience qui a été tenue.

La preuve de la Propriétaire

[11]           Dans son affidavit, M. Olender affirme que, depuis le 8 novembre 2011, il est le président de la Propriétaire, une société des États-Unis [para 1].

[12]           M. Olender affirme que, étant donné son titre, ses fonctions et son poste au sein de la société qu'est la Propriétaire, il est généralement au courant de ses activités; il est aussi au fait, ayant accès à tous les documents et renseignements pertinents, des circonstances entourant l'emploi de la Marque [para 2].

[13]           M. Olender explique que, ce qu'il veut dire dans son affidavit lorsqu'il indique que la Marque a été employée au Canada pendant la Période pertinente, c'est que la Marque [Traduction] « a été employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce des Services au Canada » [para 4].

[14]           Au paragraphe 6 de son affidavit, M. Olender affirme que la Propriétaire a employé la Marque au Canada, pendant la Période pertinente, en liaison avec les Services par l'entremise de divers cabinets d'avocats, sous-licenciés de la Propriétaire. Il affirme que la Propriétaire octroie des licences d'emploi de la Marque à Market‑Masters Legal, A Resonance Company, Inc. (Market‑Masters), qui octroie à son tour des licences d'emploi de la Marque à des cabinets d'avocats. M. Olender ajoute ce qui suit :
[Traduction] « En vertu des licences qui liaient respectivement [la Propriétaire], Market‑Masters et les licenciés, [la Propriétaire] a exercé un contrôle sur la qualité des services en liaison avec lesquels la [Marque] a été employée, et ce, en tout temps pendant la Période pertinente. »

[15]           Au paragraphe 7 de son affidavit, M. Olender désigne précisément des cabinets d'avocats situés aux États-Unis comme étant des sous-licenciés de la Propriétaire qui ont tous employé la Marque en liaison avec les Services pendant la Période pertinente. Il s'agit des cabinets suivants : cabinet d'avocats de Joe Bornstein, de Bangor et de Portland, dans le Maine; Goodman Acker de Détroit, au Michigan; Marks & Harrison de Richmond, en Virginie; Keller & Keller d'Indianapolis, en Indiana; Hogan and Kiel à Wichita du Kansas; Metzger Wickersham d'Harrisburg, en Pennsylvanie; cabinet d'avocats de Mark E. Salomone de Boston, au Massachusetts; et cabinet d'avocats de Mark E. Salomone and Morelli d'Hartford, au Connecticut (collectivement « les Cabinets américains »).

[16]           À l'appui de ses affirmations quant à l'emploi de la Marque par les Cabinets américains dans la promotion et l'annonce de leurs services juridiques, M. Olender décrit les activités commerciales et promotionnelles de quelques Cabinets américains. En bref, M. Olender affirme ceci :

       le cabinet Goodman Acker, de Détroit, diffuse des annonces à la télévision au Canada par l'intermédiaire de ses stations de télévision locales et [Traduction] « reçoit des demandes de clients canadiens potentiels ». La pièce A‑1 jointe à l'affidavit est une [Traduction] « carte de rayonnement illustrant la zone de rayonnement de Détroit diffusée en Ontario » [para 7];

       le cabinet d'avocats de Joe Bornstein Bangor et de Portland [Traduction] « effectue régulièrement des envois postaux au Canada employant la [Marque] et a représenté des clients canadiens pendant la Période pertinente » [para 7];

       la Marque est employée par le cabinet d'avocats de Mark E. Salomone de Boston, dans des annonces diffusées sur les systèmes de câblodistribution au Canada par la retransmission depuis deux stations de télévision bostoniennes. La pièce A-2 jointe à l'affidavit fait référence aux stations de télévision nommées par M. Olender [para 8];

       la Marque a été employée sur les sites Web des cabinets d'avocats sous-licenciés. La pièce A‑3 jointe à l'affidavit est constituée d'extraits des sites Web de deux cabinets, lesquels ont été obtenus à partir de la base de données d'archives Internet Wayback Machine, à savoir :

o  des extraits du site Web de Keller & Keller datés du 27 mai 2011, du 12 août 2012, du 20 octobre 2013 et du 23 janvier 2014;

o  des extraits du site Web de Metzger Wickersham datés du 12 mai 2013 du 13 février 2014;

M. Olender atteste que ces pages Web [Traduction] « étaient accessibles » aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente [para 10];

       le cabinet d'avocats de Mark E. Salomone and Morelli emploie la Marque sur une publication datée du 7 mai 2013 sur sa page Facebook. La pièce A‑4 jointe à l'affidavit est un extrait de la page Facebook. M. Olender atteste que cette page [Traduction] « était accessible » aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente [para 11].

[17]           M. Olender affirme que la campagne promotionnelle relative à la Marque a fait l'objet d'une couverture médiatique. À titre d'exemple de cette couverture médiatique, il produit des copies de deux articles, l'un publié le 9 août 2010 sur le site Web www.richmondbizsense.com (d'abord publié en juillet 2008) et l'autre publié le 15 janvier 2014 sur le site Web blogpennlive.com [para 14, pièce A‑5].

[18]           Je reproduis ci-dessous les paragraphes 9, 12 et 13 de l'affidavit de M. Olender [Traduction] :

9.    Bien que les cabinets d'avocats qui ont employé la [Marque] sous licence pendant la Période pertinente soient situés aux États-Unis, les Services ont été, en tout temps, fournis ou offerts et prêts à être fournis à des consommateurs canadiens.

[...]

12.  Le Canada est actuellement un marché intéressant pour [la Propriétaire]. [La Propriétaire] poursuit activement des clients de cabinets d'avocats au Canada, y compris des clients de Toronto, en Ontario, et de Calgary, en Alberta.

13.  Parmi les cabinets d'avocats qui ont employé la [Marque], les cabinets Joe Bornstein, Mark E. Salomone and Morelli, Mark E. Salomone, Keller & Keller et Metzger Wickersham offrent des services juridiques dans les domaines des lésions corporelles et des accidents d'automobile, de motocyclette ou de camion. Ces cabinets d'avocats peuvent donc fournir lesdits services juridiques aux Canadiens qui auraient été impliqués dans des incidents nécessitant le recours à de tels services, aux États-Unis. Les cabinets d'avocats Joe Bornstein et Mark E. Salomone and Morelli ont effectivement représenté des clients au Canada, dont quelques-uns ont communiqué avec eux après avoir vu leurs annonces. Les Services liés à la [Marque] étaient offerts en tout temps aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente, sans que les consommateurs canadiens n'aient à quitter le Canada.

[19]           M. Olender conclut son affidavit en affirmant que la Propriétaire n'a pas abandonné sa Marque au Canada et qu'elle continue de l'employer [para 15].

Analyse

[20]           Les représentations de la Partie requérante peuvent être résumées comme suit :

(a)      la preuve est constituée presque entièrement de ouï-dire inadmissible et de simples affirmations non documentées ni corroborées par des faits;

(b)     la preuve ne permet pas d'établir que la Propriétaire a véritablement exercé quelque contrôle que ce soit sur les caractéristiques ou la qualité des Services au Canada;

(c)      la preuve ne permet pas d'établir que l'une quelconque des entités nommées dans l'affidavit a réellement employé la Marque au Canada pendant la Période pertinente, ou encore a fourni ou était en mesure de fournir les Services au Canada pendant la Période pertinente.

[21]           J'ai relevé trois questions découlant des représentations de la Partie requérante en l'espèce. Il s'agit des suivantes :

1.    Peut-on qualifier de preuve par ouï-dire l'affidavit de M. Olender?

2.    La preuve permet-elle d'établir que l'emploi de la Marque s'appliquait en faveur de la Propriétaire?

3.    La preuve établit-elle l'emploi de la Marque au sens de l'article 4(2) de la Loi pendant la Période pertinente?

[22]           J'examinerai tour à tour chacune de ces questions.

1.      Peut-on qualifier de preuve par ouï-dire l'affidavit de M. Olender?

[23]           Je remarque que la Partie requérante a présenté des représentations détaillées pour corroborer sa prétention selon laquelle la preuve de M. Olender concernant la licence, les sous-licenciés et l'emploi de la Marque par les Cabinets américains constitue du ouï-dire inadmissible et doit être écartée.

[24]           Afin d'analyser et de résumer efficacement les représentations de la Partie requérante, je reproduis d'abord l'extrait suivant de ses représentations écrites :

[Traduction]
21.    M. Olender indique qu'il est le président de l'Inscrivante et que, étant donné le poste qu'il occupe, il est « généralement au courant de ses activités » (voir le paragraphe 2). Il affirme qu'il « est aussi au fait, ayant accès à tous les documents et renseignements pertinents, des circonstances entourant l'emploi de la Marque ». Cependant, il n'affirme pas avoir véritablement consulté des documents ou des dossiers de l'Inscrivante au moment de préparer son affidavit. Fait encore plus important, il n'indique pas qu'il a : a) une connaissance personnelle des activités ou de l'exploitation de Market‑Masters; b) une connaissance personnelle des activités ou de l'exploitation de l'un ou l'autre des Cabinets américains; c) un accès à des documents ou à des dossiers de Market‑Masters; ou d) un accès à des documents ou à des dossiers de l'un ou l'autre des Cabinets américains. Il faut donc conclure que M. Olender n'a pas une telle connaissance personnelle des documents ni accès à ceux-ci. Cela concorde avec le fait qu'il n'a produit aucun document de Market‑Masters ou de l'un des Cabinets américains.

[25]           Compte tenu de ce qui précède, je résume comme suit les représentations de la Partie requérante expliquant pourquoi la preuve de M. Olender constitue du ouï-dire inadmissible et doit être écartée :

       une connaissance générale des activités de la Propriétaire ne suffit pas pour établir la connaissance personnelle qu'a M. Olender de la licence octroyée à Market‑Masters;

       M. Olender semble n'avoir aucune connaissance personnelle de Market‑Masters ou de l'un des Cabinets américains ni expérience à leur égard;

       M. Olander ne donne aucune explication ni justification du fait que, pour les Cabinets américains, la Propriétaire n'a pas obtenu d'affidavit auprès de personnes ayant une connaissance personnelle des faits pertinents;

       M. Olender n'explique pas pourquoi aucun fait ou document à l'appui n'a pu être fourni pour corroborer ses affirmations au sujet de la licence, des sous-licenciés et de l'emploi de la Marque au Canada par l'ensemble des Cabinets américains;

       rien ne laisse entendre que les affirmations de M. Olender sont fiables ou nécessaires. Par conséquent, aucune exception à la règle de l’irrecevabilité du ouï-dire ne peut être appliquée.

[26]           Pour sa part, à l'audience, la Propriétaire a soutenu que l'affidavit de M. Olender satisfait aux critères de fiabilité et de nécessité aux fins de la procédure prévue à l'article 45 [citant à l'appui Wishbuds Inc c Sandoz GmbH, 2013 COMC 208; et 1459243 Ontario Inc c Eva Gabor International Ltd, 2011 CF 18, 90 CPR (4th) 277 (Eva Gabor)]. À cet égard, la Propriétaire fait valoir que [Traduction] :

       il est présumé que, étant donné son titre de président de la Propriétaire, M. Olender a une connaissance personnelle des différents modes de fonctionnement de la Propriétaire;

       le critère de nécessité qui s'applique dans le cas de la procédure prévue à l'article 45 doit être interprété avec souplesse;

       le fait d'exiger des affidavits d’employés de chacun des Cabinets américains, ou de seulement quelques-uns, en plus de celui de M. Olender, assujettirait inutilement la Propriétaire à une surabondance d'éléments de preuve, ce qui ne serait pas conforme à la mission d'intérêt public de la procédure prévue à l'article 45 de la Loi, ni au faible niveau de preuve pour établir l'emploi.

[27]           Étant donné la nature du poste occupé par M. Olender, j'admets que ce dernier devrait normalement avoir une connaissance des activités de la Propriétaire et donc, de l'emploi sous licence de la Marque. De plus, la Cour fédérale a affirmé dans Eva Gabor que [Traduction] « une approche plus rigoureuse envers une preuve par ouï-dire serait adéquate au titre de l’article 57, alors qu’un processus accusatoire viserait à définir les droits des parties », mais que, étant donné la nature sommaire de la procédure visée à l'article 45, [Traduction] « toute préoccupation quant au fait que sa preuve constitue du ouïdire devrait être dirigée vers le poids de celle-ci, plutôt que son admissibilité » [Eva Gabor, aux para 12 et 18].

[28]           Somme toute, je ne suis pas d'accord avec la prétention de la Partie requérante selon laquelle la preuve produite par M. Olender doit être entièrement écartée en l'espèce. Cependant, je reviendrai plus loin sur la valeur probante de la preuve, s'il y a lieu.

2.    La preuve permet-elle d'établir que l'emploi de la Marque s'appliquait au profit de la Propriétaire?

[29]           Comme je l'ai souligné précédemment, M. Olender affirme ceci au paragraphe 6 de son affidavit : [Traduction] « En vertu des licences qui liaient respectivement [la Propriétaire], Market‑Masters et les licenciés, [la Propriétaire] a exercé un contrôle sur la qualité des services en liaison avec lesquels la [Marque] a été employée, et ce, en tout temps pendant la Période pertinente. » Je souligne au passage que je suppose que lorsqu'il fait référence aux [Traduction] « licences », M. Olender sous-entend les Cabinets américains sous-licenciés.

[30]           La Partie requérante soutient que M. Olender reprend le libellé de l'article 50 de la Loi en affirmant que la Propriétaire a exercé un contrôle sur la qualité des Services en liaison avec lesquels la Marque a été employée, et ce, en tout temps pendant la Période pertinente. Cependant, la Partie requérante souligne que M. Olender n'explique pas comment la norme de qualité est définie, communiquée, surveillée ou contrôlée. De même, la Partie requérante souligne que M. Olender ne fournit pas d'extrait d'une seule sous-licence. Par conséquent, citant Ricard c Molson Canada 2005, 2007 CanLII 80989, 60 CPR (4th) 338 (COMC), à la p 349, la Partie requérante soutient qu'en l'absence de documents ou de faits à l'appui, les affirmations de M. Olender relativement au contrôle qu'exerçaient les licenciés ne suffisent pas pour établir le contrôle qu'exerçait la Propriétaire sur les caractéristiques ou la qualité des Services.

[31]           À l'audience, j'ai fait remarquer à la Partie requérante que dans Ricard, supra, une décision que j'ai rendue au nom du registraire, il est question d'une procédure d'opposition et non d'une procédure prévue à l'article 45. Quoi qu'il en soit, une simple lecture de cette décision révèle que ma décision relative à l'insuffisance des affirmations du déposant dans cette affaire tenait compte du contre-interrogatoire du déposant. Autrement dit, l'affaire Ricard se distingue de la présente espèce.

[32]           Pour sa part, la Propriétaire soutient qu'il est bien établi qu'il n'est pas obligatoire de produire une copie d'un accord de licence dans une procédure prévue à l'article 45; il est possible d'établir le contrôle requis au titre de l'article 50(1) de la Loi, comme c'est le cas en l'espèce, en attestant clairement le fait que le propriétaire de la marque de commerce exerce le contrôle requis [citant, entre autres, Mantha & Associés/Associates c Central Transport Inc (1995), 64 CPR (3d) 354 (CAF); et Empresa Cubana Del Tabaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, 91 CPR (4th) 248, conf par 2011 CAF 340 (Empresa Cubana)].

[33]           Comme l'a indiqué la Cour fédérale dans Empresa Cubana, au paragraphe 84, le propriétaire d'une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu'il exerce le contrôle exigé par l'article 50(1) de la Loi : premièrement, attester clairement qu'il exerce le contrôle exigé; deuxièmement, produire une preuve démontrant qu'il exerce le contrôle exigé; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit le contrôle exigé. En l'espèce, la Propriétaire s'est prévalue de la première méthode avec succès.

[34]           Par conséquent, je conclus que la preuve suffit pour établir que tout emploi démontré de la Marque par les Cabinets américains en liaison avec les Services pendant la Période pertinente constituait un emploi sous licence qui s'appliquait au profit de la Propriétaire suivant l'article 50 de la Loi.

3.      La preuve établit-elle l'emploi de la Marque au sens de l'article 4(2) de la Loi pendant la Période pertinente?

[35]           Les représentations de la Partie requérante relativement à cette question comportent deux volets :

                                        (i)          la preuve ne démontre pas que l'un ou l'autre des Cabinets américains a employé ou montré la Marque dans l'exécution ou l'annonce des Services au Canada;

                                      (ii)          la preuve n'est pas suffisante pour établir que les Cabinets américains ont fourni ou étaient prêts à fournir les Services au Canada.

[36]           J'amorce ma discussion sur cette question en soulignant que je suis d'accord avec les représentations de la Partie requérante, selon lesquelles les affirmations de M. Olender portant que le Canada est un marché important pour la Propriétaire et que celle-ci poursuit activement des cabinets d'avocats au Canada, ne sont d'aucune utilité à la Propriétaire en l'espèce [para 12 de l'affidavit Olender]. Au contraire, ces affirmations mènent à la conclusion que les Services n'ont pas été fournis ou n'étaient pas offerts et prêts à être fournis au Canada.

[37]           Je poursuis ma discussion sur cette question par un examen du premier volet des représentations de la Partie requérante.

(i)       Aucun emploi de la Marque par l'un ou l'autre des Cabinets américains dans l'exécution ou l'annonce des Services

[38]           Selon les représentations orales de la Propriétaire, je comprends que la Propriétaire ne conteste pas le fait que sa preuve n'établit pas l'emploi ou l'affichage de la Marque par les Cabinets américains dans l'exécution des Services. En fait, une simple lecture de l'affidavit révèle que M. Olender ne mentionne que l'emploi de la Marque dans la promotion et l'annonce des Services par les Cabinets américains. Cependant, la Propriétaire soutient qu'elle a fourni une preuve suffisante pour me permettre de conclure à l'emploi de la Marque dans l'annonce des Services au Canada pendant la Période pertinente par les Cabinets américains.

[39]           À l'audience, j'ai expressément informé la Propriétaire de quelques-unes de mes préoccupations concernant sa preuve. En conséquence, la Propriétaire a ultimement reconnu qu'elle n'avait pas fourni de preuve montrant la Marque employée ou affichée dans de la documentation qui aurait été postée au Canada. Par exemple, bien qu'ils soient mentionnés au paragraphe 7 de l'affidavit, les [Traduction] « envois postaux » expédiés par le cabinet d'avocats de Joe Bornstein n'ont pas été produits en preuve. Par conséquent, je ne peux pas conclure que la Marque était visible sur de telles annonces.

[40]           Dans le même ordre d'idées, la Propriétaire a reconnu qu'elle n'a fourni aucune preuve montrant la Marque employée ou affichée dans une annonce télédiffusée de Goodman Acker et du cabinet d'avocats de Mark E. Salomone [para 7 et 8 de l'affidavit Olender]. Par conséquent, je ne peux pas conclure que la Marque est visible dans de telles annonces. Il ne m'est donc pas nécessaire de déterminer la valeur probante des pièces A‑1 et A‑2, qui sont censées démontrer la zone de rayonnement ou la diffusion au Canada des annonces télédiffusées alléguées.

[41]           En ce qui concerne les articles sur la [Traduction] « couverture médiatique » fournis en pièce A‑5, à l'audience, j'ai mentionné à la Propriétaire que je ne voyais pas en quoi cette preuve pouvait être utile en l'espèce. En effet, mise à part la question de savoir si ces articles ont été lus par des consommateurs canadiens, je suis d'avis que la couverture médiatique par des tiers ne constitue pas une forme d'annonce. [Voir, par analogie, Williams Companies Inc c William Tel Ltd (1999), 4 CPR (4th) 253 (COMC), décision dans laquelle il a été déterminé que les références aux marques de commerce dans les articles de journaux ne constituent pas une forme d'annonce.]

[42]           Selon ce que je comprends de ses représentations orales, la Propriétaire a produit la pièce A‑5 comme preuve pour corroborer les affirmations de M. Olender au sujet de l'exécution des Services par les Cabinets américains pendant la Période pertinente. À cet égard, la Propriétaire a souligné que l'article publié sur le site Web www.richmondbizsense.com fait référence aux cabinets Marks & Harrison, Keller & Keller, Hogan and Kiel et au cabinet d'avocats de Mark E. Salomone, alors que l'article publié sur le site Web blogpennlive.com fait référence au cabinet Metzger Wickersham. Néanmoins, je ne considère pas que cette preuve est utile à la Propriétaire. Même si je déduisais que chacun des Cabinets américains cités dans les articles était en exploitation aux dates auxquelles les articles ont été publiés, ces articles ne font aucunement référence à des activités au Canada de l'un ou l'autre de ces Cabinets américains. Par conséquent, je ne discuterai pas davantage de la pièce A‑5 dans mon examen du deuxième volet des représentations de la Partie requérante ci-dessous.

[43]           Je me penche maintenant sur les pièces A‑3 et A‑4, produites en preuve pour établir l'affichage de la Marque dans l'annonce des Services au Canada pendant la Période pertinente.

[44]           Je commence par la pièce A‑4, décrite comme un extrait de la page Facebook du cabinet d'avocats de Mark E. Salomone and Morelli [para 11 de l'affidavit Olender].

[45]           La Partie requérante soutient que ni la pièce A‑4 ni les affirmations de M. Olender qui s'y rapportent n'indiquent que des activités ont eu lieu pendant la Période pertinente. À titre subsidiaire, la Partie requérante soutient que la preuve n'est d'aucune valeur puisque la Propriétaire n'a pas produit de preuve démontrant que la page Facebook a été consultée par des consommateurs canadiens pendant la Période pertinente.

[46]           La Propriétaire prétend que les affirmations de M. Olender sont suffisantes pour permettre au registraire d'accepter la page Facebook comme preuve établissant que le cabinet d'avocats de Mark E. Salomone and Morelli a employé la Marque dans l'annonce des Services au Canada pendant la Période pertinente. La Propriétaire souligne que M. Olender affirme que le cabinet [Traduction] « emploie » la Marque [Traduction] « dans une publication datée du 7 mai 2013 » et que la page Facebook était accessible aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente.

[47]           En outre, la Propriétaire conteste le fait qu'elle était tenue de produire une preuve établissant que la page Facebook avait été consultée par des consommateurs canadiens pendant la Période pertinente. Je n'ai pas besoin d'aborder ce débat entre les parties pour conclure que la pièce A‑4 n'est d'aucune utilité à la Propriétaire en l'espèce.

[48]           En effet, on ne sait pas si la « publication » fait référence à l'unique élément visible sur la page Facebook produite en pièce, à savoir la photo de couverture arborant la Marque. Cependant, cette photo n'est pas datée. De plus, on ne voit aucune publication sur la page Facebook produite en pièce, encore moins une publication datée du 7 mai 2013. Aussi, bien qu'il ne s'agisse pas d'un élément déterminant, la Partie requérante a souligné à juste titre que l'on peut voir sur la page Web produite en pièce un avis de droit d'auteur daté de 2014 [« Facebook © 2014 ‑ Francais (France) »].

[49]           Somme toute, que la page Facebook constitue ou non une annonce au Canada, je suis d'avis que le mieux que l'on puisse inférer de cette preuve est que la page Facebook existait lorsqu'elle a été imprimée le 30 septembre 2014, date qui est ultérieure à la Période pertinente.

[50]           Je me penche maintenant sur la pièce A‑3, qui est constituée d'extraits des sites Web des cabinets Keller & Keller et Metsger Wickersham, qui ont été obtenus à l'aide du site d'archives Wayback Machine [para 10 de l'affidavit Olender].

[51]          En ce qui concerne la fiabilité, la Propriétaire soutient que les pages Web générées au moyen du site d'archives Wayback Machine ont été jugées généralement fiables [citant, entre autres, ITV Technologies, Inc c WIC Television Ltd, 2003 CF 1056, 29 CPR (4th) 182 au para 14, conf par 2005 CAF 96, 38 CPR (4th) 481 (ITV)].

[52]           Bien que la Partie requérante reconnaisse que, dans certains cas, la preuve issue du site d'archives Wayback Machine est admissible, elle soutient que, en l'espèce, la preuve [Traduction] « n'a qu'une faible valeur probante et constitue également du ouï-dire ». À cet égard, la Partie requérante cite Bereskin & Parr c Movenpik-Holding (2008), 69 CPR (4th) 243 (COMC), affaire dans laquelle le registraire, établissant une distinction avec la décision ITV, a conclu que la preuve issue du site d'archives Wayback Machine était inadmissible parce qu'elle ne satisfaisait pas aux critères de fiabilité et de nécessité. Il est important de souligner que la décision citée par la Partie requérante est antérieure à l'affaire Eva Gabor. Comme je l'ai mentionné précédemment, la Cour fédérale a conclu dans cette affaire que, étant donné la nature sommaire de la procédure prévue à l'article 45, [Traduction] « toute préoccupation quant au fait que sa preuve constitue du ouïdire devrait être dirigée vers le poids de celle-ci, plutôt que son admissibilité » [Eva Gabor, au para 18].

[53]           En l'espèce, j'admets que la pièce A‑3 a une valeur probante à titre de preuve établissant l'affichage de la Marque sur les sites Web de Keller & Keller et de Metzger Wickersham (collectivement les Sites Web) à des dates s'inscrivant dans la Période pertinente. Ainsi, je traiterai du débat entre les parties relativement à l'exigence de fournir une preuve établissant que les consommateurs canadiens ont consulté les Sites Web pendant la Période pertinente.

[54]           La Partie requérante prétend que, comme la Propriétaire n'a pas produit de preuve établissant que des consommateurs canadiens ont accédé aux Sites Web pendant la Période pertinente, la preuve issue du site d'archives Wayback Machine n'est pas suffisante pour établir l'affichage de la Marque dans l'annonce des Services au Canada [citant Candrug Health Solutions Inc c Thorkelson, 2007 CF 411, 60 CPR (4th) 35, au para 21 (Candrug); inf pour d'autres motifs 2008 CAF 100, 64 CPR (4th) 431].

[55]           La Propriétaire conteste la prétention de la Partie requérante. D'abord, elle soutient que l'affaire Candrug se distingue de l'espèce, parce que : a) cette affaire concerne une procédure d'annulation contradictoire prévue à l'article 57 de la Loi et non une procédure prévue à l'article 45; et b) la preuve issue du site d'archives Wayback Machine produite dans l'affaire Candrug devait servir à démontrer un emploi considérable de marques de commerce de tiers au Canada. Ensuite, la Propriétaire soutient que tout ce qu'elle doit prouver est que les Sites Web pouvaient être consultés au Canada pendant la Période pertinente; l'affirmation de M. Olender portant que ces pages Web [Traduction] « étaient accessibles » aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente fournit la preuve requise. À cet égard, la Propriétaire s'appuie sur la décision HomeAway.com Inc c Hrdlicka, 2012 CF 1467, 2012 CarswellNat 5339 (HomeAway), dans laquelle la Cour fédérale a déclaré ceci [Traduction] :

[22] [...] une marque de commerce qui figure sur le site Web d'un écran d’un ordinateur au Canada constitue, pour l’application de la Loi sur les marques de commerce, un emploi et une annonce faits au Canada, et ce, indépendamment de la provenance des renseignements ou du lieu où ils sont stockés.

[56]           Cette conclusion de la Cour a été abordée dans McMillan LLP c SportsLine.com, Inc, 2014 COMC 51, 124 CPR (4th) 226, affaire dans laquelle le registraire formule les commentaires suivants [Traduction] :

[11] [...] Dans [HomeAway], la Cour s'est penchée sur la question de savoir si l'affichage d'une marque de commerce (ou d'autres renseignements) par l'intermédiaire d'un écran d'ordinateur situé au Canada doit être considéré comme un affichage d'une marque de commerce au Canada, même si les données sont stockées sur ou proviennent d'un serveur situé à l'extérieur du Canada. La Cour a, à juste titre, conclu que oui; toutefois, la question de savoir si un tel affichage constitue un emploi de cette marque de commerce par son propriétaire inscrit en liaison avec les services particuliers visés par l'enregistrement au cours d'une période pertinente ou autrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi, n’en doit pas moins être tranchée sur la base des faits particuliers de l'espèce [...].

[57]           En l'espèce, même si je déduis que des personnes ont vu la Marque sur les Sites Web affichés à l'écran d'ordinateur au Canada pendant la Période pertinente, la question demeure celle de savoir si la preuve établit que les Cabinets américains ont fourni les Services au Canada ou ont offerts et étaient prêts à fournir les Services aux consommateurs au Canada, pendant la Période pertinente.

[58]           Par conséquent, je conclus ma discussion sur cette question par un examen du deuxième volet des représentations de la Partie requérante.

(ii)     Preuve insuffisante pour établir que les Cabinets américains ont fourni ou étaient prêts à fournir les Services au Canada.

[59]           La Partie requérante reconnaît que, dans certains cas, des cabinets d'avocats à l'étranger peuvent offrir et fournir des services juridiques à des consommateurs au Canada, sans que les consommateurs canadiens n'aient à quitter le pays [voir Norman M. Cameron Law Corporation c CMS Cameron McKenna LLP, 2009 CanLII 82159 (COMC) (Norman M. Cameron); et McCarthy Tetrault c Lawyers Without Borders Inc, 2010 COMC 169; 87 CPR (4th) 437 (Lawyers Without Borders)]. Toutefois, je suis d'accord avec la prétention de la Partie requérante selon laquelle ce n'est pas le cas en l'espèce.

[60]           En effet, pour les raisons qui suivent, j'estime que la preuve fournie par M. Olender au sujet de l'exécution ou de l'offre des Services au Canada par les Cabinets américains n'a que peu de valeur, voire aucune, en l'espèce.

[61]           En premier lieu, je partage les préoccupations de la Partie requérante concernant la fiabilité des simples affirmations de M. Olender portant que les Cabinets américains ont fourni ou offert et étaient prêts à fournir les Services au Canada pendant la Période pertinente.

[62]           Même si j'admets que, à titre de président de la Propriétaire, M. Olender aurait eu une connaissance générale de l'emploi sous licence de la Marque, je ne suis pas certaine de la manière dont il pourrait avoir eu une connaissance des clients des Cabinets américains. Il aurait été plutôt facile pour M. Olender d'expliquer pourquoi il est en mesure d'affirmer, au paragraphe 9 de son affidavit, que [Traduction] « bien que les cabinets d'avocat qui ont employé la [Marque] sous licence pendant la Période pertinente soient situés aux États-Unis, les Services ont été, en tout temps, fournis ou offerts et prêts à être fournis à des consommateurs canadiens » (je souligne). Quoi qu'il en soit, j'estime qu'une telle affirmation n'est rien d'autre qu'une simple affirmation d'emploi de la Marque du même type que celle qui a été jugée inacceptable dans l'affaire Plough.

[63]           En outre, non seulement est-il bien établi en droit que chaque affaire doit être tranchée en fonction des circonstances qui lui sont propres, mais je suis d'accord avec la Partie requérante pour dire que la présente espèce se distingue des affaires Norman M. Cameron et Lawyers Without Borders.

[64]           En effet, même si les faits sous-jacents en l'espèce sont semblables à ceux de l'affaire Norman M. Cameron, la preuve dans cette affaire va largement au-delà de la preuve en l'espèce. D'une part, la preuve dans Norman M. Cameron a été produite par un employé de l'entité qui a employé la marque de commerce. D'autre part, la preuve produite par le déposant pour établir l'exécution de servies juridiques et consultatifs au Canada contenait des descriptions de clients canadiens précis, les questions particulières ayant fait l'objet de services juridiques ou consultatifs fournis par l'inscrivant à ces clients et des honoraires facturés par l'inscrivant à ces clients pendant la période pertinente.

[65]           De plus, selon une interprétation raisonnable de la décision Lawyers Without Borders, il est évident que, dans cette affaire, le registraire s'est appuyé sur le site Web (qui a été démontré avoir été consulté par des Canadiens) ainsi que sur d'autres éléments de preuve, y compris, sans toutefois s'y limiter, un bulletin distribué à des abonnés au Canada. Il semble qu'il y ait eu des passages dans le bulletin et sur le site Web qui corroboraient la conclusion portant que l'inscrivant avait offert et/ou fourni des services juridiques au Canada pendant la période pertinente.

[66]           Bien qu'il ait pu être raisonnable pour le registraire de conclure dans les affaires Norman M. Cameron et Lawyers Without Borders qu'une entité étrangère avait fourni des services juridiques au Canada ou avait offert et était prête à fournir de tels services au Canada, je ne suis pas d'accord avec la Propriétaire pour dire que des faits suffisants ont été présentés en l'espèce pour que j'en arrive à la même conclusion.

[67]           En l'espèce, M. Olender ne fournit aucune documentation à l'appui de ses affirmations portant que les Cabinets américains ont fourni les Services au Canada pendant la Période pertinente.

[68]           En outre, à mon avis, l'affirmation de M. Olender selon laquelle le cabinet d'avocats de Joe Bornstein, de Bangor et de Portland, [Traduction] « ont représenté des clients canadiens pendant la Période pertinente » est ambigüe [para 7 de l'affidavit Olender]. En effet, j'estime qu'on ne sait pas clairement s'ils ont représenté « des clients canadiens » au Canada ou des « clients canadiens » aux États-Unis.

[69]           Dans le même ordre d'idées, en l'absence d'autres renseignements, l'affirmation de M. Olender portant que [Traduction] « les cabinets d'avocats Joe Bornstein et Mark E. Salomone and Morelli ont effectivement (je souligne) représenté des clients au Canada, dont quelques-uns ont communiqué avec eux après avoir vu leurs annonces » n'a que peu de valeur, voire aucune [para 13 de l'affidavit Olender]. D'une part, M. Olender ne déclare pas catégoriquement que ces cabinets ont représenté des clients au Canada pendant la Période pertinente. D'autre part, sans indication que les avocats de ces deux cabinets étaient autorisés à pratiquer le droit dans au moins une région au Canada, on ne sait pas comment ils ont pu représenter des clients devant les tribunaux canadiens. Il est possible que M. Olender ait voulu dire que ces cabinets ont représenté des Canadiens aux prises avec des problèmes juridiques aux États-Unis. Si c'est le cas, en l'absence d'autres renseignements, on ne sait pas comment les Services ont été fournis sans que les clients aient quitté le Canada.

[70]           De plus, que les extraits de Sites Web constituent on non une preuve fiable corroborant l'affirmation de M. Olender selon laquelle Keller & Keller et Metzger Wickersham offrent des services juridiques dans les domaines des lésions corporelles ainsi que des accidents d'automobile, de motocyclette ou de camion, il convient de souligner que les extraits du Site Web ne montrent aucune information propre aux Canadiens ou ciblant les Canadiens. En outre, l'affirmation de M. Olender portant que ces cabinets, et les autres cités au paragraphe 13 de son affidavit, [Traduction] « peuvent donc fournir lesdits services juridiques aux Canadiens qui auraient été impliqués dans des incidents nécessitant le recours à de tels services, aux États-Unis » s'avère ambigüe (je souligne). Au plus, j'interprète une telle affirmation comme un aveu indiquant que les services juridiques sont offerts aux États-Unis.

[71]           Enfin, je n'accorde aucun poids à l'affirmation de M. Olender selon laquelle [Traduction] « Les Services liés à la [Marque] étaient offerts en tout temps aux consommateurs canadiens pendant la Période pertinente, sans que les consommateurs canadiens n'aient à quitter le Canada » [para 13 de l'affidavit Olender]. À cet égard, je suis d'accord avec la Partie requérante pour dire qu'une telle affirmation constitue une opinion sur une question à trancher par le registraire dans le cadre de la présente procédure.

[72]           Même si les propriétaires inscrits ne devraient pas être assujettis à une « surabondance d'éléments de preuve », la preuve produite doit néanmoins avoir une valeur probante et ne pas constituer de simples affirmations d'emploi. En l'espèce, la Propriétaire aurait pu profiter d'une preuve plus exhaustive fournie par un employé qualifié de l'un des Cabinets américains sous licenciés. Même si ce n'est pas strictement nécessaire compte tenu de mon analyse de la question du ouï-dire allégué ci-dessus, une telle preuve aurait pu fournir des détails qui vont au-delà des simples affirmations faites par M. Olender et aurait pu préciser les ambiguïtés que j'ai relevées.

[73]           Somme toute, pour l'ensemble des motifs que j'ai énoncés précédemment, je conviens en fin de compte avec la Partie requérante que l'affidavit de M. Olender n'est pas suffisant pour que je conclue que les sous-licenciés de la Propriétaire ont fourni ou offert et étaient prêts à fournir les Services aux consommateurs au Canada pendant la Période pertinente.

[74]           Par conséquent, je ne suis pas convaincue que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque au Canada en liaison avec des [Traduction] « services juridiques » au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi. De plus, l'affidavit de M. Olender ne présente aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d'emploi.

Décision

[75]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l’enregistrement no LMC721,638 sera radié selon les dispositions de l'article 45 de la Loi.

______________________________

Céline Tremblay

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Sophie Ouellet, trad.a.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L’AUDIENCE : 2016-02-10

 

COMPARUTIONS

 

Thomas Gagnon-van Leeuwen                                                            POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

Anthony Prenol                                                                                   POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

AGENTS AU DOSSIER

 

ROBIC                                                                                                POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

Blake, Cassels & Graydon LLP                                                          POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

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