Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2016 COMC 161

Date de la décision : 2016-09-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE,

NON RÉVISÉE]

 

Amacon Construction Ltd.

                                             

Opposante

et

 

Reid’s Heritage Homes Ltd.

Requérante

 

 

 



1,602,230 pour la marque de commerce LIVEWISE

Demande

[1]               Le 13 novembre 2012, Reid’s Heritage Homes Ltd. a produit une demande d'enregistrement relative à la marque de commerce LIVEWISE (la Marque) fondée sur l'emploi projeté au Canada en liaison avec les services suivants [Traduction] : promotion, gestion, vente et location de propriétés et de biens immobiliers; services d'entreprise générale et construction de lotissements résidentiels et de propriétés commerciales; services de courtage immobilier; plomberie; installation, réparation et entretien de systèmes électriques, de chauffage, de ventilation et de climatisation (les Services).

[2]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 11 décembre 2013.

[3]               Le 9 mai 2014, Amacon Construction Ltd. (l'Opposante) a produit une déclaration d'opposition. Les motifs d'opposition peuvent être résumés comme suit :

         La demande n'est pas conforme à l'article 30i) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), parce que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer ou d'enregistrer la Marque au Canada en liaison avec les Services, compte tenu de l'emploi antérieur, ou de l'emploi et de l'enregistrement antérieurs, par l'Opposante de la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante.

         La Marque n’est pas enregistrable suivant l'article 12(1)d) de la Loi, parce que la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce déposée LIVE WELL de l’Opposante (enregistrement no LMC619,539).

         La Requérante n'a pas droit à l'enregistrement de la Marque suivant l'article 16(3)a) de la Loi, parce que la Marque créait de la confusion avec la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante qui avait été antérieurement employée au Canada.

         Suivant l'article 2 de la Loi, la Marque n'est pas distinctive en ce qu’elle ne distinguera pas et n'est pas adaptée à distinguer les Services des services de l'Opposante.

[4]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante. Au soutien de son opposition, l'Opposante a produit les affidavits de Marcello S. De Cotiis et d'Ailbish Skinner. Au soutien de sa demande, la Requérante a produit les affidavits de Blake Seeberger et de Beth Boisvert. Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient toutes deux présentes à l'audience qui a été tenue.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[5]               C'est à la Requérante qu'incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante a toutefois le fardeau de preuve initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limited c The Molson Companies Limited (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298].

[6]               Les dates pertinentes qui s’appliquent aux motifs d’opposition sont les suivantes :

         articles 38(2)a)/30i) – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c Scott Paper Ltd. (1984), 3 CPR (3d) 469, à la p 475 (COMC) et Tower Conference Management Co. c Canadian Exhibition Management Inc. (1990), 28 CPR (3d) 428, à la p 432 (COMC)];

         articles 38(2)b)/12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)];

         articles 38(2)c)/16(3)a) – la date de production de la demande [voir l’article 16(3) de la Loi];

         articles 38(2)d)/2 – la date de production de la déclaration d'opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c Stargate Connections Inc. (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Analyse des motifs d'opposition

Motif d'opposition fondé sur l'article 30i)

[7]               Le motif d'opposition fondé sur l'article 30i) porte que la Requérante ne pouvait pas être convaincue d'avoir droit d'employer ou d'enregistrer la Marque, parce que la Requérante devait forcément avoir connaissance de l'emploi et de l'enregistrement antérieurs par l'Opposante de sa marque de commerce LIVE WELL. Lorsqu'un requérant a fourni la déclaration exigée par l'article 30i), ce motif ne devrait être accueilli que dans des cas exceptionnels, comme lorsqu'il existe une preuve de mauvaise foi [Sapodilla Co c Bristol-Myers Co (1974), 15 CPR (2d) 152 (COMC), à la p 155]. Étant donné que la présente demande renferme la déclaration exigée et qu'il n'y a ni allégation ni preuve de mauvaise foi ou d'autres circonstances exceptionnelles, le motif fondé sur l'article 30i) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d)

[8]               Un opposant s’acquitte de son fardeau de preuve initial à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) si l'enregistrement qu’il invoque est en règle à la date de la décision relative à l’opposition. J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de consulter le registre [voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c Menu Foods Ltd. (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)] et je confirme que l'enregistrement de la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante est valide. Les détails de l'enregistrement sont reproduits ci-dessous.

No d'enregistrement

Marque de commerce

Services [Traduction]

LMC619,539

LIVE WELL

Services immobiliers, nommément services d’investissement, de développement, de construction, de commercialisation, de vente, d’exploitation et de gestion ayant trait à des propriétés résidentielles, commerciales, industrielles et institutionnelles, y compris les espaces à bureaux et les propriétés servant au commerce de détail, à la villégiature, à l’hébergement et aux soins de santé, nommément les soins gériatriques et les soins de longue durée.

[9]               Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. L'article 6(2) de la Loi porte que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[10]           Lorsqu'il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles expressément énoncées à l'article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent. Le poids qu'il convient d'accorder à chacun de ces facteurs n'est pas nécessairement le même [voir, de manière générale, Mattel, Inc. c 3894207 Canada Inc. (2006), 49 CPR (4th) 321 (CSC) et Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc. (2011), 96 CPR (4th) 361 (CSC)].

Le caractère distinctif inhérent

[11]           Les marques de commerce des parties possèdent un caractère distinctif inhérent très faible. La marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante suggère que les utilisateurs finaux des services de l'Opposante vont bien vivre [live well]. Par exemple, la brochure de vente de l'Opposante pour son projet TEMPO indique ce qui suit (affidavit De Cotiis, pièce B-1) [Traduction] :

… Notre engagement à l'égard du service et de la qualité ne s'arrête pas au moment de votre achat. Un service après-vente attentif offre aux clients la tranquillité d'esprit dont ils ont besoin pour se sentir en confiance dans leur nouvelle maison. Le tout pour que vous puissiez LIVE WELLMD [bien vivre].

La Marque suggère que les Services ont été conçus de manière intelligente ou judicieuse. Le site Web de la Requérante comprend le passage suivant (affidavit Seeberger, pièce B4) [Traduction] :

Pour chaque maison que nous construisons, notre engagement à l'égard de l'excellence est défini par notre programme LiveWISEMC, qui est à l'origine de l'importance primée que nous accordons à la qualité supérieure, à la satisfaction des clients, à la responsabilité environnementale, à la supériorité du service, à une conception exceptionnelle et à la création de quartiers dynamiques.

Pour conclure que la Marque et la marque de commerce LIVE WELL ne possèdent pas un caractère distinctif inhérent, il n'a pas été nécessaire que je tienne compte de la preuve de Mme Boisvert, qui présente dans le texte d'un affidavit la première définition des mots WELL [bien], LIVE WELL [bien vivre] et WISE [judicieux] figurant dans divers dictionnaires. L'Opposante s'est opposée à cette preuve, principalement au motif que Mme Boivert n'a pas joint d'imprimés tirés des dictionnaires en ligne qu'elle a consultés et que les définitions complètes n'ont pas été fournies (voir le plaidoyer écrit de l'Opposante, para 29). Étant donné que je n'ai pas tenu compte de la preuve de Mme Boivert, je ne m'y attarderai pas davantage.

La mesure dans laquelle les marques sont devenues connues et la période pendant laquelle elles ont été en usage

[12]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue en devenant connue au Canada par la promotion ou l'emploi. J'examinerai maintenant la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues au Canada.

[13]           La preuve d'emploi de la Marque de la Requérante est présentée dans l'affidavit de Blake Seeberger, le premier vice-président, Lotissements résidentiels de la Requérante. M. Seeberger fournit les éléments de preuve suivants :

         La Marque figure sur le site Web de la Requérante, accessible au www.reidsheritagehomes.com (para 7; pièces B1 à B4), et sur ses comptes Twitter et LinkedIn (para 13; pièces H1 et H2); sur des brochures de vente exposées dans les bureaux de vente (para 8; pièces C1 à C3); et dans des publicités publiées dans des journaux comme le Waterloo Region Record et le Guelph Mercury (para 9; pièces D1 à D5) et l'Active Adult Magazine (para 11; pièce F).

         Le programme LIVEWISE a été mentionné dans des articles publiés dans le New Home & Condo Guide et Your First Home & Condo (para 10; pièces E1 à 3).

         La Marque figure dans des publicités publiées dans les journaux et sur des sites Web de tiers annonçant les Services depuis aussi tôt que janvier 2013 (pièces D1, G3 et G4).

Étant donné que la Requérante n'a pas fourni de renseignements à propos des ventes ou de la promotion, du nombre de visites sur les sites Web ou les médias sociaux, il est difficile de déterminer la mesure dans laquelle la marque de commerce de la Requérante est devenue connue au Canada. Compte tenu de ces lacunes, je ne peux qu'inférer que la Marque est probablement connue dans une mesure limitée en Ontario.

[14]           La preuve d'emploi de la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante est présentée dans l'affidavit de Marcello S. De Cotis [sic], vice-président de l'Opposante. M. De Cotiis fournit les éléments de preuve suivants :

         La marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante a été employée en liaison avec plusieurs projets immobiliers à Mississauga, en Ontario, et à Vancouver, à Surrey et à Burnaby, en Colombie-Britannique (para 5).

         La marque de commerce LIVE WELL figure dans des publicités imprimées, dont des brochures de vente (para 9, pièces B1 à B3; C), sur des enseignes et des bannières entourant les projets immobiliers de l'Opposante (para 10, pièces D1 et D2, E) et sur des enseignes installées aux centres de vente (para 12; pièce H).

         La marque de commerce LIVE WELL a été employée sur le site Web de l'Opposante, accessible au www.amacon.com, de 2003 à 2014 (para 15; pièces L1 et L2) et sur ses comptes de médias sociaux, dont son fil Twitter, sa page Facebook et sa page Instagram (para 16; pièces M à O).

         La marque de commerce LIVE WELL figure sur une variété d'autres articles promotionnels employés pour faire la promotion des services de l'Opposante, y compris ses projets, comme des blocs-notes vierges, des épinglettes, des porte-clés, des stylos, des clés USB et des boîtes de menthes, qui sont distribués aux clients potentiels (para 14; pièce K).

         La marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante a été mentionnée dans des articles de journaux, dont le Toronto Star et le Vancouver Province (para 11, pièces F et G).

         L'Opposante a établi l'emploi de sa marque de commerce LIVE WELL depuis 2003 (voir, par exemple, la pièce L1, qui fait voir cette marque de commerce sur le site Web de l'Opposante en 2003).

         L'Opposante indique qu'en janvier 2012, les chiffres des ventes liés à ses projets immobiliers s'élevaient à plus de 800 millions de dollars canadiens et que les dépenses publicitaires liées à la publicité imprimée, la publicité en ligne, les accessoires promotionnels et la commandite d'événements (para 7) s'élevaient à plus de 7,5 millions de dollars (para 6 et 7). Bien que 800 millions de dollars canadiens représentent des ventes très impressionnantes, j'ai tenu compte du fait que le prix d'achat de l'une des maisons de l'Opposante serait considérable.

L'Opposante fournit également des éléments de preuve par la voie de l'affidavit de Mme Skinner, une stagiaire en droit à l'emploi de son agent. Mme Skinner fournit d'autres exemples de versions archivées du site Web de l'Opposante datant de 2003 à 2014 qui comprennent la marque de commerce LIVE WELL (pièces D1 à D11). Mme Skinner fournit aussi la preuve que la diffusion du Toronto Star en 2008 était d'environ 335 000 exemplaires (pièce A) et que la diffusion du Vancouver Province en 2013 était de 140 000 exemplaires (pièce B4). Je présume que la diffusion en 2014 serait semblable à celle de 2013.

[15]           Je conviens avec l'Opposante que son emploi de la marque de commerce LIVE WELL a accru le caractère distinctif de cette dernière. Ceci étant dit, j'estime que la marque de commerce LIVE WELL demeure néanmoins une marque relativement faible et que la preuve ne permet pas de conclure qu'elle est devenue connue au Canada au point de compenser le fait qu'elle ne possède pas un véritable caractère distinctif inhérent.

Le genre de produits, services ou entreprises

[16]           Ce facteur favorise l'Opposante, car les Services sont identiques aux services visés par l'enregistrement de l'Opposante ou les recoupent.

Le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'elles suggèrent

[17]           S'agissant du degré de ressemblance, dans l’arrêt Masterpiece, supra, la Cour suprême du Canada indique que la ressemblance est définie en tant que rapport entre des objets de même espèce présentant des éléments identiques (para 62) et que, pour mesurer le degré de ressemblance, il est préférable de se demander si l’un des aspects d’une marque de commerce est particulièrement frappant ou unique (para 64). En outre, s'il est généralement admis que le premier élément d'une marque est souvent le plus important pour distinguer des marques entre elles, l'importance de ce facteur diminue lorsque le premier élément est suggestif ou descriptif [Conde Nast Publications Inc c Union des Editions Modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst); Sky Solar Holdings Co., Ltd. c Skypower Global, 2014 COMC 262, aux para 48 à 50; Health4All Products Limited c The Nutraceutical Medicine Company Inc, 2012 COMC 194, aux para 61-62; International Business Machines Corporation c Loris Technologies Inc, 2013 COMC 136, au para 70; Reno-Dépôt c Homer TLC Inc (2009), 2010 COMC 11, au para 58]. Il est également bien établi en droit que, lorsqu'il s'agit d'apprécier la probabilité de confusion, il faut éviter de décomposer les marques de commerce en leurs éléments constitutifs; les marques doivent plutôt être considérées dans leur ensemble [United States Polo Assn c Polo Ralph Lauren Corp (2000), 9 CPR (4th) 51 (CAF), au para 18].

[18]           En l'espèce, il n'y a rien de frappant ou d'unique dans les marques de commerce de l'une ou l'autre des parties, car chacune d'elles se rapporte à des caractéristiques des services respectifs des parties. Bien que l'usage commun du mot LIVE [vivre] fasse en sorte que les marques de commerce présentent une certaine ressemblance, j'estime que la différence de leur suffixe diminue la ressemblance dans la présentation et dans le son. De plus, j'estime que, du point de vue des consommateurs, il y a une distinction à faire entre les idées suggérées par chacune des marques de commerce. Plus précisément, la Marque suggère que les projets immobiliers de la Requérante sont conçus de manière intelligente ou judicieuse, tandis que la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante suggère que les projets immobiliers de l'Opposante permettront aux consommateurs de profiter de la vie.

[19]           Dans son plaidoyer écrit, l'Opposante affirme ce qui suit (para 73) [Traduction] :

Étant donné que la [Marque] et la Marque LIVE WELL comportent toutes deux le mot LIVE [vivre] à la fois comme premier mot et comme mot dominant de chacune des marques respectives en cause, chacune suivie d'un adjectif de quatre lettres commençant par la lettre « W », l'Opposante soutient que la Marque LIVE WELL et la [Marque] se ressemblent substantiellement.

Or, l'importance que l’Opposante accorde aux éléments individuels des marques qui sont identiques semble mettre en jeu une comparaison côte à côte contre laquelle les tribunaux nous ont mis en garde [Veuve Clicquot Ponsardin Maison Fondée en 1772 c Boutiques Cliquot Ltée 2006 CSC, au para 20; et International Stars SA c Simon Chang Design Inc, 2013 CF 1041, au para 9].

Droit relatif aux marques de commerce faibles

[20]           La jurisprudence relative aux marques de commerce faibles appuie la position de la Requérante. Il est bien établi que des différences relativement petites suffiront à distinguer entre elles des marques faibles [voir Boston Pizza International Inc c Boston Chicken Inc (2001), 15 CPR (4th) 345 (CF 1re inst), au para 66]. Dans Provigo Distribution Inc c Max Mara Fashion Group SRL 2005 CF 1550, le juge de Montigny donne l'explication suivante [Traduction] :

Les deux marques étant intrinsèquement faibles, il est juste d’affirmer que même de petites différences suffiront à les distinguer. S’il en était autrement, le premier utilisateur de mots couramment employés se verrait conférer injustement un monopole de ces mots. Un autre motif invoqué par les tribunaux pour en arriver à cette conclusion est que le public est censé être plus vigilant lorsque des noms commerciaux aussi faibles sont employés…

[21]           En outre, il a été établi qu'une partie qui adopte une marque de commerce faible accepte un certain risque de confusion [voir General Motors c Bellows (1949), 10 CPR 101, aux p 115 et 116 (CSC)].

Autres enregistrements de la Requérante relatifs à des marques formées de l'élément WISE

[22]           La Requérante a démontré qu'elle possède d'autres marques de commerce comprenant l'élément WISE, dont DESIGNWISE, ENVIROWISE, PEOPLEWISE et QUALITYWISE (affidavit Seeberger, pièces A1 à A4). J'estime qu'il ne s'agit pas là d'une circonstance pertinente de l'espèce, car cela ne lui confère pas automatiquement le droit d'obtenir l'enregistrement d'autres marques comprenant l'élément WISE [voir American Cyanamid Co c Stanley Pharmaceuticals Ltd (1996), 74 CPR (3d) 571 (COMC)].

Conclusion

[23]           Le test à appliquer est celui de la première impression que laisse dans l'esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque de commerce LIVEWISE en liaison avec les Services alors que ce consommateur n'a qu'un souvenir imparfait de la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante et qu'il ne s'arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [Veuve Clicquot Ponsardin Maison Fondée en 1772 c Boutiques Cliquot Ltée, supra, au para 20].

[24]           Bien que l'Opposante ait établi que sa marque de commerce est connue dans une certaine mesure au Canada et que les Services sont identiques à ses services ou les recoupent, la marque de commerce de l'Opposante demeure une marque de commerce faible. Dans ce contexte et compte tenu des différences entre les marques de commerce, je conclus que la prépondérance des probabilités entre la conclusion qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion et la conclusion qu’il existe une probabilité raisonnable de confusion penche légèrement en faveur de la Requérante. En conséquence, le motif d'opposition fondé sur l'article 12(1)d) est rejeté.

Motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a)

[25]           Pour s'acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard de son motif d’opposition fondé sur l’article 16(3)a), l'Opposante doit démontrer qu'elle avait déjà employé la marque de commerce LIVE WELL à la date du 13 novembre 2012 et qu'elle n'avait pas abandonné cet emploi à la date du 11 décembre 2013 (voir l’article 16(5)). La preuve de l'Opposante décrite au paragraphe 14 est suffisante pour lui permettre de s'acquitter de son fardeau de preuve. La Requérante doit maintenant démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existait pas de probabilité de confusion entre la Marque et la marque de commerce LIVE WELL de l'Opposante à la date de production de sa demande.

[26]           J'estime que les différences entre les dates pertinentes n'ont pas d'incidence significative sur la détermination de la probabilité de confusion. L'Opposante s'est certes acquittée de son fardeau de preuve initial, mais la Requérante s'est également acquittée de son fardeau ultime puisqu'il n'existe pas de probabilité de confusion pour les raisons énoncées dans l'analyse du motif fondé sur l'article 12(1)d). Bien que seule l'Opposante ait établi l'emploi de sa marque de commerce à cette date pertinente plus lointaine, étant donné que sa preuve n'est pas suffisante pour me permettre de conclure que sa marque de commerce est devenue connue au Canada au point de compenser le fait qu'elle ne possède pas un véritable caractère distinctif inhérent, j'estime que la date pertinente plus lointaine n'a pas d'incidence sur ma conclusion quant à la probabilité de confusion. Par conséquent, je rejette le motif d'opposition fondé sur l'article 16(3)a) de la Loi.

Motif d'opposition fondé sur l'article 2 - caractère distinctif

[27]           L’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive des Services, parce qu’elle crée de la confusion avec la marque de commerce LIVE WELL de l’Opposante. L'Opposante s'est acquittée de son fardeau de preuve initial, car sa preuve démontre que sa marque de commerce LIVE WELL avait acquis, à la date pertinente, une notoriété importante, significative ou suffisante au Canada [voir Bojangles' International LLC c Bojangles Café Ltd (2006), 48 CPR (4th) 427, au para 34 (CF)]. Dans les circonstances de l'espèce, cependant, la date pertinente différente n’est pas déterminante pour l’examen de ce motif d’opposition, contrairement aux motifs d’opposition fondés sur les articles 16 et 12(1)d). Par conséquent, je tire la même conclusion à l'égard du motif fondé sur l'absence de caractère distinctif qu'à l'égard de ces deux motifs, de sorte que ce motif d’opposition est rejeté.

Décision

[28]           Dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi, je rejette l'opposition selon les dispositions de l'article 38(8) de la Loi.

______________________________

Natalie de Paulsen

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Marie-Pierre Hétu, trad.


COMMISSION DES OPPOSITIONS DES MARQUES DE COMMERCE

OFFICE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DU CANADA

COMPARUTIONS ET AGENTS INSCRITS AU DOSSIER

___________________________________________________

 

 

DATE DE L'AUDIENCE : 5 mai 2016

 

COMPARUTIONS

 

K. Beth Macdonald                                                                 POUR L'OPPOSANTE

 

Micheal Bean                                                                           POUR LA REQUÉRANTE

 

AGENT(S) AU DOSSIER

 

McCarthy Tétrault LLP                                                           POUR L’OPPOSANTE

 

Michael Bean Trademark & Copyright Law                           POUR LA REQUÉRANTE

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