Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

 

                                                                                               Référence : 2013 COMC 175

                                                                                               Date de la décision : 2013-10-15

                                                                                               TRADUCTION

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Imperial Tobacco Canada Limited à l’encontre de la demande d’enregistrement no 1411285 pour la marque de commerce FLIP-TOP au nom de Philip Morris Products S.A.

 

Dossier

[1]        Le 18 septembre 2008, Philip Morris Products S.A. a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce FLIP-TOP, fondée sur un emploi projeté au Canada, en liaison avec les marchandises suivantes :

tabac, brut ou manufacturé, y compris cigares, cigarettes, cigarillos, tabac pour rouler ses cigarettes, tabac à pipe, tabac à chiquer, tabac à priser et substituts de tabac (à usage autre que médical)

 

[2]        La demande en titre a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 29 juillet 2009 et une déclaration d’opposition a été produite par Imperial Tobacco Canada Limited le 23 décembre 2009. Le registraire a transmis une copie de la déclaration d’opposition à la requérante le 14 janvier 2010, comme l’exige le paragraphe 38(5) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13. En réponse, la requérante a produit et signifié une contre‑déclaration dans laquelle elle rejette les allégations contenues dans la déclaration d’opposition de manière générale.

[3]        La preuve de l’opposante est constituée de l’affidavit de Claire Gordon. La preuve de la requérante est constituée des affidavits de Suzanna La Rose et de Mary P. Noonan, et d’une copie certifiée du dossier de délivrance pour la marque de commerce BLUES, enregistrement no LMC270151. La contre‑preuve de l’opposante est constituée de l’affidavit de Kathleen Larone.

 

[4]        Mme Larone a été contre‑interrogée au sujet de sa preuve par affidavit. La transcription de son contre‑interrogatoire a été versée au dossier. Les deux parties ont produit des plaidoyers écrits et étaient représentées à l’audience tenue le 25 septembre 2013.

 

Déclaration d’opposition

[5]        Les motifs d’opposition sont invoqués brièvement et sont présentés intégralement ci‑dessous :

a)       Suivant l’alinéa 38(2)a) de la Loi [Loi sur les marques de commerce], la demande ne satisfait pas aux exigences de l’alinéa 30e), car la requérante n’a pas l’intention d’employer, elle‑même ou par l’entremise d’un licencié, ou elle‑même et par l’entreprise d’un licencié, la marque visée par cette demande comme marque de commerce.

 

b)       Suivant les alinéas 38(2)b) et 12(1)b) de la Loi, la marque visée par cette demande n’est pas enregistrable, car qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou une description fausse et trompeuse du fait que les marchandises de la requérante sont vendues dans un emballage à rabat.

         

c)       Suivant l’alinéa 38(2)d) de la Loi, la marque de commerce en titre n’est pas distinctive, à cause de la nature descriptive de la marque, et du fait que la marque ne sera pas employée ni perçue comme une marque de commerce.

 

Thèse de l’opposante

[6]        Les allégations susmentionnées sont formalistes et reproduisent le libellé de la Loi sur les marques de commerce. L’opposante énonce essentiellement les mêmes allégations, dans un langage plus clair et plus informel, aux paragraphes 4 et 8 de son plaidoyer écrit, présentés ci‑dessous :

 

 

 

[Traduction]

4.  FLIP-TOP est un terme défini dans le dictionnaire comme étant le couvercle d’un pot ou le pot doté d’un tel couvercle, car le couvercle reste attaché au pot lorsque le pot est ouvert. Ce type de couvercle est facilement rabattable. Rien n’indique dans la présente opposition que ce terme peut avoir une autre signification.

 

5.  FLIP-TOP est un terme largement employé dans l’industrie du tabac pour décrire un emballage pour produits du tabac comportant un couvercle facilement rabattable.

 

6.  Tous les fabricants et distributeurs de produits du tabac devraient pouvoir utiliser le terme FLIP-TOP en lien avec des produits du tabac vendus dans ce type d’emballage.

 

7.  La marque de commerce FLIP-TOP visée par l’opposition décrit clairement un type d’emballage pour produits du tabac, et ce, à la première impression, d’une manière facile à comprendre.

 

8.  La marque de commerce FLIP-TOP visée par l’opposition n’est pas distinctive en ce qui a trait aux produits du tabac. Elle ne possède pas de caractère distinctif inhérent, car elle est descriptive. Elle n’est pas « adaptée à distinguer » et ne distingue pas les marchandises de la requérante de celles d’autres, car d’autres commerçants emploient déjà le terme FLIP-TOP en lien avec des produits du tabac.

 

Thèse de la requérante

[7]        La thèse de la requérante est énoncée au paragraphe 6 de son plaidoyer écrit :

[Traduction] La marque de commerce de la requérante est un mot servant de marque et devant être employé en lien avec des produits du tabac bruts et manufacturés […] La description des marchandises n’inclut pas les emballages. La marque de commerce FLIP-TOP est un terme arbitraire lorsqu’elle est employée avec les marchandises qui y sont associées. Elle ne fait pas référence à la composition des biens ni à une qualité intrinsèque évidente des biens, comme une fonction, un trait ou une caractéristique des marchandises spécifiées dans l’enregistrement. En outre, il n’existe aucune preuve que la marque de commerce ne sera pas ou ne peut pas être employée comme une marque de commerce, au sens de la Loi sur les marques de commerce.

 

[8]        Avant d’aborder les questions soulevées dans la déclaration d’opposition, j’examinerai la preuve des parties, le fardeau qui incombe à l’opposante de mettre en doute ses allégations et le fardeau ultime qui incombe à la requérante de prouver le bien‑fondé de sa cause.

 

 

Preuve de l’opposante

Claire Gordon

[9]        Mme Gordon est parajuriste à la firme qui représente l’opposante. Son affidavit sert à communiquer diverses pièces à titre de preuves, décrites ci‑dessous.

 

[10]      La pièce B est constituée d’une copie de la section 1 (section sur les définitions) du Règlement sur les rapports relatifs au tabac (DORS/2000-273), laquelle comprend l’entrée suivante : 

                        « type d’emballage »

"type of package"

« type d’emballage » S’entend notamment de chaque format des types d’emballage suivants :

                                    a) dans le cas des cigarettes, kreteks, bidis et bâtonnets de tabac :

                                         (i)      un paquet à coulisse,

                                         (ii)     un paquet à rabat,

                                         (iii)    un paquet mou;

                                                               (emphase ajoutée)

 

[11]      Les pièces D1 à D30 sont constituées de copies d’écran tirées de pages web. Ces pièces indiquent que le terme « flip-top » (à rabat) est couramment employé pour décrire un type de contenant à cigarettes, c’est-à‑dire, un type d’emballage. Par exemple, la pièce D8 présente [traduction] « 10 façons de réutiliser une boîte à rabat (paquet de cigarettes) »; la pièce D14 indique que [traduction] « Le paquet de cigarettes à rabat est l’un des emballages les plus populaires de l’histoire de l’industrie de la conception d’emballages ».

 

[12]      Les pièces G et H sont constituées d’entrées dans le dictionnaire pour le terme « flip-top » tirées de textes de référence courants en ligne. Ces entrées concernent l’adjectif [traduction] « qui a ou qui présente un couvercle rabattable facilement » et le nom « couvercle d’un contenant qui reste attaché à ce dernier lorsqu’il est ouvert ».

 

[13]      Les pièces I et O sont constituées de copies de brevets canadiens pour des emballages de cigarettes dotés de couvercles de type « flip-top ». En particulier, la pièce I est constituée d’une copie d’un brevet intitulé FLIP-TOP BOX qui appartient à la requérante aux présentes. La description du brevet comprend le passage suivant :

[Traduction] L’invention a trait a une boîte à rabat, en particulier pour des cigarettes, comprenant un couvercle et une boîte dont la paroi arrière est attachée à la paroi arrière du couvercle […] Ces boîtes à rabat ou à couvercle basculant sont les boîtes à cigarettes les plus courantes avec les emballages souples […] Toutefois, plus récemment, on trouve de plus en plus de boîtes à rabat avec arêtes longitudinales chanfreinées […] Le problème de toutes ces boîtes à rabat, en particulier lorsqu’elles ont été ouvertes et fermées à plusieurs reprises, c’est que le couvercle ne reste pas automatiquement en position fermée et reste légèrement entrouvert.

                                        (emphase ajoutée)

 

Preuve de la requérante

Suzanna La Rose

[14]      Mme La Rose se présente comme une bibliothécaire de référence principale à l’emploi des agents de la requérante. Son affidavit sert à communiquer, à titre de preuves, des entrées dans le dictionnaire pour les termes « tobacco » (tabac), « cigars » (cigares), « cigarettes » (cigarettes), « cigarillos » (cigarillos) et « tobacco » (tabac) [sic], tirés de divers textes de référence courants en ligne et imprimés.

 

Mary P. Noonan

[15]      Mary P. Noonan se présente comme une commis à la recherche de marques de commerce employée par les agents de la requérante. Son affidavit sert à communiquer à titre de preuves les résultats de diverses recherches dans le registre des marques de commerce.

 

[16]      La première recherche a révélé des marques déposées comprenant les éléments FLIP ou TOP dont les marchandises associées peuvent constituer des emballages ayant un « rabat » (flip) ou un « couvercle » (top). Trois marques ont été trouvées : FLIP-PAC, associée à des produits pharmaceutiques; FLIP-A-MINT, associée à des friandises; et « FLIP YOUR LID!! », associée à de la pizza.

 

[17]      La deuxième recherche a révélé des marques déposées dont un élément décrit l’emballage. Dix‑sept marques ont été trouvées, par exemple, STACK, associée à de la papeterie; BIG PAK, associée à de la gomme à mâcher; BLACK BOX, associée à du vin; et SIXPACK, associée à des pièces automobiles. La majorité des marques comportaient l’élément PAK ou PACK.

 

[18]      La troisième recherche a révélé des marques déposées incluant une renonciation relative à l’emballage spécifié dans les marchandises. Huit marques ont été trouvées. Trois marques incluaient une renonciation relative à l’élément PACK ou PAC; deux marques incluaient une renonciation relative à l’élément CASE; une marque incluait une renonciation relative à l’élément CUBE; et deux marques incluaient une renonciation relative à l’élément BOX.

 

Dossier de délivrance pour la marque de commerce BLUES

[19]      Le dossier de délivrance contient une décision rendue par la présente Commission dans l’opposition produite par RJR-MacDonald, Inc. à l’encontre d’Imperial Tobacco Limited concernant la marque BLUES enregistrée pour un emploi en liaison avec des produits du tabac : cette décision est citée dans (1981), 67 C.P.R. (2d) 246.

 

[20]      Je juge que la décision rendue par la Commission dans l’affaire BLUES ne fournit aucune orientation dans la présente espèce.

 

Contre-preuve de l’opposante

Kathleen Larone

[21]      Mme Larone se présente comme une adjointe au cabinet d’avocats représentant l’opposante. Son affidavit sert à communiquer à titre de preuves d’autres entrées dans le dictionnaire pour le terme « flip-top ».

 

[22]      La requérante a fait valoir que la preuve de Mme Larone est inappropriée, car elle ne se limite pas strictement aux questions soulevées dans la contre‑preuve et elle aurait dû être présentée comme preuve principale. Je suis d’accord avec la requérante et par conséquent, je n’ai pas tenu compte de l’affidavit de Mme Larone.

 

Fardeau ultime et fardeau de présentation

[23]      Comme je l’ai mentionné plus tôt, avant d’examiner les allégations contenues dans la déclaration d’opposition, je dois examiner certaines exigences techniques concernant (i) le fardeau qui incombe à l’opposante d’appuyer les allégations contenues dans la déclaration d’opposition et (ii) le fardeau ultime qui incombe à la requérante de prouver le bien‑fondé de sa cause. 

 

[24]      En ce qui concerne le point (i), conformément aux règles de preuve habituelles, il incombe à l’opposante de prouver les faits inhérents aux allégations avancées dans la déclaration d’opposition : voir John Labatt Limited c. The Molson Companies Limited, 30 C.P.R. (3d) 293, à la p. 298 (CF). L’existence d’un fardeau à l’endroit de l’opposante relativement à une question particulière signifie que, pour que la question soit considérée un tant soit peu, l’opposante doit présenter une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question. Quant au point (ii), la requérante a le fardeau ultime de prouver que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur les marques de commerce comme l’allègue l’opposante dans sa déclaration d’opposition. L’existence d’un fardeau ultime à l’endroit de la requérante signifie que si une certaine décision ne peut être rendue une fois toutes les preuves en main, la question doit être tranchée contre la requérante. 

 

Examen des motifs d’opposition

[25]      Chacun des motifs d’opposition est fondé sur la même prémisse, à savoir que le terme « flip-top » ne peut pas servir de marque de commerce, car il décrit un type d’emballage pour produits du tabac. Même si la requérante (aux paragraphes 19 et 20 de son plaidoyer écrit) a soulevé des objections techniques concernant certains éléments de preuve de l’opposante, à mon avis la preuve de l’opposante dans son ensemble suffit pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de prouver que le terme « flip‑top » décrit un type d’emballage utilisé pour divers produits et en particulier pour des produits du tabac. Par conséquent, je juge qu’il existe suffisamment de faits pertinents pour mettre en doute chacun des motifs d’opposition. Je commencerai par examiner le motif d’opposition relatif à l’absence de caractère distinctif de la marque de commerce visée par la demande.

 

 

 

    Troisième motif d’opposition – La marque FLIP-TOP est-elle distinctive?

[26]      L’opposante m’a signalé que la présente Commission a rendu plusieurs décisions relatives à des marques de commerce décrivant un emballage. La première est la décision de la Commission dans l’affaire Plastic Packaging Products Ltd. c. Universal Electric Products Co. Ltd., (1964) 43 C.P.R. 155, concernant la marque BLISTER-PAK pour un emploi projeté en liaison avec des [traduction] « ampoules électriques pour arbre de Noël ». La Commission a résumé les objections à la marque projetée, à la p. 155 :        

[Traduction] L’opposante fait valoir que la marque BLISTER-PAK employée en liaison avec des « ampoules électriques pour arbre de Noël » n’est pas distinctive. Un « blister-pak » (emballage-coque), ou un « blister-packaging », est un type d’emballage bien connu dans l’industrie du commerce. Par conséquent, l’opposante soutient que la marque de commerce BLISTER-PAK ne devrait pas être enregistrée au nom de la requérante ou de toute autre personne, car elle ne distingue pas les marchandises d’une personne de celles d’autres personnes qui sont emballées dans des « blister-paks ». L’opposante se permet même de dire que le Bureau des marques de commerce n’enregistrerait pas non plus les marques de commerce « foil-wrapped » (recouvert de papier d’aluminium) ou « plastic-wrapped » (recouvert de film étirable) en liaison avec des ampoules électriques pour arbre de Noël. De la même manière, le terme « blister-pak » n’est pas distinctif.

 

[27]      Les motifs du refus de la demande par la Commission sont énoncés à la p. 156 :

 

[Traduction] J’ai examiné la preuve au dossier et comme aucune audience n’a eu lieu, je conclus que la marque de commerce BLISTER-PAK ne devrait pas être enregistrée, car elle n’est pas distinctive. La preuve fournie par l’opposante montre clairement qu’il s’agit d’un nom commercial appliqué à un certain mode d’emballage pour divers types d’articles et que par conséquent, il ne distingue pas les marchandises de la requérante de celles d’autres personnes.

                                                (emphase ajoutée)

 

[28]      Je suis d’accord avec l’opposante pour dire que la présente affaire est identique à l’affaire BLISTER-PAK. Il me semble que la requérante doit employer sa marque et montrer le caractère distinctif acquis par cette marque avant de pouvoir s’acquitter du fardeau qui lui incombe de montrer que sa marque distingue ses produits du tabac. Dans les circonstances de la présente espèce, je conclus que la marque projetée FLIP-TOP apposée sur des emballages de produits du tabac serait perçue comme une description de l’emballage et non comme une description des produits qu’il contient. L’opposition est donc accueillie à l’égard du troisième motif d’opposition lié à l’absence de caractère distinctif.

 

   Deuxième motif d’opposition – La marque FLIP-TOP donne-t-elle une description claire?

            Cause de l’opposante

[29]      Comme j’ai conclu en faveur de l’opposante relativement au troisième motif d’opposition, il n’est pas nécessaire que j’examine les autres motifs. Cependant, le conseil de l’opposante m’a aussi signalé, aux paragraphes 42 et 43 de son plaidoyer écrit, présenté plus bas, deux décisions relativement récentes et pertinentes de la Commission :

[Traduction] 42. […] dans Canada Dry Ltd. c. McCain Foods Ltd. (1988) 21 C.P.R. (3d) 99, la Commission des oppositions des marques de commerce (d’après le juge Martin) a jugé que DRINKIN' BOX et BOÎTE À BOIRE donnaient une description claire des boissons, car « sous l’angle de la première impression, l’utilisateur ordinaire des marchandises de la requérante croirait, en voyant ou en entendant la marque de commerce DRINKIN’ BOX de la requérante, qu’il s’agit d’un contenant de type boîte lui permettant de boire directement la boisson contenue à l’intérieur ». La marque donnait une description claire du produit, « le produit dans cette espèce étant le jus et le contenant ».

 

[Traduction] 43. De la même manière, une marque peut donner une description claire des marchandises lorsqu’elle décrit la taille du contenant dans lequel ces marchandises sont vendues. Dans Ralston Purina Canada Inc. c. Effem Foods Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 125, la Commission des oppositions des marques de commerce a jugé que « MONEY SAVING VALUE SIZE » décrivait des aliments pour animaux de compagnie, car elle fait aussitôt penser que le produit de la requérante (ou de quiconque d’ailleurs) est vendu dans un format plus grand, permettant à l’acheteur d’économiser. Si tel est le cas, alors la marque de commerce donne une description claire, et si tel n’est pas le cas, la marque donne une description fausse et trompeuse. On pourrait facilement imaginer d’autres commerçants employer ces termes pour décrire leurs produits et par conséquent, ils ne devraient pas être monopolisés par la requérante si elle n’est pas en mesure de prouver qu’ils ont acquis un caractère distinctif. (emphase ajoutée)

 

            Cause de la requérante

[30]      Le conseil de la requérante a mentionné une autre décision relative à un « emballage » rendue par la présente Commission. Cette décision concerne la marque TWO BY SIX, fondée sur un emploi projeté au Canada, en liaison avec des boissons alcoolisées de type bière : voir John Labatt Ltd. c. Molson Cos. Ltd. (1986) 9 C.P.R. (3d) 385. L’opposante fait valoir que cette marque donnait une description claire, qu’elle constituait le nom des marchandises et qu’elle n’est pas distinctive de celle de la requérante. La Commission a fait remarquer que

[Traduction] le troisième motif d’opposition [caractère distinctif] est formulé en termes généraux et qu’il doit donc être considéré comme étant limité aux allégations antérieures de l’opposante concernant ses deux premiers motifs d’opposition.

 

[31]      La Commission a ensuite fait remarquer que

[Traduction] la preuve de l’opposante ne sert qu’à établir que le terme « 2x6 » ou « two by six » (deux par six) a une signification reconnue dans ce segment de l’industrie de l’emballage spécialisé dans l’emballage de la bière. Dans ce secteur commercial spécialisé, le terme « two by six » fait référence à des emballages de taille particulière pouvant contenir deux rangées de six bouteilles ou cannettes de bière. Toutefois, la preuve de l’opposante ne permet pas d’établir que le consommateur moyen connaît la signification du terme « two by six » en liaison avec des boissons alcoolisées de type bière.

                                                (emphase ajoutée)

 

[32]      La Commission a rejeté les deux premiers motifs d’opposition et, comme le troisième motif découlait des deux premiers motifs, elle a aussi rejeté le troisième motif lié à l’absence de caractère distinctif.

 

[33]      Dans la présente espèce, le troisième motif d’opposition lié à l’absence de caractère distinctif ne découle pas des autres motifs. Il est plutôt invoqué seul pour alléguer que la marque FLIP-TOP ne sera pas perçue comme une marque de commerce. En outre, dans la présente espèce, je dispose de preuves que l’emballage de type « flip-top » ne se limite pas à un produit en particulier.

 

[34]      Le conseil de la requérante m’a aussi signalé l’existence de plusieurs décisions de la Cour fédérale dans lesquelles cette dernière affirme sans équivoque que « pour qu’un mot donne une description claire, il doit se rapporter à la composition des biens ou du produit ». Voir, par exemple, Provenzano c. Registraire des marques de commerce (1977) 37 C.P.R. (2d) 189 (CF), confirmé par 40 C.P.R. (2d) 288 (CAF). Toutefois, aucune des décisions de la Cour invoquées par la requérante ne concerne des emballages. En outre, dans S. C. Johnson & Son, Ltd. et al. c. Marketing International Ltd. 44 C.P.R. (2d) (1979) 16, à la p. 25 (CSC), la Cour a fait remarquer qu’une marque peut être visée par l’interdiction énoncée à l’alinéa 12(1)b), c’est‑à‑dire, qu’elle peut donner une description claire, si elle décrit « l’effet » des marchandises. Il semble donc que la condition énoncée dans l’affaire Provenzano pour conclure qu’une marque donne une description claire ne soit pas tout à fait complète. Néanmoins, le conseil de la requérante m’a fait douter des décisions qui ont été rendues en vertu de l’alinéa 12(1)b) dans les affaires Canada Dry et Ralston Purina susmentionnées.

 

[35]      Même si la règle du précédent ne s’applique pas aux tribunaux administratifs tels que la présente Commission, laquelle prend ses propres décisions, j’estime que je suis dans l’obligation, conformément au principe de courtoisie dans la prise de décision, de respecter les décisions antérieures de la présente Commission, à moins que je ne les juge clairement inappropriées. Comme j’ai des doutes, je ne peux pas affirmer que les décisions rendues dans les affaires Canada Dry et Ralston Purina susmentionnées concluent à tort que les marques visées contrevenaient à l’alinéa 12(1)b). Par conséquent, je dois suivre le raisonnement appliqué dans les décisions susmentionnées et conclure que la marque FLIP-TOP donne une description claire des marchandises de la requérante. 

 

   Preuve relative à l’état du registre

[36]      J’aimerais aussi mentionner que la requérante a fait valoir, au paragraphe 43 de son plaidoyer écrit, que les nombreuses marques déposées de tierces parties trouvées par Mme Noonan qui donnent une description claire de l’emballage (voir les paragraphes 15 à 18, plus haut) montrent que ces marques sont acceptables si elles ne donnent pas une description des marchandises spécifiées dans la demande. Je ne crois pas que l’on puisse tirer cette conclusion, pour les raisons expliquées par la présente Commission dans Simmons I.P. Inc. c. Park Avenue Furniture Corp. (1994) 56 C.P.R. (3d) 284, à la p. 288 :

[Traduction] Dans la décision Reed Stenhouse [(1992), 45 C.P.R. (3d) 79, 57 F.T.R. 317, 36 A.C.W.S. (3d) 119 (T.D.)], le juge en chef adjoint Jerome a souligné qu’il appartient au registraire, en rejetant la demande à l’étape de l’examen, de concilier ce refus « dans une certaine mesure », compte tenu de l’existence de marques assez similaires dans le registre des marques de commerce. Toutefois, j’estime que les commentaires du juge en chef adjoint ne s’appliquent pas aux procédures d’opposition : voir les décisions relatives à des oppositions dans Thomas J. Lipton Inc. c. Boyd Coffee Co. (1991), 40 C.P.R. (3d) 272 (COMC), à la p. 277, et dans Procter & Gamble Inc. c. Morlee Corp. (1993), 48 C.P.R. (3d) 377 (COMC), à la p. 386. Il ne revient pas à la Commission d’opposition d’expliquer pourquoi l’enregistrement d’une marque en particulier a été autorisé par la section d’examen du Bureau des marques de commerce. Cette décision peut avoir été prise parce que l’examinateur ne disposait pas du type de preuve présenté dans le cadre d’une procédure d’opposition ou parce que le fardeau de présentation ou le fardeau ultime n’est pas le même à l’étape de l’examen.

                                                (emphase ajoutée)

 

Décision

[37]      Compte tenu de ce qui précède, la demande est rejetée. Cette décision a été rendue en vertu du pouvoir conféré par le paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce.

 

 

 

___________________

Myer Herzig, membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Lou-Ann Dubé, trad.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.