Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

TRADUCTION/TRANSLATION

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

THE REGISTRAR OF TRADE-MARKS

Référence : 2012 COMC 77

Date de la décision : 2012-04-13

DANS L’AFFAIRE DE L’OPPOSITION produite par Doctor’s Associates Inc. à l’encontre de la demande d’enregistrement n1335372 pour la marque de commerce KIDSPACK & Dessin au nom de American Multi-Cinema, Inc.

[1]               Le 14 février 2007, American Multi-Cinema, Inc. (la Requérante), a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce KIDSPACK & Dessin (la Marque), reproduite ci-dessous :

 

[2]               La demande d’enregistrement de la Marque est fondée sur un emploi au Canada depuis aussi tôt que décembre 2005 relativement à des marchandises consistant en des « contenants pour aliments en carton et en papier pour les cinémas » (les Marchandises) et des services « de cinéma » (les Services; collectivement désignés comme les Marchandises et Services). La Requérante revendique le 13 octobre 2006 comme date de priorité de production en se basant sur la demande no 77/020,609 déposée aux États-Unis d’Amérique en liaison avec le même genre de marchandises et de services. La demande se fonde également sur emploi et l’enregistrement de la Marque aux États-Unis d’Amérique sous le no 3371408 en rapport avec les Marchandises seulement.

[3]               La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce du 7 mai 2008.

[4]               Le 7 juillet 2008, Doctor’s Associates Inc. (l’Opposante) a produit une déclaration d’opposition. Les motifs d’opposition sont résumés ci-dessous :

  • Suivant les alinéas 38(2)a) et 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T‑13 (la Loi), la Requérante ne peut être convaincue de son droit d’employer la Marque compte tenu de l’emploi antérieur des marques de commerce KIDS’ PAK et SUBWAY KIDS’ PAK Dessin, reproduites ci-dessous (les Marques de l’Opposante), par l’Opposante. La Requérante aurait dû savoir que la Marque créait de la confusion avec celles de l’Opposante.

 

SUBWAY KIDS' PAK Design

 

  • Suivant les alinéas 38(2)a) et 30b) de la Loi, la demande n’est pas conforme à cette dernière disposition parce que la Requérante n’emploie pas la Marque au Canada depuis la date de premier emploi alléguée.

 

  • Suivant les alinéas 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable étant donné qu’elle crée de la confusion avec les Marques de l’Opposante enregistrées sous les numéros LMC455408 et LMC544579 en liaison avec des « services de restaurant et de sandwicherie; services de restaurant » et « sandwiches et goûters, nommément croustilles, bretzels, croustilles tortillas, croustilles au maïs, frisons de maïs soufflé, maïs éclaté, gâteaux, pâtisseries, pour consommation sur place ou à l’extérieur; boissons gazeuses; biscuits; services de restaurant et de sandwicherie », respectivement, déjà employées et (ou) révélées au Canada bien avant la date de premier emploi de la Marque alléguée par la Requérante.

 

  • Selon les alinéas 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque puisqu’à la date de premier emploi alléguée dans la demande, à savoir décembre 2005, la Marque créait de la confusion avec celles de l’Opposante qui avaient déjà été employées ou révélées par elle au Canada bien avant l’adoption de la Marque.

 

  • Selon les alinéas 38(2)c) et 16(1)b) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque puisqu’à la date de premier emploi alléguée dans la demande, à savoir décembre 2005, la Marque créait de la confusion avec celles de l’Opposante à l’égard desquelles des demandes d’enregistrement avaient déjà été produites au Canada, bien avant l’adoption de la Marque.

 

  • En vertu de l’alinéa 38(2)d) et de l’article 2 de la Loi, la Marque n’est pas distinctive en ce qui a trait aux Marchandises et Services, car elle ne distingue pas véritablement les Marchandises et Services de ceux de l’Opposante au Canada, et n’est pas adaptée à les distinguer ainsi.

[5]               La Requérante a signifié et produit une contre-déclaration dans laquelle elle nie les allégations de l’Opposante et la somme d’en faire la preuve.

[6]               L’Opposante a produit en preuve, conformément à l’article 41 du Règlement sur les marques de commerce, DORS/96‑195 (le Règlement), des copies certifiées des enregistrements de ses Marques, ainsi que les affidavits de Valérie Pochron, une avocate la représentant, souscrit le 23 janvier 2009 et accompagnés des pièces A à C, et d’Arif Mahmood, un étudiant en droit employé par l’agent de l’Opposante, souscrit le 26 janvier 2009 et auquel étaient jointes les pièces 1 à 3. Me Pochron a été contre-interrogée le 18 janvier 2009, les transcriptions et suivis donnés aux engagements ont été produits le 26 août suivant et font partie du dossier. L’Opposante a produit un second affidavit de Valérie Pochron, souscrit le 8 avril 2010 et accompagné des pièces A à P, à titre de contre‑preuve, conformément à l’article 43 du Règlement.

[7]               La Requérante a produit en preuve au titre de l’article 42 du Règlement, l’affidavit de Pauline Pawson, comptable pour ses opérations canadiennes, souscrit le 5 novembre 2009 et accompagné des pièces A à O.

[8]               Les deux parties ont produit un plaidoyer écrit. Une audience a été tenue et les deux parties y étaient représentées.

Fardeau de la preuve et dates pertinentes

[9]               C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que sa demande est conforme aux dispositions de la Loi. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau initial de présenter une preuve admissible suffisante permettant raisonnablement de conclure à l’existence des faits allégués au soutien de chacun des motifs d’opposition [voir John Labatt Limitée c. Les Compagnies Molson Limitée (1990), 30 C.P.R. (3d) 293 (C.F. 1re inst.), p. 298].

[10]           Les dates pertinentes pour l’examen des motifs d’opposition sont les suivantes :

         alinéas 38(2)a ) / 30b) et i) – la date à laquelle la demande a été produite [voir Georgia-Pacific Corp. c. Scott Paper Ltd. (1984), 3 C.P.R. (3d) 469, à la page 475 (C.O.M.C.), et Tower Conference Management Co. c. Canadian Exhibition Management Inc. (1990), 28 C.P.R. (3d) 428, à la page 432 (C.O.M.C.)].

         alinéa 38(2)b) / alinéa 12(1)d) – la date de ma décision [voir Park Avenue Furniture Corporation c. Wickes/Simmons Bedding Ltd. et le Registraire des marques de commerce (1991), 37 C.P.R. (3d) 413 (C.A.F.)].

         alinéas 38(2)c) / 16(1)a) et b) – la date de premier emploi alléguée [voir le paragraphe 16(1) de la Loi].

         alinéa 38(2)d)/article 2 de la Loi – la date de production de la déclaration d’opposition [voir Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c. Stargate Connections Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 317 (C.F.)].

Question préliminaire – Objection à la contre‑preuve

[11]           Dans une lettre datée du 12 mai 2010, la Requérante a soulevé une objection à l’égard de la preuve produite par l’Opposante aux termes de l’article 43 du Règlement, estimant qu’il ne s’agissait pas d’une contre‑preuve conforme. À l’audience, la Requérante a indiqué qu’elle souhaitait retirer son objection, ce dont j’ai pris acte; cependant, quelle que soit la position de la Requérante, je signale que la preuve soumise au titre de l’article 43 du Règlement doit se limiter strictement aux matières servant de réponse à la preuve de cette dernière.

[12]           À l’audience, l’Opposante a fait valoir que l’affidavit Pawson vise à démontrer que les kiosques alimentaires situés dans les cinémas ou chez des tiers se présentent toujours sous la forme d’établissements distincts construits en dur, ce qui prouve bien qu’il s’agit d’entreprises distinctes. L’Opposante prétend que le second affidavit Pochron aborde justement cette question.

[13]           Dans son second affidavit, Me Pochron précise que l’Opposante projette de multiplier et de développer les établissements sur place dans les cinémas, les aéroports, les hôpitaux, les collèges et les universités : ils occuperont l’emplacement d’entreprises existantes et attireront principalement la clientèle du site d’accueil.

[14]           Me Pochron a joint à son affidavit des photographies représentant des restaurants SUBWAY situés à l’intérieur de cinémas (pièces D à P). La preuve montrant trois restaurants de ce type à l’intérieur de cinémas au Canada confirme la déclaration sous serment de Me Pochron voulant que la stratégie globale d’exploitation de l’Opposante consiste notamment à s’étendre aux établissements commerciaux existants, y compris les cinémas.

[15]           Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que le second affidavit Pochron est une contre‑preuve conforme.

Motifs d’opposition fondés sur l’article 30

Alinéa 30i) de la Loi

[16]           Lorsqu’un requérant fournit la déclaration exigée par l’alinéa 30i), le motif fondé sur cette disposition ne devrait être retenu que dans les cas exceptionnels, par exemple lorsque la preuve permet d’établir la mauvaise foi du requérant [voir Sapodilla Co. Ltd. c. Bristol-Myers Co. (1974), 15 C.P.R. (2d) 152 (C.O.M.C.), p. 155]. La Requérante a fourni la déclaration requise, et nous ne sommes pas en présence d’un cas exceptionnel; le motif fondé sur l’alinéa 30i) est donc rejeté.

Alinéa 30b) de la Loi

[17]           Le fardeau de preuve initial de l’Opposante est peu exigeant en ce qui concerne la question de non‑conformité à l’alinéa 30b) de la Loi, étant donné que la Requérante connaît bien les faits se rapportant à son premier emploi de la Marque [voir Tune Masters c. Mr. P.’s Mastertune Ignition Services Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 84 (C.O.M.C.), p. 89].

[18]           Pour s’acquitter du fardeau initial imposé par l’alinéa 30b), l’Opposante peut s’appuyer sur la preuve de la Requérante [voir Molson Canada c. Anheuser-Busch Inc., (2003), 29 C.P.R. (4th) 315 (C.F. 1re inst.), et York Barbell Holdings Ltd. c. ICON Health and Fitness, Inc. (2001), 13 C.P.R. (4th) 156 (C.O.M.C.)]. Toutefois, l’Opposante doit démontrer que cette preuve est « manifestement incompatible » avec les prétentions formulées dans la demande d’enregistrement [voir Ivy Lea Shirt Co. c. 1227624 Ontario Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 562, pages 565 et 566 (C.O.M.C.), conf. par 11 C.P.R. (4th) 489 (C.F. 1re inst.)].

[19]           L’Opposante n’a produit en l’espèce aucun élément de preuve quant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b); elle a cependant présenté des arguments solides s’attachant à interpréter la preuve de la Requérante afin de s’acquitter du fardeau qui lui incombe.  

[20]           Dans son affidavit, Mme Pawson indique que la Requérante a abondamment et constamment employé la Marque au Canada depuis aussi tôt que décembre 2005 en liaison avec les Marchandises et pour promouvoir les Services.

[21]           Dans son affidavit, Mme Pawson indique que depuis aussi tôt que décembre 2005, la Requérante offre aux comptoirs de ses cinémas (il y en a huit au Canada) un assortiment de nourritures et de boissons pour les enfants. Le produit se compose, dit-elle, de maïs soufflé, d’une boisson et d’une autre collation, ainsi que d’une boîte décorative contenant un jeu/une activité. Mme Pawson précise que les aliments et la boisson sont servis aux clients dans une boîte ou un plateau en carton que la Requérante appelle un KIDSPACK.

[22]           Mme Pawson a joint les articles suivants à son affidavit : un exemplaire des contenants vendus dans les cinémas de la Requérante depuis 2005 (pièces G, J) et sur lesquels la Marque figure bien en vue; d’autres éléments du menu combiné (c.-à-d. un sac de maïs soufflé et un gobelet) (pièces H, I) arborant tous deux la Marque; et des photographies de ce qu’elle désigne comme un contenant KIDSPACK pour le maïs soufflé, une boisson et une collation, représentatif de ce qu’on peut acheter dans les cinémas de la Requérante au Canada depuis 2005 (pièces K, L). Mme Pawson affirme que la Requérante a vendu 64 211 contenants KIDSPACK dans ses cinémas au cours de l’année financière 2009. Je constate que Mme Pawson n’a pas précisé le prix de ces produits ni fourni de chiffres de ventes pour d’autres années que celle-là.

[23]           L’Opposante fait valoir que la preuve de la Requérante atteste l’emploi de la Marque en liaison avec un menu combiné vendu aux enfants aux comptoirs de la Requérante, et non avec les Marchandises et Services revendiqués dans la demande visant la Marque. Elle soutient notamment que la Requérante ne vend pas les contenants en soi : ils renferment simplement la nourriture et la boisson vendues en menu combiné, ce que la Requérante admet à son avis puisque Mme Pawson affirme dans son affidavit que [traduction] « la combinaison est vendue à un prix attrayant » (voir l’affidavit Pawson au paragraphe 9).

[24]           La Requérante fait valoir que sans le contenant, il n’existerait pas de produit KIDSPACK, et plus précisément que, sans cela, les clients achèteraient simplement du maïs soufflé, des boissons et des collations séparément, ce qui est déjà possible à ses comptoirs. La Requérante prétend que c’est le contenant en carton qui fait le produit KIDSPACK.

[25]           La Requérante indique en outre que les contenants ont une valeur ajoutée pour les clients, pour les raisons suivantes (voir l’affidavit Pawson au paragraphe 9) :

a.       le contenant est coloré et ses motifs sont attrayants, ce qui plaît aux enfants;

b.      le contenant est facile à transporter à l’intérieur du cinéma et à manipuler une fois assis;

c.       enfin surtout, le contenant offre une activité ou un jeu aux enfants.

[26]           La Requérante a également produit des affiches promotionnelles (pièce N) et des coupons (pièce O) arborant la Marque. L’Opposante prétend que ces articles promotionnels révèlent que les consommateurs associent la Marque à un menu combiné, et non à un contenant en carton.

[27]           L’Opposante s’appuie sur la décision Brett c. Coors Global Properties, Inc. (2008), 68 C.P.R. (4th) 58, concernant l’article 45, aux pages 65-66 (C.O.M.C.), dans laquelle le registraire devait décider si l’emploi d’une marque en liaison avec de la bière équivalait à l’emploi de la marque en liaison avec des « canettes en métal et leurs pièces comprenant extrémités, tonnelets à bière et capsules de métal pour bouteilles » et des « contenants et boîtes en papier ». Le registraire a conclu qu’en l’absence d’un avis d’expert établissant que les consommateurs accordaient de la valeur à l’emballage, elle ne pouvait :

[…] inférer que les consommateurs considéreraient les canettes, les capsules pour bouteilles, les tonnelets et les matériaux d’emballages comme des produits COORS distincts de la bière qu’ils contiennent. En conséquence, puisqu’il n’y a aucune preuve semblable, ni aucune preuve de vente de ces matériaux d’emballages indépendamment de leurs contenus, [la registraire n’a] pu conclure qu’il y a eu emploi de la marque de commerce en cause sur ces marchandises.

[28]           L’Opposante soutient que cette analyse trouve à s’appliquer à la présente instance, et que la Requérante ne vend pas les « contenants pour aliments en carton et en papier » séparément des produits alimentaires qu’ils contiennent et qui sont vendus comme un menu combiné. Elle ajoute que rien dans la preuve ne permet de croire que les clients attribuent la moindre valeur aux contenants en dehors des menus combinés.

[29]           Même s’il est vrai, comme le prétend l’Opposante, que la Requérante ne vend pas les « contenants pour aliments en carton et en papier » séparément des menus combinés, je ne puis convenir avec elle qu’aucun élément de preuve ne suggère que les clients ne leur accordent de valeur. En particulier et comme nous l’avons déjà mentionné, la preuve de Mme Pawson confirme que la boîte remplit une certaine fonction dans la mesure où elle contient un jeu/une activité pour les enfants, et qu’elle est facile à transporter à l’intérieur du cinéma et à manipuler une fois assis. La Requérante fait donc valoir, et je suis d’accord avec elle, que le contenant est plus qu’un simple véhicule nécessaire pour livrer le produit au client (comme une canette de bière, par exemple).

[30]           Ainsi, à l’instar de la Requérante, j’estime que le cas d’espèce relève davantage de l’affaire Kabushiki Kaisha Hattori Seiko c. Impenco Ltd. (1999), 4 C.P.R. (4th) 374 (Seiko), dans laquelle la Cour fédérale a infirmé la décision du registraire concernant l’emploi d’une marque en liaison avec des écrins de montre comme marchandises séparées et distinctes des montres qu’ils contenaient. La preuve d’expert produite lors de l’appel a établi que l’écrin avait une valeur ajoutée et qu’il pouvait être perçu comme une marchandise à part entière. L’Opposante fait valoir que je dois distinguer la présente affaire de l’affaire Seiko puisqu’aucune preuve d’expert indépendante n’a été produite quant à savoir si le contenant a une valeur intrinsèque et constitue une marchandise distincte. Il est vrai qu’aucune preuve d’expert ne nous a été présentée et que, de ce point de vue, les faits de l’espèce diffèrent de ceux de l’affaire Seiko. Cependant, je suis convaincue que les déclarations de Mme Pawson sur la fonctionnalité du contenant autorisent à conclure que celui-ci possède une valeur ajoutée telle qu’il peut être perçu comme une composante du menu combiné séparée et distincte des produits alimentaires.

[31]           Dans son affidavit, Mme Pawson affirme sans détour que les éléments produits arborant la Marque sont représentatifs de la manière dont celle‑ci est montrée depuis décembre 2005.

[32]           Compte tenu de ce qui précède, je ne suis pas convaincue que l’Opposante a réussi à établir que la preuve de la Requérante est manifestement incompatible avec la date d’emploi alléguée pour les Marchandises.

[33]           En ce qui concerne les Services, Mme Pawson qualifie l’emploi de la Marque en liaison avec les menus combinés de promotion des Services de la Requérante. La Requérante renvoie spécifiquement au prix attrayant du menu combiné KIDSPACK et au fait que le produit vendu sous la Marque vise à [traduction] « améliorer l’expérience de divertissement de nos clients et à attirer les gens aux cinémas AMC » (voir l’affidavit Pawson au paragraphe 9).

[34]           L’Opposante fait valoir que la promotion d’un service se distingue de sa prestation. La Requérante affirme de son côté que « promotion » et « publicité » veulent dire la même chose, et qu’il faudrait conclure à ce titre que la preuve de Mme Pawson atteste l’emploi de la Marque dans la publicité des Services, ce que conteste l’Opposante, qui soutient que « promotion » et « publicité » ne sont pas synonymes.

[35]           Il m’est loisible de consulter un dictionnaire pour établir le sens des mots [voir Insurance Co. of Prince Edward Island c. Prince Edward Island Insurance Co. (1999), 2 C.P.R. (4th) 103 (C.O.M.C.)]. J’ai trouvé dans le Canadian Oxford Dictionary les définitions suivantes des termes « promotion » et « publicité », respectivement : [traduction] « activité qui appuie ou encourage une cause, une entreprise ou un but » et [traduction] « processus et moyens par lesquels la promotion de produits, de services, d’idées et de marques est assurée par l’intermédiaire de messages diffusés dans les médias de masse dans l’intention d’influencer le comportement, l’opinion et (ou) les attitudes d’un auditoire ». Je constate que l’une des définitions du terme « promotion » renvoie à celle de publicité.

[36]           Je suis prête à reconnaître que le sens de ces deux termes est techniquement très voisin, mais je ne suis pas convaincue, compte tenu de l’examen de l’ensemble de la preuve, que l’affichage de la Marque sur les contenants alimentaires utilisés pour les menus combinés vendus dans les cinémas de la Requérante soit une publicité de ses services de cinéma.

[37]           Dans son affidavit, Mme Pawson affirme que [traduction] « la disponibilité de boissons et d’aliments à consommer sur place, normalement durant le visionnement d’un film, fait partie de l’expérience de divertissement offerte par [la Requérante] » (voir l’affidavit Pawson au paragraphe 6). Mme Pawson indique également que l’une des options alimentaires offertes dans les cinémas de la Requérante est un [traduction] « comptoir dont [celle-ci] est propriétaire et qu’elle exploite ».

[38]           Eu égard à ces facteurs, j’ai demandé aux deux parties à l’audience de me présenter des observations quant à la question de savoir si l’exploitation d’un comptoir pouvait être considérée comme accessoire par rapport aux services principaux, à savoir les « services de cinéma ». Si tel était le cas, la preuve de l’emploi de la Marque dans les comptoirs de la Requérante (service accessoire) pourrait constituer une preuve d’emploi de la Marque en liaison avec la prestation des Services (service principal). À cette fin, mentionnons qu’il est clairement établi en droit que la Loi ne fait aucune distinction entre les services principaux, accessoires ou secondaires [voir TSA Stores, Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (2011), 91 C.P.R. (4th) 324, au paragraphe 17 (C.F. 1re inst.)].

[39]           La Requérante fait valoir que les services offerts aux comptoirs sont intrinsèquement liés aux services de cinéma; elle cite la déclaration de Mme Pawson voulant que la mission de la Requérante soit [traduction] « [d’]offrir aux clients la meilleure expérience de divertissement hors de la maison ».

[40]           L’Opposante prétend qu’une interprétation selon laquelle les services secondaires suffiraient à confirmer un emploi en liaison avec les services principaux, est inacceptable et priverait le registre de toute certitude ou fiabilité.

[41]           Je comprends les préoccupations de l’Opposante, mais il reste que la jurisprudence confirme que l’emploi en liaison avec des services secondaires peut confirmer un emploi en liaison avec des services principaux [voir Société Nationale des Chemins de fer Français SNGC c. Venice Simplon-Orient-Express Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 443 (C.F. 1re inst.); TSA Stores, précitée]. Je suis convaincue que le même raisonnement s’applique en l’occurrence et que l’exploitation d’un comptoir est un service secondaire au regard des « services de cinéma » de la Requérante.

[42]           En plus de ma conclusion précédente voulant que la Marque soit employée en liaison avec un contenant en carton destiné aux menus combinés offerts dans les comptoirs de la Requérante, la preuve démontre que la Marque figure sur la carte à menu (pièce M jointe à l’affidavit Pawson). La Marque est donc employée par la Requérante dans l’exécution des services offerts aux comptoirs.

[43]           Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que la Marque, qui est employée en liaison avec les services de comptoirs de la Requérante, l’est en liaison avec les Services. Je ne suis donc pas convaincue que l’Opposante a réussi à établir que la preuve de la Requérante est manifestement incompatible avec la date de premier emploi alléguée à l’égard des Services.

[44]           Le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b) de la Loi est donc rejeté puisque l’Opposante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait.

Le motif fondé sur l’alinéa 12(1)d)

[45]           Un opposant s’acquitte du fardeau initial qui lui incombe à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) lorsque l’enregistrement invoqué est en règle à la date de la décision portant sur l’opposition. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de consulter le registre pour confirmer l’existence de l’(des)enregistrement(s) invoqué(s) par un opposant [voir Quaker Oats of Canada Ltd./La Compagnie Quaker Oats du Canada Ltée c. Menu Foods Ltd. (1986), 11 C.P.R. (3d) 410 (C.O.M.C.)]. Je me suis prévalue de ce pouvoir et confirme que les enregistrements relatifs aux Marques de l’Opposante sont toujours valides; l’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve. Je dois maintenant déterminer si la Requérante a fait de même.

[46]           Le test en matière de confusion en est un de première impression et de souvenir imparfait. Le paragraphe 6(2) de la Loi prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

[47]           Lorsqu’il applique le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances en l’espèce, notamment celles que prévoit expressément le paragraphe 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; b) la période pendant laquelle chacune des marques de commerce a été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à chacun de ces facteurs. [Voir, de façon générale, Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2006), 49 C.P.R. (4th) 321 (C.S.C.), et Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc. (2011), 92 C.P.R. (4th) 361 (C.S.C.).]

[48]           Récemment, dans l’arrêt Masterpiece, la Cour suprême du Canada a analysé l’importance du facteur énoncé à l’alinéa 6(5)e) dans l’analyse de la probabilité de confusion entre les marques des parties conformément à l’article 6 de la Loi (voir le paragraphe 49) :

[…] il arrive souvent que le degré de ressemblance soit le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion, et ce même s’il est mentionné en dernier lieu au par. 6(5) […] si les marques ou les noms ne se ressemblent pas, il est peu probable que l’analyse amène à conclure à la probabilité de confusion même si les autres facteurs tendent fortement à indiquer le contraire. En effet, ces autres facteurs ne deviennent importants que si les marques sont jugées identiques ou très similaires […] En conséquence, certains prétendent que, dans la plupart des cas, l’étude de la ressemblance devrait constituer le point de départ de l’analyse relative à la confusion […]

[49]           Dans les circonstances de la présente affaire, j’estime qu’il convient d’analyser en premier lieu le degré de ressemblance entre les marques des parties.

Alinéa 6(5)e) – le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent

[50]           À l’audience, l’Opposante a prétendu qu’en dépit des différences d’orthographe, les marques des parties sont identiques dans le son et les idées qu’elles suggèrent et essentiellement identiques dans leur présentation.

[51]           Je précise que la Marque et la marque SUBWAY KIDS’ PAK & Dessin comportent toutes deux des éléments graphiques sous la forme de mots présentés en police de caractères stylisée, et que ces éléments se ressemblent au point qu’on ne dénote aucune différence significative entre les marques. L’inclusion du terme SUBWAY dans la marque SUBWAY KIDS’ PAK & Dessin crée la différence la plus notable entre les marques des parties. Le mot SUBWAY ne figure pas dans la marque KIDS’ PAK de l’Opposante, de sorte que c’est avec cette dernière que la ressemblance entre les marques des parties est la plus frappante.

[52]           La Requérante avance que les marques des parties sont intrinsèquement faibles et que de petites différences suffiront donc à les distinguer [voir Kellogg Canada Inc. c. Weetabix of Canada Ltd. (2002), 20 C.P.R. (4th) 17 (C.F.); et American Cyanimid Co. c. Record Chemical Co. Inc. (1972), 7 C.P.R. (2d) 1 (C.F. 1re inst.)].

[53]           Je conviens avec la Requérante que les marques des parties sont intrinsèquement faibles; cependant, elles ne sont pas totalement dénuées de caractère distinctif inhérent, et surtout, elles sont essentiellement identiques.

[54]           Ayant conclu que les marques des parties sont très similaires, je dois maintenant examiner les autres circonstances pertinentes de l’espèce pour déterminer si l’un de ces facteurs est assez important pour favoriser la Requérante selon la prépondérance des probabilités [voir Masterpiece, précité, au paragraphe 49].

Alinéa 6(5)a) – le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues

[55]           Les deux parties ont reconnu que les marques en question évoquent les marchandises et services associés qui sont offerts sur le marché. En ce qui concerne la Marque et la marque de l’Opposante SUBWAY KIDS’ PAK & Dessin, il ne me semble pas que les composantes graphiques ajoutent grand-chose à leur caractère distinctif. Par conséquent, j’estime que le caractère distinctif des marques des parties est identique et, comme nous l’avons mentionné dans l’analyse du facteur prévu à l’alinéa 6(5)e), relativement faible.

[56]           Il est possible d’accroître la force d’une marque de commerce en la faisant connaître au Canada par la promotion ou l’usage. J’aborderai à présent la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues au Canada.

[57]           Comme nous en avons discuté plus en détail dans l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 30b), la Requérante a prouvé l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises et Services depuis décembre 2005. Cependant, les chiffres de vente qu’elle a fournis ne concernaient que les Marchandises et ne se rapportaient qu’à l’année 2009. La Requérante a également fourni une preuve relative à l’emploi de la Marque en liaison avec la publicité des Marchandises sans préciser les dépenses publicitaires. Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincue que la Marque est devenue connue, du moins dans une certaine mesure.

[58]           L’Opposante a fourni une preuve substantielle démontrant l’emploi de ses Marques au Canada en liaison avec la vente de menus combinés destinés aux enfants. Plus précisément, d’après Me Pochron, l’Opposante a vendu 5,8 millions de ces menus sous ses Marques entre décembre 2004 et juillet 2008, ce qui représente 20,5 millions de dollars de ventes. Je suis convaincue que l’Opposante a établi que ses Marques sont devenues très connues au Canada.

Alinéa 6(5)b) – la période pendant laquelle les marques ont été en usage

[59]           La Requérante a prouvé l’emploi de la Marque en liaison avec les Marchandises et Services depuis décembre 2005.

[60]           Dans les enregistrements de ses Marques, l’Opposante
 revendique un emploi depuis 1986 pour la marque KIDS’ PAK, et 1999 pour la marque SUBWAY KIDS’ PAK & Dessin. MPochron déclare que [traduction] « depuis que les [Marques de l’Opposante] ont commencé à être employées, en 1986 pour la marque nominale et en 1999 pour le dessin, les restaurants SUBWAY ont vendu des centaines de milliers de menus combinés pour les enfants, ou plus, sous [les Marques de l’Opposante] ». (Premier affidavit Pochron, au paragraphe 9).

[61]           Je signale que l’Opposante n’a fourni aucune preuve montrant ses Marques sur ses marchandises ou leur emballage. Lors du contre-interrogatoire, Me Pochron a indiqué qu’il était arrivé au fil des ans que les Marques de l’Opposante figurent sur les sacs dans lesquels les menus combinés étaient remis aux clients, mais elle n’a pas pu en produire un échantillon (Q111-112 et suivis donnés à des engagements). Me Pochron a fourni des éléments de preuve concernant l’utilisation de la Marque dans des publicités pour corroborer l’emploi des Marques de l’Opposante en liaison avec ses services de restaurant et de sandwicherie conformément au paragraphe 4(2) de la Loi. Me Pochron indique plus précisément que les menus placardés au mur et les affiches promotionnelles présentes dans les restaurants SUBWAY arborent les Marques de l’Opposante (le premier affidavit Pochron, au paragraphe 11). Elle joint à son affidavit des exemplaires d’affiches portant les Marques de l’Opposante pour la période allant de 2007 à 2009 (pièces B1 à B8 jointes au premier affidavit Pochron).

[62]           Je signale que la preuve documentaire et les chiffres de vente ne remontent qu’à 2004 au plus tôt. Cela étant dit, que j’accepte ou non que la preuve confirme l’emploi des Marques de l’Opposante depuis 1986, 1999 ou 2004, ces trois dates sont antérieures à la date de premier emploi alléguée par la Requérante.

Alinéas 6(5)c) et d) – le genre de marchandises, services ou entreprises et la nature du commerce

[63]           Mon appréciation de ce facteur repose sur l’examen de l’état déclaratif des marchandises et des services de la Requérante tel qu’il figure dans la demande d’enregistrement par rapport aux marchandises et/ou services visés par l’enregistrement de l’Opposante [voir Esprit International c. Alcohol Countermeasure Systems Corp. (1997) 84 C.P.R. (3d) 89 (C.O.M.C.)]. Il faut cependant interpréter ces états déclaratifs de sorte à déterminer le type probable d’entreprise ou de commerce que les parties ont l’intention d’exploiter et non de répertorier tous les types de commerce que le texte peut englober. À cet égard, la preuve de la nature véritable du commerce des parties est utile, surtout lorsque les marchandises et services visés par la demande ou l’enregistrement laissent place à l’ambiguïté [McDonald’s Corp. c. Coffee Hut Stores Ltd. (1996), 68 C.P.R. (3d) 168 (C.A.F.); Procter & Gamble Inc. c. Hunter Packaging Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 266 (C.O.M.C.), American Optical Corp. c. Optional Corp. c. Alcon Pharmaceuticals Ltd. (2000), 5 C.P.R. (4th) 110 (C.O.M.C.)].

[64]           Le lien de ressemblance le plus étroite entre les Marchandises et Services des parties tient au fait que les Marchandises sont des contenants pour aliments et que les Marchandises et Services de l’Opposante incluent des produits alimentaires.

[65]           En l’occurrence, les deux parties ont produit des éléments de preuve concernant la nature de leurs activités commerciales.

[66]           La preuve de la Requérante établit que la Marque est employée en liaison avec des contenants utilisés pour des menus combinés vendus dans des comptoirs dans ses cinémas. Cette preuve démontre également que de la nourriture est vendue dans ces cinémas à la fois dans les comptoirs et dans des kiosques alimentaires que des tiers possèdent et exploitent (pièces C et D jointes à l’affidavit Pawson).

[67]           Les Marques de l’Opposante sont employées en liaison avec un menu combiné destiné aux enfants et vendu dans ses restaurants SUBWAY.

[68]           L’Opposante fait valoir que ses restaurants SUBWAY occupent divers emplacements, qu’il s’agisse de restaurants autonomes dans des galeries marchandes, des centres commerciaux, des dépanneurs, des complexes de loisirs ou des cinémas (premier affidavit Pochron, au paragraphe 6). L’Opposante précise que 31 des 30 498 restaurants SUBWAY exploités dans le monde sont situés dans des cinémas ou dans le même complexe que des cinémas (le premier affidavit Pochron, au paragraphe 7). Un de ces emplacements est le Whitby Entertainment Centrum, à Whitby (Ontario), où la Requérante exploite un cinéma (le premier affidavit Pochron, au paragraphe 7). Le second affidavit Pochron a été produit pour mieux étayer la décision commerciale de l’Opposante d’ouvrir des établissements à l’intérieur d’autres types d’entreprises, notamment des cinémas, et il démontre qu’il y a trois restaurants SUBWAY dans des cinémas au Canada (pièces D à F jointes au second affidavit Pochron).

[69]           La Requérante reconnaît que les marchandises et services des parties sont offerts dans une grande proximité les uns par rapport aux autres. Cependant, elle soutient qu’il est évident que ses marchandises et services sont proposés dans le cadre de l’exploitation de cinémas alors que ceux de l’Opposante se rapportent à des activités de restaurants. La Requérante fait valoir que lorsque l’Opposante gère un restaurant SUBWAY à l’intérieur d’un cinéma, les enseignes signalent sans équivoque que les clients fréquentent son restaurant.

[70]           Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, je suis convaincue que les voies commerciales des parties sont relativement similaires et qu’elles se recoupent. Plus particulièrement, les deux parties offrent des produits alimentaires destinés aux enfants, et la preuve confirme que des kiosques alimentaires sont exploités par des tiers à l’intérieur des cinémas de la Requérante. En fait, la preuve révèle que des restaurants SUBWAY sont en activité à l’intérieur de cinémas.

Autre circonstance pertinente – absence de preuve de confusion réelle

[71]           À l’audience, les deux parties ont rappelé qu’il n’existait aucune preuve de confusion réelle malgré la coexistence de leurs marques au Canada depuis décembre 2005.

[72]           L’Opposante soutient que ce facteur ne devrait pas jouer en sa défaveur compte tenu de la réputation importante que lui confèrent ses Marques.

[73]           La Requérante estime que ce facteur devrait être considéré comme une circonstance pertinente.

[74]           Bien que l’Opposante ne soit pas tenue de faire la preuve d’une confusion réelle, son omission à cet égard, en dépit d’une longue période de coexistence, peut justifier une inférence défavorable (voir Mattel, précitée].

[75]           En l’espèce, je ne suis pas convaincue que le défaut de l’Opposante d’avoir produit une preuve de confusion réelle soulève une présomption favorable à la Requérante ou qu’il soit décisif quant à la question de la confusion. À cette fin, je renvoie à la décision Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3 (C.F. 1re inst.), dans laquelle la Cour fédérale a estimé que les marques de la défenderesse MR. SUBS’N PIZZA et MR. 29 MIN. SUBS’N PIZZA créaient de la confusion avec la marque MR. SUBMARINE, bien qu’il n’y ait eu aucune preuve de confusion réelle en dépit d’un emploi concomitant de ces marques dans la même région pendant dix ans. En l’occurrence, la preuve atteste tout au plus une période de coexistence de moitié plus courte que dans Mr. Submarine.

Conclusion

[76]           Compte tenu de l’ensemble des circonstances, notamment de la grande ressemblance entre les marques des parties, je ne suis pas convaincue que la Requérante s’est acquittée du fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les marques de l’Opposante.

[77]           Compte tenu de ce qui précède, j’accueille le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi.

Motifs fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement

Alinéa 16(1)a) de la Loi

[78]           Bien qu’il incombe à la Requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques de l’Opposante, celle-ci a le fardeau initial de prouver que la ou les marques de commerce invoquées à l’appui de son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a) de la Loi étaient employées au Canada avant la date de premier emploi alléguée par la Requérante (décembre 2005), et n’avaient pas été abandonnées à la date de l’annonce de la demande d’enregistrement de la Marque (le 7 mai 2008) [paragraphe 16(5) de la Loi].

[79]           Comme nous l’expliquions en détail dans l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), je suis convaincue que la preuve présentée par l’Opposante autorise à conclure que ses Marques ont été employées au Canada à la date pertinente et n’ont pas été abandonnées à la date de l’annonce; en conséquence, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve.

[80]           Il s’agit maintenant de savoir si la Requérante a satisfait au sien. Plus précisément, il incombe à cette dernière d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre les marques des parties.

[81]           La différence entre les dates pertinentes n’est pas significative et mes conclusions quant au motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi s’appliquent tout autant ici. En conséquence, j’estime que la Requérante ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause. Eu égard à ce qui précède, j’accueille le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)a) de la Loi.

Alinéa 16(1)b) de la Loi

[82]           Bien qu’il incombe à la Requérante de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque et les Marques de l’Opposante, celle-ci a le fardeau initial de prouver que les demandes relatives à la marque de commerce invoquées à l’appui de son motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)b) de la Loi étaient pendantes à la date de premier emploi alléguée de la Marque, soit en décembre 2005, et qu’elles l’étaient toujours à la date de l’annonce de la demande visant cette marque, c’est-à-dire le 7 mai 2008 [paragraphe 16(5) de la Loi]. Le registraire peut, dans l’intérêt du public, consulter le registre pour y trouver les demandes sur lesquelles s’appuie une opposante [voir Royal Appliance, Mfg. Co. c. Iona Appliance Inc. (1990), 32 C.P.R. (3d) 525 (C.O.M.C.)]. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire de vérifier l’état des demandes visant les Marques de l’Opposante.

[83]           Les demandes visant les Marques de l’Opposante ont été produites avant la date de premier emploi alléguée, mais ont toutes deux été enregistrées avant la date de l’annonce de la demande relative à la Marque et n’étaient donc plus pendantes à la date pertinente. Plus précisément, la demande visant la marque de commerce KIDS’ PAK a été enregistrée le 15 mars 1996 et celle qui se rapporte la marque de commerce SUBWAY KIDS’ PAK & Dessin, le 4 mai 2001.

[84]           Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 16(1)b) de la Loi n’a pas été convenablement plaidé : il est donc rejeté.

Le motif concernant l’absence de caractère distinctif – alinéa 38(2)d) de la Loi

[85]           Pour s’acquitter de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit établir qu’au moins l’une de ses Marques était connue au Canada, du moins dans une certaine mesure, en date du 7 juillet 2008 [voir Bojangles’ International LLC c. Bojangles Café Ltd. (2006), 48 C.P.R. (4th) 427 (C.F.), et Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 (C.F. 1re inst.)]. Comme l’a déclaré la Cour au paragraphe 34 de la décision Bojangles :

Une marque doit être connue au moins jusqu’à un certain point pour annuler le caractère distinctif établi d’une autre marque, et sa réputation au Canada devrait être importante, significative ou suffisante.

[86]           Comme nous l’évoquions plus en détail dans l’analyse du motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d), je suis convaincue que la preuve présentée par l’Opposante permet de conclure que ses Marques ont acquis une certaine réputation au Canada depuis la date pertinente et, en conséquence, que cette dernière s’est acquittée de son fardeau de preuve.

[87]           Il s’agit maintenant de savoir si la Requérante a satisfait au sien. Plus précisément, il incombe à la Requérante d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre les marques des parties.

[88]           La différence entre les dates pertinentes n’est pas significative et mes conclusions touchant le motif d’opposition fondé sur l’alinéa 12(1)d) de la Loi s’appliquent ici de la même manière. En conséquence, je ne suis pas convaincue que la Requérante s’est déchargée de son fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre les marques en cause. Compte tenu de ce qui précède, j’accueille le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif.

Décision

[89]           En vertu du pouvoir qui m’est conféré aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi, je repousse la demande conformément au paragraphe 38(8) de la Loi.

 

                                                           

Andrea Flewelling

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.