Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRANSLATION/TRADUCTION


LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2010 COMC 127

Date de la décision : 2010-08-13

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION en vertu de l’article 45, engagée à la demande de Cassels Brock & Blackwell, s.r.l., visant l’enregistrement no LMC447820 de la marque de commerce MOMENTUM au nom de Momentum Healthware, Inc.

[1]               Le 14 mars 2008, à la demande de Cassels Brock & Blackwell, s.r.l. (la partie requérante), le registraire a fait parvenir l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) à Momentum Healthware, Inc. (l’inscrivante), la propriétaire inscrite de la marque de commerce MOMENTUM (la Marque), portant le numéro d’enregistrement LMC447820.

[2]               La Marque est enregistrée pour être employée en liaison avec les marchandises et services suivants :

Logiciels, imprimés, nommément livres, manuels, périodiques et dessins (les Marchandises) et

Installation, entretien et réparation de logiciels à la demande ou selon les spécifications de tiers (les Services).

[3]               Cet avis exige que l’inscrivante démontre si la Marque a été employée au Canada en liaison avec chacune des Marchandises et chacun des Services à un moment quelconque au cours des trois ans précédant immédiatement la date dudit avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. La période pertinente en l’espèce est la période allant du 14 mars 2005 au 14 mars 2008 (la période pertinente).

[4]               En réponse à l’avis, l’affidavit de Charles Laflèche ainsi que les pièces A à W ont été produits. Les deux parties ont produit des observations écrites et aucune audience n’a été demandée.

[5]               Les procédures prévues à l’article 45 sont considérées comme des procédures sommaires et expéditives visant à radier du registre les marques de commerce qui ne sont plus en usage. L’expression « éliminer le bois mort » est souvent employée pour décrire ce type de procédure [voir Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (1987), 13 C.P.R. (3d) 289].

[6]               Une simple allégation d’utilisation de la Marque ne constitue pas une preuve suffisante de l’emploi de celle-ci en liaison avec les Marchandises et avec les Services au sens de l’article 4 de la Loi. Cependant, il n’est pas nécessaire de présenter une surabondance de preuves pour établir cet emploi [voir Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1980) 53 C.P.R. (4th) 62].

[7]               Dans Lewis Thomson & Son Ltd. c. Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 C.P.R. (3d) 483, le juge Strayer a décrit en ces termes la nature des procédures prévues à l’article 45 :

Je ne suis pas disposé à conclure, comme l’ont suggéré les intimés, que l’appelante doit présenter un genre particulier de preuve et que tout affidavit non accompagné d’une facture est présumé inutile. J’estime que l’affidavit en l’espèce précise suffisamment l’emploi et, dans le contexte général des procédures, il suffit amplement. Il me semble, en raison de ce type de procédures, que les faits démontrant l’emploi de la marque de commerce ne doivent pas être contestés sans fin devant le registraire ni la Cour fédérale. Selon moi, le bénéficiaire de l’enregistrement n’a qu’à établir une preuve prima facie de l’emploi de la marque de commerce, c’est tout ce qu’on lui demande. En la matière, aucun contre‑interrogatoire n’est permis d’habitude à l’égard des affidavits déposés soit devant le registraire, soit devant cette Cour, et aucune disposition ne prévoit le dépôt par les intimés d’éléments de preuve devant le registraire. À mon avis, cela indique très nettement que dans la présente procédure les faits ne sont pas censés être contestés sans fin.

[8]               Enfin, il est nécessaire d’examiner l’ensemble de la preuve [voir Worldplay Ltd. c. Teachers Insurance & Annuity Assn. (2004), 37 C.P.R. (4th) 182].

[9]               Comme l’a soutenu la partie requérante, il n’y a aucun élément de preuve visant à expliquer le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec une partie ou l’ensemble des Marchandises et des Services. Si je conclus que la Marque n’a pas été employée en liaison avec les Marchandises et les Services, il faudra la radier (défaut d’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises et les Services); cependant, si je conclus que l’emploi de la Marque a été établi en liaison avec quelques-unes des Marchandises ou quelques-uns des Services, l’enregistrement sera modifié.

[10]           Fondateur de l’inscrivante, M. Laflèche en est le chef des finances depuis janvier 2008. Il travaille pour l’inscrivante ou les prédécesseurs en titre de celle-ci depuis 1995. Dans son affidavit, il fournit d’abord des renseignements généraux sur l’entreprise de l’inscrivante. Il fait ensuite valoir que l’inscrivante et les prédécesseurs en titre de celle‑ci ont commencé à employer la Marque en liaison avec les Marchandises et avec les Services dès le 10 juillet 1995 ou avant. Il ajoute que l’inscrivante est le propriétaire d’une famille de marques de commerce dont la Marque fait partie.

[11]           Monsieur Laflèche explique que l’entreprise de l’inscrivante vend des logiciels informatiques conçus pour les établissements de santé et qu’elle accorde des licences à l’égard de ces logiciels. Il allègue ce qui suit : [traduction] « Au cours des années 2005, 2006 et 2007, les activités de l’inscrivante ont généré des ventes de plusieurs millions de dollars liées directement à ses logiciels informatiques, à l’installation, à la conversion et à la formation des clients à l’égard desdits logiciels ainsi qu’à l’exécution de services de maintenance et de soutien connexes pour les clients. »

[12]           Il appert de la preuve produite que les logiciels de l’inscrivante comprennent différents modules ou composantes comme le « Financial Management System » (système de gestion financière), le « Clinical System » (système clinique), les « Physician Orders » (ordonnances médicales), la « Dietary Management » (gestion du régime alimentaire) et les « Decision Support Systems » (systèmes d’aide à la décision).

[13]           Dans bon nombre des documents produits, il est fait mention de « Momentum Healthware » et de « Momentum Healthware & Design ». Dans certains cas, l’inscription « TM » suit le mot « Healthware » ou se trouve juste à côté d’un trait ovale vertical apparaissant à la droite des mots « Momentum Healthware ».

[14]           Dans Canada (Registraire des marques de commerce) c. Cie. Internationale pour l’informatique CII Honeywell Bull, S.A. (1985), C.P.R. (3d) 523, le juge Pratte s’est exprimé comme suit :

5 Il ne s’agit pas de déterminer si CII a trompé le public quant à l’origine de ses marchandises. Elle ne l’a manifestement pas fait. La seule et véritable question qui se pose consiste à se demander si, en identifiant ses marchandises comme elle l’a fait, CII a employé sa marque de commerce « Bull ». Il faut répondre non à cette question sauf si la marque a été employée d’une façon telle qu’elle n’a pas perdu son identité et qu’elle est demeurée reconnaissable malgré les distinctions existant entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée et celle sous laquelle elle a été employée. Le critère pratique qu’il faut appliquer pour résoudre un cas de cette nature consiste à comparer la marque de commerce enregistrée et la marque de commerce employée et à déterminer si les distinctions existant entre ces deux marques sont à ce point minimes qu’un acheteur non averti conclurait, selon toute probabilité, qu’elles identifient toutes deux, malgré leurs différences, des marchandises ayant la même origine.


6 Si on considère le problème sous cet angle et qu’on applique ce critère, nous ne pouvons que conclure qu’en employant la marque composite « CII Honeywell Bull » CII n’a pas employé sa marque « Bull ».

[15]           J’estime qu’en raison de l’ajout du mot inventé « healthware » au mot courant « momentum », l’acheteur non averti conclurait selon toute probabilité que les marchandises et services offerts en vente en liaison avec la marque de commerce en question n’ont pas la même origine que ceux qui sont offerts en liaison avec la Marque. L’ajout du symbole « TM » de la façon décrite plus haut est une autre raison de conclure que la marque Momentum Healthware constitue une marque de commerce en soi [voir Bull, Housser & Tupper c. Bulldog Bag Ltd. 1991 CarswellNat 1626]. De toute évidence, la même conclusion s’applique à la marque de commerce Momentum Healthware & Dessin.

[16]           Dans certains cas, le mot « Momentum » figure seul. La partie requérante fait valoir que, dans ces situations, ce n’est pas la Marque qui est employée, mais plutôt une version abrégée du nom commercial de l’inscrivante. Je conviens avec la partie requérante que, dans certains cas, il est évident que le mot « Momentum » représente une version abrégée du nom commercial Momentum Healthware. Je me reporte, par exemple, à la pièce C jointe à l’affidavit de M. Laflèche, où Momentum est un mot défini utilisé en remplacement du nom commercial Momentum Healthware.

[17]           Le mot « Momentum » est-il employé seul ou avec d’autres mots de sorte qu’il constitue un emploi de la Marque? Dans certains cas, je réponds par l’affirmative et j’y reviendrai plus loin. Je préciserai également les marchandises et les services associés à cet emploi.

[18]           La pièce A que M. Laflèche a jointe à son affidavit est décrite comme une lettre d’engagement datée du 19 avril 2007. Je reproduis le premier paragraphe de cette lettre afin d’en faciliter la compréhension :

[traduction]

La présente lettre d’engagement ainsi que l’entente de licence relative aux logiciels et l’entente de soutien et de maintenance ci-jointes constituent la totalité du contrat régissant l’utilisation des licences relatives aux logiciels, la mise en oeuvre et les services de soutien à l’égard des produits énumérés ci-dessous.

La pièce A comporte également une facture en date du 24 avril 2007 sur laquelle figurent les droits de licence exigés à l’égard des logiciels.

[19]           La lettre produite comme pièce A est intitulée « Momentum Software-Engagement Letter » (logiciels Momentum – lettre d’engagement). Sous la rubrique « Pricing Summary » (résumé des prix), il est fait mention de certains modules des logiciels. La lettre renvoie également aux « License Fees » (droits de licence), aux activités « Implementation and Training » (mise en oeuvre et formation) et aux « Annual Support and Maintenance Fees » (frais annuels de soutien et de maintenance). Dans ce contexte, le mot « Momentum » est utilisé comme marque de commerce en liaison avec les logiciels et avec les services d’installation, de maintenance et de réparation connexes.

[20]           Une autre lettre d’engagement datée du 31 mars 2005 a été produite comme pièce C ainsi que des factures datées des 25 avril, 8 juillet, 31 juillet et 23 décembre 2005 et 28 septembre 2006, lesquelles factures sont toutes liées aux logiciels informatiques de l’inscrivante. Tel qu’il est mentionné plus haut, l’utilisation du mot « Momentum » dans cette lettre ne constitue pas une preuve d’emploi de la Marque. Cependant, les factures jointes comme pièce C représentent un autre exemple de l’emploi de « Momentum » comme marque de commerce. Les différentes factures comportent, sous la rubrique « Description », les inscriptions « Momentum Financial Management » (gestion financière Momentum) et « Annual Software Support and Maintenance – Momentum Financial Management » (soutien et maintenance annuels des logiciels – gestion financière Momentum). Ces factures font état des droits de licence correspondant au module « Financial Management » (gestion financière) des logiciels Momentum, ainsi que des frais de soutien et de maintenance connexes.

[21]           Les pièces L, M et N sont des brochures promotionnelles relatives aux produits « Enterprise Solution for Healthcare » (solution d’entreprise en matière de soins de santé), « Solution for Canadian Long-Term Care » (solution en matière de soins à long terme pour les Canadiens) et « Dietary Management » (gestion du régime alimentaire). Monsieur Laflèche précise que ces brochures étaient utilisées au cours de la période pertinente. On y fait la promotion des logiciels informatiques offerts en vente au Canada. La phrase suivante figure au haut de la page 5 des brochures produites comme pièces M et N : [traduction] « Les produits Momentum peuvent être utilisés comme solution complète et intégrée ou comme éléments modulaires. » Cette phrase renvoie indéniablement à la Marque employée en liaison avec les logiciels de l’inscrivante et avec les composantes de ceux-ci.

[22]           Monsieur Laflèche fait valoir que l’inscrivante a conçu différents livres, manuels, périodiques et brochures afin de promouvoir les logiciels qu’elle vend et de soutenir la formation des clients et l’utilisation des produits en question par ceux-ci.

[23]           Il a joint à son affidavit, comme pièce J, un extrait du guide d’emploi intitulé « Care Management System Care Touch’ Just the Basics’ User Guide v. 9.0 » (éléments de base du système de gestion des soins – guide d’emploi, version 9.0), daté de janvier 2008, et comme pièce K, un extrait du guide de l’inscrivante intitulé « Care Management System Installation Guide » (guide d’installation du système de gestion des soins) , également daté de janvier 2008. Monsieur Laflèche explique que les clients de l’inscrivante utilisent ce dernier guide aux fins de l’installation des logiciels informatiques de celle-ci. Ce même document renferme également les coordonnées de l’équipe de soutien à la clientèle de l’inscrivante qui vient en aide aux clients dans le cadre de l’installation, de la maintenance et de la réparation des logiciels à l’égard desquels l’inscrivante accorde des licences.

[24]           La pièce J comporte l’avis de droit d’auteur suivant : « The Momentum Care Management System Care Security User Guide... » (guide d’emploi et d’entretien du système de gestion des soins Momentum), tandis que l’inscription suivante figure sur la pièce K : « The Momentum Care Management Install Guide... » (guide d’installation du système de gestion des soins Momentum). J’estime que le mot « Momentum » utilisé dans ce contexte renvoie à la Marque et est employé en liaison avec des livres et des manuels.

[25]           Il n’y a aucune preuve d’activités qui auraient pu constituer un emploi de la Marque en liaison avec des périodiques et des dessins au Canada au cours de la période pertinente. L’enregistrement sera donc modifié en conséquence.

[26]           Compte tenu de la preuve exposée ci-dessus, je conclus que l’inscrivante a établi l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec des logiciels et des imprimés, nommément livres et manuels, ainsi qu’en liaison avec l’installation, l’entretien et la réparation de logiciels à la demande ou selon les spécifications de tiers.


Décision

[27]           Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions du paragraphe 63(3) de la Loi, l’enregistrement de la Marque portant le numéro LMC447820 sera modifié afin de radier les marchandises suivantes : « périodiques et dessins » conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi.

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Jean Carrière

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 

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