Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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TRADUCTION/TRANSLATION

 

AFFAIRE INTÉRESSANT LOPPOSITION

des Aliments Parmalat Inc. à la demande

denregistrement n° 853,582 de la marque de

commerce BLACK DIAMOND

produite par Sun World International, Inc.

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Le 15 août 1997, la requérante Sun World International, Inc. a produit une demande d’enregistrement de la marque de commerce BLACK DIAMOND sur le fondement de l’emploi au Canada depuis au moins le 6 juillet 1990 en liaison avec les fruits et légumes frais. La Section de l’examen du Bureau des marques de commerces a objecté que la marque de commerce dont l’enregistrement était demandé créait de la confusion avec un certain nombre de marques de commerce déposées comprenant tout ou partie du terme BLACK DIAMOND. Les enregistrements cités étaient la propriété des Aliments Parmalat Inc. en vue de l’emploi en liaison avec le fromage et des marchandises connexes.

 

La requérante a surmonté les objections de la Section de l’examen en faisant valoir, notamment, que les marchandises liées à la marque dont l’enregistrement était demandé étaient différentes des marchandises visées par les enregistrements cités. La demande visée a été annoncée en vue de la procédure d’opposition au Journal des marques de commerce le 9 mai 2001 et elle a fait l’objet d’une opposition de la part des Aliments Parmalat Inc. le 9 janvier 2002.

 


Le 31 janvier 2002, la requérante a demandé l’autorisation de modifier la demande en cause pour réduire la portée des marchandises aux « prunes ». Le registraire a accordé l’autorisation à la requérante le 12 février 2002 et a notifié à l’opposante que, si elle le souhaitait, elle pouvait demander l’autorisation de modifier sa déclaration d’opposition. Le 12 février 2002, le registraire a également transmis à la requérante une copie de la déclaration d’opposition datée du 9 janvier 2002. La requérante a répondu en produisant et en signifiant une contre-déclaration.

 

Selon le premier motif d’opposition, la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce parce que, à la date de production de la demande, la requérante était au courant de l’emploi considérable par l’opposante de marques similaires au point de créer de la confusion, qui sont énumérées dans le tableau 1, ci-dessous.

 

Selon le deuxième motif d’opposition, la demande n’est pas conforme à l’alinéa 30b) de la Loi sur les marques de commerce du fait que la requérante n’avait pas employé la marque dont l’enregistrement était demandé depuis la date indiquée dans la demande, soit le 6 juillet 1990.

 

Selon le troisième motif d’opposition, la marque dont l’enregistrement était demandé n’est pas enregistrable, aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec les marques déposées de l’opposante qui sont énumérées dans le tableau 1, ci-dessous.

 


Selon le quatrième motif d’opposition, la requérante n’a pas le droit d’obtenir l’enregistrement demandé, en vertu de l’alinéa 16(1)a) de la Loi, parce qu’à la date du premier emploi de la marque dont l’enregistrement était demandé, elle créait de la confusion avec les marques de l’opposante énumérées dans le tableau 1, ci-dessous, qui avaient été employées antérieurement au Canada par l’opposante et par ses prédécesseurs en titre.

 

Selon le cinquième motif d’opposition, la requérante n’a pas le droit d’obtenir l’enregistrement demandé, en vertu de l’alinéa 16(1)c) de la Loi, parce qu’à la date de premier emploi de la marque dont l’enregistrement était demandé, elle créait de la confusion avec le nom commercial de l’opposante Black Diamond Cheese Company, employé antérieurement au Canada par l’opposante et par ses prédécesseurs en titre.

 

Selon le dernier motif d’opposition, la marque dont l’enregistrement était demandé n’est pas distinctive des marchandises de la requérante compte tenu de l’emploi par l’opposante de ses marques pour le fromage et des produits connexes.

 

  Tableau 1 - Marques déposées de l’opposante

 

 

Marque et n° denregistrement

 

Marchandises

 

BLACK DIAMOND

enreg. n° 853582

 

fromage, trempette, tartinade, fondue, mélanges

 

BLACK DIAMOND  1%

enreg. n° 507570

 

fromage

 

 

 

 

 

                                                                         

 

 

 

enreg. n° 210879

 

fromage fondu

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 277603

 

fromage

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 277602

 

fromage

 

 

 

 

 

enreg. n° 553386

 

fromage et article promotionnels, nommément, tee‑shirts, pulls molletonnés et casquettes

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 264394

 

fromage

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 413573

 

fromage

 

 

 

 

 

enreg. n° 450124

 

fromage

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 450171

 

fromage

 

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 407385

 

 

fromage

 

 

enreg. n° 536002

 

fromage

 

 

enreg. n° 287087                               

 

fromage au lait écrémé fondu

 

enreg. n° 287088

 

fromage  au lait écrémé fondu

 

 

BLACK DIAMOND LITES LEGER         

 

 

 

enreg. n° 393704

 

tranches de fromage fondu

 

 

                                    

 

 

                                    

enreg. n° 433272

 

fromage

 

 

 

 

 

 

 

enreg. n° 416264

 

fromage

 

 

 

 

enreg. n° 331343

 

fromage fondu

 

 

 


La preuve de l’opposante se compose des affidavits de Steve Trofimchuk, directeur du marketing de la Division du groupe des produits laitiers de l’opposante; Brian Hind, vice‑président, Opérations, Fluides et boissons de l’opposante; et Alexander Chan, étudiant stagiaire. En outre, l’opposante a présenté des copies certifiées conformes de chacun des enregistrements de marque de commerce invoqués dans la déclaration d’opposition. La preuve de la requérante se compose des affidavits de Jeliah Yen Chan, avocat, et Elenita Anastacio, recherchiste en marques de commerce. De plus, la requérante a présenté une copie certifiée conforme de la demande d’enregistrement de marque de commerce en cause, n° 853,582. MM. Trofimchuk, Hind et Chan ont été contre-interrogés sur leur témoignage par affidavit. La transcription de ces contre-interrogatoires et les pièces annexées font partie de la preuve versée au dossier. Seule l’opposante a présenté un plaidoyer écrit, toutefois les deux parties ont été représentées à l’audience.

 

Le témoignage de M. Trofimchuk par voie d’affidavit peut se résumer comme suit. L’opposante et la société de son groupe Laiterie et Boulangerie Parmalat Inc. sont producteurs de produits laitiers, nommément du lait, du yogourt, du fromage et de la crème sûre. Une gamme de produits de fromage est vendue sous la marque de commerce BLACK DIAMOND. L’opposante a acquis le secteur fromage BLACK DIAMOND en 1990 de prédécesseurs en titre remontant à 1933. M. Trofimchuk n’est pas au courant de dossiers sur les ventes ou la publicité des produits de fromage BLACK DIAMOND avant 1990.

 


L’opposante exerce parfois son activité sous la dénomination Black Diamond Cheese Company, Black Diamond Cheese Co. et Black Diamond. Depuis 1990, l’opposante vend un certain nombre de produits de fromage différents au Canada sous ses marques BLACK DIAMOND, notamment du fromage naturel, des tranches de fromage fondu, des goûters au fromage, du fromage râpé Sarento et une tartinade au fromage fondu. La pièce 3 annexée à l’affidavit de M. Trofimchuk établit que la marque de l’opposante BLACK DIAMOND est bien en vue sur l’emballage des produits. La gamme de produits de fromage BLACK DIAMOND est de façon régulière la deuxième marque de fromage la plus vendue au Canada. Les ventes au Canada se sont chiffrées à 63 millions de dollars environ par année en 1995 et en 1996 et ont connu une progression continue pour atteindre environ 147 millions de dollars par année en 2001 et 2002. La gamme de produits de fromage BLACK DIAMOND est offerte dans presque toutes les grandes épiceries au Canada, sauf au Québec, où la gamme est offerte par certains des grands détaillants, mais pas tous. Les dépenses de marketing pour les produits BLACK DIAMOND se sont chiffrées en moyenne à plus de 3,6 millions de dollars par année au cours de la période allant de 1990 à 1994 inclusivement. Les campagnes de promotion comprennent des présentoirs aux points de vente, des offres de coupons, des annonces dans les journaux et les magazines et des annonces à la radio et à la télévision. Les pièces jointes à l’affidavit de M. Trofimchuk établissent que la marque de l’opposante BLACK DIAMOND est bien en vue dans ces publicités.

 

De plus, la gamme de fromages BLACK DIAMOND de l’opposante est souvent annoncée et promue dans le rayon des produits frais des épiceries parce que l’opposante voit ses produits de fromage comme un complément aux produits frais : voir la transcription du contre-interrogatoire de M. Trofimchuk Q34; Q44; Q64; et, en particulier, Q296 sur réinterrogatoire, dont le texte est reproduit ci-dessous :

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Selon son témoignage, M. Hind est employé dans l’industrie laitière depuis environ 29 ans. Au cours de la période 1973-1980, pendant laquelle il était employé par un concurrent de l’opposante, le fromage fondu BLACK DIAMOND était la deuxième marque la plus vendue au Canada, tandis que le fromage naturel BLACK DIAMOND était la deuxième ou troisième marque la plus vendue.

 

Il ressort de la transcription du contre-interrogatoire de M. Trofimchuk qu’un grand nombre des détails fournis dans son affidavit proviennent de tiers et constituent donc du ouï-dire inadmissible. Toutefois, M. Trofimchuk et aussi M. Hind ont répondu clairement, pleinement et de manière informative aux questions qui leur ont été posées dans le contre-interrogatoire. En prenant leur témoignage dans son ensemble et en écartant les parties inadmissibles de l’affidavit de M. Trofimchuk, je suis disposé à déduire que la marque de l’opposante BLACK DIAMOND avait, à toutes les dates pertinentes, acquis une réputation notable au Canada en liaison avec le fromage.

 

Le témoignage par voie d’affidavit de M. Chan indique 1) qu’il a trouvé plusieurs mentions du fromage BLACK DIAMOND dans des livres sur le fromage consultés à la Bibliothèque publique d’Ottawa, et 2) que l’on trouve régulièrement dans les grands journaux canadiens des annonces du fromage BLACK DIAMOND.

 


L’affidavit de Mme Anastacio, produit pour le compte de la requérante, sert à introduire en preuve des recherches dans le registre des marques de commerce visant à trouver des marques contenant 1) les éléments BLACK et DIAMOND, ou le dessin d’un losange, ces recherches ayant permis de trouver 68 marques actives et inactives, 2) les éléments BLACK ou DIAMOND  (ou l’image d’un losange similaire au dessin de losange dans les marques de l’opposante présentées dans le tableau 1, ci-dessus) dans les marques visant les produits alimentaires, ces recherches ayant permis de trouver 234 marques actives. Tous les détails sont ensuite donnés au sujet de 102 des 234 marques. Faisaient ainsi partie des marques trouvées BLACK PEARL et dessin afférent pour les produits du poisson, BLACK RHINO COFFEE pour les produits de café et de thé, BLACK RIVER pour le jus de fruit, DIAMOND et dessin y afférent pour les noix, DIAMOND pour les aliments en conserve, DIAMOND et dessin y afférent pour les pommes, les poires et les cerises.

 

Une autre recherche a été menée pour trouver les marques [traduction] « contenant le ou les mêmes mots qui sont employées par des propriétaires différents pour les fruits et pour les fromages ». Les marques ainsi trouvées ont été COTTAGE COUNTRY et dessin y afférent pour les fruits et d’autres marchandises; COUNTRY KITCHEN pour le fromage et d’autres marchandises; et COUNTRY ACRES pour les bleuets et les fraises.

 

L’affidavit de Jeliah Chan, également produit pour le compte de la requérante, sert à introduire en preuve une recherche effectuée dans le journal Toronto Star sur le terme BLACK DIAMOND dans les années 1945 à 2000. La recherche a trouvé des emplois de BLACK DIAMOND comme marque de commerce pour les pamplemousses et les oranges (antérieurement à 1950); des gants de joueur de champ au baseball (antérieurement à 1992); des chaussures; des émissions de télévision; un groupe de musique; un club de motocyclistes; un album musical; un moulinet à lancer léger pour cannes à pêche (antérieurement à 1983); des bijoux (antérieurement à 1965); et des fourrures de vison (surtout antérieurement à 1990).

 


Le premier motif d’opposition ne vaut pas de façon indépendante, mais suppose une conclusion de confusion conformément aux motifs suivants.

 

Le deuxième motif d’opposition, fondé sur l’alinéa 30b) de la Loi sur les marques de commerce, suppose que la demande contient la date à partir de laquelle la requérante a employé sa marque. Comme toujours, le fardeau de persuasion incombe à la requérante, qui doit établir que sa demande est conforme à l’alinéa 30b). C’est-à-dire que la requérante doit établir que la date de premier emploi alléguée est exacte en fait. La demande peut contenir une date de premier emploi postérieure à la date réelle de premier emploi, mais elle ne peut contenir une date antérieure à la date réelle de premier emploi. Conformément aux règles habituelles de preuve, le fardeau de présentation incombe à l’opposante, qui doit établir les faits afférents à son allégation que la date de premier emploi de la requérante est inexacte. Le fait qu’il incombe à une partie un fardeau de présentation à l’égard d’une question particulière signifie que, pour que la question soit considérée, il doit y avoir une preuve suffisante dont on peut conclure raisonnablement que les faits allégués au soutien de la question existent. Le fardeau de présentation qui incombe à l’opposante à l’égard de la date de premier emploi de la marque dont l’enregistrement était demandé est relativement léger parce que les faits se rapportant au premier emploi sont généralement connus de la requérante tandis qu’ils ne sont pas facilement accessibles à l’opposante : voir la décision John Labatt Ltée c. Les Compagnies Molson Ltée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293, aux pages 298 à 300 (C.F. 1re inst.).

 


En l’espèce, la requérante n’a présenté aucune preuve d’emploi de sa marque; toutefois, l’absence d’une telle preuve ne suffit pas, à elle seule, à faire jouer le deuxième motif d’opposition. En contre-interrogatoire, l’avocat de la requérante a posé des questions à M. Trofimchuk ainsi qu’à M. Hind sur le point de savoir s’ils avaient déjà eu connaissance d’emplois de la marque de commerce de la requérante BLACK DIAMOND en liaison avec des prunes. Tous deux ont répondu négativement. Bien que l’opposante n’ait pas établi explicitement que M. Trofimchuk ou M. Hind ait été au courant des marques de commerce employées en liaison avec les fruits, il est manifeste d’après le témoignage de M. Trofimchuk en contre-interrogatoire qu’il connaissait très bien le marketing des fruits dans les grandes épiceries. Donc, il existe au moins quelque élément de preuve indiquant que la marque dont l’enregistrement était demandé n’était pas employée par la requérante. Je note également que la requérante a eu toutes les occasions de dissiper les doutes concernant son emploi de la marque BLACK DIAMOND en fournissant la preuve de son emploi. C’aurait été une affaire simple et une question de prudence pour la requérante de le faire, particulièrement dans une procédure d’opposition où la requérante produit sa preuve après avoir contre-interrogé les témoins de l’opposante. Donc, comme la preuve dans le dossier suscite au moins quelque doute sur le point de savoir si la requérante a employé sa marque en fait, je conclus que l’opposante s’est acquittée du fardeau de présentation léger qui lui incombait pour faire jouer le deuxième motif d’opposition. Je conclus aussi que la requérante n’a rien fait pour s’acquitter du fardeau de persuasion qui lui incombait et surmonter la preuve dans le dossier qui indique que la requérante n’a pas employé sa marque en fait. Par conséquent, l’opposante a gain de cause sur le deuxième motif d’opposition. Pour le cas où j’en viendrais à cette conclusion à tort, je vais considérer les autres motifs d’opposition.

 


La principale question en ce qui concerne les autres motifs d’opposition porte sur le point de savoir si la marque dont l’enregistrement était demandé BLACK DIAMOND employée en liaison avec les prunes crée de la confusion avant la marque de l’opposante BLACK DIAMOND employée en liaison avec le fromage. À cet égard, l’opposante emploie le terme BLACK DIAMOND en tant que marque de commerce en soi et également comme composante de divers dessins-marques ainsi qu’il est indiqué dans le tableau 1, ci-dessus. Dans la majorité des dessins-marques de l’opposante, le terme BLACK DIAMOND serait perçu comme une marque en soi en combinaison avec d’autres marques, comme le dessin d’un losange stylisé : voir la décision Nightingale Interloc c. Prodesign Ltd. (1984), 2 C.P.R. (3d) 535, à la page 538 (COMC), sous le titre Principe 1.

 


Les dates pertinentes pour apprécier la question de la confusion sont :  i) la date de la décision à l’égard du troisième motif d’opposition alléguant la non-enregistrabilité : voir les arrêts Andres Wines Ltd. and E & J Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.) et Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. (1991), 37 C.P.R. (3d) 413, à la page 424 (C.A.F.); ii) la date de premier emploi de la marque dont l’enregistrement était demandé, en l’occurrence le 6 juillet 1990, à l’égard des quatrième et cinquième motifs d’opposition alléguant l’absence de droit à l’enregistrement : voir le paragraphe 16(1) de la Loi sur les marques de commerce; iii) la date de l’opposition, en l’occurrence le 9 janvier 2002, à l’égard du dernier motif d’opposition alléguant l’absence de caractère distinctif : voir l’arrêt Re Andres Wines Ltd. and E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126, à la page 130 (C.A.F.) et la décision Clarco Communications Ltd. c. Sassy Publishers Inc. (1994), 54 C.P.R. (3d) 418 (C.F. 1re inst.). Toutefois, dans les circonstances de la présente affaire, je pense que la question de savoir si la question de la confusion doit être appréciée à une date pertinente particulière est sans conséquence.

 

Le fardeau de persuasion incombe à la requérante, qui doit établir qu’il n’existe pas de risque raisonnable de confusion, au sens du paragraphe 6(2), entre la marque dont l’enregistrement était demandé BLACK DIAMOND pour les prunes et la marque de l’opposante BLACK DIAMOND pour le fromage. L’existence d’un fardeau de persuasion pour la requérante signifie que, si l’on ne peut arriver à une conclusion déterminée une fois que toute la preuve a été présentée, la question doit être tranchée à l’encontre de la requérante: voir la décision John Labatt Ltée c. Les Compagnies Molson Ltée (1990) 30 C.P.R. (3d) 293, aux pages 297 et 298 (C.F. 1re inst.). Le critère de la confusion est celui de la première impression et du souvenir imparfait. En appréciant si deux marques créent de la confusion entre elles, il faut tenir compte des facteurs exposés au paragraphe 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques ont été en usage; le genre de marchandises, services ou entreprises; la nature du commerce; le degré de ressemblance entre les marques dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Cette liste n’est pas exhaustive et tous les facteurs pertinents doivent être pris en considération. Tous les facteurs n’ont pas nécessairement le même poids. La pondération de chacun dépend des circonstances : voir la décision Gainers Inc. c. Tammy L. Marchildon et le registraire des marques de commerce (1996), 66 C.P.R. (3d) 308 (C.F. 1re inst.).

                                                                                                        


           La marque de l’opposante possède un degré assez élevé de caractère distinctif inhérent parce que le terme « black diamond » constitue une juxtaposition inhabituelle, c’est-à-dire que l’adjectif  « black » ne décrit pas normalement le nom « diamond ». De plus, le terme BLACK DIAMOND n’est pas lié au fromage ou n’est pas descriptif du fromage. Bien que la preuve de l’opposante ne soit pas à l’abri de critiques pour son caractère incomplet, il lui suffit néanmoins d’établir que sa marque BLACK DIAMOND a acquis une réputation notable pour le fromage au Canada à toutes les dates pertinentes. La marque dont l’enregistrement était demandé possède aussi un degré assez élevé de caractère distinctif inhérent; toutefois, il n’y a pas de preuve qu’elle ait acquis une réputation quelconque à l’une des dates pertinentes. À cet égard, la requérante n’a présenté aucune preuve au sujet des ventes ou de la publicité faites sous sa marque. La période pendant laquelle les marques ont été en usage favorise l’opposante, étant donné que sa marque a été employée pour la première fois en 1933, tandis que la marque dont l’enregistrement était demandé revendique une date de premier emploi en 1990. Les marchandises des parties appartiennent à la grande catégorie générale des produits alimentaires; toutefois, le fromage est naturellement différent de manière fondamentale des fruits. Néanmoins, on peut s’attendre à un chevauchement des canaux de distribution des marchandises des parties et, selon M. Trofimchuk, le fromage et les fruits sont des produits que le consommateur pourrait manger ensemble. De plus, l’opposante a une stratégie de marketing consistant à faire la publicité de ses produits de fromage dans les rayons de produits frais des supermarchés. S’agissant de la ressemblance entre les marques en cause, elles sont naturellement identiques. 

 


Les affidavits Chan et Anastacio, produits pour le compte de la requérante, ne contribuent guère à soutenir la cause de la requérante. À cet égard, la recherche sur l’état du registre des marques de commerce a permis de trouver de nombreuses marques dans lesquelles les composantes BLACK et DIAMOND figuraient isolément ou en combinaison avec d’autres composantes, mais la recherche n’a révélé aucun cas où BLACK  DIAMOND en soi serait employé en liaison avec des produits alimentaires (avec une exception possible pour l’enregistrement n° 52227 pour le rhum). Donc, la preuve de la requérante sur l’état du registre ne diminue pas de manière appréciable le caractère distinctif inhérent de la marque de l’opposante BLACK DIAMOND. En outre, la preuve de la requérante au sujet de la publicité sous la marque BLACK DIAMOND par des tiers pour des marchandises autres que le fromage ne suffit pas à diminuer de manière appréciable le caractère distinctif acquis de la marque de l’opposante BLACK DIAMOND.   

 

Compte tenu de ce qui précède, et en particulier du caractère distinctif inhérent et acquis de la marque de l’opposante BLACK DIAMOND, de la période pendant laquelle elle a été en usage sur le marché, du chevauchement des canaux de distribution des parties et du rapport entre les fruits et le fromage, dont l’opposante a fait la preuve, je conclus que la requérante n’a pas établi, suivant la prépondérance de la preuve, qu’il n’existe pas de risque raisonnable de confusion entre les marques en cause. Par conséquent, l’opposante a gain de cause sur les motifs d’opposition alléguant la non-enregistrabilité, l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de caractère distinctif.

 

Compte tenu de ce qui précède, la demande est rejetée.


FAIT À GATINEAU (QUÉBEC), LE 28 MARS 2006.

Myer Herzig,

Membre,

Commission des oppositions des marques de commerce 

    

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