Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

                                                                                    Référence: 2011 COMC 171

Date de la décision : 2011-09-12

DANS L’AFFAIRE DE DEUX OPPOSITIONS produites par Rent-A-Nerd Computer Services Inc. à l’encontre des demandes d’enregistrement no  1,353,539 et 1,353,538 pour les marques de commerce RENT-A-GEEK et RENT-A-GEEK & Dessin au nom de Rent-A-Geek Computer Services Ltd.

DEMANDE NO 1,353,539

 

le dossier

[1]        Le 27 juin 2007, Rent-A-Geek Computer Services Ltd. a demandé l’enregistrement de la marque de commerce RENT-A-GEEK sur le fondement de l’emploi de cette marque au Canada depuis le 13 décembre 1998 au moins, en liaison avec les services suivants :

(1) Exploitation d’une entreprise de services informatiques, nommément installation d’ordinateurs et de logiciels, services de maintenance et de réparation, services de conseil et de dépannage, mise à niveau d’ordinateurs.

(2) Exploitation d’une entreprise de services informatiques, nommément services de diagnostic à distance comprenant l’installation, la réparation, la maintenance, la mise à jour et le dépannage, conception et administration de réseaux informatiques et analyse de systèmes de technologie de l’information, suppression de virus et protection antivirus, installation de logiciels et de matériel informatique ainsi que formation connexe, synchronisation et unification de fonctions système de même qu’optimisation d’ordinateurs et de réseaux.

 

[2]        La demande a été modifiée par la suite pour inscrire Keith Schiehl, faisant affaires sous le nom de Rent-A-Geek et de Rent-A-Geek, société de personnes, en qualité de prédécesseur en titre de la requérante.

[3]        La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans l’édition du Journal des marques de commerce du 6 février 2008. Rent-A-Nerd Computer Services Inc. a produit son opposition le 3 avril 2008

[4]        Le 6 mai 2008, le registraire a transmis une copie de la déclaration d’opposition à la requérante, conformément au par. 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. La requérante a produit et signifié en réponse une contre‑déclaration dans laquelle elle a nié en bloc les allégations formulées dans la déclaration d’opposition.

[5]        La preuve de l’opposante consiste en l’affidavit de Michael E. Romaniuk. Celle de la requérante est constituée de l’affidavit de Keith Schiehl. Seule l’opposante a produit un plaidoyer écrit. Aucune des parties n’a demandé la tenue d’une audience.

 

Déclaration d’opposition

[6]        1.  Le premier motif d’opposition, fondé sur l’alinéa 30i) de la Loi, énonce que la requérante ne peut être convaincue d’avoir le droit d’employer la marque en cause car l’opposante avait antérieurement employé et fait enregistrer ses marques RENT‑A‑NERD et RENT-A-NERD COMPUTER SERVICES.

            2.  Suivant le deuxième motif, fondé sur l’alinéa 12(1)d), la marque RENT‑A‑GEEK crée de la confusion avec les marques déposées susmentionnées de l’opposante, lesquelles visent notamment les services suivants :

Ordinateur, périphérique et réseau informatique, consultation, installation, réparation, dépannage, programmation et formation.

 

            3.  Le troisième motif est fondé sur l’alinéa 16(1)a), et il allègue qu’à la date de premier emploi de la marque RENT-A-GEEK cette marque créait de la confusion avec les marques RENT-A-NERD et RENT-A-NERD COMPUTER SERVICES, antérieurement employées ou révélées au Canada en liaison avec les services susmentionnés de l’opposante.

            4.  Suivant le quatrième motif, fondé sur l’alinéa 16(1)c), la marque RENT‑A‑GEEK, à la date de premier emploi déclarée, créait de la confusion avec les noms commerciaux « Mike Romaniuk doing business as Rent-A-Nerd Computer Services » et « Mike Romaniuk doing business as Rent-A-Nerd Computer Services Inc. ».

            5.  Le cinquième motif allègue que compte tenu des marchandises et services vendus par l’opposante sous les marques de commerce et noms commerciaux susmentionnés, la marque RENT-A-GEEK n’est pas distinctive.

 

La preuve de l’opposante

Michael E. Romaniuk

[7]        M. Romaniuk déclare être un dirigeant et administrateur de la société opposante et avoir été le seul propriétaire de l’entreprise Rent-A-Nerd Computer Services, prédécesseure en titre de l’opposante. La pièce A jointe à son affidavit confirme que le nom commercial Rent-A-Nerd Computer Services a été enregistré en Colombie‑Britannique en 1997. La pièce B confirme que la société Rent-A-Nerd Computer Services Inc. a été constituée en Colombie‑Britannique en 1999. M. Romaniuk a adopté le nom et la marque RENT-A-NERD en 1994 et, depuis 1995, ils figurent sur des factures, des feuillets publicitaires et d’autres documents. La pièce C confirme l’emploi du nom commercial Rent-A-Nerd et de la marque de commerce RENT‑A‑NERD sur des factures en 1995. L’entreprise de fourniture de services informatiques a connu une progression constante et, en 1997, l’opposante a commencé à employer la marque RENT-A-NERD en liaison avec des « servies de consultation informatique ».

[8]        Les marques RENT-A-NERD, enregistrée sou le no LMC602,344, et RENT‑A‑NERD COMPUTER SERVICES, enregistrée sou le no LMC 602,065, visent les marchandises et services suivants :

marchandises

(1) Ordinateurs, périphériques et pièces, nommément piles, câbles, châssis, claviers, souris, blocs d’alimentation, imprimantes, haut-parleurs, mémoire, cartes mères, processeurs, cartes de son, cartes vidéo, unités de disque dur, lecteurs de stockage amovibles, lecteurs optiques, modems, nœuds de réseau et interrupteurs, cartes d’interface réseau, imprimantes et moniteurs.

services

(1) Ordinateur, périphérique et réseau informatique, consultation, installation, réparation, dépannage, programmation et formation.

 

[9]        M. Romaniuk déclare qu’il a appris l’existence de la demande d’enregistrement des marques RENT-A-GEEK et RENT-A-GEEK COMPUTER SERVICES & Dessin au mois d’août 2007 en consultant une base de données de marques de commerce en ligne. Il a communiqué avec la requérante et l’a informée de l’existence des marques déposées de l’opposante. Il a plus tard donné instruction à son agent d’entreprendre la procédure d’opposition.

[10]      Les pièces L à JJ de l’affidavit de M. Romaniuk confirment sa déclaration que l’opposante a employé ses marques de commerce et son nom commercial et en a fait la promotion sans interruption depuis le 5 mai 1997 au moins en l’utilisant sur des factures, sur du papier à en‑tête, dans des annonces, sur des véhicules et des vêtements de fonction, à la radio, etc. En septembre 2008, la principale source de publicité pour les marques de l’opposante était son site Web, à l’adresse www.rent-a-nerd.ca. En 2002, l’opposante a commencé à recourir à des annonces dans Google liant les internautes au site susmentionné. De 2002 à septembre 2008, les annonces de l’opposante se sont affichées sur les écrans de tierces parties environ 3,9 millions de fois. Les opérations de l’opposante ont débuté en Colombie‑Britannique, mais au mois de septembre 2008, l’entreprise avait des clients en Alberta, en Saskatchewan et en Ontario. Les ventes de l’opposante on doublé de 1997 à 1999; elles ont triplé de 1999 à 2000 et quintuplé de 2001 à 2007.

[11]      M. Romaniuk a cité un dictionnaire courant, édité en 1996, définissant un « geek » comme [traduction] « . . . une personne aux aptitudes sociales déficientes ou d’un conventionnalisme ennuyeux », et donnant la définition suivante de « nerd » [traduction] « personne ridicule, molle ou inintéressante ». Il a ajouté qu’en 2008, les mots « nerd » et « geek » étaient en quelque sorte devenus des synonymes dans l’acception des deuxième et troisième définitions du dictionnaire. À cet égard, les deux mots s’entendent d’une personne versée en matière technique ou scientifique mais manquant d’aptitudes sociales : voir les paragraphes 22 et 23 de son affidavit.

 

La preuve de la requérante

Keith Schiehl

[12]      M. Schiehl déclare être le président fondateur de la société requérante qui, à l’origine, vers la fin de 1998, était une entreprise à propriétaire unique exploitée à Vernon (Colombie‑Britannique). L’actuelle requérante a été constituée pour succéder aux sociétés de personnes qui avaient pris la suite de l’entreprise à propriétaire unique. La requérante se spécialise dans la réparation d’ordinateurs et la résolution d’autres problèmes technologiques décrits dans la présente demande. Elle offre ses services chez les clients, dans sa boutique et en ligne. Son site Web (www.rentageek.ca) a reçu annuellement autour de 24 000 visites d’internautes canadiens, américains ou d’autres pays depuis son lancement en 2005. En mars 2009, la requérante comptait 6 300 clients, situés à 95 % en Colombie‑Britannique.

[13]      Les pièces F à K de l’affidavit de M. Schiehl appuient ses déclarations d’emploi et de promotion continus des marques et du nom commercial de la requérante depuis le 13 décembre 1998 dans des journaux et annuaires téléphoniques, sur des factures, sur des véhicules de fonction, à la radio et par d’autres moyens. Les dépenses de publicité effectuées depuis le 13 décembre 1998 dépassent 250 000 $.

[14]      M. Schiehl signale aussi qu’au mois d’avril 2005, le site Web de l’opposante faisait la distinction suivante entre « nerd » et « geek » (voir la pièce Z de l’affidavit de M. Schiehl) :

[traduction] Il ne faut pas confondre nerds et geeks!

Nous pouvons avec raison être fiers d’être nerds!

 

Nerd (n&rd), nom : personne considérée comme intellectuelle

ou ayant uniquement des intérêts intellectuels

ou scientifiques.

 

Geek (gEk), nom : artiste de carnaval dont le numéro

consiste souvent à jouer les primitifs en décapitant

un poulet ou un serpent vivant avec ses dents.

 

[15]      M. Schiehl n’a connaissance d’aucun cas de confusion entre les marques des parties qui serait survenu au cours des dix ans où les marques ont cohabité dans le marché, entre 1998 et la date de son affidavit, le 19 mars 2009.

[16]      Il indique en outre que l’opposante était au courant de l’existence des marques visées par la demande d’enregistrement depuis le mois de juillet 2004 au moins puisqu’elle a [traduction] « incorporé les mots Rent-a-Geek dans les métabalises de son site Web ». La requérante affirme donc que l’opposante a consenti à l’emploi de ces marques par la requérante. 

 

Fardeau de persuasion et fardeau de preuve

[17]     C’est au requérant qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la demande d’enregistrement ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur les marques de commerce invoquées dans la déclaration d’opposition. Cependant, conformément aux règles de preuve habituelles, l’opposant a le fardeau de prouver les faits sur lesquels reposent les allégations de sa déclaration d’opposition : voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, page 298. Ce fardeau de l’opposant signifie que, pour que l’examen d’une question soit entrepris, il doit exister suffisamment d’éléments de preuve permettant raisonnablement de conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

Premier motif d’opposition

[18]      S’agissant du premier motif, l’alinéa 30i) s’applique lorsqu’on invoque la fraude de la part du requérant ou lorsqu’une disposition réglementaire fédérale particulière empêche l’enregistrement de la marque visée par la demande [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), p. 155, et Société canadienne des postes c. le Registraire des marques de commerce (1991), 40 C.P.R. (3d) 221]. En l’espèce, les actes de procédure n’étayent pas le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i), qui est par conséquent rejeté. 

 

Autres motifs d’opposition et dates pertinentes

[19]     La question décisive soulevée par les autres motifs d’opposition est celle de la confusion entre la marque RENT-A-GEEK dont la requérante demande l’enregistrement et la marque RENT-A-NERD de l’opposante. La requérante a le fardeau ultime de démontrer qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion au sens du paragraphe 6(2) de la Loi, reproduit ci‑dessous : 

L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées [...] ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

[20]      Le paragraphe 6(2) ne vise donc pas la confusion entre les marques elles-mêmes, mais une confusion qui porterait à croire que des produits ou services issus d’une source proviennent d’une autre source. En l’espèce, il faut se demander, pour appliquer le paragraphe 6(2), si l’on pourrait penser que les services informatiques de la requérante sont fournis, autorisé par licence ou approuvés par la requérante.

[21]     Les dates pertinentes pour l’examen de la confusion sont (i) la date de la décision, pour ce qui est du deuxième motif d’opposition, portant que la marque n’est pas enregistrable : voir Andres Wines Ltd. c. E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), page 130, et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.), page 424; (ii) la date de premier emploi de la marque, en l’occurrence le 13 décembre 1998, pour ce qui est du troisième motif d’opposition, portant sur l’absence de droit à l’enregistrement : voir l’alinéa 16(1)a) de la Loi; (iii) la date de l’opposition, en l’occurrence le 3 avril 2008, pour ce qui est du cinquième motif alléguant l’absence de caractère distinctif : voir Andres Wines Ltd. c. E. & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 (C.A.F.), page 130, et Clarco Communications Ltd. c. Sassy Publishers Inc. (1994), 54 C.P.R. (3d) 418 (C.F. 1re inst.).

 

Le test en matière de confusion

[22]     Le test en matière de confusion est affaire de première impression et de souvenir imparfait, comme l’a indiqué le juge Denault dans Pernod Ricard c. Molson Breweries (1992) 44 C.P.R. (3d) 359, à la page 369 (C.F. 1re inst.) :

Le critère de la confusion tient de la première impression. Les marques de commerce devraient être examinées dans l’optique du consommateur moyen qui a un souvenir non pas précis mais général de la marque précédente. En conséquence, les marques ne devraient pas être disséquées ni soumises à une analyse microscopique en vue d’apprécier leurs ressemblances et leurs différences. Au contraire, elles devraient être regardées globalement et évaluées selon leur effet sur l’ensemble des consommateurs moyens.

 

[23]      Les facteurs qu’il faut prendre en compte pour déterminer si deux marques créent de la confusion sont énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, la période pendant laquelle chacune des marques a été en usage, le genre de marchandises, services ou entreprises, la nature du commerce et le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive; tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération.  Tous les facteurs n’ont pas nécessairement le même poids. Le poids à attribuer à chacun d’eux dépend des circonstances: voir Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R.(3d) 308 (C.F. 1re inst.).

 

Examen des facteurs énoncés au par. 6(5)

Caractères distinctifs inhérent et acquis

[24]      La marque RENT-A-NERD de l’opposante possède intrinsèquement un caractère distinctif assez élevé parce qu’il s’agit d’une expression cocasse et inattendue pour la commercialisation de marchandises et services informatiques. La marque RENT‑A‑GEEK dont la requérante demande l’enregistrement a elle aussi un caractère distinctif inhérent important. Cette marque n’avait acquis aucun caractère distinctif (au moyen de l’emploi ou de la promotion) à la date pertinente la plus reculée, le 13 décembre 1998. Il est difficile de tirer une conclusion définitive au sujet du caractère distinctif acquis par les marques des parties aux dates pertinentes postérieures en raison de l’absence de données quantitatives concernant les ventes réalisées sous ces marques. Je suis toutefois disposé à inférer, après examen objectif de l’affidavit de M. Schiehl, que la marque RENT‑A‑GEEK de la requérante avait acquis, en Colombie‑Britannique à tout le moins, une réputation d’une certaine importance à la date pertinente postérieure du 3 avril 2008. L’examen objectif de l’affidavit de M. Romaniuk m’amène pareillement à inférer que la marque RENT-A-NERD jouissait d’une réputation minimale jusque vers l’année 2000 environ et que cette réputation avait ensuite acquis une certaine importance à la date pertinente postérieure du 3 avril 2008, en Colombie‑Britannique à tout le moins. En conséquence, le facteur du caractère distinctif inhérent et acquis des marques en cause ne favorise de façon significative aucune des parties.

 

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage et nature des marchandises et du commerce

 

[25]      L’opposante a commencé à employer sa marque au mois de mai 1997, tandis que la requérante a commencé à employer la sienne en décembre 1998. Ce facteur favorise donc l’opposante, mais de façon négligeable seulement. Pour autant que je puisse l’établir, les services des parties sont essentiellement les mêmes et, en l’absence de preuve contraire, je présume que leurs voies de commercialisation sont également les mêmes. Ces facteurs favorisent l’opposante puisque la requérante exploite le même type d’entreprise que l’opposante.

 

Ressemblance

[26]      Les marques des deux parties présentent nécessairement un degré de ressemblance à cause des mots RENT-A qui en forment le préfixe. Il arrive souvent qu’on attribue plus d’importance au premier élément d’une marque pour ce qui est du caractère distinctif, mais lorsqu’il s’agit d’un mot courant, descriptif ou évocateur, cette importance diminue [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.); Park Avenue Furniture Corp. c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.); Phantom Industries Inc. c. Sara Lee Corp. (2000), 8 C.P.R. (4th) 109 (C.O.M.C.)]. En l’espèce, la première partie des marques – qui indique que les services durent relativement peu longtemps – est très suggestive (pour ne pas dire descriptive) du genre de services informatiques offerts par les parties. En comparaison, les suffixes GEEK et NERD constituent les éléments les plus distinctifs et dominants des marques. Dans les deux cas, les marques suggèrent la même idée sous un tour amusant, c’est‑à‑dire la location pour une courte période des services de spécialistes en informatique compétents mais dont les aptitudes sociales laissent à désirer. J’estime toutefois que lorsque l’on compare les marques en cause dans leur intégralité, les différences dans la présentation et le son l’emportent sur la similitude des idées suggérées. La ressemblance entre les marques est donc un facteur qui favorise la requérante.

[27]      En outre, comme l’a établi Beverley Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstering Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.), page 149 :

À toutes fins pratiques, le facteur le plus important dans la plupart des cas, et celui qui est décisif, est le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent, les autres facteurs jouant un rôle secondaire.

                                (Je souligne.)

 

Les circonstances de l’espèce

[28]      Il faut prendre en considération l’absence de preuve de cas concrets de confusion.  Naturellement, l’opposante n’a pas à produire une telle preuve, et l’absence de cette preuve ne fait pas nécessairement naître de présomption qui lui soit défavorable, pas plus qu’elle n’est déterminante pour la question de la confusion. Néanmoins, lorsque les marchandises ou services et les voies de commercialisation des parties se recoupent, l’absence de preuve de cas concrets de confusion pendant une période pertinente peut mener à une conclusion négative sur la probabilité de confusion : voir Monsport Inc. c. Vêtements de Sport Bonnie (1978) Ltée (1988), 22 C.P.R. (3d) 356 (C.F. 1re inst.) et Mercedes-Benz A.G. c. Autostock Inc., 69 C.P.R. (3d) 518 (C.O.M.C.).  En l’espèce, il ressort de la preuve qu’il y a eu utilisation concomitante importante des marques RENT‑A‑NERD et RENT-A-GEEK en Colombie‑Britannique depuis 1999 et que les services des parties, qui visaient essentiellement la même clientèle, ont emprunté des voies de commercialisation se recoupant. Si aucun cas concret de confusion entre les marques RENT-A-NERD et RENT-A-GEEK n’a été mis en preuve, cela peut vouloir dire qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion.

 

Conclusion

[29]      J’estime en conséquence que la requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer selon la prépondérance des probabilités qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la marque RENT-A-GEEK dont elle demande l’enregistrement et les marques de commerce et le nom commercial de l’opposante.

 

DEMANDE NO 1,353,538

[30]      La demande no 1,353,538 visant la marque RENT-A-GEEK & Dessin, illustrée ci‑dessous, a été produite à la même date que la demande n1,353,539 visant la marque verbale RENT-A-GEEK et elle est fondée sur l’emploi en liaison avec les mêmes services depuis septembre 2004 au moins :

 

[31]      Les deux demandes ont été annoncées dans la même édition du Journal des marques de commerce et elles ont toutes deux fait l’objet d’une opposition produite le 3 avril 2008. Les actes de procédure, les questions soulevées et les facteurs applicables sont essentiellement les mêmes pour les deux oppositions, de sorte que la même conclusion s’impose, à savoir que la requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de démontrer selon la prépondérance des probabilités qu’à toute date pertinente il n’existait aucune probabilité raisonnable de confusion entre la marque RENT-A-GEEK & Dessin dont elle demande l’enregistrement et les marques de commerce et le nom commercial de l’opposante. 

 

DÉCISION

[32]      Les oppositions visant les demandes d’enregistrement no 1,353,539 et 1,353,538 sont en conséquence rejetées. La présente décision est rendue dans l’exercice d’une délégation de pouvoir faite en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

 

___________________

Myer Herzig                              

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

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