Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 8

Date de la décision : 2012‑01‑18

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Liverton Hotels International Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1 238 970 pour la marque de commerce FOOD DIVA au nom de Maribel Linfield

[1]               Le 29 novembre 2004, Maribel Linfield (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce FOOD DIVA (la Marque) en liaison avec les marchandises et services suivants (les Marchandises et Services), fondée sur l’emploi au Canada ou sur l’emploi projeté, selon les spécifications données ci-dessous :

Marchandises

(1) Bijoux, nommément boucles d’oreilles. Employée au Canada depuis au moins juin 2004.

 

(2) Vêtements et accessoires pour hommes et femmes, nommément débardeurs, chemisiers, pulls, manteaux, chandails, tee-shirts, sous-vêtements, lingerie, pantalons de chef, tabliers de chef, chaussettes, mouchoirs, survêtements, robes d’intérieur, vêtements de plage, tabliers, pantoufles; faux tatouages; articles de cuisine, nommément batterie de cuisine; équipement pour la cuisine, nommément plaques à pâtisserie, couteaux; ustensiles de cuisine, nommément cuillères de bois, fouets, spatules, pinces, cuillères et spatules en céramique; pichets, bols, plats de service, verres, poterie, plateaux de service, assiettes de service, bols de service, coutellerie, assiettes de présentation, marchandises et ustensiles pour cuisson pour piques-niques, nommément assiette en céramique, en métal, en plastique ou en verre; contenants pour aliments, nommément porte-manger, verre en plastique, ou supports en métal pour aliments, pince à aliments, ensemble de fourchettes, couteaux et cuillères; certificats-cadeaux, imprimés, nommément aimants pour réfrigérateur, autocollants pour pare-chocs, étiquettes, affiches, brochures, livres de cuisine; papeterie, nommément listes d’épicerie, cartes pour cadeaux, en-tête de lettre, calendriers, livres, recettes, fiches de recettes, documents, trophées, cartes; accessoires pour la salle de bain, nommément serviettes, savons parfumés, assainisseurs d’air, bougies, sels de bain, huiles de bain, linges de maison, nommément torchons à vaisselle, serviettes à vaisselle, chiffons pour le nettoyage, serviettes de table, poignées de batterie de cuisine, nappes; dessins textiles pour vêtements et nappes, décorations, nommément cadres; articles décoratifs, nommément sculptures, peintures et photographies, oreillers, jetés pour le divan; bijoux, nommément pendentifs, broches, bagues, anneaux d’orteil, bracelets; macarons, chaînes porte-clés; artisanat, nommément gravures, pièces brutes matricées, impressions, marquages et moulages; sacs à main, bourses, havresacs, fourre‑tout; bougies, cosmétiques, nommément rouge à lèvres, maquillage pour les yeux, maquillage pour le visage, lustrant, tatouages, autocollants pour le corps, crèmes et spritzes pour la peau; vidéos éducatifs préenregistrés [sic], disques compacts, DVD, MP3, jeux vidéo et disques ayant trait à l’alimentation et/ou à la cuisson. Fondée sur l’emploi projeté.

 

(3) Articles de cuisson, nommément plats en céramique et ramequins. Employée au Canada depuis au moins octobre 2004.

Services

Enseignement de la cuisine, fourniture de leçons de cuisine, fourniture de cours de cuisine, tenue de classes de cuisine, services de traiteur, planification d’événements ayant trait aux aliments, consultation en matière d’aliments. Employée au Canada depuis au moins janvier 2004.

[2]               La Requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif du mot FOOD en dehors de la Marque.

[3]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 26 juillet 2006.

[4]               Le 22 mars 2007, Liverton Hotels International Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition.

[5]               Les motifs d’opposition peuvent être résumés comme suit :

         La demande ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), en ce que la Requérante ne pouvait être convaincue qu'elle avait le droit d'employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises et les Services, puisqu'à la date de production de la demande pour la Marque, la Requérante connaissait ou aurait dû connaître les marques de commerce DIVA et DIVA AT THE MET de l'Opposante, antérieurement employées au Canada en liaison avec des services de restauration.

         La marque n’est pas enregistrable, parce qu’elle crée de la confusion avec les enregistrements de l’Opposante pour les marques de commerce suivantes : DIVA (LMC480444) et DIVA AT THE MET (LMC480443) (les marques DIVA).

         Suivant l’alinéa 16(1)a) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque, parce qu’à la date de la production de la demande pour la Marque, cette dernière créait de la confusion avec les marques DIVA, antérieurement employées et révélées au Canada par l’Opposante en liaison avec des services de restauration.

         Suivant l’alinéa 16(1)b) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque, parce qu’à la date de la production de la demande pour la Marque, cette dernière créait de la confusion avec les marques DIVA de l’Opposante à l’égard desquelles des demandes d’enregistrement avaient été antérieurement produites au Canada par l’Opposante, en liaison avec des services de restauration.

         La Marque n’est pas distinctive des Marchandises, car elle ne distingue pas, ni n’est adaptée à distinguer, les Marchandises et Services des marchandises et services de tiers, à savoir des services de restauration offerts en liaison avec les marques DIVA de l’Opposante.

[6]               La Requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante et exige que celle-ci prouve formellement ses allégations.

[7]               À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit comme preuve, suivant l’article 41 du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96‑195 (le Règlement), l'affidavit de Henry Wu, président de l'Opposante, souscrit le 7 décembre 2007, et l'affidavit de Karin McCaig, étudiante en droit travaillant pour l'agent de l'Opposante, souscrit le 10 décembre 2007. Une ordonnance autorisant la tenue d’un contre-interrogatoire a été rendue, mais aucun contre-interrogatoire n’a eu lieu. L’Opposante a aussi produit l’affidavit souscrit le 21 juillet 2009 par Gary Daniel, un associé de l’agent de l’Opposante, en réponse à la preuve de la Requérante, conformément à l’article 43 du Règlement.

[8]               À l’appui de sa demande, la Requérante a produit son propre affidavit, souscrit le 28 novembre 2008, et celui de David J. Schnurr, un associé de l’agent de la Requérante, souscrit le 28 novembre 2008. Une ordonnance autorisant la tenue d’un contre-interrogatoire a été rendue, mais aucun contre-interrogatoire n’a eu lieu.

[9]               Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit et étaient représentées à l’audience tenue en l’espèce.

Le fardeau de preuve et les dates pertinentes

[10]           C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime d’établir, suivant la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), à la page 298].

[11]           Les dates pertinentes pour l’examen des motifs d’opposition sont les suivantes :

         alinéas 38(2)a) et 30i) – la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.), à la page 475; Tower Conference Management Co. c. Canadian Exhibition Management Inc. (1990), 28 C.P.R. (3d) 428 (C.O.M.C.), à la page 432].

         alinéas 38(2)b) et 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

         alinéas 38(2)c) ainsi que 16(1)a) et b) – les dates de premier emploi revendiquées [voir le paragraphe 16(1) de la Loi].

         alinéa 38(2)d) et article 2 – la date de production de l’opposition [voir Metro‑Goldwyn‑Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30i)

[12]           Lorsqu’un requérant a fourni la déclaration exigée par l’alinéa 30i), un motif d’opposition fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque la preuve dénote la mauvaise foi du requérant [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), à la page 155]. La Requérante a fourni la déclaration prescrite, et il ne s’agit pas ici d’un cas exceptionnel; le motif fondé sur l’alinéa 30i) est en conséquence rejeté.

 

Le motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité – alinéa 12(1)d) de la Loi

[13]           Un opposant s’acquitte du fardeau initial qui lui incombe à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) si les enregistrements invoqués sont en règle à la date de la décision sur l’opposition. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour vérifier l’existence des enregistrements invoqués par l’opposant [voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c. Menu Foods Ltd. (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (C.O.M.C.)]. J’ai exercé ce pouvoir discrétionnaire, et je confirme que les enregistrements pour les marques DIVA de l’Opposante demeurent valides; par conséquent, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à cet égard. Je dois maintenant évaluer si la Requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait.

[14]           Le test en matière de confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. Selon le paragraphe 6(2) de la Loi, l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[15]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont précisées au paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce, et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs n’est pas nécessairement le même. [Voir, de façon générale, les arrêts Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.), et Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (C.S.C.).]

[16]           J’aimerais signaler, à titre préliminaire, que l’Opposante, dans son plaidoyer écrit et lors de l’audience, a admis qu’il n’y a pas de recoupement dans le genre des marchandises des parties pour ce qui est des marchandises de la Marque énumérées ci-dessous, lesquelles n’ont aucun lien avec les aliments ni avec la cuisine (les Marchandises non alimentaires) :

Marchandises (1) : Bijoux, nommément boucles d’oreilles.
Marchandises (2) : Vêtements et accessoires pour hommes et femmes, nommément débardeurs, chemisiers, pulls, manteaux, chandails, tee-shirts, sous-vêtements, lingerie, [...] chaussettes, mouchoirs, survêtements, robes d’intérieur, vêtements de plage, tabliers, pantoufles; faux tatouages; [...] papeterie, nommément listes d’épicerie, cartes pour cadeaux, en-tête de lettre, calendriers, livres, [...] documents, trophées, cartes; accessoires pour la salle de bain, nommément serviettes, savons parfumés, assainisseurs d’air, bougies, sels de bain, huiles de bain, linges de maison, nommément torchons à vaisselle, serviettes à vaisselle, chiffons pour le nettoyage, serviettes de table, poignées de batterie de cuisine, nappes; dessins textiles pour vêtements et nappes, décorations, nommément cadres; articles décoratifs, nommément sculptures, peintures et photographies, oreillers, jetés pour le divan; bijoux, nommément pendentifs, broches, bagues, anneaux d’orteil, bracelets; macarons, chaînes porte-clés; artisanat, nommément gravures, pièces brutes matricées, impressions, marquages et moulages; sacs à main, bourses, havresacs, fourre-tout; bougies, cosmétiques, nommément rouge à lèvres, maquillage pour les yeux, maquillage pour le visage, lustrant, tatouages, autocollants pour le corps, crèmes et spritzes pour la peau; [...]

[17]           De plus, l’Opposante a demandé, à titre subsidiaire, que la demande d’enregistrement concernant la Marque soit refusée seulement à l’égard des marchandises et services ayant trait aux aliments et à la cuisine, et non à l’égard des Marchandises non alimentaires. Étant donné l’absence de preuve ou d’observations étayant la probabilité de confusion à l’égard des Marchandises non alimentaires, je rejette sommairement le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) à l’égard des des Marchandises non alimentaires.

 

Alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[18]           Les marques des parties contiennent toutes deux le mot DIVA qui, bien qu’étant un mot courant du dictionnaire, n’a pas de signification particulière lorsqu’il est employé en liaison avec les marchandises des parties; il s’agit donc de l’élément le plus distinctif des marques des parties. En fait, DIVA constitue la marque de commerce de l’Opposante en entier.

[19]           La Marque contient aussi le mot FOOD; la Requérante s’est désistée du droit à l’usage exclusif de ce mot en dehors de la Marque, en raison de son caractère descriptif.

[20]           Étant donné la nature descriptive de l’élément FOOD de la Marque, j’estime que la marque DIVA de l’Opposante possède, dans une certaine mesure, un caractère distinctif inhérent plus marqué que celui de la Marque.

[21]           Comme une marque de commerce peut acquérir une force accrue en devenant connue au Canada par la promotion ou par l’emploi, j’examinerai maintenant la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues au Canada.

[22]           La Requérante a commencé à offrir ses services dans la région de Kitchener-Waterloo en 2004. En particulier, Mme Linfield déclare dans son affidavit qu’elle emploie la Marque depuis au moins janvier 2004, en liaison avec les services suivants : « Enseignement de la cuisine, fourniture de leçons de cuisine, fourniture de cours de cuisine, tenue de classes de cuisine, services de traiteur, planification d’événements ayant trait aux aliments, consultation en matière d’aliments ». Mme Linfield précise aussi qu’elle offre la plupart de ses cours de cuisine chez elle, mais qu’elle les donne aussi en d’autres lieux, notamment dans les salles communautaires des marchés Zehrs.

[23]           De plus, elle déclare dans son affidavit qu’elle exploite depuis janvier 2004 le site Web fooddiva.com, grâce auquel elle offre des services éducatifs, plus précisément  des cours de cuisine en ligne. La Requérante soutient que bien qu’elle exploite physiquement sa Marque dans la région de Kitchener-Waterloo, son site Web, et par conséquent les services offerts en ligne, n’ont pas de frontières géographiques : la réputation de la Requérante s’étendrait donc au-delà de la région de Kitchener-Waterloo. Mme Linfield joint à son affidavit des documents imprimés à partir du site Web fooddiva.com, sur lesquels on peut voir la Marque et l’annonce des divers services offerts par la Requérante.

[24]           Dans son affidavit, Mme Linfield déclare qu’elle offre également des services de traiteur. En particulier, elle précise qu’elle assure des services de traiteur dans environ six évènements par année. Au fil des ans, elle aurait assuré de tels services dans des mariages, des funérailles et des réceptions d’affaires, habituellement pour des petits groupes d’environ 40 personnes. Je remarque que le matériel promotionnel joint à l’affidavit de Mme Linfield ne mentionne pas les services de traiteur (pièces B à H).

[25]           Pour étayer ses déclarations d’emploi, Mme Linfield joint à son affidavit une brochure annonçant ses services et incluant une liste de prix pour ses cours de cuisine ainsi qu’une liste des services qu’elle offre aux entreprises en plus des cours de cuisine (par exemple, apparition télévisée, création de recettes, conseils en matière de menus, conférences, démonstrations culinaires, stylisme de produits alimentaires, aide culinaire à domicile, réorganisation de cuisines, journalisme culinaire, création de produits et formation de personnel) (pièce G). La brochure présente la Marque dans le format suivant, que j’accepte comme un emploi de la Marque :

[26]           La date d’enregistrement du droit d’auteur indiquée dans la brochure est 2005 : par conséquent, je suis prête à accepter que la Marque pourrait avoir été employée par la Requérante depuis au moins 2005. J’admets la brochure comme preuve d’emploi de la Marque dans l’annonce des services suivants : « enseignement de la cuisine, fourniture de leçons de cuisine, fourniture de cours de cuisine, tenue de classes de cuisine, [...] consultation en matière d’aliments », conformément au paragraphe 4(2) de la Loi. Toutefois, je ne suis pas convaincue que la brochure fasse foi de l’emploi de la Marque en liaison avec les « services de traiteur » ou la « planification d’événements ayant trait aux aliments ».

[27]           Mme Linfield joint aussi à son affidavit des copies de cartes professionnelles qu’elle utilise pour promouvoir ses services, lesquelles affichent toutes deux le logo présenté ci-dessus au paragraphe 25 (pièce H). Je remarque que les cartes professionnelles ne sont pas datées : par conséquent, je leur attribue la date à laquelle Mme Linfield a souscrit son affidavit, c’est-à-dire le 28 novembre 2008.

[28]           Dans son affidavit, Mme Linfield déclare qu’elle utilise également la Marque depuis au moins octobre 2004 en liaison avec les marchandises suivantes : « Articles de cuisson, nommément plats en céramique et ramequins ».

[29]           Je remarque que la Requérante n’a pas fourni de preuve suggérant que la Marque est apposée sur l’une ou l’autre des Marchandises ou sur les colis les transportant, ou qu’elle est liée de toute autre manière aux Marchandises de manière à satisfaire aux exigences du paragraphe 4(1) de la Loi. Conséquemment, je ne suis pas convaincue que la Requérante a acquis une réputation pour la Marque en liaison avec l’une ou l’autre des Marchandises.

[30]           À l’égard des services de la Requérante, l’Opposante soutient qu’aucune preuve au dossier ne démontre clairement que la Marque a acquis une réputation appréciable au Canada.

[31]           Je conviens avec l’Opposante que la Requérante n’a fourni ni chiffres d’affaires ni factures, de sorte qu’il est difficile d’établir la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue en liaison avec les Services. De plus, je remarque que la Requérante n’a fourni aucune donnée concernant le nombre de visites du site Web fooddiva.com. Par conséquent, je suis dans l’impossibilité de déterminer la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue, mais elle doit être devenue connue dans une certaine mesure, puisque j’ai conclu que la Marque est employée au Canada depuis au moins 2005 en liaison avec certains des Services.

[32]           À l’audience, l’Opposante a fait valoir qu’il n’est pas contesté qu’elle emploie principalement ses marques en liaison avec son restaurant à Vancouver et que la réputation de ses marques est liée à cet emploi. La Requérante concède que les marques DIVA de l’Opposante sont probablement devenues connues dans la région de Vancouver pour des services de restauration.

[33]           De plus, l’Opposante soutient qu’en dehors de la réputation qu’elle a acquise en liaison avec des services de restauration, elle s’est aussi forgé, pour ses marques, une réputation dont la portée s’étend au-delà du restaurant de l’Opposante situé dans son hôtel vancouvérois. En particulier, l’Opposante fait observer que ses marques DIVA ont aussi été employées dans son restaurant Hemispheres, situé dans son hôtel de Toronto.

[34]           D’abord, l’Opposante soutient qu’en ce qui a trait à la réputation de ses marques DIVA en liaison avec des services de restauration, sa preuve démontre qu’elle sert des dizaines de milliers de repas par année, qu’elle a fait l’objet d’une quantité considérable de publicité, sollicitée ou non, et qu’elle exploite un site Web qui a reçu beaucoup de visites. En particulier, M. Wu affirme que l’Opposante exploite un restaurant nommé DIVA au Metropolitan Hotel de Vancouver depuis 1996. Il déclare aussi que le restaurant est parfois désigné sous le nom DIVA AT THE MET. La Requérante s’oppose à l’interprétation que fait M. Wu de la preuve. Plus particulièrement, la Requérante avance que les pièces jointes à l’affidavit de M. Wu démontrent que l’Opposante elle-même ainsi que les tiers désignent la plupart du temps le restaurant DIVA de l’Opposante par le nom DIVA AT THE MET. Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, j’estime que l’objection de la Requérante est fondée. En fait, je remarque que la plupart du temps, l’Opposante fait référence au restaurant DIVA en utilisant une marque figurative, présentée ci-dessous, sur laquelle on peut lire les mots DIVA AT THE MET (le logo Diva).

[35]           Cela dit, j’estime que le logo Diva constitue un emploi de la marque de commerce DIVA, parce que le mot DIVA se démarque des autres composants du logo par la taille de la police, nettement différente de celle des autres caractères [voir Nightingale Interloc Ltd. c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535 (C.O.M.C.), aux pages 538-539].

[36]           M. Wu déclare que chaque année, le restaurant de l’Opposante sert plus de 40 000 clients. Il déclare qu’en 2005, l’Opposante a servi environ 50 000 repas dans son restaurant.

[37]           M. Wu fournit aussi des chiffres d’affaires pour les services de restauration de l’Opposante. Plus précisément, M. Wu déclare que le chiffre d’affaires brut pour 2006 s’est élevé à plus de deux millions de dollars et que pendant plusieurs années précédant 2007 (année où il a souscrit son affidavit), le chiffre d’affaires annuel a atteint plus d’un million de dollars.

[38]           M. Wu fournit aussi une preuve étayant la publicité et la promotion des marques DIVA de l’Opposante. En premier lieu, M. Wu joint à son affidavit des copies d’articles de magazines et de journaux qui, selon lui, constituent des publicités favorables pour le restaurant DIVA de l’Opposante (pièce A). Le tirage de ces publications n’a pas été précisé. Néanmoins, je peux prendre connaissance d’office du grand tirage des journaux quotidiens d’importance au Canada [voir Northern Telecom Ltd. c. Nortel Communications Inc. (1987), 15 C.P.R. (3d) 540 (C.O.M.C.), à la page 543; R. Griggs Group Ltd. c. 359603 Canada Inc. (2005), 47 C.P.R. (4th) 215 (C.O.M.C.), à la page 227]. En outre, je suis prête à admettre d’office que le Vancouver Sun et le Toronto Sun sont distribués au moins dans les régions de Vancouver et de Toronto respectivement [voir Milliken & Co. c. Keystone Industries (1970) Ltd. (1986), 12 C.P.R. (3d) 166 (C.O.M.C.), à la page 168; Les Brasseries Carling O’Keefe du Canada Ltée c. Anheuser-Busch, Inc. (1985), 4 C.P.R. (3d) 216 (C.O.M.C.), à la page 224]. J’estime cependant que des articles de journaux et de magazines ne constituent pas de la publicité. Néanmoins, je suis disposée à reconnaître, considérant le volume d’articles et la variété de publications dans lesquelles ils se trouvent, que ces articles donnent à penser que les résidents de Vancouver et de Toronto doivent connaître l’existence du restaurant DIVA de l’Opposante.

[39]           Dans son affidavit, M. Wu déclare que l’Opposante a dépensé plus de 150 000 $ [traduction] « au cours des dernières années » pour promouvoir ses services de restauration. Il fournit aussi des exemples du matériel utilisé par l’Opposante pour faire la promotion de ses services de restauration en liaison avec ses marques DIVA (pièce B). Il affirme que plus de 25 000 copies des brochures présentées dans la pièce B ont été imprimées et envoyées à des clients ainsi qu’à des clients potentiels au Canada. Je remarque, comme je l’ai mentionné précédemment, que la plupart de ces documents présentent le logo Diva.

[40]           M. Wu joint aussi à son affidavit des éléments d’information tirés du site Web de l’Opposante qui, selon ses déclarations, reçoit en moyenne plus de 30 000 visites par mois.

[41]           Il y joint également des exemples de ce qu’il appelle une publicité indirecte ou non sollicitée (pièce D). M. Wu joint notamment à son affidavit des photos de chefs du restaurant DIVA de l’Opposante qui ont participé en 2001 et en 2003 au concours culinaire le « Bocuse d’Or », en France. Les photos montrent les chefs qui portent des vestes arborant le logo Diva. Je remarque que cette photo a trait à un évènement qui a eu lieu en France, et non au Canada. Par conséquent, elle ne constitue pas une preuve pertinente permettant d’établir la réputation des marques DIVA de l’Opposante au Canada.

[42]           À l’égard de la réputation que l’Opposante aurait acquise à l’extérieur du restaurant DIVA, celle-ci présente la preuve suivante :

         dans son affidavit, M. Wu explique que l’Opposante met à la disposition du public les recettes de certains plats servis au restaurant Diva (pièce H);

         il déclare aussi que l’Opposante a employé les marques DIVA dans au moins un autre de ses restaurants, à savoir le restaurant Hemispheres à Toronto. Il a annexé à son affidavit une copie du menu de 2006 du restaurant Hemispheres proposant la [traduction] « Trempette aux oignons Diva – La trempette du restaurant Diva at the Met de Vancouver, servie avec des croustilles de légumes racines ».

[43]           Compte tenu de ce qui précède, j’estime que l’Opposante a établi que les marques DIVA jouissent d’une solide réputation à Vancouver, en Colombie-Britannique, et d’une certaine réputation ailleurs au Canada, plus particulièrement à Toronto.

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage

[44]           Comme je l’ai exposé de façon plus détaillée dans l’analyse du motif fondé sur l’alinéa 6(5)a), la Requérante a établi l’emploi de la Marque depuis au moins 2005 en liaison avec les services suivants : «enseignement de la cuisine, fourniture de leçons de cuisine, fourniture de cours de cuisine, tenue de classes de cuisine, [...] consultation en matière d’aliments». La Requérante n’a cependant pas établi l’emploi de la Marque en liaison avec l’une ou l’autre des Marchandises revendiquées, ni avec les « services de traiteur » ou la « planification d’événements ayant trait aux aliments ».

[45]           Par ailleurs, comme il appert de l’analyse détaillée du motif fondé sur l’alinéa 6(5)a), l’Opposante a démontré l’emploi de ses marques DIVA. M. Wu déclare sous serment que l’Opposante offre des services de restauration en liaison avec ses marques DIVA depuis 1996; toutefois, la preuve documentaire à l’appui remonte seulement à 2001. Néanmoins, ce facteur favorise l’Opposante, peu importe que celle-ci ait réussi à établir l’emploi de ses marques DIVA depuis 1996 ou 2001, puisque ces deux dates précèdent la date de premier emploi de la Requérante, soit 2005.

 

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises

[46]           En ce qui concerne ce facteur, ma décision repose sur la comparaison entre l’état déclaratif des marchandises et des services figurant dans la demande de la Requérante et les services enregistrés de l’Opposante [voir Esprit International c. Alcohol Countermeasure Systems Corp. (1997), 84 C.P.R. (3d) 89 (C.O.M.C.)].

[47]           Mme Linfield affirme que dans ses cours de cuisine, elle enseigne les bonnes méthodes de préparation des aliments et la théorie culinaire. Les cours sont habituellement donnés dans son atelier de cuisine, et ils sont conçus pour accueillir de 8 à 10 participants adultes par cours de trois heures.

[48]           Mme Linfield affirme que son site Web fooddiva.com contient des vidéos éducatives sur la cuisine [traduction] « grâce auxquelles chacun peut apprendre à cuisiner dans le confort de son foyer ». Elle déclare aussi que l’école de cuisine en ligne consiste en une série de vidéos pratiques préfilmées et prééditées ayant trait à la cuisine. Mme Linfield explique que les gens qui consultent le site Web peuvent acheter une vidéo particulière qu’ils pourront visionner en ligne, ou s’abonner pour les visionner toutes; elle précise que par ailleurs, certaines vidéos sont gratuites sur son site Web. Mme Linfield affirme qu’elle offre également un bulletin d’information électronique.

[49]           Quant aux autres Marchandises, le simple fait qu’elles ont trait aux aliments et à la cuisine n’est pas suffisant, à mon avis, pour conclure qu’elles présentent une ressemblance marquée avec les services de restauration de l’Opposante.

[50]           L’analyse est plus complexe en ce qui a trait aux Services.

[51]           Dans son plaidoyer écrit, la Requérante soutient que la distinction entre les services de traiteur et les services de restauration est corroborée par le fait que la classification de Nice les classe dans des catégories différentes. À l’audience, l’Opposante a fait valoir qu’aucun précédent ne permet de conclure que cette distinction est pertinente pour l’analyse relative à la confusion. Je suis d’accord avec les observations de l’Opposante, et je n’accorde aucun poids aux observations de la Requérante fondées sur la classification de Nice.

[52]           La Requérante fait valoir que l’essence de son entreprise consiste à offrir des cours de cuisine éducatifs, des tutoriels en ligne et d’occasionnels services de traiteur (environ six évènements par année). Dans son affidavit, Mme Linfield indique clairement qu’elle ne compte nullement offrir des services de restauration, ni maintenant ni dans l’avenir. L’absence de services de restauration dans la demande d’enregistrement étaye cette affirmation.

[53]           Les enregistrements de l’Opposante visent uniquement des services de restauration. La Requérante soutient que les services de traiteur sont différents des services de restauration, et elle s’appuie à cet égard sur l’affidavit de M. Schnurr. L’Opposante, en revanche, soutient que les restaurants offrent souvent des services de traiteur ou des cours de cuisine, et elle s’appuie à cet égard sur l’affidavit de Mme McCaig.

[54]           Plus particulièrement, la Requérante se fonde sur les pièces F et G de l’affidavit de M. Schnurr pour étayer son observation selon laquelle le Bureau des marques de commerce, dans le passé, a déjà considéré les services de restauration et les services de traiteur ou les cours de cuisine comme étant des types de services distincts. Ainsi,

         M. Schnurr a fait une recherche pour repérer les marques de commerce comprenant des services de traiteur mais non des services de restauration (il en a trouvé 602); des services de restauration, mais non des services de traiteur (il en a trouvé 6 781); des services de restauration et des services de traiteur (il en a trouvé 1 236) (pièce F).

         M. Schnurr a aussi effectué une recherche pour trouver les marques de commerce qui incluent le mot cuisine, mais ne comprennent pas de services de restauration (il en a trouvé 647); des services de restauration, mais pas le mot cuisine (il en a trouvé 7 917); à la fois le mot cuisine et des services de restauration (il en a trouvé 100) (pièce G).

[55]           L’Opposante, au contraire, s’appuie sur l’affidavit de Mme McCaig pour étayer son allégation portant que les restaurants offrent souvent des services de traiteur ou des cours de cuisine en plus des services traditionnels de restauration. Mme McCaig joint à son affidavit les résultats des recherches qu’elle a effectuées avec le moteur de recherche Google. Plus précisément,

         Mme McCaig a cherché dans le moteur de recherche Google les restaurants situés à Toronto et à Vancouver qui offrent des services de traiteur en plus des services de restauration. Sa recherche a révélé que sept restaurants à Toronto et trois à Vancouver correspondent à ces critères. Mme McCaig a téléphoné à tous ces restaurants et elle confirme qu’ils offrent effectivement des services de traiteur.

         Mme McCaig a aussi utilisé le moteur de recherche Google pour trouver les restaurants qui offrent des cours de cuisine en plus des services de restauration. Sa recherche a révélé l’existence de trois restaurants de ce type à Toronto, et d’un à Vancouver. Mme McCaig a complété sa recherche par des appels téléphoniques, mais elle a pu confirmer uniquement que deux des trois restaurants torontois offrent des cours de cuisine.

[56]           L’Opposante s’appuie également sur la preuve de M. Wu, qui affirme qu’un grand nombre de restaurants au Canada offrent des services de traiteur et des cours de cuisine en plus de services de restauration et qui joint des copies papier d’extraits de sites Web de tiers pour étayer cette assertion (pièce F). Je remarque qu’il s’agit là des mêmes entreprises que celles citées dans l’affidavit de Mme McCaig.

[57]           L’affidavit de M. Schnurr fait état d’une recherche sur le site Web www.canada411.ca pour trouver des restaurants de Toronto et de Vancouver (pièce I). La recherche a révélé 4 951 restaurants à Toronto, et 4 344 à Vancouver.

[58]           Il convient de signaler que tant la preuve de Mme McCaig que celle de M. Schnurr comportent des problèmes de ouï-dire. En particulier, comme la Requérante l’a fait remarquer à l’audience, je remarque que la preuve soumise par Mme McCaig concernant les appels téléphoniques qu’elle a effectués pour confirmer les services de traiteur ou les cours de cuisine offerts par les restaurants, constitue du ouï-dire.

[59]           Quoi qu’il en soit, à mon avis, les observations fondées sur la preuve respective de Mme McCaig et de M. Schnurr ne sont pas déterminantes. Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, j’estime plutôt que le fait que les services de restauration et les services de traiteur se rapportent dans les deux cas au service des aliments, est suffisant pour conclure à l’existence d’un chevauchement dans le genre des services. On ne peut en dire autant des cours de cuisine, de la planification d’événements ayant trait aux aliments ni de la consultation en matière d’aliments. Je ne suis pas convaincue que le simple fait que ces services, comme les services de restauration, ont un lien avec la nourriture, soit suffisant pour occasionner un recoupement dans le genre des services.

[60]           Vu ce qui précède, je conclus qu’il existe un certain recoupement dans les services des parties, mais seulement en ce qui a trait aux « services de traiteur ».

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[61]           Les deux marques de l’Opposante contiennent le mot DIVA, et il s’agit là du seul élément qui ressemble tant soit peu à la Marque. Par conséquent, je considère que l’enregistrement no LMC480444 pour la marque de commerce DIVA visant les « services de restauration » représente le scénario le plus favorable à l’Opposante. Je vais donc me concentrer, pour l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 6(5)e), sur la marque de commerce DIVA enregistrée sous le no LMC480444 et sur la Marque.

[62]           Dans la plupart des cas, le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent est le facteur le plus important, les autres facteurs jouant un rôle secondaire dans l’ensemble des circonstances de l’espèce [voir Beverly Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding & Upholstery Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2) 145, conf. par 60 C.P.R. (2d) 70 (C.F. 1re inst.)]. Ce principe a été confirmé récemment par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Masterpiece, précité.

[63]           La Requérante fait valoir que la première partie d’une marque est la plus importante aux fins du caractère distinctif [voir Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.), à la page 188]. Or, la Cour suprême a récemment fait observer, dans l’arrêt Masterpiece, qu’il est préférable de se demander d’abord, lorsqu’il s’agit de comparer des marques, si l’un des aspects de la marque de commerce est particulièrement frappant ou unique [voir Masterpiece, précité, au paragraphe 64]. Le mot DIVA, s’il figure dans le dictionnaire, n’a pas de signification particulière lorsqu’il est employé en liaison avec les marchandises et services des parties; par conséquent, il constitue l’élément le plus frappant ou unique des marques des parties.

[64]           L’élément DIVA constitue la totalité de la marque de commerce DIVA de l’Opposante, et il représente l’élément dominant de la Marque. Cet état de choses donne lieu à des ressemblances dans le son, dans la présentation et dans les idées suggérées par les marques des parties. L’Opposante soutient que les marques des deux parties suggèrent l’idée d’une diva. Elle avance aussi que le mot FOOD dans la Marque n’est qu’un descriptif qui réfère aux aliments, et que cet ajout n’atténue en rien le degré de ressemblance entre les marques des parties.

[65]           Je conviens avec l’Opposante que les marques des parties présentent des ressemblances dans le son et dans la présentation, du fait que la Marque englobe l’intégralité de la marque de commerce DIVA. De plus, je reconnais que les marques des deux parties suggèrent l’idée d’une « diva ». Cependant, pour les motifs exposés ci-dessous, je considère qu’il y a des nuances dans les idées suggérées par chacune des marques, de sorte qu’il n’y a pas recoupement important dans les idées qu’elles suggèrent.

[66]           Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, j’estime que la Requérante elle-même est la « food diva » (« diva de la cuisine ») et qu’il s’agit là du fondement même de l’emploi de la Marque par la Requérante. Pour arriver à cette conclusion, je m’appuie sur le fait que la Requérante est une personne physique qui offre ses Services elle-même, en grande partie depuis son domicile. De plus, je constate que le matériel promotionnel fourni par Mme Linfield arbore un dessin qui semble représenter Mme Linfield elle-même, renforçant ainsi l’idée que la Requérante est elle-même la « food diva » dont il est question. Étant donné que l’Opposante, une société, emploie la marque de commerce DIVA en liaison avec un restaurant situé dans un hôtel, l’idée suggérée par la marque de commerce DIVA de l’Opposante est nécessairement différente.

Autre circonstance de l’espèce – l’état du registre et du marché

[67]           Les deux parties ont produit une preuve de l’état du registre et du marché relativement au mot DIVA au Canada.

[68]           La Requérante fournit, par l’intermédiaire de M.Schnurr, une preuve de l’état du registre dans laquelle celui-ci expose les résultats de diverses recherches effectuées dans la Base de données sur les marques de commerce canadiennes de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. En particulier, M. Schnurr a fait une recherche sur les marques comportant l’élément DIVA en liaison avec les genres de marchandises ou de services suivants :

         restaurants, produits alimentaires, boissons ainsi que marchandises et services connexes (pièce A). La recherche de M. Schnurr a permis de relever neuf marques pertinentes.

         vêtements et marchandises connexes (pièce B). La recherche de M. Schnurr a permis de relever treize marques pertinentes.

         bijoux, montres et marchandises connexes (pièce C). La recherche de M. Schnurr a permis de relever cinq marques pertinentes.

         produits d’éclairage (pièce D). La recherche de M. Schnurr a permis de relever deux marques pertinentes.

[69]           Il convient de souligner qu’une preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où son analyse permet de tirer des conclusions sur l’état du marché. Des conclusions sur l’état du marché ne peuvent être dégagées que dans le cas où un grand nombre d’enregistrements pertinents est relevé [voir Ports International Ltd. c. Dunlop Ltd. (1992), 41 C.P.R. (3d) 432; Del Monte Corporation c. Welch Foods Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.); Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.)].

[70]           L’Opposante soutient que tout au plus pourrais-je considérer que certaines de ces marques pourraient avoir été employées dans une mesure limitée. Je suis d’accord. Je ne suis pas convaincue que les enregistrements pertinents relevés dans l’affidavit de Schnurr sont suffisamment nombreux pour me permettre de tirer des conclusions sur l’état du marché. Par conséquent, je n’accorde aucun poids à la preuve de l’état du registre présentée par M. Schnurr.

[71]           M. Schnurr a aussi effectué une recherche dans la base de données www.canada411.ca pour vérifier s’il existe des restaurants ou des entreprises connexes dont le nom commercial contient le mot DIVA. Il a repéré sept entreprises correspondant à ce critère, et il a pu vérifier par téléphone que trois d’entre elles étaient en exploitation (pièce H). Tout d’abord, les résultats de la recherche de M. Schnurr ne constituent pas une preuve de l’emploi de ces noms commerciaux au Canada; de plus, je ne suis pas convaincue que sept mentions représentent un nombre suffisamment élevé pour me permettre de tirer des conclusions sur l’état du marché.

[72]           M. Schnurr fournit aussi les résultats d’une recherche de marques similaires enregistrées séparément pour des services de restauration et des services de traiteur; cette recherche a révélé huit exemples. Le fait que des marques de « restaurants » de tiers puissent coexister avec des marques de tiers relatives à des services de « traiteur » n’est pas pertinent pour décider de la probabilité de confusion entre la Marque et les marques DIVA de l’Opposante. Chaque cas doit être décidé en fonction des faits qui lui sont propres. Par conséquent, je n’accorde aucun poids à cette partie de l’affidavit de M. Schnurr.

[73]           L’Opposante a produit l’affidavit de M. Daniel en réponse à l’affidavit de M. Schnurr. M. Daniel affirme qu’au fil des années, plusieurs des tierces parties recensées dans les résultats de recherche de M. Schnurr se sont entendues avec l’Opposante pour restreindre dans une certaine mesure l’emploi de leurs marques comprenant l’élément DIVA. M. Daniel traite aussi d’une entreprise mentionnée au paragraphe 11 de l’affidavit de M. Schnurr, entreprise dont le nom commercial « Diva Classic Indian Cuisine » a dû, à l’instigation de l’Opposante, être changé pour « Diwa Classic Indian Cuisine ».

[74]           La Requérante soutient que la preuve de M. Daniel n’est pas pertinente pour se prononcer sur la question de la confusion entre la Marque et les marques DIVA de l’Opposante. Je suis d’accord. Par conséquent, je n’accorde aucun poids à la preuve soumise par M. Daniel.

[75]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincue que l’une ou l’autre partie a fourni une preuve de l’état du registre ou de l’état du marché qui soit suffisante pour constituer en l’espèce une circonstance pertinente dans l’appréciation de la probabilité de confusion entre les marques des parties.

Autre circonstance de l’espèce – les services de traiteur et les cours de cuisine de l’Opposante

[76]           Les marques DIVA de l’Opposante sont enregistrées uniquement en vue de leur emploi en liaison avec des services de restauration. Néanmoins, l’Opposante a produit une preuve qui, selon elle, permettrait de conclure qu’en plus d’offrir les services de restauration visés par l’enregistrement, elle propose aussi des services de traiteur et des cours de cuisine en liaison avec ses marques DIVA.

[77]           J’ai déjà conclu que les services de traiteur et les services de restauration sont liés : je n’ai donc pas besoin d’examiner cette autre circonstance pour me prononcer en faveur de l’Opposante à l’égard des services de traiteur.

[78]           M. Wu affirme que l’Opposante a déjà offert des cours de cuisine. Plus particulièrement, il déclare dans son affidavit que l’ancien chef de cuisine de l’Opposante a offert des cours de cuisine privés suivis d’un repas de dégustation à six services au restaurant de l’Opposante. Pour étayer cette affirmation, M. Wu présente un communiqué de presse daté du 23 novembre 2006, dans lequel les détails de cette offre sont décrits. Je remarque que le communiqué de presse indique que ces services devaient être offerts en janvier et en février 2007. M. Wu affirme que la planification de cours de cuisine qui seraient donnés par le chef actuel de l’Opposante, est en cours. Cette déclaration donne à entendre qu’à la date où M. Wu a souscrit son affidavit, l’Opposante n’offrait plus de cours de cuisine. En conséquence, je ne suis pas convaincue que l’Opposante a fourni une preuve suffisante pour conclure qu’à la date pertinente, ses marques DIVA avaient acquis quelque réputation que ce soit en liaison avec des cours de cuisine. Je ne peux donc pas considérer ces faits comme une circonstance additionnelle appuyant la position de l’Opposante.

Autre circonstance de l’espèce – Absence de preuve concrète de confusion

[79]           À l’audience, la Requérante a avancé qu’il convenait de relever que les marques des parties coexistent au Canada depuis que Mme Linfield a commencé à employer la Marque, en 2004. De l’avis de la Requérante, il s’agit là d’une circonstance pertinente de l’espèce, qui étaye sa position.

[80]           Bien que l’Opposante ne soit pas tenue de produire une preuve de confusion concrète, l’absence d’une telle preuve, dans un cas où les parties coexistent depuis longtemps, peut entraîner une conclusion défavorable. En l’espèce, cependant, le fait que les parties ont offerts leurs services respectifs aux deux extrémités du pays constitue une circonstance atténuante qui pourrait expliquer l’absence d’incidents concrets de confusion.

[81]           En conséquence, je ne crois pas que l’absence de preuve de véritable confusion dans le marché au Canada constitue un facteur qui appuie la position de la Requérante.

Conclusion

[82]           Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, et plus particulièrement les ressemblances dans le genre entre les « services de traiteur » et les « services de restauration », j’estime que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et la marque DIVA de l’Opposante, en ce qui touche les « services de traiteur ». Compte tenu de ce qui précède, je fais droit au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) à l’égard des services de traiteur seulement.

[83]           Quant aux autres Marchandises et Services, la différence dans le genre des marchandises et des services fait basculer la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante : je rejette donc le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi pour ce qui est des autres Marchandises et Services.

Les motifs fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement

Alinéa 16(1)a) de la Loi

[84]           Bien qu’il incombe à la Requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques DIVA de l’Opposante, cette dernière doit au préalable démontrer qu’une ou plusieurs des marques de commerce invoquées au soutien de son motif d’opposition fondé sur le paragraphe 16(1) de la Loi ont été employées au Canada avant la date de premier emploi revendiquée (juin 2004 pour les Marchandises (1), octobre 2004 pour les Marchandises (3) et janvier 2004 pour les Services), et qu’elles n’avaient pas été abandonnées à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement pour la Marque (le 26 juillet 2006) [paragraphe 16(5) de la Loi].

[85]           Je remarque que l’Opposante, qui a produit une preuve d’emploi allégué de ses propres marques DIVA en liaison avec des services de traiteur et des cours de cuisine, n’a pourtant pas fondé son argument quant à l’absence de droit à l’enregistrement sur l’emploi en liaison avec ces services. Le motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement est limité à l’emploi des marques DIVA de l’Opposante en liaison avec des services de restauration. En conséquence, je ne peux tenir compte de l’emploi des marques DIVA de l’Opposante en liaison avec ces autres services.

[86]           Ce motif d’opposition fait intervenir trois dates pertinentes différentes, selon les Marchandises et les Services en cause. Cela dit, les circonstances, à mon avis, n’étaient pas très différentes, à l’une ou l’autre des dates pertinentes, des circonstances qui existaient à la date pertinente pour l’examen du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d); de ce fait, mes conclusions quant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi s’appliquent également ici. Conséquemment, je ne suis pas convaincue que la Requérante s’est acquittée de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause pour ce qui est des « services de traiteur ». Compte tenu de ce qui précède, je fais droit au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a) de la Loi à l’égard des services de traiteur seulement.

[87]           En ce qui a trait aux Marchandises (1) et (3) et aux autres Services, la différence dans le genre des marchandises et des services fait basculer la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante : je rejette donc le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a) de la Loi pour ce qui est des Marchandises (1) et (3) et des autres Services.

Alinéa 16(1)b) de la Loi

[88]           L’Opposante n’a pas spécifié les numéros des demandes pendantes sur lesquelles elle se fonde à l’égard de ce motif d’opposition. Les seules marques de commerce auxquelles l’Opposante fait référence dans la déclaration d’opposition sont ses marques DIVA, toutes deux enregistrées en 1997. Les marques DIVA de l’Opposante n’étaient donc pas pendantes à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement pour la Marque [voir le paragraphe 16(4) de la Loi]; de ce fait, l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve. Conséquemment, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)b) de la Loi est rejeté.

Le motif fondé sur l’absence de caractère distinctif – alinéa 38(2)d) de la Loi

[89]           Pour s’acquitter du fardeau initial qui lui incombe à l’égard de ce motif, l’Opposante doit établir qu’une ou plusieurs de ses marques DIVA étaient connues au moins dans une certaine mesure au Canada le 22 mars 2007 [voir Bojangles’ International LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F.), et Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.)].

[90]           Comme je l’ai exposé de façon plus détaillée dans mon analyse des motifs d’opposition fondés sur l’enregistrabilité et sur l’absence de droit à l’enregistrement, je suis convaincue que la preuve de l’Opposante permet de conclure que les marques DIVA de l’Opposante avaient acquis une réputation au Canada à la date pertinente; en conséquence, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial. Je remarque que, tout comme pour les motifs d’opposition soulevant l’absence de droit à l’enregistrement, l’Opposante a fondé ce motif uniquement sur ses services de restauration.

[91]           Je dois maintenant évaluer si la Requérante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait. En particulier, elle devait établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité de confusion entre les marques des parties.

[92]           La différence entre les dates pertinentes n’est pas importante; de ce fait, les conclusions que j’ai tirées quant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi s’appliquent également en l’espèce. En conséquence, je ne suis pas convaincue que la Requérante s’est acquittée de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause pour ce qui est des « services de traiteur ». Compte tenu de ce qui précède, je fais droit au motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif à l’égard des services de traiteur seulement.

[93]           En ce qui a trait aux autres Marchandises et Services, la différence dans le genre des marchandises et des services fait basculer la prépondérance des probabilités en faveur de la Requérante : je rejette donc le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif à l’égard des autres Marchandises et Services.


 

Décision

[94]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement de la Marque à l’égard des « services des traiteur », et je rejette l’opposition à l’égard des Marchandises et des autres Services, conformément aux dispositions du paragraphe 38(8) de la Loi [voir Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 C.P.R. (3d) 492 (C.F. 1re inst.), à titre de précédent autorisant une décision partagée].

 

______________________________

 

Andrea Flewelling

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Dominique Lamarche, LL.L., trad. a.

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.