Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION
de St. Joseph Media Inc. à la demande
no 1238824 produite par Lauren Ashley Howell
en vue de l’enregistrement de la marque de commerce
WHERE IMAGINATION COMES TO LIFE!
------------------------------------------------------
LE DOSSIER
[1] Le 29 novembre 2004, Lauren Ashley Howell a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce WHERE IMAGINATION COMES TO LIFE! fondée sur (1) l’emploi de la marque au Canada, depuis le 15 septembre 2004, en liaison avec (i) de nombreuses marchandises dont diverses pièces de vêtements, figurines d’action articulées, jouets d’enfant, papeterie, enregistrements sonores, jeux vidéo, publications de livres électroniques et imprimés, et (ii) des services de vente des nombreuses marchandises de la requérante, (2) l’emploi projeté de la marque au Canada en liaison avec des ballons de plage, des articles chaussants, des bavoirs et de la vaisselle en plastique.
[2] La marque WHERE IMAGINATION COMES TO LIFE! qui fait l’objet de la demande a subséquemment été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 31 août 2005 et St. Joseph Media Inc. a produit une déclaration d’opposition le 31 janvier 2006. Le registraire a fait parvenir une copie de la déclaration d’opposition à la requérante
le 27 février 2006 tel que le prévoit le paragraphe 38(5) de la Loi sur les marques de commerce. Il semble que l’opposante a reçu deux contre-déclarations; celle versée au dossier est celle portant la date du 24 mars 2006 : voir la lettre du Bureau datée du 16 août 2006.
[3] La preuve de l’opposante consiste en l’affidavit de Mme Elenita Anastasio. Son affidavit a pour but de présenter en preuve des renseignements sur les enregistrements de marque de commerce de l’opposante qui sont invoqués dans la déclaration d’opposition. Madame Anastacio a également cherché des mentions de WHERE IMAGINATION COMES TO LIFE et de la requérante Lauren Ashley Howell dans la base de données FPInfomart. Elle explique que cette base de données [traduction] « est le plus important fournisseur canadien de données et de renseignements sur les entreprises, comprenant plus de 275 sources d’information d’un océan à l’autre, en plus des données documentées relatives aux sociétés pour lesquelles le Financial Post DataGroup est réputé. » Aucune mention de la marque ou de la requérante n’a été trouvée.
[4] La requérante a produit en preuve l’affidavit de Mme Lauren Ashley Howell; cependant celle-ci ne s’est pas présentée au contre-interrogatoire ordonné par la Commission. En conséquence, l’affidavit de Mme Howell a été retourné à la requérante conformément au paragraphe 44(5) du Règlement sur les marques de commerce, et ne constitue pas un élément de preuve en l’espèce : voir la décision de la Commission du 20 novembre 2007. Aucune des parties n’a produit de plaidoyer écrit et seule l’opposante était présente à l’audience tenue le 1er septembre 2009.
DÉCLARATION D’OPPOSITION
[5] La déclaration d’opposition peut se résumer en ces termes :
(A) La marque visée par la demande n’est pas enregistrable, en vertu de l’article 16 de la Loi sur les marques de commerce, en raison de l’emploi antérieur par l’opposante (1) de ses marques WHERE, WHERE ON-LINE, WHERE FAMILY et WHERE MAGAZINES INTERNATIONAL, (2) de ses noms commerciaux WHERE CANADA, WHERE INTERNATIONAL, WHERE MAGAZINES INTERNATIONAL et WHERE ON-LINE en liaison avec des publications imprimées et des magazines, des services d’édition électronique et de renseignements, et des logiciels, (3) et en raison des demandes d’enregistrement pendantes des marques de commerce WHERE TELEVISION et WHERE TELEVISION et Dessin visant de nombreux services, dont des services d’audio-visuel et de magazines électroniques.
(B) La marque qui fait l’objet de la demande n’est pas enregistrable, en vertu de
l’alinéa 12(1)d) de la Loi, en raison de la confusion qu’elle crée avec les marques de commerce déposées de l’opposante WHERE, WHERE MAGAZINES INTERNATIONAL, WHERE ON-LINE et WHERE FAMILY.
(C) La demande d’enregistrement contrevient à l’alinéa 30i) car la requérante était au courant ou aurait dû être au courant de l’emploi par l’opposante de ses marques et noms commerciaux.
(D) La marque qui fait l’objet de la demande n’est pas distinctive ou n’est pas adaptée à distinguer les marchandises et services de la requérante.
(E) La marque qui fait l’objet de la demande n’a pas été employée par la requérante depuis la date de premier emploi, ou elle ne l’a pas été du tout.
FARDEAUX DE PREUVE
[6] Le fait que le fardeau ultime incombe à la requérante signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion dans un sens ou dans l’autre une fois toute la preuve examinée, il faut rendre une décision défavorable à la requérante : voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, à la p. 298. Conformément aux règles de preuve habituelles, l’opposante a également le fardeau de produire une preuve suffisante pour établir la véracité des faits sur lesquels elle appuie chacun des motifs invoqués dans sa déclaration d’opposition. L'imposition d'un fardeau de preuve à l'opposante quant à une question particulière signifie que, pour que la question soit examinée, il doit exister des éléments de preuve suffisants desquels on pourrait raisonnablement conclure que les faits allégués au soutien de la question existent.
[7] Le premier motif d’opposition invoqué en (A) n’a pas à être examiné car l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait d’établir l’emploi de ses marques ou noms commerciaux. De même, l’opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau d’étayer le motif d’opposition invoqué en (C), ci-dessus.
TEST EN MATIÈRE DE CONFUSION
[8] En ce qui concerne le second motif d’opposition invoqué en (B), la requérante a le fardeau de démontrer qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion, au sens du paragraphe 6(2) de la Loi sur les marques de commerce, entre la marque qui fait l’objet de la demande, soit WHERE IMAGINATION COMES TO LIFE!, et une ou plusieurs des marques déposées de l’opposante. La date pertinente pour apprécier la question de la confusion est celle de ma décision : pour un aperçu des dates pertinentes dans les instances d’opposition, voir la décision American Association of Retired Persons c. Association canadienne des individus retraités/Canadian Association of Retired Persons (1998), 84 C.P.R. (3d) 198, aux pages 206 à 209 (C.F. 1re inst.).
[9] Le test pour déterminer s’il y a confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Pour évaluer s’il existe une probabilité raisonnable de confusion, je dois tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles énumérées au paragraphe 6(5) de la Loi, soit : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle chacune des marques a été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son ou dans les idées qu’elles suggèrent.
EXAMEN DES FACTEURS PRÉVUS AU PARAGRAPHE 6(5)
[10] En l’espèce, la marque visée par la demande et les marques déposées de l’opposante possèdent un certain degré de caractère distinctif inhérent, mais ce sont des marques relativement faibles. La période pendant laquelle les marques des parties ont été employées ne constitue pas un facteur pertinent, car aucune des parties n’a présenté de preuve d’emploi continu. Après avoir examiné les enregistrements de l’opposante et la demande en cause, il semble que les marchandises et les services des parties se chevauchent dans le domaine de l’édition d’imprimés et de livres électroniques ainsi que dans celui des marchandises et services liés à l’audio-visuel. Cependant, faute de preuve présentée par les parties, il est impossible d’arriver à une conclusion dans un sens ou dans l’autre quant à l’étendue réelle de ce chevauchement ou quant à l’existence d’un chevauchement, s’il en est, dans le commerce des parties. Naturellement, il incombe toujours à la requérante de distinguer ses marchandises, ses services et son commerce de ceux de l’opposante. La ressemblance entre les marques des parties est attribuable à la présence de la composante WHERE, qui est la première partie des marques en cause.
[11] La première composante d'une marque de commerce est souvent considérée comme la plus importante pour établir son caractère distinctif (voir la décision Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.) et, en l’instance, ce principe du droit des marques de commerce favorise l’opposante qui fait valoir qu’il existe une probabilité de confusion entre les marques des parties. Toutefois, il existe également un principe issu du même droit selon lequel des différences minimes peuvent suffire à distinguer des marques ayant un caractère distinctif faible (voir GSW Ltd c. Great West Steel Industries Ltd., (1975), 22 C.P.R.(2d) 154 (C.F. 1re inst.)) et, en l’espèce, ce principe est favorable à la requérante.
[12] Compte tenu de ce qui précède, et sans oublier que la requérante a le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause, je conclus que la requérante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait. La demande est donc rejetée en vertu de l’alinéa 12(1)d). De plus, comme j’ai déjà conclu que la marque visée par la demande crée de la confusion avec chacune des marques déposées de l’opposante, et que la requérante n’a pas prouvé l’emploi de sa marque, il s’ensuit que cette dernière n’a pas démontré que la marque qui fait l’objet de la demande est distinctive ou qu’elle est adaptée à distinguer ses marchandises et services de ceux de l’opposante.
MOTIF D’OPPOSITION FONDÉ SUR L’ALINÉA 30b)
[13] Le motif d’opposition visé en (E) est fondé sur le non-respect des dispositions de l’alinéa 30b) de la Loi sur les marques de commerce. Le fardeau qui incombe à l’opposante de prouver qu’elle se conforme à l’alinéa 30b) est assez léger : voir Tune Masters c. Mr. P's Mastertune (1986), 10 C.P.R.(3d) 84, p. 89 (COMC). En l’espèce, le témoignage de Mme Anastacio suffit pour établir que l’opposante a satisfait au fardeau qui lui incombait, alors que la requérante n’a présenté aucun élément de preuve permettant d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle se conforme à l’alinéa 30b). Cette partie de la demande qui est fondée sur l’emploi au Canada de la marque faisant l’objet de la demande est donc rejetée.
DÉCISION
[14] Compte tenu de ce qui précède, la demande est rejetée. La présente décision est rendue en vertu du pouvoir qui m’a été délégué au paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.
FAIT À VILLE DE GATINEAU (QUÉBEC), LE 16 SEPTEMBRE 2009.
Myer Herzig
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce
Traduction certifiée conforme
Jean-Jacques Goulet, LL.L.