Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2015 COMC 113

Date de la décision : 2015-06-22

TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par 1721502 Canada Inc. à l'encontre de la demande d'enregistrement no 1,408,404 pour la marque de commerce KING’S MOON CAKES au nom de Hing Yip Hong Ltd.

Dossier

[1]        Le 25 août 2008, Hing Yip Hong Ltd. a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce

KING’S MOON CAKES

basée sur l’emploi de la marque au Canada depuis au moins aussi tôt que le mois d'août 2003 en liaison avec

[Traduction]
Produits de boulangerie, nommément gâteaux et pâtisseries.

 [2]       La demande en cause a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 26 septembre 2012, et 1721502 Ontario Inc. s’y est opposée le 26 novembre 2012. Le 17 janvier 2013, le registraire a transmis à la requérante une copie de la déclaration d'opposition, conformément aux dispositions de l'art. 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre-déclaration dans laquelle elle nie de façon générale les allégations contenues dans la déclaration d'opposition.

[3]        La preuve de l’opposante est constituée de l’affidavit d’Eric Cheung, ainsi que d’une copie certifiée de l’enregistrement de la marque de commerce KING’S PASTRY de l’opposante en liaison avec de la pâte à tarte. La preuve de la requérante est constituée de l’affidavit de Raymond Chan. Les parties ont toutes deux produit un plaidoyer écrit et étaient également toutes deux représentées à l’audience qui a été tenue le 24 février 2015.

Déclaration d'opposition

[4]        L’opposante plaide qu’elle est la propriétaire de la marque déposée KING’S PASTRY, employée au Canada en liaison avec les produits [Traduction] « pâte à tarte » avant la date de premier emploi revendiquée par la requérante pour la marque visée par la demande. Sur la base de l’enregistrement et de l’emploi antérieur, et citant la confusion avec sa marque, l’opposante allègue que la marque KING’S MOON CAKES visée par la demande n’est pas enregistrable, en vertu de l’art. 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce; et que la marque KING’S MOON CAKES visée par la demande n’est pas distinctive des produits de la requérante, en vertu de l’art. 2. D’autres motifs d’opposition sont également invoqués, incluant un motif fondé sur l’art. 30b), plaidé au para 1a) de la déclaration d’opposition :

[Traduction]
L’Opposante base son opposition sur le motif fondé sur l’article 38(2)a) de la Loi sur les marques de commerce du Canada. . . en ce sens où la demande no 1,408,404 n’est pas conforme aux exigences de l’article 30b) de la Loi sur les marques de commerce puisque la Requérante, Hing Yip Hong Ltd., n’a pas employé la marque de commerce KING’S MOON CAKES au Canada. . . depuis la date de premier emploi revendiquée, nommément août 2003. Également, parce que la Requérante n’a pas employé la marque en liaison avec les produits en vertu de l’article 4 de la Loi.

[5]        Je résumerai ensuite la preuve des parties avant de traiter des allégations contenues dans la déclaration d’opposition.

Preuve de l’Opposante

M. Cheung

[6]        M. Cheung se présente comme le directeur du marketing de l’entreprise de l'opposante. L’opposante est un important fabricant de produits de pâtisserie et de desserts de style franco-oriental en gros. Ses produits sont vendus à des chaînes de magasins de détail incluant Walmart, Costco et Sobeys de même qu’à des magasins de détail spécialisés dans les produits chinois ou asiatiques. Les produits arborant la marque KING’S PASTRY et « KING’S PASTRY et Dessin » de l’opposante sont vendus au Canada depuis février 1997. La valeur de telles ventes est en moyenne de 30,4 M$ par année pour les années 2005 à 2012 inclusivement. Les frais de publicité et de promotion des produits arborant les marques de l’opposante pour la même période varient entre un maximum de 64 000 $ en 2010 et un minimum de 13 000 $ en 2008; la moyenne annuelle était de 35 700 $.

[7]        M. Cheung n’indique pas explicitement à quelle marque il fait référence quand il parle de la marque « KING’S PASTRY et Dessin », cependant, selon un examen de la preuve produite, il semble faire référence à la marque verbale KING’S PASTRY écrite dans une écriture de fantaisie plutôt qu’en caractères d’imprimerie. Aux fins de la présente procédure, les deux marques, même si elles sont visuellement différentes, sont équivalentes : voir, par exemple, Canadian Jewish Review Ltd. c. le Registraire des marques de commerce (1961) 37 CPR 89 (C. de l'Éch.).

[8]        Les pièces A à D de l’affidavit de M. Cheung montrent comment les marques de l’opposante sont employées sur des factures, des brochures, des catalogues, des cartes professionnelles, du papier à en-tête et sur son site Web.

[9]        Il me semble, d’après une interprétation raisonnable de l’affidavit de M. Cheung et un examen de la preuve, que le consommateur moyen ne croise pas la marque KING’S PASTRY de l’opposante. À cet égard, l’opposante est un grossiste et il semble que les produits de l’opposante soient fournis à des détaillants en gros sans emballage individuel ou dans des emballages individuels, mais sous la marque maison de détaillant, ou présentée aux clients sans emballage, comme, par exemple, dans des buffets de restaurant. La preuve de l’opposante établit que sa marque KING’S PASTRY a acquis une réputation importante auprès des acheteurs en gros, mais pas auprès du grand public.

[10]      Au paragraphe 15 de son affidavit, M. Cheung s’interroge à savoir si la requérante a, dans les faits, vendu ses produits sous la marque KING’S MOON CAKES visée par la demande depuis 2003, comme revendiqué dans la demande en cause.

[Traduction]
15.
     J’ai enquêté sur Hing Yip Hong Ltd. en examinant les renseignements disponibles en ligne au sujet de l’entreprise. Je ne connais pas bien cette entreprise et je ne crois pas qu’elle vendait de façon active les produits de marque KING’SMOON[sic] CAKES depuis août 2003. Je crois que cette entreprise n’est en exploitation au Canada que depuis les 4 à 6 dernières années et, par conséquent, qu'elle n’a pas, comme elle le revendique, employé la marque au Canada depuis août 2003. De plus, les renseignements disponibles sur le site Web de la Requérante indiquent qu’elle est un distributeur. Il ne semble pas que Hing Yip Hong Ltd. fabrique et, par conséquent, contrôle les caractéristiques et la qualité des produits vendus sous la marque de commerce KING’SMOON[sic] CAKES. De plus, la présentation des produits de la Requérante suggère que la marque KING’SMOON[sic] CAKES ne figure pas sur, ou n’est pas autrement associée avec, les gâteaux et produits de pâtisserie de la Requérante au moment de l’achat. Je joins à cela mon affidavit, en pièce E, les renseignements tirés de divers sites indépendants de même que du propre site de la Requérante sur lesquels je fonde mes déclarations.

[11]      La pièce E, susmentionnée, inclut des copies de pages de deux sites Web qui semblent fournir des renseignements au sujet de compagnies canadiennes constituées en personnes morales. Une source indique que la requérante a été incorporée en juin 2007, l’autre source indique que la requérante fait des affaires depuis 2009. Les deux dates sont largement postérieures à la date de premier emploi revendiquée par la requérante, nommément août 2003.

Preuve de la requérante

Raymond Chan

[12]      M. Chan se présente comme le directeur des ventes internationales de l’entreprise de la requérante. La requérante [Traduction] « exerce des activités de distribution de certains produits de boulangerie propres au Canada ». Ces produits sont composés d’un seul produit, nommément des gâteaux de lune. Il s’agit d’une pâtisserie importante dans la culture chinoise, qui est composée d’une garniture faite d’un ingrédient rare, nommément de la pâte de graines de lotus, et de jaunes d'œuf. Les gâteaux de lune ne sont vendus que pendant une période de deux semaines à l’occasion de la fête chinoise de la mi-automne. M. Chan décrit ensuite comment le produit est vendu dans des boîtes en fer ornementées, avec la marque KINGS’S MOON CAKES visée par la demande apparaissant sur un des côtés de la boîte. Les clients de la requérante sont [Traduction] « exclusivement des détaillants en alimentation et des supermarchés de la communauté chinoise, dans des grands centres urbains, nommément le grand Toronto et Vancouver ». Aucune valeur quantitative n’a été fournie quant à l’étendue des ventes ou de la publicité faite sous la marque visée par la demande.

 

[13]      M. Chan a produit une preuve au para 7 de son affidavit, reproduit ci-dessous, probablement en réponse au para 15 de l'affidavit de M. Cheung (susmentionné au para 10) :

[Traduction]
7.
       La Requérante a employé la Marque de commerce [KING’S MOON CAKES] pendant une période importante en liaison avec les Produits. Après examen, la bonne date de premier emploi tourne autour de la date d’incorporation de la Requérante, c'est-à-dire le 1er juin 2007. Nous vendons de façon active les Produits en liaison avec la Marque de commerce depuis cette date. Jointe ici à mon affidavit en pièce A est une copie certifiée conforme de l’historique de l’entreprise de la Requérante tirée d’Industrie Canada.

La pièce A, susmentionnée, confirme que la requérante a été incorporée le 1er juin 2007.

Décision

[14]      L’admission faite par M. Chan au para 7 de son affidavit, susmentionné, est concluante du motif d’opposition fondé sur l’art. 30b). À cet égard, il existe une longue liste d’affaires indiquant qu’une demande qui revendique une date de premier emploi antérieure à la véritable date de premier emploi ne se conforme pas à l’art. 30b) : voir, par exemple, Vibe Ventures LLC c. 3681441 Canada Inc., 2009 CanLII 82160 (CA COMC) à 21 et 22 :

[Traduction]
[21] Il n’y a aucun doute que la non-conformité des dispositions de l’art. 30b) de la Loi constitue un motif d’opposition valable (voir Structureco Inc. c. Jean (1997), 79 CPR (3d) 331 et Lise Watier Cosmétiques Inc. c. Villoresi (2009), 76 CPR (4th) 196 (CAF)] En produisant une demande fondée sur une date de premier emploi antérieure à la véritable date de premier emploi, un requérant empêche la production d’une déclaration d’opposition par des opposantes qui peuvent avoir des droits ayant pris naissance entre la date de premier emploi revendiquée par la requérante et la véritable date de premier emploi.

 

[22] Tous les autres motifs d’opposition sont fondés sur la prétendue confusion entre la Marque [la marque visée par la demande] et la marque de commerce VIBE de l’Opposante. Je n’ai pas l’intention de me prononcer sur ces motifs d’opposition simplement parce l’article 32 du Règlement sur les marques de commerce prévoit que la modification d’une demande d’enregistrement d’une marque de commerce n’est pas permise après l’annonce de la demande si elle vise à changer la date de premier emploi qui y est revendiquée. Par conséquent, la Requérante n’est pas en mesure, à cette étape-ci ou même à l’étape de l’appel dont la présente décision pourrait éventuellement faire l’objet, de corriger un tel défaut. La demande étant invalide, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur les autres motifs d'opposition.

(non souligné dans l'original)

[15]      Dans le même ordre d’idées, en l’espèce, la demande en cause est repoussée parce qu’elle ne satisfait pas aux exigences de l’article 30b) de la Loi sur les marques de commerce. Il n’est donc pas nécessaire de se pencher sur les autres motifs d’opposition qui sont fondés sur la question de confusion entre la marque visée par la demande et la marque de l’opposante.

[16]      J’ajouterais, cependant, que selon la preuve au dossier, j’aurais été enclin à pencher en faveur de l’opposante sur les motifs invoquant la confusion et alléguant l’absence de caractère distinctif compte tenu de la ressemblance entre les marques des parties, le caractère distinctif acquis de la marque de l’opposante et le potentiel de recoupement des voies de commercialisation des parties.

[17]      Compte tenu de ce qui précède, la demande d’enregistrement en cause est repoussée. La présente décision est rendue dans l'exercice des pouvoirs qui m'ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu des dispositions de l'article 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

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Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Nathalie Tremblay, trad.

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