Contenu de la décision
TRADUCTION/TRANSLATION
RELATIVEMENT A L’OPPOSITION de H SEC, une société anonyme, à la demande d'enregistrement no 834 623 concernant la marque de commerce LE BÂTON DE BERGER produite par NOSTRANO INC.
Le 24 janvier 1997, la requérante, NOSTRANO INC., a produit une demande d'enregistrement de la marque de commerce LE BÂTON DE BERGER fondée sur l'emploi projeté de la marque de commerce au Canada par la requérante elle-même ou par l’entremise d’un licencié, ou elle-même et par l’entremise d’un licencié, en liaison avec «Saucissons secs».
La demande de la requérante a été publiée pour fins d'opposition dans le Journal des marques de commerce du 2 juillet 1997 et l’opposante, H SEC, une société anonyme, a produit une déclaration d'opposition le 24 novembre 1997, dont copie a été envoyée à la requérante le 2 février 1998. Cette dernière a produit et signifié une contre‑déclaration le 27 mars 1998 en réponse à la déclaration d’opposition. L’opposante a soumis en preuve l’affidavit de Maude-Isabelle Delagrave et la requérante a choisi de ne pas produire de preuve. Seule la requérante a produit un plaidoyer écrit et les deux parties étaient toutes deux représentées à l’audience.
L’opposante a invoqué les motifs d’opposition suivants dans sa déclaration d’opposition :
1. La demande de la requérante ne satisfait pas aux exigences de l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce en ce que :
a) la requérante a déjà employé la marque en opposition au Canada, en tout ou en partie;
b) alternativement ou cumulativement, la requérante n’a jamais eu l’intention d’employer la marque en demande au Canada ou a abandonné celle-ci, en tout ou en partie;
c) c’est faussement que la requérante s’est dite convaincue à l’emploi au Canada de la marque de commerce et ce, eu égard à ce qu’aux présentes mentionné;
2. La requérante n'est pas la personne ayant droit à l'enregistrement de la marque de commerce :
a) car, à la date de production de la demande sous opposition de même qu’à toute époque pertinente, la marque de commerce de la requérante créait de la confusion avec la marque de commerce LE BÂTON DE BERGER antérieurement employée ou révélée au Canada par l’opposante ou ses prédécesseurs en titre ou licenciés en liaison avec du saucisson et ce, contrairement aux dispositions du sous-paragraphe 16(3)a) de la Loi sur les marques de commerce;
b) car la demande d’enregistrement sous opposition:
i) n’est pas conforme aux dispositions de l’article 30 de la Loi;
ii) la marque sous opposition en faisant l’objet n’en est pas une projetée mais en est une employée ou abandonnée, le cas échéant
le tout contrairement aux dispositions du paragraphe 16(3) introductif de la Loi;
3. La marque de commerce de la requérante n’est pas distinctive des marchandises et services de l’opposante ni ne peut l’être ainsi que n’est-elle pas apte à les distinguer, notamment de ceux de l’opposante :
a) eu égard principalement à ce qu’aux présentes mentionné quant aux adoption, emploi, révélation et enregistrement des marques notoires dont l’opposante est titulaire;
b) par suite de son transfert, il subsistait des droits chez deux ou plusieurs personnes à l’emploi de la marque de commerce, et ces droits ont été exercés par lesdites personnes concurremment et ce, contrairement aux dispositions du paragraphe 48(2) de la Loi sur les marques de commerce;
c) la requérante a permis à des tiers d’employer la marque de commerce au Canada, et de fait, ces tiers l’ont employée, hors les cadres des dispositions législatives régissant l’emploi sous licence d’une marque et ce, contrairement aux dispositions de l’article 50 de la Loi.
L’opposante n’a produit aucune preuve en ce qui concerne l’emploi de sa marque de commerce LE BÂTON DE BERGER au Canada et n’a produit aucune preuve concernant son allégation que la marque de la requérante n’est pas distinctive. Par conséquent, l’opposante ne s’est pas acquittée du fardeau initial qui lui incombait par rapport aux deuxième et troisième motifs. Donc, je rejette ces motits d’opposition. En ce qui concerne le premier motif fondé sur l’article 30 de la Loi, l’opposante a produit l’affidavit de Maude-Isabelle Delagrave.
Dans son affidavit, Maude-Isabelle Delagrave, étudiante, dit :
1. Le 26 octobre 1998, Je suis allée au Super Marché Maxi du 7455, rue Sherbrooke Est à Montréal.
2. J’ai acheté cinq (5) saucissons secs LE BÂTON DE BERGER, à savoir:
- au poivre noir;
-aux noisettes;
-au raisin sec et au rhum;
-au vin rouge et
à l’ail
3. Je produis en liasse comme élément MD-1 au soutien de mon affidavit ces cinq (5) saucissons de même que le coupon de caisse se rapportant à mon achat.
4. CHARCUTERIE NOUVELLE FRANCE est une marque de commerce détenue par NOSTRANO INC. et ce, tel qu’il appert à l’enregistrement TMA 421.033 obtenu à même la banque de données de l’Office de la Propriété Intellectuelle du Canada, telle qu’opérée par Strategis. Je produis ce relevé comme élément MD-2 au soutien de mon affidavit.
Bien que le fardeau légal repose sur la requérante de démontrer que sa demande est conforme à l'article 30 de la Loi sur les marques de commerce, il y a un fardeau de preuve initial qui repose sur l’opposante en ce qui concerne les motifs fondés sur l'article 30 [voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al c. Seagram Real Estate Ltd., 3 C.P.R. (3d) 325, pp. 329-330]. Pour s’acquitter du fardeau de preuve qui lui incombe au sujet d’une question particulière, l’opposante doit soumettre suffisamment d’éléments de preuves admissibles qui pourraient raisonnablement permettre de conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question [voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, p. 298]. En outre, la date pertinente pour apprécier les circonstances concernant la question de la non-conformité à l’article 30 de la Loi est la date de production de la présente demande [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd., 3 C.P.R. (3d) 469, p. 475].
L’opposante a allegué que la requérante n’avait jamais eu l’intention d’employer sa marque au Canada ou qu’elle avait abandonné sa marque et que la requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la marque de commerce LE BÂTON DE BERGER au Canada. Toutefois, l’affidavit de Maude-Isabelle Delagrave n’est pas pertinent en ce qui concerne ces motifs. Donc, je rejette ces motifs d’opposition fondés sur l’article 30 de la Loi. L’opposante a aussi prétendu que la requérante avait déjà employé sa marque de commerce au Canada avant la date de production de la présente demande. À cet égard, l’opposante à l’audience a soumis que les spécimens produits par l’opposante comme élément MD-1 au soutien de l’affidavit Delagrave démontrent que la requérante avait employé sa marque de commerce LE BÂTON DE BERGER au Canada depuis 1992 en liaison avec ses saucissons secs, soit, avant la date de production de la présente demande.
Il convient de déterminer si l’opposante a produit une preuve suffisante pour lui permettre de s’acquitter du fardeau de présentation qui lui incombe eu égard au motif d’opposition basé sur l’alinéa 30e) de la Loi sur les marques de commerce. À cet égard, l’opposante a invoqué une série de décisions rendues par le registraire des marques de commerce dans lesquelles celui-ci a rejeté des demandes fondées sur l’emploi projeté parce qu’il avait été démontré que la marque de commerce avait été employée avant la date de production de la demande [voir Tone-Craft Paints Ltd. c. Du‑Chem Paint Co. Ltd., 62 C.P.R. 283; Airwick Industries Inc. c. Metzner, 74 C.P.R. (2d) 55; Société Nationale Elf Acquitaine c. Spex Design Inc., 22 C.P.R. (3d) 189; Frisco-Findus S.A. c. Diners Delite Foods Ltd., 26 C.P.R. (3d) 556; La Marca Leather Corp. c. Orol Jewellery Mfg. Co. Ltd., 28 C.P.R. (3d) 562; Manifatture Casucci Di Caucci Ugo & C. S.a.s. c. Casucci Clothes Inc., 52 C.P.R. (3d) 250; et Nabisco Brands Ltd. - Nabisco Brands Ltée (maintenant Nabisco Ltd. - Nabisco Ltée) c. Cuda Consolidated Inc., 81 C.P.R. (3d) 537].
Je ferai tout d’abord observer que les spécimens annexés en tant qu’élément MD-1 à l’affidavit Delagrave sont détériorés à un tel point que les inscriptions sur les étiquettes de trois des cinq spécimens sont illisibles. En outre, les inscriptions sur les étiquettes des deux autres spécimens ne sont qu’en partie lisibles. A l’audience, la requérante a formulé l’objection selon laquelle elle n’avait reçu que des photocopies des spécimens constituant les éléments MD-1 annexés à l’affidavit Delagrave et que les photocopies étaient indéchiffrables. Toutefois, la requérante n’a pas soulevé cette objection au cours de la procédure d’opposition et, de toute façon, elle avait accès aux étiquettes de ses propres produits qui sont vendus au Canada. J’ai donc rejeté l’objection de la requérante.
L’opposante a fait remarquer au cours de l’audience que, sur les étiquettes apposées sur les spécimens constituant l’élément MD-1, figurent la mention « SIAL D’OR 1992 CONCOURS INTERNATIONAL PARIS », ainsi que l’adresse de la requérante : « 7180 Marconi, Montréal P.Q. H2S 3K1 » et la marque de commerce CHARCUTERIE NOUVELLE FRANCE de la requérante. À cet égard, l’opposante a aussi présenté, en tant qu’élément MD-2 annexé à l’affidavit Delagrave, une copie de l’enregistrement de la marque de commerce CHARCUTERIE NOUVELLE FRANCE de la requérante visant des « Produits de charcuterie, nommément : jambon cuit, jambon cru, saucissons crus, pâtés, salami cuit, tartinades ». La copie de l’enregistrement révèle que la demande d’enregistrement de la marque CHARCUTERIE NOUVELLE FRANCE a été produite le 11 février 1992 et qu’une déclaration d’emploi de la marque de commerce a été soumise le 20 septembre 1993. La copie de l’enregistrement révèle en outre que l’agent inscrit au dossier pour le propriétaire inscrit est ROBIC, qui est aussi l’agent inscrit au dossier pour l’opposante dans la présente opposition. Cependant, comme la requérante n’a pas soulevé la question d’un éventuel conflit d’intérêt en ce qui concerne l’agent représentant l’opposante dans cette procédure d’opposition, je n’ai pas tenu compte de ce facteur en l’espèce.
Je suis conscient du fait que le fardeau de la preuve qui incombe à un opposant en ce qui concerne un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30e) de la Loi est un fardeau léger. Cependant, la simple mention observée en octobre 1998 sur les étiquettes des produits de la requérante concernant un prix apparemment décerné à cette dernière en 1992 ne permet en aucune façon d’étayer la prétention de l’opposante selon laquelle le registraire devrait conclure que la requérante a employé de façon continue sa marque de commerce LE BÂTON DE BERGER au Canada depuis 1992 en liaison avec des « saucissons secs ». J’ai donc rejeté ce motif d’opposition.
Conformément aux pouvoirs qui m’ont été délégués par le registraire des marques de commerce en vertu du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, je rejette l’opposition de l’opposante conformément au paragraphe 38(8) de la Loi sur les marques de commerce.
FAIT À HULL (QUÉBEC), CE 29e JOUR DE SEPTEMBRE 2000.
G. W. Partington
Président de la Commission des
oppositions des marques de commerce