Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2010 COMC 71

Date de la décision : 2010-06-02

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Black Box Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1212629 pour la marque de commerce P ZERO au nom de Benisti Import-Export Inc.

[1]               Le 7 avril 2004, Benisti Import-Export Inc. (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce P ZERO fondée sur l’emploi de la marque de commerce au Canada depuis le 1er janvier 2002 en liaison avec les marchandises suivantes (selon l’état déclaratif modifié) :

(1)   Vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément vestes, pantalons, tee‑shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, sous‑vêtements, dessous, robes, jupes, maillots de bain, shorts, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons‑pantalons, chandails et pulls.

(2)   Chaussures, nommément bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles.

(3)   Accessoires, nommément montres.

 

[2]               Le 28 février 2005, Black Box Inc. (l’Oppposante) a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande susmentionnée. Au soutien de l’opposition, l’Opposante invoque le non‑respect des exigences des alinéas 30b) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), le fait que la marque n’est pas enregistrable compte tenu de l’alinéa 12(1)d), l’absence de droit à l’enregistrement en raison des alinéas 16(1)a), b) et c), et l’absence de caractère distinctif. La plupart de ces motifs sont fondés sur la confusion avec la marque de commerce ZERO de l’Opposante, enregistrée (sous le numéro LMC 575741) à l’égard de planches à roulettes et accessoires de planche à roulettes, nommément roues et roulements, et sur l’emploi antérieur de la marque de commerce et du nom commercial ZERO par l’Opposante en liaison avec des vêtements, plus particulièrement des [traduction] chemises, tee‑shirts, chandails en molleton, pantalons, shorts, vestes, chapeaux, casquettes, ceintures; planches à roulettes et accessoires de planche à roulettes, nommément roues et roulements.

[3]               La Requérante a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante. La preuve de l’Opposante consiste en l’affidavit de Jamie Thomas, et celle de la Requérante, en l’affidavit de Mario Morellato. À titre de preuve additionnelle, l’Opposante a aussi produit un second affidavit de M. Thomas.

[4]               Les auteurs des affidavits n’ont pas été contre‑interrogés. Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit, et une audience, à laquelle seule l’Opposante était représentée, a été tenue. 

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[5]               C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. L’Opposante doit toutefois s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chaque motif d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298; Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.)].

[6]               Les dates pertinentes pour l’examen des motifs d’opposition sont les suivantes :

         article 30 – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475];

         alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et Le registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)];

         paragraphe 16(1) – la date de premier emploi par la Requérante [voir le paragraphe 16(1)];

         absence de caractère distinctif – la date de production de l’opposition [voir Metro‑Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F. 1re inst.)].

Question préliminaire

[7]               À l’audience, l’agent de l’Opposante a signalé que cette dernière retirait officiellement les motifs d’opposition fondés sur les alinéas 16(1)b) et 16(1)c) de la Loi. Par conséquent, les cinquième et sixième motifs d’opposition ne seront pas examinés.

Décision antérieure

[8]               Une bonne partie de la preuve par affidavit soumise par les parties en l’espèce est constituée d’éléments produits en vue d’une décision antérieure du registraire mettant en cause les mêmes parties et visant les marques de commerce ZERO NINETEEN et ZERO NINETEEN et Dessin [voir la décision Black Box Inc. c. Benisti Import-Export Inc., [28 octobre 2009, C.O.M.C. (non publiée), demandes nos 1146016 et 1146481)] (la décision ZERO NINETEEN). Bien que les marques et les marchandises en cause dans la présente procédure soient différentes, les questions en l’espèce ne diffèrent pas beaucoup de celles soulevées dans les oppositions antérieures. Je me référerai donc à cette décision lorsque je le jugerai indiqué.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b)

[9]               L’Opposante allègue que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’alinéa 30b), parce que la marque de commerce de la Requérante n’a pas été employée au Canada en liaison avec les marchandises énumérées dans la demande depuis la date de premier emploi revendiquée dans la demande. Dans la mesure où il est plus facile pour la Requérante de mettre en preuve les faits pertinents pour l’examen de ce motif d’opposition, le fardeau de preuve incombant à la Requérante relativement à ce motif d’opposition est moins exigeant, et l’Opposante peut y satisfaire en s’appuyant sur la preuve de la Requérante [voir Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.); La Brasserie Labatt Limitée c. Les Brasseries Molson, Société en nom collectif (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.)]. Dans un tel cas, cependant, l’Opposante doit démontrer que la preuve est nettement incompatible avec les prétentions exposées dans la demande de la Requérante [voir Ivey Lea Shirt Co. c. 1227624 Ontario Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 562 (C.O.M.C.), aux pages 565-566, confirmée par 11 C.P.R. (4th) 489 (C.F. 1re inst.)].

[10]           La preuve soumise ne m’a pas convaincue que l’Opposante a satisfait à son fardeau de preuve initial au regard de l’alinéa 30b). J’ai analysé comme suit le fardeau de preuve qui incombe à la présente Opposante pour ce motif d’opposition, aux paragraphes 10 à 12 de la décision ZERO NINETEEN :

L’Opposante soutient qu’étant donné qu’elle a soulevé le motif fondé sur l’al. 30b) dans ses déclarations d’opposition, il incombe maintenant à la Requérante de démontrer l’emploi continu de ses marques de commerce depuis la date revendiquée. En toute déférence, je ne suis pas d’accord.

 

Afin de s’acquitter du fardeau qui lui incombe à l’égard de ce motif, l’Opposante devait soit présenter une preuve soulevant un doute quant à la déclaration de la Requérante selon laquelle la date de premier emploi de ses marques remontait au 1er janvier 2002, soit faire valoir que la preuve de la Requérante comporte suffisamment d’ambiguïtés ou d’incohérences pour mettre en doute la véracité de la déclaration de la Requérante quant à la date de premier emploi. Même si je conviens avec l’Opposante que M. Morellato n’a présenté aucune preuve documentaire au soutien de l’emploi de l’une ou l’autre des marques de commerce de la Requérante dont il est question en l’espèce, au sens de l’art. 4 de la Loi, M. Morellato a déclaré dans son témoignage que la Requérante avait employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er janvier 2002. Compte tenu des autres déclarations figurant dans son l’affidavit [sic], je n’ai aucune raison de douter que M. Morellato comprend ce qu’est un emploi au sens de l’art. 4, lorsqu’il dit que les marques de commerce de la Requérante ont été employées en liaison avec les marchandises et les services visés par la demande. Bien que je convienne avec l’Opposante qu’il est curieux que M. Morellato ait seulement annexé à son affidavit des spécimens de publicité de sa marque de commerce POINT ZERO, ce fait ne suffit pas à lui seul à soulever, à mes yeux, de doute sur la véracité de la déclaration de la Requérante portant qu’elle a employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er janvier 2002.  

 

En conséquence, comme l’Opposante n’a pas réussi à soulever de doute sur la véracité de la déclaration de la Requérante selon laquelle elle a employé ses marques de commerce depuis au moins le 1er janvier 2002, la Requérante n’était pas tenue de démontrer l’emploi de ses marques de commerce depuis cette date. Si l’Opposante avait souhaité approfondir la question, elle aurait pu contre‑interroger M. Morellato. Ce motif d’opposition est donc rejeté dans les deux cas.   

 

[11]           Compte tenu de ce qui précède, et étant donné que l’argument de l’Opposante et la preuve de la Requérante sur cette question sont les mêmes dans le cas présent, je conclus que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition, lequel est dès lors rejeté.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[12]           Lorsqu’un requérant a produit la déclaration exigée par l’alinéa 30i), le motif d’opposition fondé sur cet alinéa ne devrait être retenu qu’en des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque la preuve révèle la mauvaise foi du requérant [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155]. Il n’y a pas en l’espèce de circonstances exceptionnelles, car il n’y a aucune preuve de mauvaise foi; par conséquent, je rejette ce motif d’opposition.  

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 38(2)d)

[13]           Au regard de ce motif, l’Opposante allègue que la marque de commerce soit n’est pas adaptée, soit n’est pas apte, à distinguer les marchandises en liaison avec lesquelles la Requérante affirme les avoir utilisées, des marchandises de l’Opposante. Pour déterminer si la marque de commerce de la Requérante est distinctive, on peut examiner si elle risque de créer de la confusion avec la marque ZERO de l’Opposante.

[14]           Pour satisfaire au fardeau qui lui incombe relativement à ce motif d’opposition, l’Opposante doit démontrer qu’à la date de production de l’opposition, sa marque de commerce ZERO était devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la marque de commerce de la Requérante [voir Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44, à la page 58 (C.F. 1re inst.); Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.); Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 412, à la page 424 (C.A.F.)]. La réputation de la marque de commerce au Canada devrait être importante, significative ou suffisante, mais la marque n’a pas à être bien connue au Canada [voir Bojangles International, LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F. 1re inst.)].

[15]           Compte tenu des affidavits de M. Thomas et conformément au raisonnement exposé dans la décision ZERO NINETEEN, je suis en mesure de conclure que la marque ZERO de l’Opposante est devenue suffisamment connue au Canada pour annuler le caractère distinctif de la marque de commerce de la Requérante. À cet égard, M. Thomas déclare que l’Opposante, par l’intermédiaire de son prédécesseur en titre Tum Yeto, emploie la marque de commerce ZERO au Canada en liaison avec des articles vestimentaires, sacs à dos, sacs, portefeuilles, planches à roulettes et accessoires de planches à roulettes depuis aussi tôt que 1996. Pour corroborer cette assertion, M. Thomas a annexé à son second affidavit, comme pièce A, une facture du 22 janvier 1996 établie par Tum Yeto à son distributeur canadien Ultimate Skateboard Dist. Inc., à Richmond (Colombie‑britannique) pour divers [traduction] « vêtements liés à la marque ZERO ». La facture ne précise la nature d’aucune des marchandises de marque ZERO figurant sur la liste. Par contre, des marchandises incluant des planches à roulettes, accessoires de planche à roulettes, tee‑shirts, chandails en molleton, pantalons, shorts, vestes, chapeaux, casquettes, ceintures, sacs à dos, sacs, bracelets et portefeuilles arborant la marque ZERO de l’Opposante sont illustrées dans des catalogues pour les années 2003 à 2005, joints comme pièces N à T de l’affidavit de M. Thomas. Celui‑ci explique que ces catalogues sont soit distribués par le distributeur canadien, soit postés directement à des clients. Au paragraphe 8 de son affidavit, il atteste que les ventes canadiennes de marchandises portant la marque de commerce ZERO pour les années 2002, 2003 et 2004 se sont élevées à 390 854 $, 724 616 $ et  676 337 $ respectivement, mais il ne ventile pas ces montants. Il déclare en outre au paragraphe 10 que son entreprise a dépensé environ 25 000 $ pour commercialiser des marchandises portant la marque de commerce ZERO au Canada de 2002 jusqu’à maintenant, bien que j’aie remarqué que la plupart des annonces de la marque de l’Opposante sont publiées dans des magazines destinés aux passionnés de planches à roulettes. La preuve soumise m’amène à conclure que l’Opposante a satisfait à son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition.  

[16]           Par conséquent, c’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de convaincre le registraire que sa marque de commerce est adaptée à distinguer ses marchandises partout au Canada. Dans l’examen du caractère distinctif, il est utile d’évaluer si, à la date de l’opposition, il aurait existé une probabilité raisonnable de confusion entre les marques dans le contexte des paragraphes 6(2) et 6(5) de la Loi.

[17]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. Dans l'application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles qui sont expressément énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenues connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à chacun de ces facteurs.

[18]           La Cour suprême du Canada a traité de la procédure à suivre pour évaluer toutes les circonstances de l’espèce qu’il convient d’examiner pour décider si deux marques de commerce créent de la confusion, dans les arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321, et Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutiques Cliquot Ltée et al. (2006), 49 C.P.R. (4th) 401. C’est en gardant à l’esprit ces principes généraux que j’analyserai maintenant les circonstances de l’espèce.

[19]           Les marques constituées de chiffres sont intrinsèquement faibles [voir Pepsico c. Daiwa, 80 C.P.R. (2d) 160 (C.O.M.C.)]. Dans le cas présent, tant la marque P ZERO de la Requérante que la marque ZERO de l’Opposante sont formées de chiffres et ne possèdent donc qu’un très faible caractère distinctif. Comme les lettres de l’alphabet sont elles aussi intrinsèquement faibles, la lettre P qui précède le mot ZERO dans la marque de la Requérante n’est pas très utile pour accroître le caractère distinctif inhérent de la marque de cette dernière [voir GSW Ltd. c. Great West Steel Industries Ltd. (1975), 22 C.P.R. (2d) 154 (C.F. 1re inst.)].

[20]           Une marque de commerce peut acquérir une force accrue en devenant connue par la promotion ou l’emploi. La marque de l’Opposante est devenue connue dans une certaine mesure au Canada. Bien que la Requérante ait produit une preuve abondante concernant sa marque de commerce POINT ZERO, on ne trouve dans cette preuve que cinq exemples de la marque P ZERO, dont trois consistent en des annonces non datées et deux semblent être des photographies du recto et du verso d’étiquettes volantes (quoique je constate que ces étiquettes volantes ne sont pas désignées comme telles dans l’affidavit de M. Morellato). La preuve de la Requérante ne me permettant pas de tirer des conclusions quant à la mesure dans laquelle sa marque de commerce P ZERO a été employée ou révélée au Canada, ce facteur favorise l’Opposante. 

[21]           La période pendant laquelle chaque marque de commerce a été en usage favorise l’Opposante.

[22]           Comme il a été indiqué, les marchandises en cause en l’espèce diffèrent légèrement de celles qui étaient visées dans la décision ZERO NINETEEN. Les articles vestimentaires visés par la présente demande comprennent des vestes, pantalons, tee‑shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, sous‑vêtements, dessous, robes, jupes, maillots de bain, shorts, gilets, chemisiers, foulards, combinaisons‑pantalons, chandails et pulls. Les marchandises énumérées dans la demande comprennent également des chaussures, nommément des bottes, chaussures, chaussures de course, souliers de sport, sandales et pantoufles, et des accessoires, nommément des montres.  

[23]           Bien que l’Opposante n’ait pas procédé à une ventilation des ventes des divers articles vestimentaires qu’elles a vendus en liaison avec sa marque ZERO, les marchandises correspondant à des articles vestimentaires qui figurent dans le catalogue de 2002-2003 annexé au premier affidavit de M. Thomas à titre de pièce N comprennent des tee‑shirts, chandails en molleton, chandails à capuchon, coupe-vent, casquettes, chapeaux, chaussettes, ceintures et jeans, et les accessoires comprennent des sacs, sacs à dos, bandeaux antisudation ou serre‑poignet, boutons, portefeuilles, bagues et appliques. L’Opposante a aussi établi qu’elle emploie sa marque pour des planches à roulettes, et la plupart des vêtements semblent être destinés à être portés en liaison avec l’activité de planche à roulettes.

[24]           Selon moi, les vestes, pantalons, tee‑shirts, chemises, jeans, chapeaux, maillots de bain, casquettes, gilets et shorts de la Requérante recoupent les vêtements offerts par l’Opposante puisqu’ils sont, pour la plupart, soit des vêtements qui peuvent être portés pour faire de la planche à roulettes, soit des vêtements qui peuvent entrer dans la catégorie générale des « articles de sport ». Je conviens également avec l’Opposante que les chaussures de course et souliers de sport de la Requérante recoupent les « planches à roulettes » de l’Opposante, parce que ces marchandises appartiennent à la même catégorie, celle des « articles de sport ». Je désignerai collectivement l’ensemble de ces marchandises comme étant les [traduction] « marchandises communes ».

[25]           Quant aux autres marchandises, je ne crois pas que les sous-vêtements, dessous, robes, jupes, chemisiers, foulards, combinaisons‑pantalons, chandails et pulls soient semblables aux marchandises vestimentaires de l’Opposante, parce que ces articles ne sont probablement pas destinés à être portés pour faire de la planche à roulettes et qu’ils n’appartiennent vraisemblablement pas à la catégorie des « articles de sport ». Par ailleurs, je ne suis pas d’accord avec l’Opposante pour dire que les montres de la Requérante recoupent les bandeaux antisudation ou serre‑poignet de l’Opposante, car ces marchandises, à mon avis, sont substantiellement différentes l’une de l’autre. 

[26]           En ce qui concerne les voies de commercialisation des parties, la preuve soumise montre que l’activité principale de l’Opposante est la vente de planches à roulettes et d’accessoires connexes. À cet égard, selon M. Thomas, l’entreprise a choisi, depuis 2005, de distribuer les marchandises ZERO exclusivement à des boutiques spécialisées dans les planches à roulettes, comme les magasins The Source à Calgary, RDS Skate Supply à Vancouver et Hammer Skateboard Shop à Toronto. Les marchandises de l’Opposante sont aussi offertes à la vente sur Internet par l’intermédiaire de différents tiers.  

[27]           Néanmoins, ainsi que j’ai indiqué dans la décision ZERO NINETEEN, puisque la demande de la Requérante ne comporte aucune restriction quant aux voies de commercialisation, rien n’empêcherait les marchandises de la Requérante qui recoupent celles de l’Opposante d’être vendues dans le même genre d’établissement que ceux où sont généralement vendues les marchandises de l’Opposante.

[28]           Comme j’ai conclu que les autres marchandises décrites dans la demande de la Requérante diffèrent des marchandises de l’Opposante, j’estime que les voies de commercialisation pour ces marchandises et services seraient probablement différentes de celles de l’Opposante.

[29]           Il est un principe reconnu que le premier élément d’une marque de commerce est le plus pertinent pour des besoins de distinction [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.), à la page 188]. Toutefois, je considère que l’importance du premier élément en l’espèce (la lettre P) est diminuée en raison de sa faiblesse intrinsèque. Étant donné que le reste de la marque de la Requérante englobe intégralement la marque de l’Opposante, il subsiste un degré raisonnable de ressemblance entre cette marque et la marque de l’Opposante dans l’apparence et le son et dans les idées qu’elles suggèrent.

[30]           La requérante invoque l’existence d’une circonstance additionnelle, soit la question de la légitimité de l’emploi, par l’Opposante, de sa marque. La Requérante soutient que l’enregistrement de la marque ZERO par l’Opposante (LMC 575741) et sa demande d’enregistrement pour la marque de commerce ZERO en liaison avec des articles vestimentaires (demande no 1233575) contreviennent clairement aux droits que détient la Requérante par suite de son emploi de la marque de commerce POINT ZERO (LMC 309311) depuis 1984.

[31]           Conformément à mon raisonnement dans la décision ZERO NINETEEN, bien que je reconnaisse, ainsi que le fait valoir la Requérante, qu’un opposant ne devrait pas être autorisé à se réclamer d’activités illicites pour fonder une opposition à une demande [voir Lunettes Cartier Ltée c. Cartier, Inc. (1991), 36 C.P.R. (3d) 391 (C.O.M.C.)], en l’espèce aucun tribunal n’a conclu à la contrefaçon, et aucune preuve n’indique qu’une poursuite judiciaire a été engagée. Je ne puis par conséquent conclure que l’allégation de la Requérante constitue une circonstance pertinente en l’espèce.

[32]           La Requérante a aussi avancé que son droit d’employer la marque de commerce P ZERO en liaison avec les marchandises visées par la demande découle des droits qu’elle a acquis depuis 1984 du fait de l’emploi de sa marque de commerce POINT ZERO (LMC 309311), enregistrée à l’égard de marchandises semblables. En toute déférence, je ne suis pas d’accord avec la Requérante sur ce point, parce que l’article 19 de la Loi ne donne pas au propriétaire d’un enregistrement un droit automatique à l’obtention d’autres enregistrements, même si la marque de commerce de la partie requérante est étroitement liée à la marque de commerce visée dans le premier enregistrement [voir Groupe Lavo Inc. c. Procter & Gamble Inc. (1990), 32 C.P.R. (3d) 533 (C.O.M.C.) à la page 538].

[33]           La question est de savoir si un consommateur qui a un souvenir général mais imprécis de la marque ZERO de l’Opposante risque, en voyant la marque P ZERO de la Requérante, de penser que les marchandises communes proviennent d’une même source. Je conclus que la Requérante n’a pas satisfait à son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas une probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause pour ce qui est des marchandises communes. Toutefois, je ne pense pas qu’il y ait probabilité raisonnable de confusion entre la marque de l’Opposante et les marques de la Requérante en ce qui touche les : 1) vêtements pour hommes, femmes et enfants, nommément sous‑vêtements, dessous, robes, jupes, chemisiers, foulards, combinaisons‑pantalons, chandails et pulls; 2) chaussures, nommément bottes, chaussures, sandales et pantoufles; 3) accessoires, nommément montres.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a)

[34]           L’Opposante a également allégué qu’eu égard à l’alinéa 16(1)a), la Requérante n’est pas la personne qui a droit à l’enregistrement de la marque de commerce de la Requérante, parce que cette marque prête à confusion à cause de sa ressemblance avec la marque de commerce ZERO de l’Opposante qui a été employée antérieurement au Canada et qui n’avait pas été abandonnée à la date de premier emploi par la Requérante. J’estime, à la lumière de la preuve produite, que l’Opposante a satisfait à son fardeau de preuve relativement à ce motif d’opposition.

[35]           Mes conclusions qui précèdent sur la question de la confusion s’appliquent aussi pour la plupart à ce motif d’opposition. Il est fait droit en partie au motif d’opposition fondé sur l’article 16, parce que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau ultime qui lui incombait d’établir qu’il n’y aurait pas de probabilité raisonnable de confusion entre sa marque et la marque de l’Opposante en ce qui concerne les marchandises communes.

Motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[36]           Étant donné que l’Opposante a eu gain de cause à l’égard de deux motifs d’opposition, je ne crois pas nécessaire de me prononce sur le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d).

Décision

[37]           En vertu des pouvoirs qui m’ont été délégués en application du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande pour ce qui est des marchandises suivantes : « vestes, pantalons, tee‑shirts, chemises, jeans, chapeaux, casquettes, maillots de bain, gilets et shorts, chaussures de course, souliers de sport », et je rejette l’opposition pour ce qui est des autres marchandises, conformément au paragraphe 38(8) de la Loi [voir Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet‑Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 C.P.R. (3d) 492 (C.F. 1re inst.) à titre de précédent autorisant une décision partagée].

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Cindy R. Folz

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

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