Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION par Fernand Claisse et Fernand Claisse inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1,204,632 concernant la marque de commerce CLAISSE produite par La Corporation scientifique Claisse Inc.

 

 

[1].                         Le 29 janvier 2004, La Corporation scientifique Claisse Inc. (la Requérante) a produit une demande d'enregistrement concernant la marque de commerce CLAISSE (la Marque) employée au Canada en liaison avec les marchandises et services suivants :

 

Marchandises :

(1)  Instruments de fusion, nommément : appareils automatiques, aussi appelés fluxeurs, permettant de produire par fusion des disques de verre pour l’analyse par fluorescence de rayons X (XRF) ainsi que des solutions pour l’analyse par spectrométrie d’absorption atomique (AA) ou par spectrométrie d’émission plasma (ICP) et les pièces s’y rattachant, nommément les unités de chauffage composées d’éléments chauffants permettant d’exécuter la fusion, les unités de contrôle consistant en un boîtier doté d’un clavier permettant de commander et de modifier les actions nécessaires aux unités de chauffage, les cartes électroniques d’interface servant de lien de communication entre les différentes fonctions des fluxeurs et leur programmation informatique et les logiciels spécifiques à chacun des instruments de fusion permettant de faire varier le niveau et l’ordre d’exécution des diverses fonctions rattachées à la procédure de fusion. (Employée au Canada depuis le 21 octobre 1976)

(2)  Fondants, nommément: solvants, aussi appelés fondants, constitués de borate de lithium ou de borate de sodium utilisés dans la préparation par fusion d’échantillons inorganiques pour fins d’analyse par fluorescence de rayons X (XRF) ainsi que des solutions pour l’analyse par spectrométrie d’absorption atomique (AA) ou par spectrométrie d’émission plasma (ICP). (Employée au Canada depuis avril 1988)

(3)  Accessoires de platine, nommément: moules et creusets composés d’un alliage de platine et d’or pour fins de fusion. (Employée au Canada depuis mai 1980)

(4)  Produits chimiques, aussi appelés agents non-mouillants et additifs, utilisés lors de la fusion, nommément: carbonate de lithium, iodure de potassium, bromure de lithium, iodure de lithium, fluorure de lithium, nitrate de lithium et nitrate de sodium. (Employée au Canada depuis avril 1988)

 

Services :

(1)   Service de formation et d’assistance à la clientèle pour l’utilisation des instruments de fusion et les différents aspects des opérations d’analyse en fluorescence de rayons X (XRF), en spectrométrie d’absorption atomique (AA), en spectrométrie d’émission plasma (ICP) ou en chimie humide. (Employée au Canada depuis septembre 1998)

(2)   Service d’assistance au développement des procédures de préparation d’échantillons inorganiques par fusion de la clientèle permettant de réaliser des analyses en fluorescence de rayons X (XRF), en spectrométrie d’absorption atomique (AA), en spectrométrie d’émission plasma (ICP) et en chimie humide. (Employée au Canada depuis janvier 1991)

(3)   Service de soutien pour l’installation et le démarrage des instruments de fusion. (Employée au Canada depuis janvier 1991)

(4)   Service de suivi, nommément: visites périodiques en laboratoire pour s’assurer du bon fonctionnement des instruments de fusion de la clientèle et la tenir informée des dernières découvertes en lien avec ses opérations reliées à la fusion. (Employée au Canada depuis avril 1999)

 

(les Marchandises et Services)

 

[2].                         La demande a été annoncée le 8 décembre 2004 dans le Journal des marques de commerce.

 

[3].                         Fernand Claisse et Fernand Claisse inc. (ci-après l’Opposant et l’Opposante, aussi collectivement référés les Opposants) ont produit une déclaration d'opposition à l’encontre de cette demande le 17 janvier 2005. Les motifs d’opposition peuvent se résumer ainsi :

 

1.      La demande ne satisfait pas aux exigences des paragraphes 30(a), (b) et (i) de la Loi sur les marques de commerce (L.R.C. 1985, ch. T-13) (la Loi);

2.      La Marque n’est pas enregistrable au sens de l’article 12(1)(a) de la Loi car elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 années précédentes;

3.      La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au sens de l’article 16(1) de la Loi du fait que la Marque est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom de famille de l’Opposant. De plus, la Requérante n’est pas la véritable propriétaire de la Marque qu’elle n’a employée qu’avec la permission et le consentement de l’Opposant tel qu’il sera discuté plus amplement ci-après. Également, à la date où la Requérante prétend avoir employé la Marque à l’égard de chacune des Marchandises et de chacun des Services en premier lieu, elle créait de la confusion avec une marque de commerce « Claisse », propriété et employée par l’un ou l’autre des Opposants, le tout sans admission de quelque nature que ce soit; et

4.      La Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi.

 

[4].                         La Requérante a produit le 31 mai 2005 une contre-déclaration déniant tous les motifs d’opposition et demandant que la décision à être rendue dans la présente affaire tienne compte de l’admission des Opposants contenue dans leur déclaration d’opposition quant au fait que « …la Requérante n’est pas la véritable propriétaire de la Marque « Claisse » qu’elle n’a employée qu’avec la permission et que du consentement de l’Opposant Fernand Claisse qui, de par sa position de dirigeant de la Requérante, contrôlait les caractéristiques et la qualité des [M]archandises et [S]ervices en liaison avec lesquels la Marque était employée, ainsi que l’emploi, la publicité et l’exposition de la Marque » et ce, nonobstant le fait que les Opposants affirment que ces allégations sont faites « sans admission de quelque nature que ce soit » ».

 

[5].                         Au soutien de leur opposition, les Opposants ont produit un premier affidavit de monsieur Fernand Claisse daté du 14 décembre 2005. La Requérante a produit un affidavit de madame Lucie Simard daté du 13 juillet 2006. Madame Simard a été contre-interrogée sur son affidavit et la transcription de son contre-interrogatoire de même que les engagements souscrits lors de celui-ci ont été produits au dossier. Les Opposants ont également produit un deuxième affidavit de monsieur Claisse daté du 22 mai 2007 à titre de preuve en réplique. Dans la mesure où la preuve de l’une ou l’autre des parties relève de l’argumentation plutôt que d’éléments factuels pertinents au présent dossier, j’ai concentré mon analyse sur ces éléments pertinents.

 

[6].                         Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et participé à la tenue d’une audience.


 

Analyse

 

Principes généraux et dates pertinentes

 

[7].                         Il incombe à la Requérante de démontrer que la demande est conforme aux exigences de la Loi. Il incombe toutefois aux Opposants de faire en sorte que chacun de leurs motifs d’opposition soit dûment plaidé et de s’acquitter du fardeau de preuve initial en établissant les faits sur lesquels ils appuient leurs motifs d’opposition, sans quoi il est possible qu’un motif d’opposition ne soit pas pris en considération. Une fois ce fardeau de preuve initial rencontré, il incombe à la Requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’aucun de ces motifs d’opposition ne fait obstacle à l’enregistrement de la Marque [voir Massimo De Berardinis c. Decaria Hair Studio (1984), 2 C.P.R. (3d) 319 (C.O.M.C.); John Labatt Ltd. c. Molson Companies Ltd. (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.); Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al c. Seagram Real Estate Ltd., (1984) 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.); Dion Neckwear Ltd. c. Christian Dior, S.A. et al, (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.); et Wrangler Apparel Corp. c. The Timberland Company, [2005] C.F. 722].

 

[8].                         Les dates pertinentes pour l’appréciation des circonstances relatives à chacun des motifs d’opposition en l’espèce sont les suivantes :

 

  • Motifs fondés sur l’article 30 de la Loi : la date de production de la demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469 (C.O.M.C.)];
  • Motif fondé sur l’article 12(1)(a) de la Loi : la date de production de la demande [voir Calvin Klein Trademark Trust c. Wertex Hosiery Inc. (2004), 41 C.P.R. (4th) 552 et Jurak Holdings Ltd. c. Matol Biotech Laboratories Ltd. (2006), 50 C.P.R. (4th) 337 (C.O.M.C.)];
  • Motif fondé sur l’article 16(1) de la Loi : les dates de premier emploi revendiquées dans la demande; et

         Motif fondé sur l’absence de caractère distinctif de la Marque : généralement acceptée comme étant la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

 

Résumé de la preuve

 

Preuve des Opposants

 

[9].                         L’Opposant Fernand Claisse est un chercheur de renommée internationale dans le domaine de l’analyse chimique par rayons-x de divers matériaux. Il détient un doctorat en physique et métallurgie. Monsieur Claisse affirme dans son premier affidavit avoir notamment développé la technique des perles boratées (dite de fusion) en 1955 et avoir conçu personnellement divers appareils et instruments scientifiques, dont le premier appareil mécanique de fusion pour faire des perles de fusion qui a été désigné sous le terme de « Fluxeur » (« Fluxer » en anglais) en 1971. Ce type d’appareil est employé par les laboratoires d'analyses industriels de cimenteries, d’alumineries et de sociétés pétrolières et minières entre autres.

 

[10].                     Ces appareils de fusion ont été fabriqués et vendus sur le marché à l’origine par l’ancienne Fernand Claisse inc. (une compagnie qui n’est pas l’Opposante et qui a été dissoute en 1985 (selon madame Simard, elle aurait plutôt été dissoute en avril 1987)). Monsieur Claisse affirme dans son premier affidavit que la Requérante a été constituée par lui en 1976 aux fins seulement de la commercialisation des instruments et appareils fabriqués par l’ancienne Fernand Claisse inc. et que lorsque cette dernière a été dissoute, ses activités ont été prises en charge par la Requérante.

 

[11].                     Monsieur Claisse affirme à cet égard avoir été président de la Requérante de 1976 à 2000 et employé de cette dernière de 1976 à 2002 (selon madame Simard, il aurait plutôt été employé de la Requérante de 1984 à 2002). En raison de ses titres, responsabilités et fonctions au sein de la Requérante, il affirme être personnellement informé du fait que les noms et appellations commerciaux que la Requérante pouvait employer ne comportaient jamais, de 1976 à 1997, le mot « CLAISSE » employé seul. Monsieur Claisse ajoute que les unités de chauffage (Marchandises no 1) ne portent pas ni n’ont jamais porté le mot « CLAISSE » employé seul ou avec d’autres mot(s) ou logo(s) quelconque(s).

 

[12].                     Monsieur Claisse joint à son premier affidavit une liste des conférences, réunions et activités scientifiques auxquelles il a participé personnellement ou à titre de représentant de la Requérante, une liste des articles et livres qu’il a publiés, une liste des ateliers qu’il a dirigés et des présentations qu’il a données de même qu’une liste des honneurs et décorations qu’il a reçus pour justifier la renommée mondiale dont il jouit dans le domaine de la fusion par rayons-x.

 

[13].                     Monsieur Claisse joint également à son affidavit des communications qu’il a reçues de quatre scientifiques, dont un canadien, afin de démontrer que le nom « CLAISSE » est directement lié à sa personne. Il affirme de plus qu’il a toujours employé le nom « CLAISSE » sous lequel il a été baptisé, dans tous les aspects de sa vie.

 

[14].                     Monsieur Claisse joint également à son affidavit une liste de noms et coordonnées afin de démontrer qu’il existerait dans la seule province de Québec au moins 29 personnes qui portent le nom « CLAISSE ». Je note que cette liste recoupe les noms et coordonnées de huit des personnes apparaissant sur le site Web « Canada441.ca » répertoriées par madame Simard (voir plus bas). Pour les autres, la méthodologie de recherche employée par monsieur Claisse laisse à désirer et relève davantage du ouï-dire. Je note également que certaines des personnes figurant sur cette liste semblent appartenir à une même famille étant donné qu’elles ont la même adresse domiciliaire. Monsieur Claisse affirme par ailleurs qu’une recherche sur le site Web « Google.ca » ferait apparaître 121 000 entrées de personnes qui portent le nom « CLAISSE » partout dans le monde et 590 entrées le concernant. Cette recherche ferait également apparaître au Canada 540 entrées employant le mot « CLAISSE » et 40 entrées employant l’expression « Fernand-Claisse ». Je ne suis pas prête à accorder de poids aux divers résultats de recherche obtenus via le site « Google.ca » étant donné notamment le flou entourant les paramètres de recherche employés et le fait qu’une même entrée puisse être répertoriée plus d’une fois.

 

[15].                     S’agissant toujours de la signification du mot « CLAISSE », monsieur Claisse affirme que l’ancienne compagnie Fernand Claisse inc. a dû se désister du droit à l’emploi exclusif du mot « CLAISSE » en dehors de la marque de commerce « CLAISSE FLUXER » afin d’obtenir l’enregistrement de cette marque de commerce au Canada. Au soutien de ses affirmations, monsieur Claisse joint à son premier affidavit copie d’un relevé de la banque de données de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) concernant l’enregistrement de marque de commerce obtenu le 11 avril 1980 pour cette marque faisant voir le désistement fourni de même que la radiation de cet enregistrement le 8 mars 1996 faute d’avoir été renouvelé. Je ne suis pas prête à accorder de poids au fait que l’examinateur en charge de l’examen de cette demande d’enregistrement aurait exigé pareil désistement notamment en raison du fait que je ne suis pas liée par les conclusions pouvant être tirées au stade de l’examen d’une demande d’enregistrement [voir Now Communications Inc. c. CHUM Ltd. (2003), 32 C.P.R. (4th) 68 (C.O.M.C.); Interdoc Corporation c. Xerox Corporation (25 novembre 1998 C.O.M.C. (non rapportée), demande no 786,491); Thomas J. Lipton Inc. c. Boyd Coffee Co. (1991), 40 C.P.R. (3d) 272 et Procter & Gamble Inc. c. Morlee Corp. (1993), 48 C.P.R. (3d) 377] d’autant plus que dans ce cas particulier, il est permis de croire que le nom de la requérante ait dû influencer l’examinateur.

 

[16].                     Monsieur Claisse affirme par ailleurs que depuis la fin de son emploi au sein de la Requérante, des clients se sont adressés à lui à quelques reprises au cours de conférences-expositions, rencontres ou via des courriels, croyant parler à un responsable de la Requérante.

 

[17].                     S’agissant de l’Opposante Fernand Claisse inc., monsieur Claisse affirme qu’elle est une personne morale constituée en mars 2004 se spécialisant dans l’accroissement du potentiel de la technologie de la fusion aux borates, dans le développement de nouveaux produits afférents à la fusion aux borates et dans le développement de nouvelles versions de différents produits qu’il a créés dans le passé. Monsieur Claisse est le fondateur, l’actionnaire majoritaire, le seul administrateur et le président et secrétaire de l’Opposante.

 

[18].                     Dans son deuxième affidavit monsieur Claisse revient sur les activités poursuivies par l’ancienne Fernand Claisse inc. Il affirme que cette compagnie a employé depuis aussi tôt que février 1974, la marque « Claisse Fluxer » faisant l’objet de l’enregistrement discuté plus avant en liaison avec des marchandises décrites comme étant des « appareils de laboratoires qui ont pour objet de transformer en verre ou en solutions liquides les roches, les ciments et autres matériaux industriels ». Monsieur Claisse joint à cet effet copie d’une publicité de l’ancienne Fernand Claisse inc. sur laquelle est inscrite à la main l’année 1975 faisant voir des photographies de ces appareils sur lesquels la marque « CLAISSE FLUXER » apparaît clairement.

 

[19].                     Entre février 1974 et l’automne 1976, l’ancienne Fernand Claisse inc. a conçu, construit et commercialisé des appareils en employant la marque « Claisse Fluxer ». Ce n’est qu’à compter de l’automne 1976 que la Requérante a commencé à commercialiser les appareils « Claisse Fluxer ». Plus particulièrement, monsieur Claisse affirme dans son deuxième affidavit que l’ancienne Fernand Claisse inc. a continué de fabriquer les appareils de marque « Claisse Fluxer » qui étaient commercialisés par la Requérante de l’automne 1976 au printemps 1986. Ainsi, ce n’est qu’à compter du moment où l’ancienne Fernand Claisse inc. a été dissoute que la Requérante a commencé à fabriquer elle-même les appareils de marque « Claisse Fluxer ». La marque « Claisse Fluxer » a été cédée à la Requérante en juin 1984 tel que rapporté dans le relevé de l’OPIC discuté plus avant et son enregistrement radié en mars 1996, tel qu’également discuté plus avant.

 

[20].                     Monsieur Claisse termine son deuxième affidavit en joignant copie d’un relevé du registre des entreprises du Québec selon lequel la Requérante aurait elle-même déclaré n’avoir employé le mot « CLAISSE » qu’à compter du 21 janvier 2004.

 

[21].                     La Requérante ne s’est pas objectée à la production de ce deuxième affidavit de monsieur Claisse produit à titre de preuve en réplique. En vertu de l’article 43 du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96-195, pareille preuve doit se limiter strictement aux matières servant de réponse. Tel qu’indiqué plus avant, le deuxième affidavit de monsieur Claisse revient essentiellement sur certains aspects traités dans le cadre de son premier affidavit. J’estime qu’exception faite du relevé du registre des entreprises du Québec, le deuxième affidavit de monsieur Claisse est redondant et non nécessaire et partant, non recevable. Pour ce qui est du relevé du registre des entreprises, celui-ci a pour but de contredire le témoignage de madame Simard en ce qui a trait à l’emploi du mot « CLAISSE » comme marque de commerce ou nom commercial. Pour cette raison, j’estime cette partie de la preuve en réplique recevable. Je reviendrai sur cet aspect du dossier plus loin dans ma décision.

 

Preuve de la Requérante

 

[22].                     Madame Lucie Simard occupe la présidence de la Requérante depuis le 17 février 2000 et elle en est l’un de ses administrateurs depuis le 1er avril 1983. Madame Simard affirme dans son affidavit avoir occupé les fonctions d’adjointe administrative de 1978 à 1983 et de secrétaire-trésorière de la Requérante de 1983 à 2000.

 

[23].                     Madame Simard affirme que la Requérante est un chef de file mondial et une pionnière en développement des techniques de fusion analytiques en instrumentation et en chimie fine scientifique et s’est acquis une réputation internationale pour ses réalisations.

 

[24].                     Madame Simard affirme qu’elle est personnellement au fait que la Marque a été employée par la Requérante en liaison avec toutes les Marchandises et tous les Services à compter des dates de premier emploi revendiquées dans la présente demande d’enregistrement. Pour appuyer ses dires, elle joint à son affidavit une pile désordonnée de spécimens de factures, bons de commandes, bons de livraison, certificats d’origine, déclarations d’exportation, rapports de services ou de visites, annonces publiées dans des revues spécialisées, pages du site Web et brochure corporative de la Requérante.

 

[25].                     Madame Simard affirme que la Marque a acquis une notoriété certaine au sein de la communauté scientifique et de la clientèle desservie par la Requérante et qu’elle distingue vraiment les Marchandises et Services de la Requérante de ceux de ses concurrents. Elle affirme à cet effet que la Requérante a réalisé, tant au Canada qu’à l’étranger, de 2000 à 2006, des ventes pour plus de 25 000 000 $ et ce, pour des marchandises et services en liaison avec lesquels la Marque a été employée. Pour la même période, plus de 1 400 000 $ ont été consacrés par la Requérante à la publicité et à la promotion de ces mêmes marchandises et services.

 

[26].                     Madame Simard affirme à cet égard que la Requérante a participé, tant au Canada qu’à l’étranger, à des dizaines d’évènements au cours desquels la Requérante avait à sa disposition un kiosque où elle a pu installer des affiches et distribuer des brochures corporatives sur lesquelles la Marque apparaît distinctement. Elle joint à cet effet, à titre indicatif, une liste des présentations, publications et communications scientifiques faites par des employés de la Requérante au cours des années 1992 à 2002.

 

[27].                     Madame Simard affirme que la Requérante a un site Web qui a été mis en service en 1988 sous le nom de domaine « claisse.com » et qu’elle est également titulaire des noms de domaine « claisse.ca » et « claisse.net ».

 

[28].                     S’agissant de l’Opposant Fernand Claisse, Madame Simard affirme qu’à titre d’employé de la Requérante de 1984 à 2002 et à titre de président de 1976 à 2000, il n’a jamais contesté ou remis en cause le droit de la Requérante d’employer la Marque à l’égard des Marchandises et Services. Madame Simard soutient de plus que la renommée que s’attribue l’Opposant ne dépasse pas celle de n’importe quel scientifique qui diffuse des écrits et prononce des conférences dans son champ d’intérêt. Elle affirme à cet égard que l’Opposant confond « sa pseudo renommée » avec celle de la Requérante. À preuve, madame Simard affirme que le départ de l’Opposant en janvier 2002 n’a pas affecté le cours normal des activités de la Requérante dont la bonne renommée et les ventes ont continué de progresser depuis son départ.

 

[29].                     Madame Simard est convaincue que l’opposition des Opposants n’est motivée que par la rancœur et la hargne qui animent l’Opposant depuis son congédiement par la Requérante en 2002. Je ne suis pas prête à accorder de poids à cette affirmation de madame Simard qui m’apparaît pour le moins péjorative.

 

[30].                     S’agissant des activités des Opposants, madame Simard affirme qu’ils n’ont jamais employé une marque de commerce avec laquelle la Marque pourrait vraisemblablement porter à confusion. Elle appuie ses dires d’une copie du site Web de l’Opposante. Madame Simard affirme également que les Opposants n’ont jamais obtenu l’enregistrement d’une telle marque de commerce non plus. Tel qu’indiqué plus avant, je ne suis pas prête à accorder de poids à ces affirmations de madame Simard dans la mesure où elles relèvent de l’argumentation. Il est du ressort du registraire de déterminer la probabilité de confusion entre les marques en cause dans le présent dossier.

 

[31].                     S’agissant de la fréquence du nom « Claisse », Madame Simard joint à son affidavit un relevé du site Web « Canada411.ca » selon lequel seules 11 inscriptions ont pu être répertoriées dans les annuaires canadiens.

 

[32].                     J’analyserai maintenant les motifs d’opposition en regard de la preuve versée dans le présent dossier sans nécessairement respecter l’ordre dans lequel ils ont été invoqués dans la déclaration d’opposition.

 

Motifs d’opposition

 

i)        Motif fondé sur l’article 12(1)(a) de la Loi

 

[33].                     En vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi, une marque de commerce est enregistrable sauf si elle constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 années précédentes.

 

[34].                     Les Opposants se sont acquittés de leur fardeau de preuve initial en établissant que le mot « CLAISSE » consiste en un nom de famille d’un particulier vivant au Canada. La Requérante admet d’ailleurs volontiers cet état de fait. Le différend opposant les parties consiste en l’interprétation à donner à l’article 12(1)(a) de la Loi, notamment en ce qui a trait au test applicable pour déterminer si la Marque n’est « principalement » qu’un nom de famille d’un particulier vivant.

 

[35].                     Les Opposants soumettent que le mot « CLAISSE » n’a pas de sens second autre que d’être un nom de famille. Le mot « CLAISSE » n’est pas, dans l’une ou l’autre des langues officielles au Canada, un nom commun, un lieu géographique, un mot inventé, un acronyme, etc. S’agissant d’un nom de famille d’un particulier vivant n’ayant d’autre connotation que celle d’être un nom de famille, le canadien moyen ne peut considérer la Marque comme étant autre chose qu’un nom de famille.

 

[36].                     Par opposition, la Requérante, s’en remettant à l’Énoncé de pratique « Alinéa 12(1)(a) de la loi – nom ou nom de famille » publié par l’OPIC le 16 août 2000, soumet qu’aucune objection ne peut être formulée en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi puisqu’il n’y a pas au moins 25 occurrences de ce nom de famille qui peuvent être trouvées dans les annuaires téléphoniques canadiens. La Requérante ajoute que le sens premier de « CLAISSE » n’évoque aucunement un nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 dernières années pour un canadien doté d’une intelligence moyenne et possédant un niveau d’instruction moyen en anglais ou en français. Ce canadien moyen est plus susceptible de réagir au mot « CLAISSE » en pensant qu’il s’agit d’un mot crée, fantaisiste ou inventé employé comme marque de commerce d’une entreprise plutôt que d’un nom de famille étant donné la rareté de ce nom de famille. Subsidiairement, la Requérante soumet que si la marque de commerce n’est pas enregistrable en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi, elle peut néanmoins être enregistrée en vertu de l’article 12(2) de la Loi « car elle a été employée au Canada par la Requérante ou son prédécesseur en titre de façon à être devenue distinctive à la date de production de la présente demande d’enregistrement. » La Requérante soumet enfin que la Marque ne saurait être considérée comme un nom de famille d’un particulier « célèbre ».

 

[37].                     Considérant dans un premier temps la fréquence du mot « CLAISSE » en tant que nom de famille, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu’il s’agit-là d’un nom de famille rare au Canada. Que l’on retienne le chiffre de 11 inscriptions répertoriées dans les annuaires téléphoniques canadiens tel que mis en preuve par l’affidavit de madame Simard ou plutôt le fait que 29 personnes porteraient le nom de famille « CLAISSE » au Québec tel qu’allégué dans l’affidavit de monsieur Claisse ne saurait cependant à lui seul être déterminant en l’espèce. L’énoncé de pratique selon lequel une objection en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi sera prise en considération seulement si au moins 25 occurrences du nom de famille peuvent être trouvées dans les annuaires téléphoniques canadiens est fourni à titre indicatif seulement et ne saurait réduire le test applicable en la matière à de simples considérations mathématiques.

 

[38].                     S’agissant d’un nom de famille rare, ne correspondant au surplus à aucun mot défini dans les dictionnaires de langue française ou anglaise, la question est de savoir si le Canadien moyen est davantage susceptible d’associer le mot « CLAISSE » à un nom de famille ou si ce mot peut être perçu principalement ou également comme un nom inventé pouvant servir de marque de commerce [voir Registrar of Trade-marks c. Coles Book Stores Limited, [1974] R.C.S. 438; Standard Oil Co. c. the Registrar of Trade-marks, [1968] 2 Ex. C.R. 523; Galanos c. Canada (Registrar of Trade-marks) (1982), 69 C.P.R. (2d) 144 (C.F. 1re inst.)]. Ce deuxième scénario m’apparaît plus probable.

 

[39].                     Bien que le mot « CLAISSE » corresponde de fait à un nom de famille, la rareté de ce nom de famille combinée au fait que le mot « CLAISSE » ne possède aucune connotation particulière m’amènent à conclure que les deux caractéristiques (nom de famille et nom inventé) sont d’égale importance. Partant, on ne peut dire que le mot « CLAISSE » n’est principalement qu’un nom de famille.

 

[40].                     J’ajouterai sur ce point que l’on ne saurait inférer du simple fait que l’Opposant jouisse d’une certaine renommée internationale dans le domaine hautement pointu de l’analyse chimique par rayons-x, qu’il s’ensuit une reconnaissance du mot « CLAISSE » en tant que nom de famille par le consommateur canadien moyen en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi, d’autant plus qu’il m’apparaît difficile d’attribuer cette renommée à l’Opposant seul et non pas aussi en partie à la Requérante.

 

[41].                     Ayant conclu que la Marque ne contrevient pas aux dispositions de l’article 12(1)(a) de la Loi, il n’est pas nécessaire de considérer les représentations des parties ayant trait à l’enregistrabilité de la Marque en vertu de l’article 12(2) de la Loi. Le motif d’opposition fondé sur la non-enregistrabilité de la Marque en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi est rejeté.

 

ii)   Motifs fondés sur l’article 30 de la Loi

                        Motif fondé sur l’article 30(b) de la Loi

 

[42].                     Les Opposants soumettent que la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30(b) de la Loi en ce que c’est faussement que la Requérante déclare avoir employé la Marque en liaison avec les Marchandises et Services à compter des dates de premier emploi revendiquées dans la demande.

 

[43].                     Les Opposants peuvent s’acquitter de leur fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’article 30 en s’appuyant non seulement sur la preuve qu’ils ont déposée mais également sur celle déposée par la Requérante [voir Labatt Brewing Company Limited c. Molson Breweries, a Partnership (1996), 68 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst.)].

 

[44].                     Dans la mesure où la Requérante a plus facilement accès aux faits, le fardeau de preuve qui incombe aux Opposants relativement au motif d’opposition fondé sur le non-respect de l’article 30(b) est moins lourd [voir Tune Masters c. Mr. P’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.)].

 

[45].                     Considérant dans un premier temps la preuve fournie par les Opposants, je retiens après analyse du premier affidavit de monsieur Claisse que l’ancienne Fernand Claisse inc. est celle qui a conçu, fabriqué et commercialisé les premiers appareils et instruments de fusion du genre visé par la présente demande d’enregistrement. Aux fins de cette commercialisation, l’ancienne Fernand Claisse inc. a employé la marque « CLAISSE FLUXER », pour laquelle un enregistrement de marque de commerce a été obtenu auprès de l’OPIC. Cet enregistrement revendique comme date de premier emploi de la marque février 1974.

 

[46].                     La Requérante a été constituée par l’Opposant en 1976 aux fins seulement de la commercialisation des appareils et instruments de fusion fabriqués par l’ancienne Fernand Claisse inc. Loin de contredire ce fait, madame Simard explique aux pages 9 et 10 de son contre-interrogatoire que les instruments et appareils qui étaient vendus au tout début des activités de la Requérante étaient les « Fluxeurs de Claisse qui avaient été développés et fabriqués par [Fernand Claisse] ».

 

[47].                     Madame Simard ajoute d’ailleurs à ce sujet que l’ancienne Fernand Claisse inc. et la Requérante étaient à leurs débuts de petites entreprises qui étaient de fait des « alter ego » ou « miroir l’une de l’autre » [pages 12 et 25 de son contre-interrogatoire].

 

[48].                     Entre 1974 et 1982, six nouveaux modèles d’appareils ont été conçus et commercialisés (« Fluxeur I » à « VI » inclusivement [paragraphe 17 du premier affidavit de monsieur Claisse]). Madame Simard ne contredit pas ce fait. Elle explique à la page 15 de son contre-interrogatoire qu’à son arrivée au sein de la Requérante, celle-ci n’avait « qu’un seul appareil qui s’appelait le « Fluxor [sic]VI » et plus loin à la page 38 « [à] l’époque, en 1983, Corporation Scientifique Claisse n’avait toujours qu’un seul instrument de fusion qui était le « Fluxeur VI » ».

 

[49].                     L’entreprise de la Requérante a évolué au fil des ans. Il ressort de l’affidavit de monsieur Claisse et des pages 120 et 121 du contre-interrogatoire de madame Simard que de nouveaux appareils, instruments et techniques ont été conçus par l’Opposant en collaboration avec d’autres personnes alors qu’il œuvrait au sein de la Requérante. C’est ainsi que le modèle « Fluxeur VI » a été remplacé vers 1983-84 par le modèle « BIS », puis vers 1987-89 par le modèle « FLUXY » puis vers 1990 par le modèle « M4 », etc.

 

[50].                     Considérant dans un deuxième temps plus attentivement la preuve fournie par la Requérante, l’évolution de l’entreprise de la Requérante s’est traduite non seulement par le développement de divers modèles d’appareils de fusion mais également par l’ajout de nouveaux produits et services, tels :

         Les accessoires de platine (moules et creusets) faisant l’objet de la catégorie de marchandises no 3 de la présente demande, introduits en 1980 [page 124 du contre-interrogatoire de madame Simard]

         Les fondants et les produits chimiques faisant l’objet des catégories de marchandises nos 2 et 4 de la présente demande, introduits en 1987 [pages 129 et 141-142 du contre-interrogatoire de madame Simard]

         Les services de consultation faisant l’objet des catégories de services nos 1 et 4 de la présente demande [page 155 du contre-interrogatoire de madame Simard]

 

[51].                     Cette évolution de l’offre des produits et services de la Requérante fut également accompagnée d’une évolution du logo de l’entreprise de la Requérante. Au fil des ans, la Requérante a davantage mis l’emphase sur le mot « CLAISSE ». Madame Simard explique d’ailleurs à la page 36 de son contre-interrogatoire, que dès les débuts de l’entreprise de la Requérante, elle « avait habitué les clients à mettre toujours « CLAISSE FLUXER » [sur leurs commandes d’achat] pour positionner le mot « CLAISSE » ».

 

[52].                     Plus particulièrement, le logo de l’entreprise de la Requérante a été modifié une première fois en 1983. Constitué à l’origine des lettres « CSC » à l’intérieur d’un rectangle avec en dessous les mots « Claisse Scientific Corporation », ce logo a été modifié de manière à retrancher les lettres « CSC » et le rectangle et à ajouter un dessin stylisé de six têtes de brûleurs situé à gauche du nom Corporation Scientifique Claisse. Vers la fin des années 1990, ce logo a été modifié encore de manière à positionner le mot « CLAISSE » en premier plan avec en dessous les mots « The First and Finest in Fusion » et le dessin stylisé des six têtes de brûleurs. Puis vers 2003, les mots « The First and Finest in Fusion » ont été retranchés; le logo consistant désormais en le mot « CLAISSE » avec à sa gauche le dessin stylisé des six têtes de brûleurs.

 

[53].                     Revenant sur les Marchandises et Services et les dates de premier emploi revendiquées dans la présente demande d’enregistrement, il convient de noter ce qui suit :

         En ce qui a trait à la catégorie de marchandises désignées comme « Instruments de fusion », la facture la plus ancienne produite par madame Simard date du 15 septembre 1977 (pièce LS-1 au contre-interrogatoire de madame Simard) (par comparaison, la date de premier emploi revendiquée dans la demande est le 21 octobre 1976) et porte sur un « kit de pièces détachées pour Fluxeur Claisse ». S’agissant de pièces et accessoires, Madame Simard explique aux pages 30 et 118 de son contre-interrogatoire qu’un appareil de fusion a nécessairement été vendu à ce même client antérieurement au 15 septembre 1977. Les spécimens de publicité les plus anciens produits par madame Simard auraient quant à eux été conçus au cours des années 1980 (pièce LS-4), 1984 (pièce LS-5), 1987 (pièce LS-6) et 1996 (pièce LS-10). Ces publicités consistent essentiellement en des photographies d’appareils de fusion arborant la marque « Claisse Fluxer VI » ou « CLAISSE FLUXER BIS » ou « CLAISSE FLUXY ». L’une ou l’autre des trois premières versions du logo de l’entreprise de la Requérante selon l’année en question apparaît également sur ces publicités et sur les étiquettes ou collants apposés sur les appareils.

         En ce qui a trait à la catégorie de marchandises désignées comme « Fondants », les factures les plus anciennes produites par madame Simard datent des 13 et 19 février 1986 et portent entre autres sur du tetraborate de lithium (engagement no 1 produit suite au contre-interrogatoire de madame Simard) (par comparaison, la date de premier emploi revendiquée dans la demande est avril 1988). Ces factures ne mentionnent pas qu’il s’agit de fondants de marque « CLAISSE ». Madame Simard a joint au document produit comme engagement no 1, un spécimen de publicité daté du 15 novembre 1989 annonçant les fondants « CLAISSE FLUXES  (Borates and Phosphates)». Je note par ailleurs que les spécimens de publicité LS-9 et LS-10 qui auraient été conçus en 1996 font voir des photographies d’une boîte de fondant constitué de borate de lithium arborant la Marque CLAISSE. Madame Simard explique à la page 129 de son contre-interrogatoire qu’en 1987, les fondants commercialisés par la Requérante étaient fabriqués par une autre entreprise pour le compte de la Requérante. Ce n’est qu’à compter de 1995 que la Requérante a fabriqué elle-même ses fondants. Madame Simard explique également dans son contre-interrogatoire qu’elle n’a plus en sa possession d’exemplaire des plus vieilles publicités pour ces fondants étant donné que ces exemplaires, de même que plusieurs autres, ont été produits dans le cadre d’un litige impliquant l’Opposant et la Requérante devant les tribunaux.

         En ce qui a trait à la catégorie de marchandises désignées comme « Accessoires de platine », les factures les plus anciennes produites par madame Simard datent du 28 octobre 1983 (facture 596-83, Annexe 1 à l’affidavit de madame Simard) et du 30 novembre 1987 (engagement no 4) (par comparaison, la date de premier emploi revendiquée dans la demande est mai 1980). La facture du 28 octobre 1983 ne mentionne pas qu’il s’agit de moules et creusets de marque « CLAISSE » alors que celle du 30 novembre 1987 mentionne « Creusets BIS de Claisse ». Le spécimen de publicité le plus ancien produit par madame Simard consiste en le spécimen LS-4 mentionné plus avant. Ce spécimen de publicité intitulé « The Wining Combination » fait référence à des moules et creusets fabriqués par « Engelhard » en ces termes : « It’s no wonder Corporation Scientific Claisse the manufacturer of the CLAISSE FLUXER suggests Engelhard Platinum 5% Gold Alloy Crucibles and Molds made to their specifications as YOUR BEST CHOICE to use with their instruments ». Madame Simard explique à la page 124 de son contre-interrogatoire que la Requérante avait conclu en 1980, une entente avec la société Englehard. Il n’est pas possible de distinguer la Marque CLAISSE sur les photographies des moules et creusets reproduites dans la publicité LS-4. J’ajouterai sur ce point qu’il n’est pas clair de cette publicité si les moules et creusets sont en fait vendus comme des moules et creusets « Englehard » étant donné le dessin technique du creuset reproduit sur cette publicité faisant voir ce qui semble être le logo corporatif de la société Englehard avec en dessous le titre « CRUCIBLES & MOLDS FOR « CLAISSE FLUXER » ». Je note par ailleurs que dans le portfolio de publicité (engagement no 6 produit par madame Simard), les photographies de moules et creusets font voir la Marque gravée sur les moules. Ce portfolio est non daté. Considérant le logo corporatif reproduit sur ces publicités, j’estime que ces publicités remontent à la fin des années 1990.

         En ce qui a trait à la catégorie de marchandises désignées comme « Produits chimiques », la facture la plus ancienne daterait aux dires de l’agent de la Requérante du 27 janvier 1988 (facture no 7170-88, Annexe 1 à l’affidavit de madame Simard) (par comparaison, la date de premier emploi revendiquée dans la demande est avril 1988). Je note par contre que cette facture porte sur des fondants (catégorie de marchandises no 2) plutôt que sur les produits chimiques de la catégorie de marchandises no 3. Pour ma part, j’ai retracé tant bien que mal dans la pile de documents produits comme Annexe 1 à l’affidavit de madame Simard, une facture du 31 mars 1993 pour entre autres, de l’iodure de potassium. Cette facture ne mentionne pas qu’il s’agit d’iodure de potassium de marque « CLAISSE ». Le spécimen de publicité le plus ancien produit par madame Simard consiste en le spécimen LS-9 discuté plus avant. Ce spécimen fait référence aux fondants de même qu’aux agents non-mouillants. Madame Simard explique aux pages 141 et 142 de son contre-interrogatoire que la Requérante a commencé à fabriquer elle-même ces produits chimiques qu’à compter de 1995-96. Ces produits étaient auparavant fabriqués par une autre entreprise pour le compte de la Requérante. Je note par ailleurs que dans le portfolio de publicité (engagement no 6) mentionné plus avant, les photographies de produits chimiques font voir la Marque apposée sur les bouteilles tout comme dans le cas des fondants.

         En ce qui a trait aux catégories de services désignés comme « Service de formation et d’assistance à la clientèle » et « Service de suivi », le spécimen de publicité le plus ancien produit par madame Simard consiste en le spécimen LS-3, soit une brochure non datée annonçant « CLAISSE CONSULTATION A New Service! » qui aurait été conçue en 1998 et décrivant notamment en quoi consistent les services de « general assistance » et de « follow-up » (par comparaison, les dates de premier emploi revendiquées dans la demande sont septembre 1998 et avril 1999 respectivement).

         En ce qui a trait aux catégories de services désignés comme « Service d’assistance au développement des procédures d’échantillons inorganiques par fusion » et « Service de soutien », les spécimens de publicité les plus anciens produits par madame Simard consistent en le spécimen LS-10 mentionné plus avant, soit une brochure non datée annonçant « Claisse…directly involved in the development of analytical techniques in industrial laboratories and research centers » qui aurait été conçue en 1995-96 et les spécimens de publicité faite dans les revues « Laboratory Technology International 1996 » et « LAB Guide 1999-2000 » (Annexe 1 à l’affidavit de madame Simard) (par comparaison, les dates de premier emploi revendiquées dans la demande pour chacune de ces catégories de services est janvier 1991).

 

[54].                     Considérant plus particulièrement la catégorie de marchandises désignées comme « Instruments de fusion », il convient de noter que la date de premier emploi de la Marque revendiquée par la Requérante est identique à la date d’incorporation de celle-ci. Il m’apparaît pour le moins surprenant que la Requérante ait procédé à une première vente de ces marchandises le jour même de son incorporation.

 

[55].                     Tel qu’indiqué plus avant, la Requérante soumet elle-même dans son plaidoyer écrit que si la Marque n’est pas enregistrable en vertu de l’article 12(1)(a) de la Loi, elle peut néanmoins être enregistrée en vertu de l’article 12(2) de la Loi « car elle a été employée au Canada par la Requérante ou son prédécesseur en titre de façon à être devenue distinctive à la date de production de la présente demande d’enregistrement. » Le recours à l’emploi par un « prédécesseur en titre » de la Requérante n’est pas en soi surprenant considérant l’historique des relations commerciales entre l’ancienne Fernand Claisse inc. et la Requérante. Je note toutefois que la présente demande d’enregistrement ne fait référence à aucun prédécesseur en titre de la Requérante.

 

[56].                     Qui plus est, la Requérante ayant été constituée à l’époque aux seules fins de commercialiser les appareils et instruments de l’ancienne Fernand Claisse inc. arborant la marque « Claisse Fluxer» tel que discuté plus avant, il s’ensuit que la Requérante ne pouvait alléguer avoir débuté l’emploi de la Marque CLAISSE tout court au moment de son incorporation.

 

[57].                     La Requérante fait valoir à cet égard que pareil emploi de la marque « CLAISSE FLUXER » peut également équivaloir à l’emploi de la Marque « CLAISSE » au motif que le mot « FLUXER » doit s’entendre au sens générique du terme ou encore que la marque « CLAISSE » consiste en une déviation mineure de la marque « CLAISSE FLUXER ». La Requérante n’a produit aucune preuve afin d’établir le caractère générique mot « FLUXER » (ou son équivalent français « FLUXEUR »). Il convient de mentionner que cet argument de la Requérante concernant le caractère générique du mot « FLUXER » a été soumis lors de l’audience seulement et fut contesté par les Opposants. Ce mot ne semble défini dans aucun dictionnaire général de langue française ou anglaise. J’ai cependant trouvé les définitions suivantes dans la version électronique du Grand dictionnaire terminologique de la langue française  de même que dans la banque de données Termium Plus:

Grand dictionnaire :

« Fluxeur : Élément d’une machine soudeuse dégageant la chaleur nécessaire à son fonctionnement. Note : non courant. Équivalents anglais : « burner ». Quasi-synomyme « fluxer » ».

Termium Plus :

« Fluxeur : Appareil destiné à déposer un flux de soudage. Domaine(s) Éléments d’assemblage (mécanique). Équivalent anglais : « burner », « fluxer ». Définition tirée de Dictionnaire de termes nouveaux des sciences et techniques, Paris : Conseil international de la langue française, (c1983) »

 

[58].                     Il m’est difficile de relier ces définitions aux appareils de la Requérante. Le fait que ceux-ci comprennent des « unités de chauffage » permettant de produire par fusion des disques de verre pour l’analyse par fluorescence de rayons X ainsi que des solutions pour l’analyse par spectrométrie d’absorption atomique ou par spectrométrie d’émission plasma ne m’apparaît pas suffisant en soi pour conclure que le mot « FLUXER » dans le contexte des appareils de la Requérante est générique.

 

[59].                     Revenant sur les spécimens de publicité conçus au cours des années 1980 et les modèles d’appareils de fusion commercialisés au tout début des activités de la Requérante, je ne peux conclure comme le soumet la Requérante que l’emploi de la marque « CLAISSE FLUXER » équivaut à l’emploi de la Marque « CLAISSE ». Tel qu’indiqué plus avant, monsieur Claisse est celui qui a conçu le premier appareil mécanique de fusion. Cet appareil a été commercialisé en liaison avec la marque « CLAISSE FLUXER ». L’emphase était mise à cette époque également sur les mots « CLAISSE » et « FLUXER » employés ensemble à titre de marque de commerce distinctive. L’emploi de la Marque « CLAISSE » tout court m’apparaît avoir débuté au cours des années 1990 suivant l’évolution des activités de la Requérante, pouvant expliquer par le fait même l’abandon, en 1996, de l’enregistrement pour la marque « CLAISSE FLUXER ». L’évolution en parallèle du logo corporatif de la Requérante au fil des ans de manière à mettre l’emphase sur le mot « CLAISSE » va dans le même sens.

 

[60].                     En résumé, la preuve au dossier ne me permet pas de conclure que la Requérante a de fait employé la Marque depuis aussi tôt que la date de premier emploi alléguée, à savoir le 21 octobre 1976. Cette preuve m’apparaît au contraire incompatible avec cette date. Par conséquent, je suis d’avis que les Opposants ont satisfait le fardeau de preuve initial leur incombant au soutien de leur motif d’opposition fondé sur l’article 30(b) de la Loi en ce qui a trait à la première catégorie de marchandises visées par la présente demande alors que la Requérante a pour sa part fait défaut de satisfaire le fardeau de preuve ultime lui incombant. Le motif d’opposition fondé sur l’article 30(b) est accueilli en ce qui a trait à ces marchandises.

 

[61].                     En ce qui a trait aux autres catégories de marchandises de même qu’à l’ensemble des services visés par la présente demande d’enregistrement, la preuve de la Requérante démontre clairement l’emploi de la Marque depuis à tout le moins la fin des années 1990. Ceci est d’ailleurs non contredit par monsieur Claisse au paragraphe 46 de son premier affidavit lorsqu’il affirme « […] je sais que les noms et appellations commerciaux [que la Requérante] pouvaient [sic] utiliser ne comportaient jamais, de 1976 à 1997, le mot « Claisse » employé seul sur les marchandises ou à l’égard des services et donc que les dates de premier emploi apparaissant à la demande d’enregistrement de la Requérante sont erronées ». Il convient de rappeler à cet égard que monsieur Claisse a été président de la Requérante de 1976 à 2000 et est demeuré à l’emploi de la Requérante jusqu’en 2002. J’ajouterai sur ce point que cette affirmation de monsieur Claisse est en soi compatible avec les allégations contenues dans la déclaration d’opposition des Opposants à l’effet que la Requérante n’a employée la Marque « CLAISSE » qu’avec la permission et le consentement de monsieur Claisse qui, de par sa position de dirigeant de la Requérante contrôlait les caractéristiques et la qualité des Marchandises et Services en liaison avec lesquels la Marque était employée.

 

[62].                     À la lumière de ce qui précède, je suis d’avis que les Opposants ne se sont pas acquittés de leur fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’ensemble des services visés par la présente demande (lesquels revendiquent comme dates de premier emploi septembre 1998, janvier 1991 et avril 1999 respectivement). La preuve de la Requérante à l’égard des Services n’est pas incompatible avec les dates de premier emploi revendiquées dans la présente demande d’enregistrement. Elle appuie au contraire celles-ci.

 

[63].                     Par contre, pour ce qui est de l’emploi de la Marque précédant la fin des années 1990 en liaison avec les accessoires de platine de même qu’avec les fondants et les produits chimiques, la preuve de la Requérante fait problème.

 

[64].                     Bien que je comprenne qu’il puisse être difficile pour la Requérante de retracer dans ses archives des spécimens d’emploi de la Marque remontant aux dates de premier emploi revendiquées dans la demande, soit mai 1980 pour les accessoires de platine et avril 1988 pour les fondants et les produits chimiques, il n’en demeure pas moins que la preuve fournie dans le présent dossier pour la période comprise entre la fin des années 1990 et ces dates de premier emploi est à toutes fins pratiques inexistante.

 

[65].                     En effet, les factures fournies pour cette période ne mentionnent pas spécifiquement qu’il s’agit de moules et creusets ou de fondants et produits chimiques de marque « CLAISSE ». Le seul spécimen fourni pour cette période faisant référence à la Marque consiste en la publicité datée du 15 novembre 1989 produite comme engagement no 1 discutée plus avant annonçant les « CLAISSE FLUXES  (Borates and Phosphates)». Par contre, cette publicité ne comprend aucune reproduction faisant voir la Marque telle qu’apposée sur les fondants comme cela est le cas des spécimens de publicité LS-9 et LS-10 datant de 1996. Cette publicité n’est pas suffisante en soi pour démontrer l’emploi de la Marque avec des fondants au sens de l’article 4 de la Loi. J’ajouterai que le fait que la Requérante ait eu recours pendant cette période à des fournisseurs externes (tels Englehard mentionné plus avant) ajoute à l’incertitude entourant l’emploi fait de la Marque pendant cette période bien que je reconnaisse que le recours à des fournisseurs externes n’exclut pas nécessairement en soi qu’il y ait eu emploi effectif de la Marque.

 

[66].                     Revenant sur la difficulté pour la Requérante de retracer des spécimens d’emploi de la Marque antérieurs aux années 1990, je note que madame Simard mentionne à la page 30 de son contre-interrogatoire qu’il lui aurait fallu « faire plusieurs caisses » de documents d’archives. Également, tel qu’indiqué précédemment, la Requérante n’aurait plus en sa possession plusieurs de ces spécimens du fait qu’ils auraient été produits dans le cadre d’un litige impliquant la Requérante et l’Opposant devant les tribunaux. Je suis d’avis que la Requérante aurait pu conserver ou obtenir des copies de tout ou partie du matériel produit dans le cadre de ce procès ou encore poursuivre sa revue des boîtes d’archives afin d’étayer sa preuve dans le présent dossier et satisfaire le fardeau de preuve ultime lui incombant en regard du présent motif d’opposition à la lumière de la preuve versée par les Opposants.

 

[67].                     J’estime en effet que les Opposants ont satisfait le fardeau de preuve initial leur incombant en ce qui a trait aux deuxième, troisième et quatrième catégories de marchandises visées par la présente demande et que la preuve de la Requérante est en soi incompatible avec les dates de premier emploi revendiquées dans la présente demande d’enregistrement. Il est curieux de constater que les seuls spécimens d’emploi de la Marque acceptables en regard de ces trois catégories de marchandises datent tous des années 1990 et 2000, soit l’époque à laquelle la Requérante a mis davantage l’emphase sur le mot « CLAISSE » pour ce qui est de son image corporative, la Requérante en étant d’ailleurs finalement venue à employer comme nom commercial le mot « CLAISSE » tout court à compter de 2004 tel qu’en fait foi le relevé du registre des entreprises du Québec discuté plus avant. La Requérante ayant fait défaut de satisfaire le fardeau de preuve ultime lui incombant, je suis d’avis d’accueillir le motif d’opposition fondé sur l’article 30(b) de la Loi en ce qui a trait aux deuxième, troisième et quatrième catégories de marchandises visées par la présente demande.

 

[68].                     Pour conclure, le motif d’opposition fondé sur l’article 30(b) est accueilli en ce qui a trait à l’ensemble des Marchandises. Il est par contre rejeté en ce qui a trait à l’ensemble des Services.

 

Motif fondé sur l’article 30(a) de la Loi

 

[69].                     Les Opposants soumettent que la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30(a) de la Loi en ce que c’est faussement que la Requérante déclare avoir employé la Marque au Canada en liaison avec chacune des Marchandises et chacun des Services et alternativement ou cumulativement, la Requérante a abandonné la Marque en tout ou en partie par emploi discontinu.

 

[70].                     Tel que plaidées, ces allégations ne constituent pas un motif d’opposition valable au sens de l’article 30(a) de la Loi, lequel a trait à la justesse de l’état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises ou services spécifiques décrits dans une demande d’enregistrement. La non-conformité de la demande d’enregistrement en ce qui a trait à la justesse des dates de premier emploi ou à la marque employée dans le présent dossier relève du motif d’opposition fondé sur l’article 30(b) discuté plus avant.

 

[71].                     Conséquemment, je suis d’avis que le motif d’opposition fondé sur l’article 30(a) de la Loi doit être rejeté.

 

Motif fondé sur l’article 30(i) de la Loi

 

[72].                     Les Opposants soumettent que la demande ne satisfait pas aux exigences de l’article 30(i) de la Loi en ce que c’est faussement que la Requérante s’est dite convaincue d’avoir le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises et Services puisqu’à la date de production de la demande, la Requérante devait savoir que la Marque est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 années précédentes, que la Marque n’a pas été employée en liaison avec chacune des Marchandises et chacun des Services aux dates de premier emploi revendiquées et que la Marque a été abandonnée par emploi discontinu.

 

[73].                     Tel que plaidé, le motif d’opposition fondé sur l’article 30(i) est non recevable. Il consiste en un amalgame des motifs d’opposition fondés sur les articles 12(1)(a) et 30(b) de la Loi discutés plus avant.

 

[74].                     J’ajouterai au surplus qu’il n’y a aucune preuve au dossier pour conclure que la Requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque à la date de production de la présente demande.

 

[75].                     Conséquemment, je suis d’avis que le motif d’opposition fondé sur l’article 30(i) doit être rejeté.

 

iii)        Motifs fondés sur l’article 16 de la Loi

 

[76].                     Les Opposants soumettent que :

 

1.      « […] la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque puisque la Marque est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 années précédentes, soit le nom de famille de Fernand Claisse. De plus, les Opposants fondent leur opposition sur le motif énoncé à l’article 38(2)(c) de la Loi en ce que la Requérante n’est pas la véritable propriétaire de la Marque « Claisse » qu’elle a employée qu’avec la permission et que du consentement de l’Opposant Fernand Claisse qui, de par sa position de dirigeant de la Requérante, contrôlait les caractéristiques et la qualité des marchandises et services en liaison avec lesquels la Marque était employée, ainsi que l’emploi, la publicité et l’exposition de la Marque, le tout sans admission de quelque nature que ce soit. »;

2.      « […] la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au sens de l’article 16(1)(c) de la Loi puisqu’à la date où la Requérante prétend avoir employé la Marque à l’égard de chacune des marchandises et chacun des services en premier lieu, elle créait de la confusion avec une marque de commerce « Claisse », propriété et employée par l’un ou l’autre des Opposants, le tout sans admission de quelque nature que ce soit »; et

3.      « […] la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque au sens de l’article 16(1) de la Loi car la demande sous opposition n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi; la Marque n’a pas été employée au Canada en liaison avec chacun des services et marchandises spécifiques décrits à la demande no 1,204,632, la Marque n’a pas été employée au Canada en premier lieu en liaison avec lesdits services et marchandises aux dates de premier emploi mentionnés à ladite demande, la Marque a été abandonnée en tout ou en partie par emploi discontinu et la Marque est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier [sic] dans les 30 années précédentes ».

 

[77].                     Tel que plaidés, les premier et troisième motifs ne constituent pas des motifs d’opposition valables au sens de l’article 16 de la Loi, lequel vise à déterminer les personnes admises à l’enregistrement de marques de commerce en regard de la confusion crée par celles-ci avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada ou à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement a été antérieurement produite ou encore avec un nom commercial antérieurement employé au Canada par une autre personne.

 

[78].                     Le seul motif d’opposition valable au sens de l’article 16 plaidé par les Opposants consiste en la portion du deuxième motif alléguant que la Marque crée de la confusion avec une marque de commerce « Claisse », propriété et employée par l’un ou l’autre des Opposants.

 

[79].                     Les Opposants peuvent s’acquitter de leur fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’article 16(1)(a) de la Loi en démontrant que leur marque de commerce « Claisse » a été employée ou révélée au Canada antérieurement aux dates de premier emploi revendiquées dans la demande et qu’ils n’en avaient pas abandonné l’emploi à la date de l’annonce de la demande [article 16(5)].

 

[80].                     Tel qu’indiqué plus haut, l’Opposante Fernand Claisse inc. a été constituée en mars 2004, soit postérieurement aux dates pertinentes invalidant du même coup ce motif d’opposition en ce qui la concerne.

 

[81].                     En ce qui concerne l’Opposant Fernand Claisse, aucune preuve d’emploi d’une soi-disant marque de commerce « CLAISSE » propriété de l’Opposant employée antérieurement aux dates pertinentes et n’ayant pas été abandonnée à la date de l’annonce de la présente demande n’a été versée au dossier. Conséquemment, l’Opposant n’a pas satisfait le fardeau de preuve initial lui incombant. Conséquemment, ce motif d’opposition est également rejeté en ce qui le concerne.

 

iv)  Motifs fondés sur l’absence de caractère distinctif de la Marque

 

[82].                     Les Opposants soumettent que :

 

1.      « […] la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, car elle ne distingue pas les marchandises et services en association avec lesquels elle est présumément [sic] employée de la Requérante des marchandises et services d’autres personnes. De plus, la Marque crée de la confusion avec un ou des noms commerciaux ou marques de commerce, propriété et utilisés par l’un ou l’autre des Opposants aux époques pertinentes, le tout sans admission de quelque nature que ce soit. »; et

2.      « […]la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi parce qu’elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les 30 années précédentes. »

 

[83].                     Tel qu’indiqué plus haut, la date pertinente pour ce motif d’opposition, lequel repose en partie sur la question de confusion entre la Marque et les marques de commerce ou noms commerciaux des Opposants, est généralement acceptée comme étant la date de production de la déclaration d’opposition.

 

[84].                     Les Opposants peuvent s’acquitter de leur fardeau de preuve initial en ce qui a trait à l’absence de caractère distinctif de la Marque en démontrant que leurs marques de commerce ou noms commerciaux étaient devenus suffisamment connus au Canada à la date de la déclaration d’opposition de manière à nier le caractère distinctif de la Marque [voir Motel 6, Inc. c. No.6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F.)].

 

[85].                     L’Opposant Fernand Claisse, en sa qualité personnelle, n’a fourni aucune preuve d’emploi d’une soi-disant « marque de commerce » ou « nom commercial » « CLAISSE ». En ce qui concerne l’Opposante, monsieur Claisse affirme aux paragraphes 3 à 7 de son premier affidavit, qu’elle se spécialise dans l’accroissement du potentiel de la technologie de la fusion aux borates, dans le développement de nouveaux produits afférents à la fusion aux borates et dans le développement de nouvelles versions de différents produits qu’il a créés dans le passé.

 

[86].                     Pour réaliser ces objectifs, monsieur Claisse affirme que l’Opposante i) distribue un livre rédigé par lui-même et un autre auteur intitulé « Physics and Chemistry of Borate Fusion », ii) a développé et distribue un CD-Rom contenant plus de 110 000 coefficients d’absorption; iii) a développé et distribue un nouveau logiciel de Fluo-X intitulé « XRFDirect », et iv) offre un service de consultation en ligne pour les utilisateurs de perles de fusion. Monsieur Claisse affirme également que l’Opposante développe actuellement pour fins de commercialisation en 2006 un appareil de fusion et de nouveaux fondants. Monsieur Claisse affirme que dans la poursuite de ses activités, l’Opposante utilise et utilisera dans l’avenir, sa dénomination sociale.

 

[87].                     Il convient de noter dès maintenant que cette preuve de l’Opposante n’établit aucunement l’emploi d’une soi-disant marque « Claisse » par celle-ci. Cette preuve allègue tout au plus l’emploi de la dénomination sociale de l’Opposante. Or, je ne possède sur ce point aucune information me permettant d’apprécier la mesure dans laquelle cette dénomination sociale a été employée au Canada et l’achalandage rattaché à celle-ci.

 

[88].                     Sur la question de la confusion, monsieur Claisse affirme au paragraphe 48 de son premier affidavit qu’à quelques reprises, des clients, possiblement trompés par l’emploi de son nom, se sont adressés à lui au cours de conférences-expositions, rencontres, ou dans des courriels, croyant parler à un responsable de la Requérante et ont été surpris d’apprendre qu’il n’était plus dans cette compagnie depuis quatre années. Les seules communications produites par monsieur Claisse consistent en celles qu’il a reçues de quatre scientifiques, dont un canadien, afin de démontrer que le nom « CLAISSE » est directement lié à sa personne.

 

[89].                     Plus particulièrement, dans l’une de ces communications, il est fait mention de la surprise de l’auteur de cette communication d’apprendre que l’Opposant a été congédié de la Requérante et lui souhaitant bonne chance dans son procès contre la Requérante. Cette communication semble s’inscrire dans un échange de courriels, cependant non inclus dans la copie produite.

 

[90].                     Une autre communication consiste en un courriel daté du 12 octobre 2004 adressé à l’Opposant à ce qui semble être une adresse de courriel personnelle (fclaisse@videotron.ca), l’invitant à participer à titre de conférencier à une conférence devant avoir lieu en Chine en octobre 2005. Le courriel mentionne « We have known that your company has 50 years of fusion experience ».

 

[91].                     Les deux autres communications sont adressées à « To Whom It May Concern » et visent à vanter la contribution de monsieur Claisse à la recherche scientifique de même qu’au succès de la Requérante.

 

[92].                     La preuve des Opposants m’apparaît insuffisante pour établir que le nom commercial de l’Opposante était devenu suffisamment connu au Canada à la date de la déclaration d’opposition de manière à nier le caractère distinctif de la Marque. En cela, je suis d’avis que les Opposants n’ont pas satisfait le fardeau de preuve initial leur incombant.

 

[93].                     Pour ce qui est du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif de la Marque du fait qu’il s’agit-là principalement d’un nom de famille, les commentaires formulés plus avant en regard du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)(a) de la Loi s’appliquent. J’ajouterai sur ce point que la renommée internationale dont semble jouir l’Opposant dans le domaine de l’analyse chimique par rayons-x est insuffisante en soi pour nier le caractère distinctif de la Marque au Canada étant donné notamment qu’il m’apparaît difficile tel qu’indiqué plus avant d’attribuer cette renommée à l’Opposant seul et non pas aussi en partie à la Requérante.

 

[94].                     En résumé, les motifs d’oppositions fondés sur l’absence de caractère distinctif de la Marque doivent être rejetés.

 

Conclusion

 

[95].                     Compte tenu de ce qui précède et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je repousse la demande d’enregistrement en ce qui a trait à l’ensemble des Marchandises et je rejette l’opposition en ce qui a trait à l’ensemble des Services en vertu de l’article 38(8) de la Loi [voir Produits Ménagers Coronet Inc. c. Coronet-Werke Heinrich Schlerf Gmbh (1986), 10 C.P.R. (3d) 482 (C.F. 1re inst.) en tant qu’autorité en matière de décision partagée].

 

 

DATÉ À MONTRÉAL, QUÉBEC, LE 28 OCTOBRE 2009.

 

 

Annie Robitaille

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.