Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 103

Date de la décision : 2016-06-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,
NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

 

 

McMillan LLP

Partie requérante

et

 

Orange Brand Services Limited

Propriétaire inscrite

 

 

 



 

LMC583,274 pour la marque de commerce ORANGE



 

Enregistrement

[1]               La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée à l'égard de l'enregistrement no LMC583,274 de la marque de commerce ORANGE (la Marque) appartenant à Orange Brand Services Limited.

[2]               La Marque est enregistrée en liaison avec des [Traduction] « services de télécommunications, nommément la fourniture de services de téléphonie aux abonnés d'un réseau téléphonique mobile » (les Services).

[3]               Pour les raisons exposées ci-dessous, je conclus qu'il y a lieu de maintenir l'enregistrement.

La procédure

[4]               Le 1er octobre 2013, le registraire des marques de commerce a donné l'avis prévu à l'article 45 de la Loi sur les marques de commerce LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à Orange Brand Services Limited (la Propriétaire). L'avis a été donné à la demande de McMillan LLP (la Partie requérante).

[5]               L'avis enjoignait à la Propriétaire de fournir une preuve établissant qu'elle a employé la Marque au Canada à un moment quelconque entre le 1er octobre 2010 et le 1er octobre 2013 en liaison avec les services spécifiés dans l'enregistrement. Dans le cas où la Marque n'avait pas été ainsi employée, la Propriétaire devait fournir une preuve établissant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et les raisons de son défaut d'emploi depuis cette date.

[6]               La définition pertinente d'« emploi » est énoncée à l'article 4(2) de la Loi, lequel est ainsi libellé :

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l'exécution ou l'annonce de ces services.

[7]               Il est bien établi que l'article 45 de la Loi a pour objet et portée d'offrir une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Les critères pour établir l'emploi ne sont pas exigeants et il n'est pas nécessaire de produire une surabondance d'éléments de preuve. Il n'en faut pas moins, cependant, présenter une preuve suffisante pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et des services visés par l'enregistrement [voir Uvex Toko Canada Ltd c Performance Apparel Corp (2004) CF 448, 31 CPR (4th) 270]. En outre, de simples allégations d'emploi ne sont pas suffisantes pour établir l'emploi [voir Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)].

[8]               En réponse à l'avis du registraire, la Propriétaire a produit l'affidavit d'Helen Jane Stanwell-Smith, souscrit le 25 avril 2014, et accompagné des pièces 1 à 37.

[9]               Les parties ont toutes deux produit des représentations écrites; cependant, seule la Propriétaire était représentée à l'audience qui a été tenue conjointement avec les audiences relatives aux procédures de radiation sommaires engagées à l'égard de quatre autres enregistrements détenus par la Propriétaire. Des décisions distinctes seront rendues relativement à ces autres procédures, qui concernent les enregistrements nos LMC392,593, LMC540,151, LMC545,600 et LMC773,863.

La preuve

[10]           Dans son affidavit, Mme Stanwell-Smith atteste qu'elle est l'avocate-conseil principale d'Orange Corporate Services Limited, une société affiliée de la Propriétaire et de ses prédécesseurs en titre.

[11]           Mme Stanwell-Smith affirme que la Propriétaire et/ou ses licenciées ont employé la Marque en liaison avec les Services au Canada pendant la période pertinente.

[12]           En ce qui concerne l'historique de la Propriétaire, Mme Stanwell-Smith explique que la Propriétaire est détenue à 100 % par Orange SA, une société française qui est également l'entité mère d'un groupe mondial de sociétés dont les activités s'étendent aux secteurs des télécommunications, des médias, de la publicité, des soins de santé et des services financiers.

[13]           Elle atteste que la Propriétaire a concédé des droits à l'égard de la Marque à plus de 200 filiales et sociétés affiliées d'Orange SA (le « Groupe Orange »), qui emploient la Marque comme élément de leur identité d'entreprise, ainsi qu'en liaison avec les Services en particulier. Comme pièce 2, elle joint à son affidavit un extrait d'un document de 2012 publié par Orange SA qui comprend une liste des membres du Groupe Orange. Parmi les membres et filiales qui composent cette liste figure Equant BV. Elle souligne que cette liste n'inclut pas les filiales internationales du sous-groupe Equant qui sont plus de 80 et qui fournissent des services interentreprises à l'échelle mondiale, car seule l'entité mère « Equant » est mentionnée dans ce document. Je souligne que, plus loin dans son affidavit, Mme Stanwell-Smith atteste que l'une de ces filiales d'Equant, Equant Canada Inc., a changé son nom pour Orange Business Services Canada, Inc. (OBSC) en décembre 2012.

[14]           En ce qui concerne l'emploi des Marques sous licence au Canada, Mme Stanwell-Smith identifie expressément les entités suivantes comme des licenciées de la Propriétaire : OBSC, et Orange International Carriers and Shared Services, aussi appelée International Wholesale Solutions, une division du Groupe Orange (International Carriers). Je souligne que ces entités figurent toutes deux dans la liste des membres du Groupe Orange en pièce 2. Elle atteste que pendant toute la période pertinente, la Propriétaire a exercé un contrôle direct sur les caractéristiques et la qualité des Services fournis et annoncés par ces licenciées au Canada en liaison avec la Marque. De plus, elle fournit des exemples de la façon dont ce contrôle était exercé, notamment par l'application de lignes directrices mondiales détaillées publiées sur Internet, dont elle joint un extrait à son affidavit comme pièce 6. Elle atteste en outre que la Propriétaire exerce un contrôle sur ses licenciées qui mènent des activités au Canada en examinant trimestriellement, ou deux fois l'an, l'emploi que ces dernières font de la Marque, ainsi qu'en fournissant régulièrement un soutien à l'emploi de la marque.

[15]           Mme Stanwell-Smith atteste que, dans le cadre de la licence concédée par la Propriétaire, OBSC et International Carriers fournissent toutes deux les Services en liaison avec la Marque à des clients au Canada. Elle affirme que ces services sont décrits sur les sites Web suivants, dont des extraits sont joints à son affidavit comme pièces 3 et 5, respectivement : www.orange-business.com (qui se rapporte à OBSC), et wholesalesolutions.orange.com (qui se rapporte à International Carriers). Elle indique que ces imprimés tirés des sites Web sont représentatifs de l'apparence qu'avaient les sites Web pendant la période pertinente. Les imprimés tirés de ces deux sites Web concernent « Orange Business Services ».

[16]           Elle fournit également, en pièce 4 de son affidavit, une présentation de 2012 publiée par le groupe Orange dans le cadre de la licence concédée par la Propriétaire qui, atteste-t-elle, décrit les services de télécommunications et de TI fournis sous la Marque, y compris par OBSC au Canada, tels que la fourniture de réseaux intégrés de voix et de données, et de services d'installation, de maintenance et de réparation d'équipement de réseau et de TI connexe. Une version plus récente de cette présentation est également comprise dans cette pièce. Elle atteste que les Canadiens avaient accès à cette présentation en ligne pendant la période pertinente et qu'OBSC l'a fournie à des clients canadiens potentiels par courriel et lors de réunions de vente.

Fourniture des Services par OBSC

[17]           Mme Stanwell-Smith affirme qu'OBSC est la principale licenciée des Marques au Canada et explique qu'OBSC compte deux catégories de clients et de clients potentiels : i) les sociétés canadiennes qui exercent des activités à l'échelle nationale ou internationale auxquelles OBSC offre les Services elle-même ou par l'entremise de membres internationaux du Groupe Orange; et ii) les sociétés internationales dont le siège social est situé à l'extérieur du Canada, mais qui font des affaires au Canada.

[18]           Elle explique que, lorsque les Services ont été fournis pendant la période pertinente, OBSC disposait d'un effectif d'environ 90 employés répartis dans des établissements arborant clairement la Marque à Toronto, Vancouver et Montréal.

[19]           Mme Stanwell-Smith atteste en outre que, pendant la période pertinente, OBSC comptait plus de 170 clients (tant canadiens qu'internationaux) auxquels elle a fourni les Services en liaison avec la Marque au Canada. Elle nomme plusieurs de ces clients, qui comprennent des entités d'envergure telles que Bell Canada et Akzo Nobel. Elle fournit des chiffres de recettes annuelles considérables qui, atteste-t-elle, ont été générées par OBSC dans le cadre de la fourniture de produits et de services de télécommunications et de TI, y compris les Services, pendant la période pertinente. Elle affirme que, pendant la période pertinente, OBSC a tiré une part substantielle de ses recettes annuelles totales au Canada de la fourniture des Services.

[20]           Mme Stanwell-Smith atteste cependant qu'en raison de la nature complexe de ses forfaits de solutions pour entreprise, OBSC ne sépare pas les recettes générées par les activités exercées au Canada des recettes générées par les activités qu'OBSC exerce à l'extérieur du Canada pour le compte de clients canadiens. Elle explique en outre qu'OBSC [Traduction] « ne départage pas les éléments individuels des [produits] et des Services de télécommunications et de TI fournis », car les clients sont facturés en fonction du forfait pour entreprise qui leur est fourni. Elle fournit cependant, comme pièce 11, un tableau représentatif présentant des exemples de recettes liées aux forfaits pour entreprise spécifiques (qui, affirme-t-elle, comprennent les Services) fournis à chaque client canadien au cours de l'année 2012, et qui sont représentatifs des recettes annuelles pendant la période pertinente. Elle explique que, pour des raisons de confidentialité, les noms des clients ont été caviardés.

[21]           Les forfaits pour entreprise fournis par OBSC qui comprennent les Services sont identifiés dans son affidavit comme étant les [Traduction] « Solutions d'audioconférence et de cyberconférence », « Business Talk », « Business Together » et « Forfaits Réseau privé virtuel sur protocole Internet (VPN-PI) ». En plus du tableau des recettes susmentionné, la preuve relative à ces forfaits pour entreprise comprend les éléments suivants : spécimens de factures (pièces 17, 20, 23, 26 et 31); brochures et documents de présentation de vente (pièces 12, 14, 15, 18, 19, 21, 22, 24 et 25); et autres recettes de ventes annuelles connexes représentatives. Elle fournit en outre des exemples de captures d'écran du portail Web de connexion au logiciel de cyberconférence (pièce 16), lequel arbore clairement la Marque, qui est utilisé en conjugaison avec le forfait pour entreprise Solutions d'audioconférence et de cyberconférence.

[22]           En ce qui concerne les factures, Mme Stanwell-Smith explique que, puisqu'elles ont été générées de nouveau à partir des systèmes financiers d'OBSC, elles ne sont pas imprimées sur le papier à en-tête de marque Orange sur lequel elles étaient initialement imprimées lorsqu'elles ont été envoyées aux clients. Elle fournit toutefois, comme pièce 10, une copie numérisée d'une facture de 2007 qui, atteste-t-elle, est représentative des factures qui ont été envoyées pendant la période pertinente et montre la place importante occupée par la Marque sur les factures. Les factures renvoient à des services généraux et à des forfaits pour entreprise qui concordent avec la preuve susmentionnée.

[23]           Les brochures et les documents de présentation de vente, qui arborent aussi clairement la Marque, décrivent la gamme des services/forfaits fournis par OBSC. Mme Stanwell-Smith atteste que ces documents sont représentatifs de ceux qui ont été consultés par des consommateurs canadiens et des clients potentiels et/ou qui ont été fournis/distribués à ces derniers par OBSC pendant la période pertinente (selon les paragraphes 28, 29, 33, 38, 41 et 44 de son affidavit et la pièce 13 concernant les statistiques relatives au trafic sur le site Web).

[24]           Mme Stanwell-Smith explique qu'en plus des forfaits pour entreprise susmentionnés, OBSC fournit divers services destinés spécifiquement à l'industrie des soins de santé qui, affirme-t-elle, correspondent aux Services. Elle explique que ces services comprennent des services de FSI et d'hébergement Web, ainsi que des services de réseau mobile. Elle fournit des imprimés tirés du site Web corporatif du Groupe Orange (pièce 27) qui décrivent les services offerts au Canada, ainsi que des statistiques relatives au trafic sur le site Web canadien. Elle fournit en outre des exemples d'études de cas (pièce 28) sur les services fournis à divers clients canadiens identifiés par leur nom pendant la période pertinente. Elle affirme que ces études de cas décrivent les solutions de TI et de télécommunications fournies à ces clients et qu'elles sont mises à la disposition des clients potentiels au Canada lors de réunions de vente et d'événements de l'industrie. Elle affirme que, pendant la période pertinente, OBSC a engrangé des recettes de plus de 650 000 $ US chaque année en lien avec ces services.

[25]           Plus particulièrement, comme preuve de l'affichage de la Marque et de la fourniture de services de réseau mobile à des clients de l'industrie des soins de santé au Canada, Mme Stanwell Smith fournit une image d'un spécimen de carte SIM arborant la Marque utilisée par les clients d'OBSC en conjugaison avec ces services (pièce 29), des extraits d'un spécimen de contrat (pièce 30), et un spécimen de facture (pièce 31). Elle explique que les cartes SIM sont insérées dans les appareils médicaux des clients pour connecter ces derniers au réseau mobile de Rogers Communications au Canada. Les appareils médicaux sont ensuite activés de façon à ce qu'ils puissent renvoyer des signaux électroniques et des rapports à l'ordinateur du client et ainsi permettre à ce dernier d'exercer une surveillance sur le patient, un processus qui, affirme Mme Stanwell-Smith, est connu comme la connectivité [Traduction] « machine à machine » ou « M2M ». Elle explique en outre que les cartes SIM renvoient des signaux à OBSC afin de permettre à OBSC de fournir ensuite des rapports et des services professionnels au client.

Services de téléphonie fournis au Canada par International Carriers

[26]           Mme Stanwell-Smith atteste que les activités d'International Carriers s'étendent au commerce de gros dans les secteurs de la voix, d'Internet et de la capacité de données, ainsi qu'aux activités liées au contenu, au public cible et aux soins de santé exercées par les exploitants de réseau de télécommunication. Comme pièce 32, elle fournit une brochure arborant la Marque qui présente en détail les services offerts par International Carriers aux clients du Canada et d'ailleurs dans le monde. Elle affirme qu'International Carriers a distribué cette brochure aux clients canadiens pendant la période pertinente.

[27]           Mme Stanwell-Smith atteste qu'en plus d'être présentés dans la brochure, les services offerts par International Carriers sont annoncés sur le site Web corporatif mondial du Groupe Orange et fournit, comme pièce 5, des imprimés représentatifs des pages qui étaient en ligne pendant la période pertinente. Elle indique que ces pages Web comprennent une carte de la couverture réseau clé, qui, affirme-t-elle, inclut le Canada.

[28]           Mme Stanwell-Smith atteste que, grâce à des accords [Traduction] « d'itinérance » conclus avec International Carriers, les clients canadiens d'exploitants de réseaux au Canada peuvent utiliser leurs téléphones mobiles et leurs téléphones à ligne fixe pour obtenir des services de données et services vocaux par l'intermédiaire des réseaux du Groupe Orange lorsqu'ils se rendent à l'étranger. Elle atteste que ces réseaux sont identifiés par la présence de la Marque à l'écran du téléphone mobile de ces utilisateurs canadiens, et que le Groupe Orange envoie ensuite une facture aux exploitants canadiens pour l'utilisation de ces services (des spécimens de ces factures sont joints comme pièce 35). Elle atteste également que le Groupe Orange a conclu des ententes avec des exploitants de réseau de télécommunication canadiens afin de pouvoir fournir des services de télécommunication vocale au Canada par l'intermédiaire de réseaux mobiles de tiers dans le cadre des forfaits de produits et de services de la marque Orange destinés aux multinationales.

[29]           Mme Stanwell-Smith atteste qu'en plus d'International Carriers, OBSC offre des services de réseau aux clients d'exploitants de télécommunications au Canada; Bell Canada était l'un de ces clients pendant la période pertinente. Ces services aux exploitants de télécommunications sont décrits dans une brochure arborant la Marque, intitulée [Traduction] « Solutions pour les exploitants », qui est jointe à son affidavit comme pièce 33.

[30]           En ce qui concerne les accords [Traduction] « d'itinérance » conclus avec des exploitants canadiens qui sont décrits ci-dessus, comme pièce 34, Mme Stanwell-Smith joint à son affidavit des imprimés tirés des sites Web de Rogers Communications et de Bell Canada, qui montrent que le réseau d'Orange est le réseau d'itinérance qui est accessible à leurs clients dans un certain nombre de pays. Elle affirme que ces relations entre le Groupe Orange et les exploitants canadiens sont représentatives des relations qui existaient pendant la période pertinente.

Promotion des Marques

[31]           Mme Stanwell-Smith explique que la Propriétaire, par l'entremise d'OBSC et d'autres licenciées, emploie également la Marque dans la cadre d'activités de promotion et de marketing ciblant les clients canadiens et des clients potentiels.

[32]           Mme Stanwell-Smith affirme qu'en raison de la nature fortement conjointe des activités de promotion et de marketing qui se déroulent au Canada et aux États-Unis, il est difficile de déterminer quelle part du budget nord-américain alloué à ces événements a véritablement été dépensée en lien avec des événements au Canada. Néanmoins, Mme Stanwell-Smith estime que les investissements mondiaux dans des activités de marketing et de promotion qui [Traduction] « touchent » le Canada sont supérieurs à 100 000 $ US annuellement.

[33]           En ce qui concerne la conduite de telles activités au Canada, elle affirme que la Propriétaire, par l'entremise de ses licenciées, mène des campagnes de marketing au Canada par courriel et en publiant des billets sur des blogues et d'autres publications sur son site Web. À titre d'exemple, elle joint à son affidavit, comme pièce 36, des documents d'entreprise qui décrivent brièvement diverses campagnes de marketing. Également dans le but de fournir un autre exemple représentatif, elle explique qu'une série de courriels intitulée « People of Orange » [les gens d'Orange] a été envoyée à plus de 1 000 clients et clients potentiels en guise d'introduction aux divers rôles qu'exercent les employés d'Orange dans le cadre des services qui sont fournis aux multinationales clientes sur le continent américain.

[34]           Enfin, Mme Stanwell-Smith indique que, pendant la période pertinente, OBSC a distribué au Canada un magazine arborant la Marque. Elle explique que la publication a été distribuée trimestriellement par courriel aux abonnés et qu'elle pouvait également être téléchargée à partir du site Web d'OBSC. Des exemplaires papier du magazine ont également été envoyés par la poste à une liste de clients, de client potentiels, de personnes-ressources et de partenaires de l'industrie, ainsi qu'aux médias internationaux. Comme pièce 37, elle joint à son affidavit des exemplaires de divers numéros du magazine datant de 2010, 2011 et 2012. Elle affirme, à titre d'exemple, que le numéro de juin 2011 a été posté à plus de 60 abonnés.

Analyse et motifs de décision

[35]           Les observations de la Partie requérante peuvent être résumées comme suit :

         La preuve démontre que les Marques n'ont pas été employées par la Propriétaire et n'établit pas que la Propriétaire exerçait véritablement un quelconque contrôle sur la façon dont les Marques étaient employées pendant la période pertinente;

         Il n'y a pas la moindre preuve établissant que la Marque a été employée au Canada en liaison avec les Services pendant la période pertinente.

J'examinerai successivement chacune de ces observations.

Emploi sous licence

[36]           En ce qui concerne la première observation, la Partie requérante soutient que la Propriétaire n'a produit aucune preuve établissant l'exercice d'un contrôle véritable sur la nature et la qualité des produits et services offerts en liaison avec les Marques pendant la période pertinente [citant Lafco Enterprises Inc c Canadian Home Publishers, 2013 COMC 44; DeGrandpré Chait c Mead Products LLC, 2013 COMC 73]. La Partie requérante soutient que l'unique preuve produite à l'appui du contrôle qui aurait été exercé par la Propriétaire prend la forme d'un document intitulé « Orange core guidelines » [directives de base d'Orange], qui est joint comme pièce 7, et de déclarations de Mme Stanwell-Smith voulant que des vérifications soient effectuées et qu'un soutien à l'emploi de la marque soit offert aux licenciées (selon le paragraphe 19 de son affidavit). La Partie requérante soutient toutefois que ces allégations ne sont corroborées par aucun autre élément de preuve et qu'elles n'incluent aucun détail ni autre élément de preuve démontrant que les directives de base d'Orange sont appliquées.

[37]           La Partie requérante soutient de surcroît que la relation d'entreprise qui existe entre la Propriétaire et les licenciées présumées n'est pas suffisante pour établir l'existence d'une licence [citant Cheung Kong Holdings Ltd c Living Realty Inc (1999), 4 CPR (4th) 71 (CF); et MCI Communications Corp c MCI Multinet Communications Inc, 61 CPR (3d) 245 (COMC)].

[38]           En réponse, la Propriétaire fait valoir qu'il est bien établi que la production d’une copie d’un contrat de licence n’est pas obligatoire dans une procédure en vertu de l’article 45, du moment que la preuve démontre que le propriétaire inscrit exerce un contrôle sur les caractéristiques et la qualité des produits arborant la marque de commerce [citant Canadian Home Publishers (Re), 2013 COMC 44, au para 11]. La Propriétaire soutient en outre qu'il est possible de satisfaire à l'obligation d'établir qu'un contrôle est exercé conformément aux dispositions de l'article 50(1) de la Loi en attestant clairement que le propriétaire de la marque de commerce exerce le contrôle exigé, affirmant que c'est ce qui a été fait en l'espèce [citant Gowling, Strathy and Henderson c Samsonite Corp (1996), 66 CPR (3d) 560 et Mantha & Associés/Associates c Central Transport Inc (1995), 64 CPR (3d) 354]. En fait, la Propriétaire soutient que les affaires citées par la Partie requérante appuient cette proposition (mentionnant, par exemple, De Grandpré Chait, supra, au para 16 et Lafco, supra, au para 11). La Propriétaire écarte également Cheung Kong, supra, au motif qu'il n'y avait dans cette affaire aucune preuve que l'inscrivant avait pris quelque mesure que ce soit, en dehors de la relation d'entreprise, pour exercer un contrôle sur les caractéristiques et la qualité des produits et services liés à la marque de commerce.

[39]           En tout état de cause, la Propriétaire soutient que Mme Stanwell-Smith présente des faits et des éléments de preuve supplémentaires qui corroborent l'exercice d'un contrôle par la Propriétaire sur les caractéristiques et la qualité des produits fournis sous la Marque, notamment des déclarations donnant des exemples précis de la façon dont ce contrôle est exercé. La propriétaire soutient que ces déclarations constituent des allégations de fait plutôt que des allégations de droit et qu'il est clair qu'elles sont acceptables dans une procédure en vertu de l'article 45.

[40]           Comme l'a indiqué la Cour fédérale, le propriétaire d'une marque de commerce dispose essentiellement de trois méthodes pour démontrer qu'il exerce le contrôle exigé par l'article 50(1) de la Loi : premièrement, attester clairement qu'il exerce le contrôle exigé; deuxièmement, produire une preuve démontrant qu'il exerce le contrôle exigé; ou troisièmement, produire une copie du contrat de licence qui prévoit le contrôle exigé [voir Empresa Cubana Del Tabaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102, 91 CPR (4th) 248, au para 84]. En l'espèce, ainsi qu'il ressort des observations de la Propriétaire exposées ci-dessus, deux de ces méthodes ont été employées. De fait, non seulement Mme Stanwell-Smith a-t-elle clairement attesté qu'un contrôle est exercé, elle a aussi présenté des déclarations sous serment dans lesquelles elle donne des exemples précis de la façon dont ce contrôle est exercé. Par conséquent, je suis convaincue que tout emploi de la Marque par les licenciées qu'a identifiées Mme Stanwell-Smith, constitue un emploi sous licence qui peut être attribué à la Propriétaire conformément aux dispositions de l'article 50 de la Loi.

La Marque a-t-elle été employée en liaison avec les Services au Canada pendant la période pertinente?

[41]           La Partie requérante soutient que même si Mme Stanwell-Smith prétend qu'OBSC et International Carriers ont employé la Marque en liaison avec les Services pendant la période pertinente, la preuve ne corrobore pas ces prétentions.

[42]           Plus particulièrement, en ce qui concerne OBSC, la Partie requérante soutient qu'il n'y a aucune preuve que les brochures et les documents de vente liés aux forfaits pour entreprise d'OBSC ont véritablement été distribués à des clients canadiens ou mis à la disposition de ces derniers. La Partie requérante soutient que le seul élément de preuve se rapportant à la distribution et à la diffusion de ces documents est un rapport non daté sur le trafic enregistré sur le site Web qui a été préparé par la Propriétaire et qui montre que le site Web mondial www.orange-business.com a reçu des appels de fichiers de la part d'internautes canadiens (pièce 14). La Partie requérante soutient que cet élément de preuve a une valeur probante discutable. La Partie requérante soutient de surcroît que le site Web ne comporte aucune indication donnant à penser qu'il s'adresse aux consommateurs canadiens et que, par conséquent, la preuve est loin de démontrer que de tels services étaient accessibles aux consommateurs canadiens.

[43]           Je souligne toutefois que ces brochures et documents de vente n'étaient pas accessibles que sur le site Web. À cet égard, tout au long de son affidavit, Mme Stanwell-Smith affirme sous serment à de nombreuses reprises que ces documents ont été utilisés par les équipes de vente d'OBSC et distribués à des clients et clients potentiels au Canada pendant la période pertinente. En effet, elle fournit des exemples précis des méthodes utilisées par OBSC pour distribuer ces documents pendant la période pertinente, notamment lors de [Traduction] « centaines de rencontres de vente avec des clients existants et potentiels au Canada chaque année ».

[44]            La Partie requérante met également en doute le fait que les brochures datent de la période pertinente et soutient que certaines brochures semblent n'être que de simples documents de présentation internes utilisés par les équipes de marketing d'OBSC ou de France Telecom. Or, Mme Stanwell-Smith atteste clairement tout au long de son affidavit que ces documents sont représentatifs des types de documents qui étaient distribués par OBSC aux clients et clients potentiels du Canada pendant la période pertinente.

[45]           La Partie requérante soutient, par ailleurs, que les brochures, qui ne font pas spécifiquement mention de la fourniture de services au Canada, semblent être destinées à un public cible mondial. Dans le même ordre d'idées, la Partie requérante soutient que les états financiers (c.-à-d. les états financiers d'Equant Canada Inc. en pièce 10) et le tableau des recettes liées à divers forfaits pour entreprise (en pièce 11) ne montrent pas que ces recettes concernent le marché canadien ou se rapportent à l'emploi de la Marque.

[46]           En réponse, la Propriétaire soutient, et j'abonde dans le même sens, que la preuve doit être considérée dans son ensemble. À cet égard, j'estime que la Partie requérante, en considérant certains éléments de preuve isolément, a adopté la mauvaise approche; une approche qui, parce qu'elle ne tient pas compte des autres éléments de preuve pertinents ou connexes, peut mener à des conclusions erronées [voir Kvas Miller Everitt c Compute (Bridgend) Limited (2005), 47 CPR (4th) 209 (COMC)].

[47]           En l'espèce, Mme Stanwell-Smith explique pourquoi les états financiers et le tableau des recettes incluent des recettes qui ne sont pas exclusivement limitées aux activités exercées au Canada. Plus précisément, elle atteste qu'en raison de la nature complexe des forfaits de solutions pour entreprises qui sont fournis à ses clients, les chiffres des recettes générées par OBSC ne sont pas disponibles sous une forme qui distingue les recettes générées par les activités exercées au Canada des recettes générées par les activités qu'OBSC exerce à l'extérieur du Canada pour le compte de clients canadiens. Les factures que les clients reçoivent de la part d'OBSC sont plutôt établies en fonction du forfait pour entreprise qui leur est fourni. De plus, elle affirme clairement sous serment que de tels services ont été fournis à des clients à l'intérieur du Canada, atteste qu'une part substantielle des recettes annuelles totales générées par OBSC provient de la fourniture des Services au Canada, et fournit des factures représentatives adressées à des clients au Canada se rapportant à de tels services. En effet, relativement à chacun des forfaits pour entreprise mentionnés dans son affidavit, elle atteste invariablement tout au long de son affidavit que de tels services ont été fournis par OBSC au Canada.

[48]           Comme autre exemple d'élément de preuve corroborant, Mme Stanwell-Smith fournit des détails factuels concernant la fourniture par OBSC de services M2M à des clients canadiens dans l'industrie des soins de santé. Plus précisément, elle explique que des cartes SIM (montrées en pièce 29) sont insérées dans les appareils médicaux des clients afin de connecter ces derniers au réseau mobile de Rogers Communications au Canada, et que les cartes SIM renvoient des signaux à OBSC afin de permettre à OBSC de fournir des rapports et des services professionnels aux clients.

[49]           La Partie requérante soutient que l'image de la carte SIM n'est pas datée et qu'aucune preuve de son utilisation au Canada n'est fournie puisque l'adresse de la partie contractante a été caviardée dans l'entente de service client M2M (en pièce 30).

[50]           Je souligne toutefois que, non seulement l'entente de service client susmentionnée indique que le client est une société canadienne, mais que la preuve comprend de nombreux spécimens de factures (pièce 31) qui montrent clairement que des services M2M ont été vendus à des entités ayant une adresse au Canada pendant la période pertinente. De plus, la Marque en l'espèce ne figure pas seulement sur l'entente de service client M2M (pièce 30), mais également sur les cartes SIM elles-mêmes qui, atteste clairement Mme Stanwell-Smith, sont utilisées dans le cadre de la fourniture de tels services. Il est clair que les services M2M étaient offerts et ont été fournis à des clients au Canada pendant la période pertinente en liaison avec la Marque et j'admets que la fourniture de ce service correspond aux services visés par l'enregistrement.

[51]           En tout état de cause, la Partie requérante soutient en outre que la Marque ne figure nulle part sur les factures produites comme pièce et que l'unique occurrence du mot « ORANGE » se trouve dans la dénomination sociale « Orange Brand Service Canada ».

[52]           Or, je conviens avec la Propriétaire que Mme Stanwell-Smith a clairement expliqué pourquoi les factures fournies comme preuve n'arborent pas la Marque. Plus précisément, tel qu'il est indiqué dans le résumé de la preuve ci-dessus, Mme Stanwell-Smith explique que puisqu'elles ont été générées de nouveau à partir des systèmes financiers d'OBSC, elles ne sont pas imprimées sur le papier à en-tête de la marque Orange sur lequel elles étaient initialement imprimées lorsqu'elles ont été envoyées aux clients. Elle fournit néanmoins, comme pièce 10, une copie numérisée d'une facture de 2007 qui, atteste-t-elle clairement, est représentative des factures qui ont été envoyées pendant la période pertinente et montre la place importante occupée par la Marque sur les factures.

[53]           En ce qui concerne les services offerts par International Carriers, cependant, je conviens avec la Partie requérante que de tels services de télécommunications ne semblent pas être offerts au Canada. De fait, même si International Carriers a conclu des [Traduction] « ententes d'itinérance » avec des exploitants de télécommunications canadiens qui permettent aux clients de ces exploitants d'avoir accès au réseau cellulaire d'Orange lorsqu'ils voyagent à l'extérieur du Canada, ces ententes n'équivalent pas à l'exécution des services au Canada selon l'article 4(2) de la Loi [voir Porter c Don the Beachcomber (1966), 48 CPR 280 (C de l'É)].

[54]           Néanmoins, compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincue que la Propriétaire a établi l'emploi de la Marque par l'entremise de sa licenciée OBSC en liaison avec les Services au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi.

Décision

[55]            En conséquence, dans l'exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, l'enregistrement sera maintenu conformément aux dispositions de l'article 45 de la Loi.

______________________________

Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L'AUDIENCE : 2015-08-04

 

COMPARUTIONS

 

Sanjukta Tole                                                                                       POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

Aucune comparution                                                                           POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

Sim & McBurney                                                                                 POUR LA PROPRIÉTAIRE INSCRITE

 

McMillan LLP                                                                                     POUR LA PARTIE REQUÉRANTE

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