Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 183

Date de la décision : 2016-11-30

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION

 

 

Old Dutch Foods Limited

Opposante

et

 

1904838 Ontario Inc.

Requérante

 

 

 



 

1,573,342 pour la marque de commerce DUTCH TRADITIONS & Dessin

 

Demande

Contexte

[1]               Le 16 avril 2012, la Requérante a produit la demande no 1,573,342 pour la marque de commerce DUTCH TRADITIONS & Dessin (la Marque, reproduite ci-dessous) sur la base d’un emploi projeté en liaison avec des [Traduction] « aliments d’origine néerlandaise, nommément compote de pommes, biscuits, réglisse, soupe, légumes ».

Orange and brown design with red, white and blue ribbon

[2]               La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. La marque de commerce comprend les couleurs suivantes : -l’arrière-plan est orange PANTONE 151 C, -les rayons sont orange (CMJN 0.57.95.3),- la bordure, l’écriture et le moulin à vent sont bruns (CMJN 30.95.95.70), -la partie supérieure du ruban est rouge (CMJN 15.100.90.10), -la partie inférieure du ruban est bleue (CMJN 85.50.0.0).

[3]               L’Opposante est la propriétaire d’un certain nombre d’enregistrements de marque de commerce, dont l’enregistrement no LMC104,697 de la marque de commerce OLD DUTCH qui vise les produits suivants [Traduction] :

(1) Friandises, nommément maïs éclaté; croustilles; friandises au maïs à saveur de fromage; maïs au caramel; noix écalées fraîches; arachides salées; graines de tournesol préparées destinées à la consommation; bretzels; et craquelins au fromage.

(2) Grignotines au maïs, rondelles à saveur d’oignon, chips tortilla, couennes de porc, noix.

(3) Maïs au caramel et tortillons au fromage.

[4]               La demande pour la Marque a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 4 décembre 2013 et, le 31 janvier 2014, l’Opposante s’y est opposée en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Les motifs d’opposition, dans leur version révisée du 31 juillet 2014, sont fondés sur les articles 12(1)b), 12(1)d), 16(3)a), 30i) et 38(2)d)/2 (caractère distinctif) de la Loi. Les deux questions centrales en l’espèce sont les suivantes : 1) la Marque donne-t-elle une description claire de la nature et/ou de la qualité des produits de la Requérante, des conditions de leur production ou des personnes qui les produisent, ou de leur lieu d’origine; et 2) existe-t-il une probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et l’une quelconque des marques de l’Opposante.

[5]               Le 8 avril 2014, la Requérante a produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations formulées dans la déclaration d’opposition.

[6]               Comme preuve à l’appui de son opposition, l’Opposante a produit les affidavits de Brian Bambury, Brenda Anderson et Bonna Jean Bateman. Aucun de ces déposants n’a été contre-interrogé.

[7]               Comme preuve à l’appui de sa demande, la Requérante a produit l’affidavit de Jeff Van Niekerk. M. Van Niekerk n’a pas été contre-interrogé.

[8]               L’Opposante n’a produit aucune preuve en réponse.

[9]               Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient toutes deux présentes à l’audience qui a été tenue.

Fardeau de preuve

[10]           La Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois à l’opposante de s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298.

Motifs d’opposition

Motif fondé sur l’article 30i) – Non-conformité

[11]           L’Opposante allègue que la demande de la Requérante n’est pas conforme à l’article 30i) de la Loi parce que la Requérante ne pouvait pas être convaincue qu’elle avait droit d’employer la Marque à la lumière de l’emploi et de l’enregistrement antérieur des marques de l’Opposante.

[12]           L’article 30i) de la Loi exige simplement que le requérant, dans sa demande, se déclare convaincu d’avoir droit à l’enregistrement de sa marque de commerce. Lorsque le requérant a fourni la déclaration exigée, un motif d’opposition fondé sur l’article 30i) ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu’il existe une preuve que le requérant est de mauvaise foi [voir Sapodilla Co Ltd c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p 155]. La simple connaissance de l’existence des marques de commerce de l’Opposante ne peut pas, en soi, servir de fondement à une allégation selon laquelle la Requérante ne pouvait pas être convaincue de son droit d’employer la Marque [voir Woot, Inc c WootRestaurants Inc Les Restaurants Woot Inc 2012 COMC 197 (CanLII)].

[13]           Comme il n’y a aucune preuve de mauvaise foi en l’espèce, je rejette ce motif d’opposition.

Motif fondé sur l’article 12(1)b) – la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle donne une description claire

[14]           Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) de l’Opposante peut être divisé en trois volets, soit les suivants :

         DUTCH TRADITIONS & Dessin donne une description claire de la nature et/ou de la qualité des produits de la Requérante;

         DUTCH TRADITIONS & Dessin donne une description claire des conditions de production des produits de la Requérante ou des personnes qui les produisent;

         DUTCH TRADITIONS & Dessin donne une description claire du lieu d’origine des produits visés par la demande.

[15]           Chacun de ces trois volets est fondé sur la prémisse que la Marque décrit des produits alimentaires et de grignotage qui sont d’origine néerlandaise. À cet égard, l’Opposante s’appuie sur les déclarations suivantes de la Requérante :

         La marque de commerce projetée de la Requérante sera uniquement appliquée à ces marchandises qui proviennent des Pays-Bas et, par conséquent, décrira ces marchandises comme étant d’origine néerlandaise [contre-déclaration, alinéa 4b)];

         Les marchandises mentionnées dans la demande de la Requérante seront offertes dans des magasins de spécialités ethniques d’origine néerlandaise au Canada, et dans les sections de spécialités ethniques de magasins de détail canadiens, également d’origine néerlandaise [contre-déclaration, alinéa 4d)];

         Le dessin de la Requérante est appliqué à des produits provenant des Pays-Bas et vendus en Ontario depuis 1998. Il a été appliqué à des biscuits, des bonbons, des chocolats, de la réglisse, des légumes déshydratés et des craquelins. Il figurait sur des produits vendus dans des magasins offrant des produits d’origine néerlandaise et dans certaines chaînes de détaillants en Ontario [affidavit Van Niekerk, paragraphe 7].

[16]           L’Opposante ajoute également que les caractéristiques graphiques et les couleurs de la marque projetée visent à laisser entendre que les produits sont d’origine néerlandaise pour les raisons suivantes :

         le moulin à vent est un symbole couramment associé aux Pays-Bas et aux Néerlandais;

         l’élément graphique prenant la forme d’un ruban rouge, blanc et bleu dans la marque projetée est représentatif du drapeau néerlandais;

         la couleur orange de la partie supérieure du rectangle dans la marque projetée est représentative de la famille royale néerlandaise et de la Maison d’Orange-Nassau, et symbolise la fierté nationale néerlandaise.

[17]           Lorsqu’il s’agit d’analyser une marque de commerce aux termes de l’article 12(1)b) de la Loi, il faut considérer la marque de commerce dans son ensemble et sous l’angle de la première impression, et éviter de la décomposer en ses éléments constitutifs [Wool Bureau of Canada Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1978), 40 CPR (2d) 25 (CF 1re inst), aux p 27 et 28; Atlantic Promotions Inc c Canada (Registraire des marques de commerce) (1984), 2 CPR (3d) 183 (CF 1re inst), à la p 186]. Il a été statué que le mot « nature » à l’article 12(1)b) s’entend d’une particularité, d’un trait ou d’une caractéristique du produit et que le mot « claire » signifie « facile à comprendre, évident ou simple » [voir Drackett Co of Canada Ltd c American Home Products Corp (1968), 55 CPR 29, à la p 34]. Enfin, la date pertinente pour évaluer l’enregistrabilité d’une marque de commerce aux termes de l’article 12(1)b) de la Loi est la date de production de la demande, soit en l’espèce le 16 avril 2012 [Shell Canada Ltd c P.T. Sari Incofood Corp (2005), 41 CPR (4th) 250, (CF) et Fiesta Barbeques Ltd c General Housewares Corp (2003), 28 CPR (4th) 60 (CF)].

[18]           J’examinerai maintenant, en gardant à l’esprit la jurisprudence pertinente, les trois volets du motif fondé sur l’article 12(1)b) de l’Opposante, mais dans l’ordre inverse de leur présentation ci-dessus.

1) La Marque donne-t-elle une description claire du lieu d’origine des produits visés par la demande?

[19]           Selon MC Imports Inc c AFOD Ltd, 2016 CAF 60, une marque de commerce donne une description claire du lieu d’origine si la marque de commerce, qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, est un nom géographique et que les produits ou services liés à la marque proviennent du lieu désigné par ce nom géographique. Le récent énoncé de pratique du Bureau des marques de commerce sur les noms géographiques (intitulé Lieu d’origine — Alinéa 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce) indique qu’une marque de commerce sera considérée comme un nom géographique lorsque sa seule signification est celle d’un nom géographique ou que, malgré qu’elle ait de multiples significations, sa signification principale ou prédominante est celle d’un nom géographique.

[20]           En l’espèce, l’Opposante n’a présenté aucun élément de preuve à l’appui de ce motif d’opposition. Il n’apparaît donc pas clairement, à mon avis, que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif.

[21]           Cela étant dit, la Cour a statué que, pour déterminer si une marque de commerce correspond à l’exclusion prévue à l’article 12(1)b), le registraire doit non seulement tenir compte de la preuve dont il dispose, mais également user de bon sens dans l’évaluation des faits [voir Neptune SA c Canada (Procureur général), 2003, 29 CPR (4th) 497 (CF) et Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario c Canada, supra]. Je souligne qu’en plus d’user de bon sens, il m’est loisible d’exercer mon pouvoir discrétionnaire de prendre en considération les définitions du dictionnaire des mots qui composent la Marque [voir Yahoo! Inc c audible.ca inc (2009), 76 CPR (4th) 222 (COMC)].

[22]           Le Canadian Oxford Dictionary définit « DUTCH » de la manière suivante [Traduction] :

Adjectif

Se rapportant aux Pays-Bas, à ses habitants ou à leur langue

Nom

1.      La langue des Pays-Bas

2.      Les habitants des Pays-Bas, considérés collectivement

[23]           Il ressort clairement de la définition du dictionnaire reproduite ci-dessus que « DUTCH » [néerlandais] n’est pas un nom géographique, mais bien un mot utilisé pour décrire les personnes qui vivent aux Pays-Bas ou la langue qu’elles parlent. En outre, bien que les produits de la Requérante se rapportent aux Pays-Bas parce qu’ils sont d’origine néerlandaise, le fait que la Marque comprenne le mot TRADITIONS l’exclut, à mon sens, de cette partie de l’interdiction prévue à l’article 12(1)b). Ainsi, étant donné que la marque DUTCH TRADITIONS & Dessin n’est pas un nom géographique, on ne peut pas conclure qu’elle donne une description claire du lieu d’origine des produits de la Requérante.

[24]           Ce volet de l’argumentation avancée par l’Opposante à l’appui de ce motif d’opposition est donc rejeté. J’examinerai donc maintenant le second volet du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) de l’Opposante.

2) La Marque donne-t-elle une description claire des conditions de production des produits de la Requérante ou des personnes qui les produisent?

[25]           S’agissant du deuxième argument avancé par l’Opposante à l’appui de ce motif, j’ai eu l’occasion d’examiner la signification que revêt l’article 12(1)b) en ce qui a trait aux personnes qui produisent les produits dans Wal-Mart Stores, Inc c Tough Stuff Distributors, Inc (1999), 1 CPR (4th) 271 (TMOB), à la p 278 [Traduction] :

Il n’y a que très peu de jurisprudence sur le sens qu’il faut donner à l’art. 12(1)b) en ce qui a trait aux personnes qui produisent les marchandises ou au lieu d’origine des marchandises. Même si je considère que le mot CANADA donne une description claire du lieu d’origine des vêtements et de l’équipement sportif (à cet égard, voir Carling Breweries Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1984), 1 CPR (3d) 191(CF 1re inst.) à la p. 195), je n’arrive pas à la même conclusion lorsque je considère la marque CANADA PROUD dans son ensemble. Il m’est également impossible de conclure que la marque CANADA PROUD donne une description claire des personnes qui produisent les marchandises projetées. À mon avis, l’art. 12(1)b) n’a pas pour objet d’empêcher l’enregistrement de marques de commerce susceptibles de décrire les sentiments ou l’état d’esprit des personnes qui produisent les marchandises en liaison avec lesquelles la marque de commerce sera employée. J’estime plutôt que cette partie de l’art. 12(1)b) vise à empêcher l’enregistrement de marques de commerce qui donnent une description claire de la nature des personnes qui produisent les marchandises visées par la demande, p. ex. le mot POTTER [potier] ne serait pas enregistrable en liaison avec les marchandises « poteries », pas plus que le mot BAKER [boulanger] ne serait enregistrable avec les marchandises « pains ». Par conséquent, je rejette ce motif.

[26]           En l’espèce, la question est de savoir si la marque DUTCH TRADITIONS & Dessin donne une description claire des personnes qui produisent les produits projetés. La Requérante admet que ces produits proviennent des Pays-Bas. Il est vrai que le mot « DUTCH » [néerlandais], considéré seul, peut décrire la nature des personnes qui produisent les produits projetés, mais je dois considérer la Marque dans son ensemble. À mon avis, la Marque DUTCH TRADITIONS & Dessin ne donne pas une description claire de la nature des personnes qui produisent les produits de consommation alimentaires de la Requérante. Le second argument avancé par l’Opposante à l’appui de ce motif est donc également rejeté.

3) La Marque donne-t-elle une description claire de la nature et/ou de la qualité des produits de la Requérante?

[27]           Le dernier argument de l’Opposante que je dois examiner en ce qui concerne ce motif d’opposition est la question de savoir si la Marque donne une description claire de la nature ou de la qualité des produits visés par la demande. L’Opposante affirme dans son plaidoyer écrit que [Traduction] « il est clair que les mots DUTCH TRADITIONS visent à véhiculer l’idée que les produits alimentaires liés [à la Marque] sont d’origine néerlandaise et que, par conséquent, ils donnent une description claire de la nature ou de la qualité des produits, de leurs conditions de production ou des personnes qui les produisent et de leur lieu d’origine, en tant que produits alimentaires et de grignotage [Traduction] “traditionnels” qui sont [Traduction] “d’origine néerlandaise” » (plaidoyer écrit de l’Opposante, paragraphe 38).

[28]           Là encore, j’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter des dictionnaires pour connaître la définition du mot « traditions ». La définition que j’ai trouvée dans le Canadian Oxford Dictionary est la suivante [Traduction] :

Nom

Transmission de coutumes et de croyances de génération en génération, ou fait d’être ainsi transmis.

[29]           La Marque est constituée de deux mots ordinaires du dictionnaire, DUTCH [néerlandais] et TRADITIONS, ainsi que d’un élément graphique. Je conviens avec l’Opposante que l’élément « DUTCH » [néerlandais], tel qu’il est appliqué aux produits de la Requérante, donne une description claire de la nature ou de la qualité des produits. La question qui se pose est donc de savoir si l’ajout du mot « TRADITIONS », le dessin de moulin à vent et les revendications de couleur font en sorte que la Marque dans son ensemble ne donne pas une description claire.

[30]           J’estime que le mot « TRADITIONS », en tant que nom désignant, selon la définition ci-dessus, la transmission de coutumes et de croyances, ne donne pas une description claire de la nature ou de la qualité des produits de la Requérante qui prennent la forme de produits de consommation alimentaires. Dans son plaidoyer écrit, l’Opposante fait référence à l’adjectif « traditional » [traditionnel], plutôt qu’au nom « TRADITIONS », qui est le mot employé dans la Marque. Il est vrai que l’adjectif « traditional » [traditionnel] employé conjointement avec l’adjectif « DUTCH » [néerlandais] peut décrire des produits alimentaires typiques des Pays-Bas ou généralement consommés dans le cadre des coutumes de ce pays, mais le fait que le mot TRADITIONS soit un nom confère à la Marque une signification différente qui, à mon avis, ne donne pas une description claire de la nature ou de la qualité des produits alimentaires visés par la demande. En conséquence, j’estime que, sous le coup de la première impression, la Marque dans son ensemble ne donne pas une description claire de la nature ou de la qualité des produits. Le troisième argument avancé par l’Opposante à l’appui de ce motif est donc également rejeté.

Article 12(1)d) – la Marque n’est pas enregistrable parce qu’il existe une probabilité raisonnable de confusion avec une ou plusieurs des marques de l’Opposante

[31]           L’Opposante allègue que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec une ou plusieurs de ses marques de commerce déposées énumérées ci-dessous :

Marque de commerce

No d’enregistrement

OLD DUTCH

LMC104697

WINDMILL DESIGN

LMC154824

WINDMILL DESIGN

LMC222319

OLD DUTCH DESIGN

LMC222320

WINDMILL & DESIGN

LMC223333

DOUBLE DUTCH

LMC406712

DUTCH CRUNCH

LMC448550

DUTCH GOURMET

LMC820855

 

[32]           La date pertinente pour évaluer un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[33]           J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre et je confirme que les enregistrements de l’Opposante existent [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif.

[34]           J’estime que, sur ces huit enregistrements existants, les enregistrements no LMC104697de la marque OLD DUTCH et no LMC154824 de la marque figurative WINDMILL [moulin à vent] sont ceux qui sont le plus susceptibles de permettre à l’Opposante d’obtenir gain de cause, à la fois parce que les marques visées par ces enregistrements ressemblent davantage à la Marque que les autres marques déposées de l’Opposante et parce qu’il s’agit des marques de l’Opposante qui sont les plus anciennes et qui ont été employées le plus longuement (comme nous le verrons plus en détail ci-dessous). J’axerai donc mon évaluation de la probabilité de confusion sur ces marques déposées – s’il s’avère que la confusion n’est pas probable entre la Marque de la Requérante et l’une ou l’autre de ces marques de l’Opposante, elle ne sera pas davantage probable avec l’une quelconque des autres marques déposées de l’Opposante.

[35]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L’article 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Cet article ne porte pas sur la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais sur la confusion portant à croire que des produits ou des services provenant d’une source proviennent d’une autre source.

[36]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles expressément énoncées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc (2011), 92 CPR (4th) 361 (CSC)].

[37]           J’examinerai maintenant chacun de ces facteurs successivement.

le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[38]           La marque nominale OLD DUTCH et la marque figurative WINDMILL [représentant un moulin à vent] de l’Opposante suggèrent toutes deux un lien géographique avec les Pays-Bas, ce qui a un certain impact sur leur caractère distinctif inhérent. La Marque ne possède pas non plus un caractère distinctif inhérent très marqué, car elle est suggestive des [Traduction] « aliments d’origine néerlandaise » visés par la demande.

[39]           En ce qui concerne le caractère distinctif acquis des marques de commerce, l’Opposante a produit comme preuve un affidavit de Bonna Jean Bateman, directrice des finances de l’Opposante. La preuve de Mme Bateman est la suivante :

(a)      L’Opposante a commencé à vendre des croustilles assaisonnées sous la marque nominale OLD DUTCH au Canada en 1954 (Bateman, para 3);

(b)    Au fil du temps, la gamme de produits de l’Opposante s’est élargie pour inclure d’autres produits de grignotage tels que des bâtonnets de pomme de terre, des croustilles de maïs, du maïs éclaté, des produits de maïs soufflé, des produits soufflés à saveur de bacon, des noix, des graines de tournesol, des graines de citrouille, des bretzels, des craquelins, des trempettes, des sauces, des collations à la viande et des bonbons (les produits « OLD DUTCH ») (Bateman, para 5);

(c)     Chaque sac, chaque boîte et chaque pot est considéré comme une unité et chaque unité arbore la marque de commerce OLD DUTCH, généralement dans la même police de caractères que celle illustrée dans l’enregistrement no LMC222,320 et généralement accompagnée d’un ou plusieurs dessins de moulin à vent (Bateman, para 7);

(d)    Au cours des cinq années financières complètes comprises dans la période allant de 2009 à 2013, les recettes annuelles de l’Opposante provenant de la vente de produits OLD DUTCH au Canada se sont élevées en moyenne à plus de 340 000 000 $; ces produits arboraient tous des marques nominales OLD DUTCH, une ou plusieurs des marques figuratives représentant un moulin à vent, et une ou plusieurs des marques de commerce spécifiques à des produits Old Dutch, dont DUTCH CRUNCH et DUTCH GOURMET (Bateman, para 27);

(e)     Les ventes brutes de l’Opposante pour les trois premiers trimestres de 2014 s’élevaient à environ 250 000 000 $ (Bateman, para 35);

(f)     L’Opposante mène des campagnes d’envergure nationale pour faire la publicité de ses produits dans tous les médias. Ces campagnes comprennent la distribution massive de circulaires, des annonces à la radio et à la télévision, la diffusion de vidéos sur Internet – Youtube, des promotions sur le lieu de vente, des publicités dans des magazines et des coupons, des concours et des commandites d’événements sportifs, notamment des matchs de la Ligue nationale de hockey et la Coupe Memorial de la Ligue canadienne de hockey de 2008 à 2014 [Bateman, pièces H à M];

(g)    L’Opposante participe également à de nombreuses publicités réalisées en coopération avec ses clients détaillants, qui comprennent des promotions ciblant des produits précis intégrées à la publicité générale du client détaillant concernant ses services de vente au détail [Bateman, para 13];

(h)    Au cours des quatre années financières complètes comprises dans la période allant de 2010 à 2013, l’Opposante a engagé des dépenses publicitaires annuelles qui se sont élevées en moyenne à plus de 50 000 000 $ pour des publicités et des promotions au Canada; toutes ces publicités et promotions présentaient les marques nominales, un ou plusieurs des dessins de moulins à vent, et une ou plusieurs des marques de commerce spécifiques à des produits Old Dutch, dont DUTCH CRUNCH ou DUTCH GOURMET [Bateman, para 21];

(i)      Les dépenses publicitaires engagées au cours des trois premiers trimestres de 2014 sont en voie de dépasser 50 000 000 $pour l’année financière 2014 [Bateman, para 21];

(j)      Les produits de l’Opposante sont distribués et vendus dans toutes les provinces du Canada par l’intermédiaire d’un réseau de représentants de commerce salariés itinérants et, à la date de l’affidavit de Mme Bateman, de 337 entrepreneurs indépendants également. Les produits de l’Opposante sont vendus au grand public par l’intermédiaire d’une variété de points de vente au détail, dont des magasins d’aliments en vrac, des dépanneurs, des magasins à un dollar, des pharmacies, des épiceries, des magasins à grande surface, des grands magasins, des stations-service, des installations sportives, des écoles et des établissements d’enseignement, des services alimentaires et des comptoirs de vente d’aliments, et des machines distributrices [Bateman, para 23 et 24].

[40]           Les pièces jointes à l’affidavit de Mme Bateman montrent qu’une grande partie des ventes de l’Opposante sont attribuables à son produit principal, c’est-à-dire les croustilles.

[41]           Compte tenu de ce qui précède, je peux conclure que la marque nominale OLD DUTCH et la marque figurative WINDMILL [représentant un moulin à vent] de l’Opposante sont devenues connues dans une mesure considérable au Canada.

[42]           La demande, en revanche, est fondée sur l’emploi projeté. Bien qu’il y ait une certaine preuve que la Marque a été employée par une prédécesseure en titre, cette preuve n’est pas suffisante pour me permettre de conclure que cet emploi a été significatif.

[43]           Ce facteur favorise donc l’Opposante.

la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[44]           Comme je l’ai souligné ci-dessus, la marque nominale OLD DUTCH et la marque figurative WINDMILL [représentant un moulin à vent] de l’Opposante sont en usage depuis au moins 1954 alors que la Requérante n’a produit aucune preuve significative de l’emploi de sa Marque en liaison avec les produits visés par la demande. Ce facteur favorise donc également l’Opposante.

le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce

[45]           Pour évaluer le genre des produits, services ou entreprises et la nature du commerce, je dois comparer l’état déclaratif des produits de la Requérante avec l’état déclaratif des produits qui figure dans l’enregistrement invoqué par l’Opposante [voir Henkel Kommanditgesellschaft Auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); et Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. L’examen de ces états déclaratifs doit cependant être effectué dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce envisagé par les parties, et non l’ensemble des commerces que le libellé est susceptible d’englober. Une preuve de la nature véritable des commerces des parties est utile à cet égard [voir McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd (1996), 68 CPR (3d) 168 (CAF); Procter & Gamble Inc c Hunter Packaging Ltd (1999), 2 CPR (4th) 266 (COMC); et American Optical Corp c Alcon Pharmaceuticals Ltd (2000), 5 CPR (4th) 110 (COMC)].

[46]           En l’espèce, l’enregistrement de la marque nominale OLD DUTCH de l’Opposante vise diverses grignotines, dont des croustilles, du maïs éclaté, des arachides salées et des bretzels. L’enregistrement du dessin WINDMILL [représentant un moulin à vent] de l’Opposante vise des grignotines similaires, ainsi que des vêtements, des sacs à dos et des accessoires promotionnels pour hommes et femmes, et des articles promotionnels. La Marque de la Requérante, quant à elle, est destinée à un emploi en liaison avec de la compote de pommes, des biscuits, de la réglisse, de la soupe et des légumes. Bien qu’ils ne soient pas identiques, les produits des parties se recoupent donc dans une certaine mesure.

[47]           L’Opposante soutient que les voies de commercialisation des parties se recoupent également. À l’appui de cette affirmation, l’Opposante invoque la preuve de Mme Bateman et de Mme Anderson, une formatrice en applications à l’emploi de l’Opposante.

[48]           La preuve de Mme Bateman vise à démontrer que la prédécesseure en titre de la Requérante, Continental Imports Limited, a exploité un magasin de détail à Barrie, en Ontario, et a fait la promotion de son entreprise par l’intermédiaire d’un site Web situé à l’adresse www.dutchimports.ca (Bateman, pièces X,Y,Z). Comme pièce A, elle a joint à son affidavit un extrait du site Web Dutch Imports, obtenu le 28 octobre 2014, qui comprend des copies de pages Web qu’elle a téléchargées à partir du site Web et fait imprimer. L’Opposante soutient que quatre des magasins énumérés sur le site Web qui vendent ou ont vendu au détail les produits de la Requérante vendent également au détail les produits de l’Opposante.

[49]           L’Opposante soutient en outre que l’affidavit de Brian Bambury, directeur régional des ventes pour l’est de l’Ontario, montre que, dans un de ces établissements, des produits arborant des variantes de la marque projetée étaient offerts en vente dans le même rayon qu’un produit de l’Opposante, ainsi que de l’autre côté de l’allée. À cet égard, le 30 juillet 2014, il s’est rendu dans les locaux d’un des clients de l’Opposante, Bakker’s General Store à Manotick, en Ontario, et a constaté qu’un produit portant une étiquette arborant les mots DUTCH TRADITIONS et un dessin de moulin à vent était offert en vente sur la tablette se trouvant directement sous le produit OLD DUTCH « popcorn twist » [torsades de maïs soufflé].

[50]           Je considère que la preuve de l’Opposante n’est pas tellement pertinente, car la preuve de la Requérante indique que sa prédécesseure en titre, Continental Imports Limited, a cessé ses activités le 31 mars 2015, et il ne ressort pas clairement de la preuve de la Requérante que cette dernière exerce ses activités de la même manière que sa prédécesseure en titre. De plus, les produits repérés par M. Bambury arborant des variantes de la marque projetée ne correspondent à aucun des produits visés par la demande.

[51]           Cela étant dit, la Requérante a elle-même présenté une preuve indiquant que des produits que je présume être d’anciens produits alimentaires de la Requérante ont été vendus dans les mêmes magasins que des produits de l’Opposante, et à proximité immédiate de ces derniers [Van Niekerk, paragraphes 4 et 5]. Par conséquent, je pense qu’il est raisonnable de présumer que les produits alimentaires des parties emprunteraient également les mêmes voies de commercialisation.

le degré de ressemblance entre les marques de commerce

[52]           Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, supra, au para 49, la Cour suprême du Canada a indiqué que le degré de ressemblance est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion parmi ceux énoncés à l’article 6(5) de la Loi.

[53]           Lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance entre des marques, il faut considérer les marques de commerce dans leur ensemble et éviter de placer les marques côte à côte dans le but de les comparer et de relever les similitudes ou les différences entre leurs éléments constitutifs [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée (2006), 49 CPR (4th) 401 (CSC), au para 20]. En outre, bien que la première partie d’une marque soit souvent la plus importante pour distinguer des marques entre elles, il a également été statué que lorsque la première partie ou la partie dominante d’une marque est un mot descriptif d’usage courant, son importance s’en trouve diminuée : voir Conde Nast Publications Inc c Union des Editions Modernes (1979), 46 CPR (2d) 183, à la p 188 (CF 1re inst). Dans Masterpiece, la Cour suprême a également indiqué qu’il est préférable, lorsqu’il s’agit de comparer des marques, de se demander d’abord si l’un des aspects de celles-ci est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, supra, au paragraphe 64].

[54]           En l’espèce, la Marque et la marque nominale de l’Opposante comprennent toutes deux le mot DUTCH [néerlandais]. Certes, ce mot est le premier élément de la Marque, mais comme il est passablement descriptif des produits de la Requérante, je considère que la partie dominante de la Marque de la Requérante est le mot TRADITIONS. Puisque le mot DUTCH [néerlandais] est l’élément dominant de la marque nominale de l’Opposante, je ne considère pas qu’il existe une forte ressemblance entre la Marque et la marque nominale de l’Opposante dans la présentation et dans le son.

[55]           La Marque et la marque figurative de l’Opposante comprennent toutes deux un dessin de moulin à vent. Or, là encore, étant donné la connotation descriptive que revêt ce dessin en liaison avec les produits de la Requérante, je ne considère pas que les marques des parties se ressemblent beaucoup dans la présentation et dans le son, car j’estime que l’élément dominant de la Marque est le mot TRADITIONS.

[56]           En ce qui concerne les idées suggérées par les marques, j’estime que les marques suggèrent toutes un lien géographique avec les Pays-Bas en raison du mot « DUTCH » [néerlandais], du dessin WINDMILL [représentant un moulin à vent], ou des deux. Les idées suggérées par les marques sont différentes, car la Marque dans son ensemble suggère la transmission de coutumes ou de croyances d’origine néerlandaise, tandis que la marque OLD DUTCH de l’Opposante dans son ensemble évoque quelque chose ayant trait aux Pays-Bas qui existe depuis longtemps ou qui est issu du passé.

autres circonstances de l’espèce – état du registre

[57]           La Requérante a fait valoir que l’importance de toute ressemblance entre les marques était atténuée par la preuve de l’état du registre présentée par voie de l’affidavit Van Niekerk. La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où l’on peut en tirer des conclusions quant à l’état du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd (1992), 41 CPR (3d) 432 (COMC); Welch Foods Inc c Del Monte Corp (1992), 44 CPR (3d) 205 (CF 1re inst)]. De telles conclusions quant à l’état du marché ne peuvent être tirées de la preuve de l’état du registre que si un grand nombre d’enregistrements pertinents a été repéré [Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc (1992), 43 CPR (3d) 349 (CAF)].

[58]           Comme pièce D, M. Van Niekerk a joint à son affidavit une [Traduction] « recherche effectuée relativement à notre demande ». Cinq points sont présentés à la première page de la pièce D; les deux premiers points sont formulés comme suit [Traduction] :

i) 41 marques de commerce, répertoriées à partir du site Web de l’OPIC, comprenant le mot « Dutch » [néerlandais] appliquées à des produits de consommation alimentaires. Voir « i ».

ii) 24 marques de commerce, répertoriées à partir du site Web de l’OPIC, utilisant le code de Vienne 7.1.13 Moulins à vent ou à eau, appliquées à des produits de consommation alimentaires et comprenant un dessin semblable à ceux de la Requérante et de l’Opposante. Voir « ii ».

[59]           Comme pièces « i » et « ii », il a joint à son affidavit les détails de 41 marques de commerce déposées actives qui comprennent le mot DUTCH [néerlandais] et sont liées à des produits de consommation alimentaires, ainsi que les détails de 23 marques de commerce déposées actives qui comprennent un dessin de moulin à vent ou à eau et sont liées à des produits de consommation alimentaires, tous extraits de la base de données de l’OPIC, et tous datés du 4 juin 2015 (le jour précédent la date à laquelle M. Van Niekerk a souscrit son affidavit). Les marques de commerce de l’Opposante représentaient une certaine part de ces résultats, mais il y avait tout de même au moins 30 marques de tiers déposées comprenant le mot DUTCH [néerlandais] et environ 15 marques de tiers déposées comprenant un dessin de moulin à vent, toutes liées à des produits de consommation alimentaires.

[60]           L’Opposante soutient que cette preuve ne fournit aucun détail sur les paramètres de la recherche ni même sur l’identité de la personne qui a effectué la recherche, et fait allusion à une preuve par ouï-dire. À ce titre, l’Opposante fait valoir que ces documents ne fournissent aucune information ayant une valeur probante.

[61]           Bien que des résultats de recherches effectuées par des personnes autres que celle ayant souscrit l’affidavit aient été exclus par le passé au motif qu’ils relevaient du ouï-dire [voir, par exemple, Royal Bank of Canada c Manufacturers Life Insurance Company, 2002 CanLII 61430 (COMC)], en l’espèce, il n’apparaît pas clairement que M. Van Niekerk n’a pas effectué la recherche lui-même. L’Opposante avait la possibilité de contre-interroger M. Van Niekerk relativement à son affidavit, mais elle a choisi de ne pas le faire. Bien que l’absence d’un contre-interrogatoire ne m’empêche pas d’évaluer la valeur ou le poids de sa preuve [voir London Drugs Ltd c Purpharm Inc. (2006), 54 CPR (4th) 87, aux p 92 à 93 (COMC)], à la lumière de sa preuve dans son ensemble, je n’ai pas véritablement de raison de douter de la fiabilité des résultats de recherche. Je suis, par conséquent, disposée à leur accorder un certain poids.

[62]           Ainsi, j’admets que M. Van Niekerk a présenté en preuve un nombre d’enregistrements suffisant pour démontrer que l’emploi du mot DUTCH [néerlandais] ou d’un dessin de moulin à vent est courant dans le commerce [voir Old Spaghetti Factory Canada Ltd c Spaghetti House Restaurants Ltd (1999), 2 CPR (4th) 398, à la p 407 (COMC)]. En d’autres termes, vu le nombre d’enregistrements pertinents, on peut présumer que les consommateurs ont l’habitude de voir ces éléments couramment employés dans le commerce en liaison avec ces types de produits.

famille de marques de commerce

[63]           L’Opposante a affirmé posséder une famille de marques de commerce.

[64]           Pour pouvoir invoquer une famille de marques de commerce, un opposant doit démontrer l’emploi de chacune des marques de la famille alléguée [McDonald’s Corp c Alberto-Culver Co (1995), 61 CPR (3d) 382 (COMC); McDonald’s Corp c Yogi Yogurt Ltd (1982), 66 CPR (2d) 101 (CF 1re inst)]. De plus, la présomption de l’existence d’une famille est réfutée s’il existe une preuve que la caractéristique commune à la famille alléguée est enregistrée ou employée par des tiers [[Thomas J Lipton Inc c Fletcher's Fine Foods Ltd (1992), 44 CPR (3d) 279 (COMC), aux p 286 et 287; Techniquip Ltd c Ass. Olympique canadienne (1999), 3 CPR (4th) 298 (CAF)].

[65]           En l’espèce, bien que l’Opposante ait démontré l’emploi d’au moins plusieurs de ses marques déposées, la présomption de l’existence d’une famille est réfutée à la lumière de la preuve de la Requérante indiquant que la caractéristique commune à la famille (c.-à-d. le mot DUTCH [néerlandais]) a été enregistrée par de nombreux tiers en liaison avec des produits similaires.

[66]           Par conséquent, j’estime qu’il ne s’agit pas d’une circonstance pertinente en l’espèce.

conclusion

[67]           Le test à appliquer est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque de commerce DUTCH TRADITIONS & Dessin sur les produits alimentaires de la Requérante, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la marque nominale OLD DUTCH et de la marque figurative WINDMILL [représentant un moulin à vent] de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, supra].

[68]           Après examen de l’ensemble des circonstances de l’espèce, malgré le caractère distinctif acquis des marques de l’Opposante, la période pendant laquelle elles ont été en usage, le recoupement évident entre les produits des parties et le recoupement potentiel entre leurs voies de commercialisation, je suis d’avis que, considérées conjointement, l’absence générale de ressemblance entre les marques et la preuve de l’état du registre produite par la Requérante sont suffisamment importantes pour faire pencher la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante.

[69]           Bien que l’Opposante ait démontré que ses marques ont acquis un caractère distinctif grâce à un emploi abondant s’étendant sue une longue période et qu’elles méritent donc une protection considérable, la preuve de la Requérante établissant l’existence d’un certain nombre d’enregistrements de tiers pour des marques comprenant le mot « DUTCH » [néerlandais] ou un dessin de moulin à vent qui sont employées dans l’industrie alimentaire limite l’étendue de la protection qui peut être accordée aux marques de l’Opposante. Je considère qu’il s’agit là d’un facteur particulièrement pertinent aux fins de la détermination de la probabilité de confusion entre les marques des parties, sachant que la seule ressemblance entre les composantes textuelles des marques des parties est le mot commun DUTCH [néerlandais], et que la seule ressemblance entre la Marque et la marque figurative de l’Opposante est le dessin de moulin à vent.

[70]           Dans United States Polo Assn c Polo Ralph Lauren Corp, (2000), 9 CPR (4th) 51, le juge Malone, se penchant sur une question similaire, s’est exprimé en ces termes au para 25 [Traduction] :

 [25] La présence d’un élément commun dans les marques de commerce (soit le cheval et le maillet de polo en l’occurrence) a été jugée dans d’autres instances comme ayant des répercussions importantes sur la question de la confusion. Comme le déclare le Contrôleur général dans Harrods Ltd. - In the Matter of an Application by - to Register a Trade Mark (1934), 52 R.P.C. 65, à la p. 70] :

« Lorsqu’il s’agit d’examiner la possibilité de confusion entre deux marques de commerce, c’est un principe généralement reconnu que, si les deux marques en question comportent un élément commun [c.-à-d. Boston] qui figure également dans plusieurs autres marques utilisées sur le même marché, cette utilisation courante sur le marché tend à inciter les acheteurs à porter davantage leur attention sur les autres éléments, non communs, des différentes marques et à faire ainsi la distinction entre elles. »

[71]           En l’espèce, la preuve de la Requérante, comme je l’ai déjà indiqué, démontre l’existence d’un nombre suffisant d’enregistrements de tiers aussi bien en ce qui concerne le mot DUTCH [néerlandais] qu’en ce qui concerne les dessins de moulins à vent au sein de l’industrie alimentaire. Je dois, par conséquent, conclure que les consommateurs canadiens porteraient davantage leur attention sur les autres éléments de la marque de commerce afin de distinguer ainsi la source des produits de consommation alimentaires. En d’autres termes, les consommateurs canadiens ne s’attarderaient pas au mot « DUTCH » [néerlandais], mais plutôt au mot « TRADITIONS » et feraient, de cette façon, la distinction entre les marques de commerce.

[72]           La Requérante s’est donc acquittée de son fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité de confusion entre la Marque et l’une quelconque des marques de commerce déposées invoquées par l’Opposante dans la présente procédure.

[73]           Compte tenu de ce qui précède, je rejette le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d).

Article 16(3)a) et articles 38(2)d)/2 - Absence de droit à l’enregistrement et absence de caractère distinctif

[74]           Les autres motifs d’opposition sont également liés à la détermination de la probabilité de confusion entre la Marque et les marques de l’Opposante. Les dates pertinentes pour évaluer la probabilité de confusion au regard des motifs fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif sont, respectivement, la date de production de la demande et la date de l’opposition.

[75]           À mon avis, la principale différence entre ces motifs et le motif fondé sur l’article 12(1)d) est que la preuve de l’état du registre produite par la Requérante porte une date qui est postérieure aux deux dates pertinentes qui s’appliquent à ces motifs. Cependant, il ressort de mon examen de la preuve de l’état du registre jointe à l’affidavit de M. Van Niekerk que toutes les marques de tiers déposées pertinentes invoquées par la Requérante avaient déjà été enregistrées à la plus ancienne de ces deux dates. Ainsi, les différences entre les dates pertinentes n’ont pas d’incidence significative sur la détermination de la question de confusion entre les marques de commerce des parties. Par conséquent, ma conclusion ci-dessus selon laquelle les marques de commerce ne risquent pas d’être confondues s’applique aussi à ces motifs d’opposition, qui sont également rejetés.

Décision

[76]           Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition selon les dispositions de l’article 38(8) de la Loi.

______________________________

Cindy Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Judith Lemire, trad.


 

COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

DATE DE L’AUDIENCE : 7 novembre 2016

 

COMPARUTIONS

 

Robert Watchman                                                                    POUR L’OPPOSANTE

 

Jeff Van Niekerk                                                                     POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENTS AU DOSSIER

 

Pitblado LLP                                                                           POUR L’OPPOSANTE

 

Aucun agent nommé                                                                POUR LA REQUÉRANTE

 

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