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Dossier : 2020-2148(GST)I

ENTRE :

ADNAN AL-BONDOKJI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 18 août 2022, à Toronto (Ontario)

Devant : l’honorable juge Réal Favreau


Comparutions :

Avocat de l’appelant :

Me Azhar Sohail

Avocats de l’intimé :

Me Christopher Bartlett

Me Lalitha Ramachandran

 

JUGEMENT

L’appel de la cotisation établie le 20 août 2019 relativement à la demande de remboursement de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) pour habitations neuves est rejeté conformément aux motifs ci-joints du présent jugement.

Signé à Montréal (Québec), ce 19e jour de décembre 2022.

« Réal Favreau »

Le juge Favreau


Référence : 2022 CCI 166

Date : 20221219

Dossier : 2020-2148(GST)I

ENTRE :

ADNAN AL-BONDOKJI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Favreau

[1] Il s’agit de l’appel de la cotisation dont l’avis est daté du 20 août 2019 et qui a été émis en application de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, en sa version modifiée (la Loi).

[2] Le 6 juillet 2018 ou vers cette date, l’appelant a déposé une demande de remboursement de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée pour habitations neuves (le remboursement) s’appliquant à un bien situé au 23, chemin Jemima, Brampton (Ontario) L7A 4T2 (l’habitation).

[3] Par l’établissement de la cotisation du 20 août 2019, le ministre du Revenu national (le ministre) a refusé la demande de remboursement et a établi une cotisation en redressement de remboursement de 24 000 $ ainsi que des intérêts débiteurs de 2 319,05 $.

[4] Lorsqu’il a rejeté la demande de remboursement de l’appelant, le ministre s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes :

  • a) le 21 septembre 2015, l’appelant et Mme Hazel Meryem Bondokji ont signé une convention d’achat et de vente (la convention) avec le constructeur en vue d’acheter l’habitation;

  • b) le prix d’achat de l’habitation était de 624 100,22 $;

  • c) l’appelant et Mme Hazel Meryem Bondokji ont pris possession de l’habitation le 25 janvier 2018;

  • d) l’appelant n’a pas occupé l’habitation;

  • e) la femme de l’appelant, Mme Filiz H. Al-Bondokji (l’épouse), n’a pas occupé l’habitation;

  • f) l’appelant a vendu l’habitation en juillet 2018 pour la somme de 880 000 $;

  • g) pendant toute la période pertinente, l’appelant et son épouse résidaient au 3265, croissant Bruzan, Mississauga (Ontario);

  • h) l’appelant et son épouse ont tous les deux un passé de problèmes médicaux qui a commencé avant la signature de la convention;

  • i) il n’y a pas eu de modification de l’état de santé l’épouse depuis que l’appelant a signé la convention;

  • j) l’appelant n’a pas acheté l’habitation dans l’intention de s’en servir comme résidence principale pour lui-même et son épouse;

  • k) l’habitation n’a pas servi de lieu de résidence principale pour l’appelant ni pour son épouse.

[5] Au cours de son témoignage à l’audience, l’appelant a nié les hypothèses énoncées aux points d), e), g), i), j) et k) du paragraphe 4 ci-dessus. Grosso modo, il nie les affirmations selon lesquelles lui et son épouse n’auraient pas occupé l’habitation et il n’aurait pas acheté l’habitation avec l’intention de s’en servir comme résidence principale pour lui-même et son épouse.

[6] L’appelant a affirmé au cours de son témoignage que lui-même et son épouse ont emménagé dans l’habitation le 1er mars 2018. Pour appuyer cette affirmation, l’appelant a déposé des éléments de preuve documentaires montrant que lui et son épouse occupaient l’habitation. Les documents produits en preuve à cet égard étaient des factures de gaz naturel, d’électricité, d’eau et d’assurances, toutes étant des dépenses qui ont été engagées du mois de janvier au mois de juillet, date à laquelle l’habitation a été vendue.

[7] L’appelant a expliqué que sa fille a cosigné la convention dans le seul but de l’aider à contracter une hypothèque sur l’habitation et que sa fille n’y a jamais vécu.

[8] L’appelant a également expliqué que lui-même et son épouse ont décidé d’acheter l’habitation pour éviter le stress et la fatigue que leur auraient occasionnés les travaux de rénovation à leur résidence précédente de Mississauga. Cependant, la résidence de Mississauga n’a pas été vendue parce que leur fille y habitait.

[9] L’appelant dit avoir vendu l’habitation en juillet, à peine cinq mois après y avoir emménagé, lui et sa femme, parce que leurs problèmes de santé leur causaient de plus en plus de soucis. L’appelant a reçu un diagnostic d’hypertension artérielle et d’hyperglycémie (taux de sucre élevé); son épouse, pour sa part, a subi une chirurgie à cœur ouvert et continue d’avoir des problèmes de santé dus au vieillissement.

[10] L’appelant et son épouse sont revenus vivre dans leur résidence de Mississauga pour se rapprocher de leur médecin de famille et de leurs spécialistes en santé qui ont tous leur cabinet à Mississauga.

[11] Au cours de son témoignage, l’appelant a accepté les faits supplémentaires suivants, invoqués par le procureur général du Canada :

  • a) le 23 mars 2019, l’appelant, son épouse et Mme Hazel Meryem Bondokji ont signé une convention d’achat et de vente pour acquérir un bien situé au 119, boul. Threshing Mill, Oakville (Ontario) L6H 0V5 (la nouvelle habitation);

  • b) l’appelant, son épouse et Mme Hazel Meryem Bondokji ont pris possession de la nouvelle habitation le 6 août 2020;

  • c) l’appelant a demandé le remboursement pour habitations neuves relatif à l’achat de la nouvelle habitation;

  • d) le ministre a accepté la demande de remboursement de l’appelant relatif à la nouvelle habitation.

[12] Au cours de son contre-interrogatoire, l’appelant a admis que l’habitation avait été mise en vente le 10 février 2018 comme étant une habitation neuve n’ayant jamais été occupée au prix de 880 000 $. L’appelant a expliqué que l’inscription de cette habitation a été retirée le 11 mai 2018 et que l’habitation a été à nouveau mise sur le marché le 22 mai 2018 par une deuxième inscription.

[13] Pour être admissible au remboursement, l’appelant doit satisfaire aux exigences de l’article 254 de la Loi, dont voici le texte :

Remboursement — habitation neuve

(2) Le ministre verse un remboursement à un particulier dans le cas où, à la fois :

a) le constructeur d’un immeuble d’habitation à logement unique ou d’un logement en copropriété en effectue, par vente, la fourniture taxable au profit du particulier;

b) au moment où le particulier devient responsable ou assume une responsabilité aux termes du contrat de vente de l’immeuble ou du logement conclu entre le constructeur et le particulier, celui-ci acquiert l’immeuble ou le logement pour qu’il lui serve de lieu de résidence habituelle ou serve ainsi à son proche;

c) le total des montants – appelé « contrepartie totale » au présent paragraphe – dont chacun représente la contrepartie payable pour la fourniture de l’immeuble ou du logement et pour toute autre fourniture taxable, effectuée au profit du particulier, d’un droit sur l’immeuble ou le logement est inférieur à 450 000 $;

d) le particulier a payé la totalité de la taxe prévue à la section II relativement à la fourniture et à toute autre fourniture, effectuée à son profit, d’un droit sur l’immeuble ou le logement (le total de cette taxe prévue au paragraphe 165(1) étant appelé « total de la taxe payée par le particulier » au présent paragraphe);

e) la propriété de l’immeuble ou du logement est transférée au particulier une fois la construction ou les rénovations majeures de ceux-ci achevées en grande partie;

f) entre le moment où les travaux sont achevés en grande partie et celui où la possession de l’immeuble ou du logement est transférée au particulier en vertu du contrat de vente :

(i) l’immeuble n’a pas été occupé à titre résidentiel ou d’hébergement,

(ii) le logement n’a pas été occupé à titre résidentiel ou d’hébergement, sauf s’il a été occupé à titre résidentiel par le particulier, ou son proche, qui était alors l’acheteur du logement aux termes d’un contrat de vente;

g) selon le cas :

(i) le premier particulier à occuper l’immeuble ou le logement à titre résidentiel, à un moment après que les travaux sont achevés en grande partie, est :

(A) dans le cas de l’immeuble, le particulier ou son proche,

(B) dans le cas du logement, le particulier, ou son proche, qui, à ce moment, en était l’acheteur aux termes d’un contrat de vente,

(ii) le particulier effectue par vente une fourniture exonérée de l’immeuble ou du logement, et la propriété de l’un ou l’autre est transférée à l’acquéreur de cette fourniture avant que l’immeuble ou le logement n’ait été occupé à titre résidentiel ou d’hébergement.

[14] La seule question en litige est de savoir si l’appelant et sa fille ont acheté l’habitation pour qu’elle serve de résidence principale pour l’appelant et sa femme au moment où ceux-ci ont conclu la convention d’achat et de vente avec le constructeur le 21 septembre 2015.

[15] Il incombe à l’appelant de me convaincre selon la prépondérance des probabilités que, le 21 septembre 2015, l’appelant avait l’intention de se servir de l’habitation comme résidence principale pour sa famille.

[16] Comme l’a fait remarquer l’ancien juge en chef Bowman dans la décision Coburn Realty Ltd. c. La Reine, 2006 CCI 245, par. 10, « Les énoncés que fait le contribuable de ses buts et de ses intentions ne sont pas nécessairement et toujours le fondement le plus fiable sur lequel une question de ce genre peut être tranchée. L’utilisation réelle du bien constitue souvent la meilleure preuve du but de l’acquisition. »

[17] Ayant constaté certaines incohérences dans le récit de l’appelant et une certaine incongruité dans la justification de certaines décisions, j’accorde peu de poids à l’intention déclarée de l’appelant et j’estime nécessaire d’explorer les circonstances environnantes et les comportements. Comme l’ancien juge en chef Bowman l’a suggéré, je préfère observer l’utilisation véritable de l’habitation lorsque l’appelant était en mesure d’en prendre possession le 25 janvier 2018. À cette date, je ne pense pas que l’habitation était la résidence principale de la famille.

[18] À mon avis, l’appelant a occupé l’habitation, mais ce n’était pas sa résidence principale. L’appelant n’a fourni aucun élément de preuve nous indiquant la date exacte à laquelle lui et son épouse ont déménagé dans l’habitation, les effets personnels et les meubles qui ont été apportés dans l’habitation, le temps passé à l’habitation, les repas, les allées et venues, le changement d’adresse et le changement de numéro de téléphone.

[19] En outre, l’appelant n’a fourni aucun document pour étayer les modifications de l’état de santé de son épouse qui auraient eu lieu entre 21 septembre 2015 et le 28 janvier 2018 et relever les rendez-vous fréquents de son épouse dans les cliniques ou les hôpitaux de Mississauga.

[20] La description de l’habitation mise en vente le 10 février 2018, à peine 17 jours après la prise de possession, qui précise qu’il s’agit d’une habitation neuve qui n’a jamais été occupée, démontre clairement que l’habitation n’était pas la résidence principale de l’appelant et de son épouse le 28 janvier 2018 et ne l’était donc pas jusqu’au 11 mai 2018, date à laquelle l’inscription a été retirée. La deuxième inscription immobilière, parue le 11 mai 2018, soutient elle aussi une conclusion selon laquelle l’appelant et son épouse ne se sont jamais servis de l’habitation comme résidence principale.

[21] Pour ces motifs, je rejetterais l’appel de l’appelant.

Signé à Montréal (Québec), ce 19e jour de décembre 2022.

« Réal Favreau »

Le juge Favreau


RÉFÉRENCE :

2022 CCI 166

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2020-2148(GST)I

INTITULÉ :

ADNAN AL-BONDOKJI

c. SA MAJESTÉ LE ROI

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 18 août 2022

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Réal Favreau

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 décembre 2022

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Me Azhar Sohail

Avocats de l’intimé :

Me Christopher Bartlett

Me Lalitha Ramachandran

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Me Azhar Sohail

 

Cabinet :

 

Pour l’intimé :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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