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Dossier : 2017-3076(IT)I

ENTRE :

CHRISTOPHER MORRISEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2017-3077(IT)I

ENTRE :

MIRANDA SMOKE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Les appels ont été entendus le 12 juillet 2018 et se sont poursuivis le 24 juin 2019 à Winnipeg (Manitoba)

Devant : L’honorable juge Don R. Sommerfeldt


Comparutions :

Avocats des appelants :

Me Kenneth Young

Avocate de l’intimée :

Me Sandra Hoeppner

 

JUGEMENT

Les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2012 et 2013 sont rejetés sans dépens.

Signé à Edmonton (Alberta), ce 15e jour de janvier 2020.

« Don R. Sommerfeldt »

Le juge Sommerfeldt


Référence : 2020 CCI 5

Date : 20200115

Dossier : 2017-3076(IT)I

ENTRE :

CHRISTOPHER MORRISEAU,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Dossier : 2017-3077(IT)I

ENTRE :

MIRANDA SMOKE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Sommerfeldt

I. INTRODUCTION

[1]  Les présents motifs concernent les appels interjetés par Christopher Morriseau et Miranda Smoke à l’encontre des nouvelles cotisations établies par l’Agence du revenu du Canada (l’Agence), au nom du ministre du Revenu national (le ministre), pour les années d’imposition 2012 et 2013. Pour chacune de ces années, M. Morriseau et Mme Smoke, qui sont inscrits comme Indiens [1] aux fins de la Loi sur les Indiens, [2] avaient affirmé que leur revenu d’emploi était exonéré d’impôt sur le revenu au titre de l’article 87 de la Loi sur les Indiens et de l’alinéa 81(1)a) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la LIR) [3] .

[2]  En 2012 et 2013, M. Morriseau et Mme Smoke étaient employés par Tribal Councils Investment Group of Manitoba Ltd. (TCIG) ou par l’une de ses filiales, Arctic Beverages Ltd. (ABL) [4] . L’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke leur a initialement fourni des feuillets T4 pour ces deux années, lesquels indiquaient que leur revenu d’emploi était admissible à l’exemption d’impôt aux termes de l’article 87 de la Loi sur les Indiens. Le 31 mars 2015, apparemment après des discussions entre l’Agence et les représentants de TCIG, et deux ou trois ans après les années d’imposition en cause, l’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke leur a remis des feuillets T4 modifiés pour les années 2012 et 2013 [5] , lesquels indiquaient que le revenu d’emploi gagné au cours de ces années n’était pas admissible à l’exonération aux termes de l’article 87 de la Loi sur les Indiens.

II. QUESTION EN LITIGE

[3]  La question fondamentale dans les présents appels est de savoir si les revenus gagnés par M. Morriseau et de Mme Smoke en 2012 et 2013 étaient « situés dans une réserve » [6] . La résolution de cette question nécessite l’application du critère des « facteurs de rattachement » énoncé dans l’arrêt Williams [7] et réitéré dans l’arrêt Bastien [8] . Ce critère exige que la Cour entreprenne une analyse en deux volets : premièrement, elle doit déterminer les facteurs pertinents qui pourraient relier le revenu de M. Morriseau et de Mme Smoke à un lieu, et deuxièmement, elle doit procéder à une analyse téléologique de ces facteurs pour déterminer le poids qui doit leur être accordé. L’analyse doit être menée dans le cadre défini dans l’arrêt Kelly [9] , qui résumait les principes fondamentaux émanant de l’arrêt Bastien.

III. EXPOSÉ DES FAITS

A. Appelants

[4]  M. Morriseau est membre de la Première Nation de Peguis. Ses grands-parents ont quitté leur réserve il y a des années [traduction] « pour améliorer le sort de leur famille » [10] . M. Morriseau est né et a grandi à Winnipeg. Il n’a jamais vécu dans une réserve, bien qu’il ait exprimé le désir sincère de vivre dans la réserve de sa Première Nation [11] . Malheureusement, il n’y a pas de possibilités d’emploi dans cette réserve.

[5]  Mme Smoke est membre de la Première Nation Dakota Tipi. Jusqu’à l’âge de trois ans, elle a vécu à Portage La Prairie, plus près de sa communauté des Premières Nations [12] . En 1983, elle a déménagé avec sa mère à Winnipeg, où elle vit depuis.

B. TCIG

[6]  Aucun des actes constitutifs de TCIG n’a été mis en preuve, ni aucun témoignage concernant les détails juridiques entourant sa création. Selon les déclarations annuelles d’information 2012 et 2013 déposées par TCIG en application de la Loi sur les corporations [13] du Manitoba, TCIG a été créée par constitution en société ou par fusion le 27 novembre 1989, sous responsabilité fédérale [14] .

[7]  Jonathan Flett, l’un des administrateurs fondateurs (et maintenant ancien administrateur) de TCIG, a expliqué le but, les objectifs et la structure organisationnelle de TCIG [15] . Il a déclaré que TCIG compte sept actionnaires, qui représentent chacun des conseils tribaux du Manitoba et qui figurent dans la déclaration annuelle d’information de 2012, comme suit :

  • - Dakota Ojibway Investments Ltd.

  • - Interlake Reserves Tribal Council Inc.

  • - Island Lake Tribal Council

  • - Keewatin Tribal Council Inc.

  • - Southeast Resource Development Council Corp.

  • - Swampy Creek Tribal Council Inc. [16]

  • - West Region Investments Limited [17]

[8]  Chacun des sept actionnaires possède 10 000 actions ordinaires de catégorie A de TCIG. M. Flett a déclaré que chaque conseil tribal représente plusieurs Premières Nations. Collectivement, les sept conseils tribaux qui sont actionnaires ou dont les représentants sont actionnaires de TCIG représentent 55 des 63 Premières Nations du Manitoba [18] .

[9]  M. Flett a expliqué que les sept conseils tribaux avaient décidé de former une entité afin d’offrir des possibilités économiques aux populations autochtones, créant ainsi TCIG. Chaque actionnaire a versé 25 000 $ pour constituer l’apport en capital initial de TCIG. Le premier investissement réalisé par TCIG a été l’achat d’ABL. Depuis, TCIG a acquis de nombreuses autres filiales. TCIG et ses filiales s’efforcent d’offrir des possibilités d’emploi aux membres des Premières Nations et de fournir des produits et des services aux populations autochtones, en particulier dans les régions éloignées. Bon nombre des filiales de TCIG ont connu un succès économique. En 2012 et 2013, ABL était l’une des filiales les plus performantes de TCIG et était considérée comme la filiale phare. Le groupe de sociétés TCIG est devenu une source de fierté pour les membres des Premières Nations.

[10]  M. Flett a déclaré que, bien que la croissance ait été lente au début des années 1990, en 2012 et 2013, les filiales de TCIG étaient généralement assez rentables, de sorte qu’elles versaient des dividendes annuels élevés à TCIG, qui les distribuait aux sept conseils tribaux (ou à leurs représentants). M. Flett explique qu’en retour, les conseils tribaux utilisaient les distributions au profit des Premières Nations du Manitoba [19] .

[11]  Robert Magnusson, ancien directeur financier de TCIG, a déclaré que TCIG avait été créée dans le but de favoriser le développement économique des Premières Nations du Manitoba [20] . M. Magnusson a expliqué que, bien que TCIG soit une entité à but non lucratif (ou peut-être sans but lucratif), ses diverses filiales d’exploitation étaient des sociétés à but lucratif [21] . M. Magnusson a indiqué que TCIG gère également une fondation, qui a été enregistrée auprès de l’Agence en tant qu’organisme de bienfaisance [22] . En outre, TCIG a versé des dons d’argent aux Premières Nations pour parrainer des pow-wow ainsi que des tournois de hockey, de base-ball et de golf [23] .

C. ABL

[12]  Le premier investissement de TCIG a été l’acquisition d’ABL, qui était alors une entreprise d’embouteillage exerçant ses activités à Flin Flon [24] . Il semble qu’ABL a ensuite déménagé à Winnipeg. Il y avait peu d’éléments de preuve concernant le siège social ou le bureau enregistré d’ABL et le lieu où ses administrateurs tenaient leurs réunions. M. Morriseau a déclaré que, lorsqu’il était employé par ABL, il travaillait dans un entrepôt situé sur la route Sherwin, à Winnipeg, et que par la suite, ABL a déménagé dans d’autres locaux, qui se trouvaient également sur la route Sherwin. M. Morriseau a déclaré qu’il s’était rendu à plusieurs reprises au siège social d’ABL, qui, selon lui, était situé au 2190, rue Main, bureau 360, Winnipeg (près de l’intersection de Portage et Main) [25] . Cependant, à la lumière de l’ensemble des éléments de preuve, je n’ai pu déterminer clairement si ABL et TCIG avaient un bureau au 2190, rue Main, bureau 360, à Winnipeg.

[13]  En 2012 et 2013, ABL embouteillait et vendait les boissons gazeuses et les jus Pepsico. Elle vendait également des croustilles Frito Lay, du pain, des produits pour le petit déjeuner, de la glace, des biscuits, du bœuf séché et d’autres collations [26] . ABL ne vendait ses produits qu’aux Premières Nations ou à des entités des Premières Nations [27] . Mme Smoke a indiqué qu’ABL avait également mis en place un programme de petits déjeuners, dans le cadre duquel elle envoyait des jus et des produits pour le petit déjeuner aux écoles des Premières Nations dans diverses réserves du nord du Manitoba et dans certaines régions de l’Ontario [28] . Toutefois, M. Magnusson a déclaré que le programme de petits déjeuners a été entrepris par la fondation caritative de TCIG [29] .

[14]  M. Magnusson a également déclaré qu’ABL faisait des dons directement aux communautés des Premières Nations, en particulier selon les instructions ou sur demande de TCIG [30] . Il n’y avait aucun élément de preuve quant aux montants d’argents, aux dates, à la fréquence, à la nature ou aux bénéficiaires précis de ces dons.

D. Employeur

[15]  Comme il a été indiqué précédemment, en 2012 et 2013, l’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke était soit TCIG, soit ABL. Les témoignages oraux et les éléments de preuve documentaires étaient contradictoires et peu concluants.

[16]  Dans leur témoignage, M. Morriseau et Mme Smoke ont déclaré qu’ils travaillaient pour ABL. Par exemple, M. Morriseau a déclaré ceci [traduction] : « J’étais employé par Arctic Beverages, qui était la propriété exclusive de TCIG » [31] . M. Morriseau n’était pas sûr de l’entité qui lui versait effectivement son salaire, d’abord par chèque, puis par dépôt direct sur son compte bancaire. Il a d’abord déclaré que le nom de l’employeur figurant sur ses talons de chèque de paie était « Southeast Tribal Council », et non TCIG [32] . Il a ensuite déclaré que ses chèques de paie étaient émis par [traduction] « un des conseils tribaux » [33] , et a encore déclaré plus tard que, lorsqu’il recevait son salaire par dépôt direct sur son compte bancaire (plutôt que par chèque), les dépôts [traduction] « provenaient d’une entité des Premières Nations » [34] . M. Morriseau a insisté sur le fait que les dépôts directs n’étaient pas effectués par ABL, mais par [traduction] « une entité autochtone », qui aurait pu être TCIG [35] .

[17]  Initialement, Mme Smoke a déclaré qu’elle était employée chez ABL en tant qu’administratrice de secteur [36] . Plus tard, elle a indiqué qu’elle travaillait initialement pour ABL et qu’elle a commencé à travailler pour TCIG juste avant Noël 2011 [37] . Toutefois, au cours du contre-interrogatoire, Mme Smoke a déclaré que toutes ses tâches professionnelles se déroulaient dans les locaux d’ABL, sur la route Sherwin, à Winnipeg, et qu’elle n’avait aucune raison de se rendre dans les bureaux de TCIG à l’intersection de Portage et Main [38] . Cela pourrait suggérer qu’après que Mme Smoke a quitté ABL pour travailler pour TCIG, plutôt que de l’obliger à se rendre dans les bureaux de TCIG à l’intersection de Portage et Main, TCIG a pris des mesures pour qu’elle travaille dans les locaux d’ABL, sur la route Sherwin.

[18]  Il semble que M. Morriseau et Mme Smoke aient pu considérer TCIG et ABL comme une entité mixte, dans un sens non technique.

[19]  Dans son témoignage, M. Magnusson a déclaré qu’il croyait comprendre que l’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke était ABL [39] .

[20]  Les avis d’appel déposés par M. Morriseau et Mme Smoke, respectivement, et les réponses déposées par la Couronne indiquent tous que M. Morriseau et Mme Smoke étaient employés par TCIG. Les feuillets T4 modifiés émis à M. Morriseau et Mme Smoke indiquaient que leur employeur était TCIG.

[21]  J’ai soulevé avec les avocats la question de savoir si je dois tirer une conclusion formelle quant à l’entité qui employait M. Morriseau et Mme Smoke. Aucun des deux avocats n’a semblé se préoccuper de cette question. Par conséquent, je vais trancher ces appels en me fondant sur le fait que l’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke était soit TCIG, soit ABL.

E. Détails sur l’emploi

[22]  M. Morriseau a déclaré qu’en 2012 et 2013, il a travaillé pour ABL à titre d’expéditeur. À ce titre, il était chargé de superviser l’entrepôt d’ABL à Winnipeg. Il était également responsable des nombreuses livraisons aux clients d’ABL qui quittaient quotidiennement l’entrepôt. M. Flett a déclaré qu’ABL distribuait ses produits au Manitoba, dans le nord de la Saskatchewan, dans certaines régions de l’Ontario et dans les Territoires [40] .

[23]  Mme Smoke a témoigné que, lorsqu’elle travaillait pour ABL, elle était administratrice de secteur. À ce titre, ses fonctions consistaient à préparer des rapports sur les ventes et les volumes et à envoyer ces rapports à TCIG. Elle a également participé à l’audit du système d’ABL [41] . Elle exerçait toutes ses fonctions dans les locaux d’ABL situés sur la route Sherwin. Dans l’exercice de ses fonctions, elle n’avait pas à se rendre au bureau de TCIG situé au 2190, rue Main, bureau 360 [42] . Dans le cadre de son travail, Mme Smoke ne s’est rendue dans aucune des communautés du Nord vers lesquelles ABL expédiait ses produits, mais elle a communiqué avec elles par courrier électronique et par téléphone [43] .

[24]  M. Morriseau et Mme Smoke étaient tous deux payés par leur employeur à Winnipeg [44] .

IV. DISCUSSION

A. Dispositions législatives

[25]  La partie pertinente du paragraphe 81(1) de la LIR est rédigée comme suit :

81 (1)  Ne sont pas inclus dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition :

a)  une somme exonérée de l’impôt sur le revenu par toute autre loi fédérale [...]

La loi fédérale pertinente en l’espèce est l’article 87 de la Loi sur les Indiens, dont la partie applicable, pendant la période pertinente, était rédigée comme suit :

87 (1)  Nonobstant toute autre loi fédérale ou provinciale, mais sous réserve de l’article 83 et de l’article 5 de la Loi sur la gestion financière des premières nations [qui n’est pas pertinente en l’espèce], les biens suivants sont exemptés de taxation :

a)  [s.o.] et

b)  les biens meubles d’un Indien ou d’une bande situés sur une réserve.

2)  Nul Indien ou bande n’est assujetti à une taxation concernant la propriété, l’occupation, la possession ou l’usage d’un bien mentionné aux alinéas (1)a) ou b) ni autrement soumis à une taxation quant à l’un de ces biens.

B. Approche analytique

[26]  Il est désormais bien établi que les revenus constituent des biens meubles au sens de l’article 87 de la Loi sur les Indiens et que, même si les revenus sont intangibles, il convient de leur attribuer un lieu fictif afin de déterminer si l’exonération fiscale prévue à l’article 87 s’applique à ces revenus [45] . Pour déterminer l’emplacement d’un bien incorporel, un tribunal doit appliquer l’approche en deux volets fondée sur les facteurs de rattachement établie dans l’arrêt Williams, qui se décrit comme suit :

Il faut d’abord identifier les divers facteurs de rattachement qui peuvent être pertinents. On doit ensuite analyser ces facteurs pour déterminer le poids à leur accorder afin d’identifier l’emplacement du bien, en tenant compte de trois choses : (1) l’objet de l’exemption prévue dans la Loi sur les Indiens, (2) le genre de bien en cause et (3) la nature de l’imposition de ce bien. Il s’agit donc de déterminer, relativement à chaque facteur de rattachement, le poids qui devrait lui être accordé pour décider si l’imposition en cause de ce type de bien représenterait une atteinte aux droits de l’Indien à titre d’Indien sur une réserve [46] .

Comme l’a réaffirmé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Bastien, le critère en deux volets se décrit comme suit :

D’abord, on relève les facteurs potentiellement pertinents qui tendent à rattacher le bien à un emplacement [...] [L]a pertinence des facteurs de rattachement potentiellement pertinents varie selon le genre de bien et la nature de l’imposition [...] Pour tenir compte de cette réalité et faire en sorte que l’analyse serve à déterminer l’emplacement du bien pour l’application de la Loi sur les Indiens, le tribunal procède, à la deuxième étape, à une analyse téléologique de ces facteurs dans le but de déterminer quel poids accorder à chacun. Dans le cadre de cette analyse, il prend en considération l’objet de l’exemption prévue par la Loi sur les Indiens, le genre de bien en cause et la nature de l’imposition du bien [...] [47]

(1) Premier volet – Détermination des facteurs

[27]  Selon les arrêts Williams et Bastien, la première étape de l’approche en deux volets consiste à déterminer les facteurs potentiellement pertinents permettant de relier les revenus de M. Morriseau et de Mme Smoke à un lieu. Dans le contexte des revenus d’emploi, les facteurs de rattachement suivants ont été cernés, dans l’arrêt Desnomie, comme étant potentiellement pertinents pour déterminer si ces revenus sont situés dans une réserve :

  • a) la résidence de l’employeur;

  • b) la résidence de l’employé;

  • c) le lieu où le travail a été accompli;

  • d) le lieu où l’employé était payé;

  • e) la nature des services fournis ou les circonstances particulières dans lesquelles ils ont été fournis [48] .

Les mêmes facteurs de rattachement concernant les revenus d’emploi ont été déterminés dans d’autres affaires [49] .

[28]  Outre les cinq facteurs de rattachement potentiels énumérés ci-dessus, un autre facteur pourrait mériter d’être pris en considération dans les présents appels. Dans l’arrêt Bastien, le juge Cromwell a expliqué que « [l]es observations formulées dans Mitchell et Williams relativement à la protection des biens que les Indiens possèdent en tant qu’Indiens doivent être plutôt interprétées en fonction de la nécessité d’établir un lien entre le bien et la réserve de telle sorte que l’on puisse affirmer que le bien est situé sur la réserve pour l’application de la Loi sur les Indiens » [50] . Le juge Cromwell a ensuite fait remarquer que « la relation entre le bien et la vie sur la réserve [peut], dans certains cas, être un facteur qui tend à renforcer ou à affaiblir le lien entre le bien et la réserve […] » [51] .

[29]  La même remarque a été faite par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kelly [52] . Lors de l’audience en première instance de l’appel interjeté par M. Kelly à l’encontre de sa nouvelle cotisation, son avocat a soutenu que « [p]ar ses interventions, M. Kelly “préservait l’intégrité traditionnelle, sociale et culturelle de la vie des réserves” et “défendait et enrichissait le mode de vie traditionnel dans les réserves”, ce qui [constituait] un avantage “pour les collectivités autochtones tout entières” », ce qui signifie que l’article 87 de la Loi sur les Indiens s’applique [53] . Le juge de première instance, reconnaissant qu’il s’agissait d’un facteur reliant l’entreprise de M. Kelly aux réserves, a déclaré ceci : « En outre, les conseils que M. Kelly, par son entreprise, dispense aux réserves et à ceux qui y résident sont inestimables et répondent au critère de la préservation du mode de vie traditionnel des collectivités indiennes; c’est là un rattachement que l’on ne saurait surestimer. » [54] Dans l’arrêt Robertson, la Cour d’appel fédérale a souligné que « le fait que la pêche commerciale est exercée depuis longtemps dans les lacs situés près de la réserve par les membres de la Première Nation et leurs ancêtres, et qu’elle continue à revêtir de l’importance pour les tissus économique, social et culturel de la réserve, est pertinent pour décider s’il existe un lien suffisamment étroit entre la réserve et la source du revenu des appelants. » [55] Par conséquent, ces « considérations renforcent le lien entre la réserve et le revenu d’entreprise de pêche des appelants, et tendent donc à situer le revenu sur la réserve. » [56]

[30]  Par conséquent, en plus des facteurs de rattachement habituels relatifs au revenu d’emploi, les observations faites par l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke suggèrent un facteur supplémentaire à prendre en compte dans ces appels, soit le rapport, le cas échéant, entre le revenu de M. Morriseau et de Mme Smoke et la préservation du mode de vie traditionnel des autochtones, y compris les tissus économiques, sociaux et culturels des réserves. Toutefois, comme l’a expliqué la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kelly, l’accent doit être mis sur la question de savoir s’il existe « un lien entre le bien et la réserve, de telle sorte que l’on puisse affirmer que le bien est situé sur la réserve pour l’application de la Loi sur les Indiens », et non celle de savoir « si le bien fait partie intégrante de la vie sur la réserve ou de la préservation du mode de vie traditionnel des Indiens » [57] . En d’autres termes, la relation entre le revenu particulier et la vie dans une réserve est un facteur de renforcement ou d’affaiblissement, mais ce n’est pas un facteur de rattachement réel, ni le point central de l’analyse [58] .

[31]  Je vais maintenant examiner les facteurs de rattachement potentiels et pertinents à la lumière des faits des présents appels.

a)  Résidence de l’employeur

[32]  Le premier facteur de rattachement cerné au paragraphe 27, ci-dessus, est la résidence de l’employeur. Comme on ne sait pas avec certitude si M. Morriseau et Mme Smoke étaient employés par TCIG ou ABL, je vais tenir compte de la résidence des deux sociétés. Aux fins de cette analyse, j’appliquerai les mêmes principes (à l’exception du territoire de constitution) qui sont utilisés pour déterminer si une société est résidente du Canada ou d’un autre pays [59] .

(i) TCIG

[33]  Je commencerai par examiner le lieu où se trouvait le centre de gestion et de contrôle de TCIG, ce qui est généralement considéré comme le lieu où les administrateurs de TCIG tenaient leurs réunions. Au cours de son interrogatoire principal, M. Flett a témoigné que le conseil d’administration de TCIG s’était réuni à plusieurs reprises à la Première Nation de Brokenhead ainsi qu’à la Première Nation de Buffalo Point. Sinon, selon le territoire du conseil tribal hôte, les administrateurs se réunissaient dans la Nation des Cris des marais ou dans la Nation des Cris d’Opaskwayak (appelée familièrement « NCO »), qui était une communauté des Premières Nations [60] . M. Flett n’a pas été contre-interrogé sur le lieu des réunions des administrateurs. Il n’y avait aucun autre élément de preuve concernant le lieu où les administrateurs de TCIG tenaient leurs réunions. Par conséquent, aux fins des présents appels, j’ai conclu que les administrateurs de TCIG ont tenu leurs réunions dans différentes réserves du Manitoba.

[34]  Pour déterminer le lieu de résidence de TCIG, l’emplacement de son siège social peut être pertinent, bien que non déterminant [61] . Les éléments de preuve concernant l’emplacement du siège social de TCIG ne sont pas concluants. M. Magnusson a témoigné que, pendant la période où il était employé par TCIG, le siège social de TCIG se trouvait d’abord dans la NCO, puis, à une époque dont il ne se souvient pas, il a été déplacé dans la Première Nation de Brokenhead [62] . M. Flett a témoigné que le siège social de TCIG se trouvait à la NCO et qu’au mieux de sa connaissance et de ses souvenirs, il était toujours là et n’avait pas été déplacé [63] . Mme Smoke a déclaré qu’à sa connaissance, lorsqu’elle a commencé à travailler, en 2011, le siège social de TCIG [traduction] « se trouvait dans la Première Nation de Brokenhead, je crois, ou la Première Nation d’Opaskwayak » [64] .

[35]  Le seul élément de preuve documentaire concernant l’emplacement du siège social de TCIG est un extrait du rapport annuel de TCIG publié en septembre 2004 [65] . Ce document indiquait que le siège social de TCIG se trouvait dans la NCO.

[36]  D’après la preuve à ma disposition, je conclus qu’en 2012 et 2013, le siège social de TCIG était situé dans la NCO pendant ces deux années, ou qu’il était d’abord situé dans la NCO, puis dans la Première Nation de Brokenhead. Je crois comprendre que le siège social de TCIG était situé sur des terres qui constituaient des réserves aux fins de la Loi sur les Indiens [66] .

[37]  En plus d’avoir un siège social dans la NCO et probablement dans la Première Nation de Brokenhead par la suite, comme cela a été mentionné ci-dessus, TCIG avait également un bureau dans le centre-ville de Winnipeg. Ce bureau a été désigné, au cours de l’audience, comme le siège social ou le bureau principal de la société. Il était situé au 2190, rue Main, bureau 360. Une dizaine d’employés, dont des cadres supérieurs, travaillaient dans ce bureau. Cependant, les cadres supérieurs qui étaient des « négociateurs » étaient souvent en dehors du bureau, « dans les Premières Nations » ou ailleurs, pour négocier des contrats [67] . En plus de son siège social et de son principal bureau, TCIG disposait de plusieurs autres bureaux, [68] qui n’ont pas été décrits en détail.

[38]  Bien qu’il ne soit pas déterminant, le bureau enregistré d’une société peut être un facteur pertinent à prendre en compte pour déterminer la résidence de la société [69] . Le bureau enregistré de TCIG était situé au 2190, rue Main, bureau 360, Winnipeg, soit au même endroit que le bureau principal de TCIG.

[39]  Bien qu’elle ne soit pas déterminante, l’adresse de TCIG indiquée sur les feuillets T4 modifiés émis à M. Morriseau et Mme Smoke était 2190, rue Main, bureau 360, Winnipeg (c.-à-d. l’adresse du bureau principal et du bureau enregistré de TCIG) [70] .

[40]  En résumé, sur la base des éléments de preuve, il est plus probable qu’improbable qu’en 2012 et 2013, le centre de gestion et de contrôle de TCIG était situé dans une réserve. Il semble également que le siège social de TCIG était situé dans une réserve, tandis que son bureau principal et son bureau enregistré étaient situés dans le centre-ville de Winnipeg. En prenant en considération et en appréciant tous les éléments de preuve dans leur ensemble, je suis d’avis qu’en 2012 et 2013, TCIG résidait dans une réserve. Cependant, j’ai l’impression que TCIG était autant liée à Winnipeg qu’elle l’était aux réserves où ses directeurs tenaient leurs réunions.

(ii) ABL

[41]  Il n’y avait aucun élément de preuve concernant l’identité des administrateurs d’ABL ou le lieu où ils ont tenu leurs réunions ou pris leurs décisions concernant ABL. De même, il y avait très peu d’éléments de preuve concernant l’emplacement des bureaux d’ABL, outre une indication qu’ABL disposait d’un entrepôt et d’un bureau administratif sur la route Sherwin, à Winnipeg, ainsi que d’un bureau dans la NCO [71] , et peut-être un bureau au 2190, rue Main, bureau 360, à Winnipeg. Compte tenu du peu d’éléments de preuve, je ne suis pas en mesure de conclure qu’en 2012 et 2013, le centre de gestion et de contrôle d’ABL était situé dans une réserve. Toutefois, comme ABL aurait pu être structurée d’une manière semblable à TCIG, il est possible qu’ABL ait été résidente d’une réserve.

[42]  Pour résumer, si M. Morriseau et Mme Smoke étaient employés par TCIG, leur employeur était résident dans une réserve. S’ils étaient employés par ABL, leur employeur aurait pu résider dans une réserve, mais il n’y a pas de preuve concluante confirmant cette résidence.

b)  Résidence de l’employé

[43]  Étant né et ayant grandi à Winnipeg, et n’ayant jamais vécu dans une réserve, aux fins de l’application du critère des facteurs de rattachement, M. Morriseau était résident de Winnipeg, et non d’une réserve.

[44]  De même, ayant vécu à Portage La Prairie jusqu’à l’âge de trois ans et, par la suite, ayant vécu de façon continue à Winnipeg, aux fins de l’application du critère des facteurs de rattachement, Mme Smoke était résidente de Winnipeg, et non d’une réserve [72] .

c)  Lieu de travail

[45]  Les éléments de preuve démontrent clairement que M. Morriseau et Mme Smoke ont tous deux exercé la totalité des fonctions liées à leur emploi à Winnipeg. Ils ne se sont rendus dans aucune réserve, même pour une courte période, dans le cadre de leurs activités professionnelles. Il n’y avait aucun élément de preuve quant aux distances entre Winnipeg et les réserves où les administrateurs de TCIG se réunissaient, ou entre Winnipeg et les lieux où les produits d’ABL étaient expédiés [73] .


d)  Lieu du paiement

[46]  M. Morriseau a déclaré que son salaire lui était versé par [traduction] « une entité des Premières Nations » [74] ou [traduction] « une entité autochtone », [75] et que le payeur aurait pu être le Southeast Tribal Council, [76] [traduction] « l’un des Conseils tribaux » [77] ou peut-être TCIG [78] . Pendant la période où M. Morriseau a été payé par chèque, il n’y avait aucun élément de preuve indiquant que ces chèques avaient été tirés sur une banque située dans une réserve, à Winnipeg ou ailleurs. Lorsque M. Morriseau a commencé à être payé par dépôt direct sur son compte bancaire ou son compte de coopérative de crédit, ce compte était situé dans une institution financière à Winnipeg. Il n’y avait aucun élément de preuve concernant l’endroit où Mme Smoke a reçu son salaire au cours des années 2012 et 2013. Toutefois, comme cela a été mentionné ci-dessus, l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke a reconnu qu’ils ont tous deux été payés à Winnipeg [79] .

e)  Nature des services ou circonstances particulières

[47]  Discutant de la nature de l’emploi d’un contribuable et des circonstances qui l’entourent afin de déterminer si le revenu d’emploi était situé dans une réserve, le juge Linden a déclaré ceci :

À mon sens, quand le bien meuble en cause est un revenu d’emploi, il est logique de tenir compte du but principal et des fonctions de l’emploi sous-jacent dans le but précis de déterminer si l’emploi était exercé au profit des Indiens sur des réserves [80] .

Dans l’arrêt Bell, après avoir cité l’extrait précédent du juge Linden, le juge Létourneau a fait la déclaration suivante :

J’aimerais souligner au départ que l’idée de bien-être invoquée par les appelants n’est pas un facteur de rattachement indépendant et autonome, mais qu’il s’agit plutôt d’une norme permettant d’apprécier le facteur relatif à la « nature de l’emploi » [81] .

[48]  En ce qui concerne la nature de l’emploi de M. Morriseau, il supervisait l’entrepôt d’ABL à Winnipeg et était responsable de la livraison des produits d’ABL à ses clients. Ces produits étaient principalement des boissons non alcoolisées, des jus, des croustilles, du pain, des produits pour le petit déjeuner, de la crème glacée, des biscuits, du bœuf séché et d’autres collations. Les services de Mme Smoke concernaient la communication de renseignements relatifs à la vente et à la distribution de ces produits [82] . Dans les présents appels, outre le programme de petit déjeuner (qui aurait pu être entrepris par une fondation caritative de TCIG), il n’y avait pas de circonstances particulières comme dans l’affaire Folster, qui concernait des soins de santé en milieu hospitalier [83] . Les services fournis par M. Morriseau et Mme Smoke n’avaient aucune similitude avec les services de conseil fournis par M. Kelly [84] . Toutefois, on peut tracer un certain parallèle entre ces appels et les circonstances de l’arrêt Robertson, [85] dans la mesure où M. Robertson travaillait comme pêcheur commercial, et était donc impliqué dans une chaîne d’approvisionnement de produits alimentaires. M. Morriseau et Mme Smoke étaient également impliqués dans une chaîne d’approvisionnement de produits alimentaires.

f)  Considérations traditionnelles, économiques, sociales et culturelles

[49]  Les avis d’appel déposés par M. Morriseau et Mme Smoke étaient sensiblement les mêmes. Chaque avis d’appel faisait référence à TCIG en tant qu’employeur, mais indiquait que M. Morriseau et Mme Smoke [traduction] « travaillaient pour une société qui était détenue et contrôlée par l’employeur ». Les avis d’appel énumèrent divers facteurs qui, selon M. Morriseau et Mme Smoke, relient leurs revenus à une réserve. Bien que cela ne soit pas très clair, il semble que la réserve en question était la réserve appelée Nation des Cris d’Opaskwayak, ou NCO. Parmi les facteurs énumérés dans chaque avis d’appel, on retrouve les suivants :

traduction]

1.  L’employeur appartenait à sept conseils tribaux qui, à leur tour, étaient détenus et contrôlés par les Premières Nations. Ces Premières Nations représentaient 92 000 membres qui, pour la plupart, résidaient dans leur Première Nation d’origine ou y étaient liés par des liens familiaux [...]

5.  L’employeur se consacrait au développement socio-économique de ses Conseils tribaux membres et de leurs Premières Nations membres ainsi que de leurs membres [...]

9.  L’employé devait atteindre les objectifs de l’employeur énoncés au paragraphe 5.

[50]  Dans les observations finales présentées par l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke, il est dit ce qui suit au sujet du facteur de rattachement de la « résidence de l’employeur » :

[TRADUCTION] :

Dans les présents appels, la résidence de l’employeur devrait être analysée comme un facteur de rattachement afin d’établir l’étendue des activités de l’employeur dans les réserves, en particulier si des avantages ont été accordés aux réserves du fait de la présence de l’employeur dans celles-ci [...] TCIG a été créé pour amorcer le développement socio-économique des Premières Nations du Manitoba [...] par sept conseils tribaux afin d’offrir des avantages socio-économiques aux Premières Nations membres de ces conseils tribaux... Elle a fourni des avantages financiers aux Premières Nations membres [...] L’employeur a créé des emplois pour les membres des Premières Nations [...] Par conséquent, il existe des éléments de preuve importants pour appuyer la présence de l’employeur dans les réserves et le fait qu’il a fourni des avantages socio-économiques importants [...]

Le témoignage de Jonathan Flett [...] concernant la présence corporative de TCIG et de ses filiales a fait ressortir la pertinence de la présence de l’employeur dans les réserves qu’il représentait et qui en était propriétaire :

«  Lorsque nous sommes unis, notre succès devient votre succès. Chaque dollar dépensé dans ces entreprises est recyclé par l’intermédiaire d’entreprises des Premières Nations qui contribuent à renforcer l’économie globale des Premières Nations [...] parce qu’au final, ce dollar vous revient ». [86]

[51]  Plus tard dans son mémoire de clôture, abordant la nature des services rendus et les circonstances particulières dans lesquelles ils ont été rendus, l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke a déclaré ceci :

[traduction]

Les appelants travaillaient dans une filiale en propriété exclusive de TCIG. L’employeur, TCIG [,] [...] consistait en une équipe formée des appelants, de tous les administrateurs de TCIG, de tous les employés de leurs filiales en propriété exclusive, y compris Arctic Beverages Ltd, travaillant à améliorer la situation socio-économique des Premières Nations et des peuples des Premières Nations. TCIG a été créée et est détenue et gérée par les membres des Premières Nations. Son siège social était situé dans une réserve. Elle employait principalement des membres des Premières Nations, y compris les appelants, et son conseil d’administration était composé de membres des Premières Nations qui se réunissaient de temps à autre dans des réserves. Le revenu d’emploi des employés de TCIG, y compris celui des appelants, était lié à une réserve et était donc situé dans celle-ci [87] [...] [Les caractères gras dans l’original, qui mettaient en évidence la majeure partie de la citation ci-dessus, n’ont pas été reproduits ici].]

[52]  Après que l’avocate de la Couronne eut présenté ses observations écrites, l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke, dans ses observations en contre-preuve, a fait la déclaration suivante, en soulignant l’importance, à son avis, des considérations économiques et sociales :

[traduction]

En l’espèce, le siège social de TCIG se trouvait dans une réserve, elle employait principalement des membres des Premières Nations, le directeur général et le directeur financier étaient des membres des Premières Nations, et tous les membres du conseil d’administration étaient des membres des Premières Nations, sauf un. Toute l’activité économique et corporative de TCIG confirme sa présence dans les réserves pour le service desquelles elle a été créée. Selon les appelants, ce facteur de rattachement aux réserves devrait se voir accorder un poids déterminant relativement à l’emplacement des revenus. Il est raisonnable de conclure, compte tenu des faits susmentionnés, que tous les employés de TCIG qui sont membres des Premières Nations, quel que soit leur lieu de résidence ou de travail, ne devraient pas être assujettis à l’impôt sur le revenu [88] .

[53]  La déclaration ci-dessus semble suggérer que M. Morriseau et Mme Smoke sont d’avis que leur revenu était situé non pas dans une réserve particulière, mais plutôt dans toutes les réserves ayant un lien avec TCIG. Ils semblent également suggérer que leur position s’applique non seulement à eux-mêmes, mais aussi à tous les employés autochtones de TCIG.

[54]  Dans chacune des réponses déposées par la Couronne concernant les deux appels, le texte qui suit figure comme l’une des hypothèses de fait formulées par le ministre dans le contexte de ce facteur particulier :

[traduction]

Pour déterminer l’obligation fiscale de l’appelant pour les années d’imposition, le ministre s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes : [...]

h)  les fonctions exercées par l’appelant n’étaient pas liées à des activités non commerciales de l’employeur exercées exclusivement au profit d’Indiens qui vivent pour la plupart dans des réserves [...] [89]

[55]  Dans ses observations écrites, l’avocate de la Couronne a fait les déclarations suivantes, dans le contexte du facteur de rattachement de la « nature des services rendus ou des circonstances particulières », bien qu’elles soient également pertinentes en l’espèce :

[traduction]

Comme il a été souligné dans l’arrêt Bastien et dans d’autres décisions, il doit y avoir un lien avec un lieu physique, avec une réserve, et non pas simplement avec les membres des Premières Nations, car cela ne répond pas à l’objet et à l’intention de l’article 87 de la Loi sur les Indiens [...]

Comme l’ont confirmé à maintes reprises les arrêts Bastien, Williams et Mitchell c. Bande indienne Peguis, l’exonération prévue à l’article 87 n’a pas pour objet de conférer un avantage économique général ou d’améliorer la situation socio-économique des Autochtones en général. L’objectif est de protéger les biens personnels situés dans la réserve [90] . [Souligné dans l’original, numéro de note de bas de page omis.]

[56]  Comme il est mentionné ci-dessus, la relation entre le revenu d’un contribuable et la vie dans une réserve (c’est-à-dire diverses considérations traditionnelles, économiques, sociales et culturelles) peut, dans certains cas, être un facteur tendant à renforcer ou à affaiblir le lien entre le revenu et la réserve [91] . Ce lien et ces considérations ne constituent pas un facteur de rattachement distinct et autonome entre le revenu d’emploi et une réserve. Au contraire, ils renforcent ou affaiblissent un ou plusieurs des facteurs de rattachement reconnus [92] .

(2) Deuxième volet – Analyse des facteurs

[57]  Après avoir cerné les facteurs de rattachement potentiellement pertinents, l’étape suivante consiste à analyser ces facteurs pour déterminer le poids qui doit leur être accordé dans la détermination du lieu des salaires respectifs de M. Morriseau et de Mme Smoke [93] .

a)  Trois éléments

[58]  Dans l’analyse des facteurs de rattachement, la Cour doit tenir compte de trois [94] éléments, cités dans l’arrêt Kelly, à savoir l’objet de l’exonération prévue par la Loi sur les Indiens, le type de propriété et la nature de l’imposition du bien [95] . La raison de cette approche est que « la pertinence des facteurs de rattachement potentiellement pertinents varie selon le genre de bien et la nature de l’imposition » [96] . Pour déterminer le poids à accorder à chaque facteur de rattachement, à la lumière des trois facteurs énumérés ci-dessus, le juge Gonthier, dans l’arrêt Williams, a déclaré ceci :

Il s’agit donc de déterminer, relativement à chaque facteur de rattachement, le poids qui devrait lui être accordé pour décider si l’imposition en cause de ce type de bien représenterait une atteinte aux droits de l’Indien à titre d’Indien sur une réserve [97] .


(i) Objet de l’exonération

[59]  Mon examen de l’objet l’exonération prévue à l’article 87 est guidé par le résumé de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kelly des principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Bastien. Plutôt que de répéter tous les points soulevés dans les arrêts Williams, Bastien et Kelly concernant l’objet de l’exonération prévue à l’article 87, je renvoie le lecteur au paragraphe 42 de l’arrêt Kelly. Je note également le résumé concis de l’objet de l’exonération formulé par le juge V. Miller dans l’arrêt Baldwin :

L’exemption vise à préserver les droits des Indiens sur leurs terres réservées et à assurer que la capacité des gouvernements d’imposer des taxes ne porte pas atteinte à l’utilisation de leurs biens situés dans leurs terres réservées [...] [98]

[60]  L’extrait suivant de l’arrêt Kelly est également utile, car il aide à comprendre l’objet qui sous-tend l’article 87, comme le réaffirme et, dans une certaine mesure, le reformule la Cour suprême dans l’arrêt Bastien :

L’article 87 « empêch[e] qu’un palier de gouvernement, par l’imposition de taxes, puisse porter atteinte à l’intégrité des bénéfices accordés par le palier de gouvernement responsable du contrôle des affaires indiennes ». La Couronne doit « protéger les Indiens de tous les efforts entrepris par des non-Indiens pour les déposséder des biens qu’ils possèdent en tant qu’Indiens ». « L’Indien détient[-il] les biens en question en vertu des droits qu’il possède à titre d’Indien sur la réserve »? Le but est de « protéger des ingérences et des entraves de la société en général les droits de propriété des Indiens sur leurs terres réservées pour veiller à ce que ceux-ci ne soient pas dépouillés de leurs droits » [99] .

[61]  En ce qui concerne la signification de l’expression « des biens qu’ils possèdent en tant qu’Indiens », le commentaire suivant de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Shilling fournit des indications supplémentaires :

Depuis [1763], la Couronne a toujours reconnu qu’elle est tenue par l’honneur de protéger les Indiens de tous les efforts entrepris par des non-Indiens pour les déposséder des biens qu’ils possèdent en tant qu’Indiens, c’est-à-dire leur territoire et les chatels qui y sont situés [100] . [Entre crochets dans l’original.]

[62]  Je note également que la Cour d’appel fédérale a indiqué, dans l’arrêt Kelly, que l’article 87 vise à déterminer si les biens meubles (dans ce cas, le revenu d’emploi) d’un Autochtone sont situés sur une réserve [101] . L’accent est mis sur la question de savoir s’il existe un lien entre le revenu d’emploi et la réserve, de sorte que l’on puisse dire que le revenu est situé à cet endroit, et non sur la question de savoir si le revenu d’emploi fait partie intégrante de la vie sur la réserve ou de la préservation du mode de vie traditionnel des Indiens [102] .

[63]  Je suis guidé plus particulièrement par le principe sous-jacent énoncé au paragraphe 47 de l’arrêt Kelly, dont on peut tirer une analogie aux fins des présents appels :

Selon l’arrêt Bastien, l’accent mis sur le caractère « commercial » des dépôts à terme a induit en erreur les cours d’instance inférieure. C’est ainsi qu’elles ont été amenées à centrer leur analyse sur les activités génératrices de revenu de la caisse qui a émis le certificat de dépôt à terme, plutôt que sur les activités génératrices de revenu de M. Bastien [...] Selon l’arrêt Bastien, il convenait de mettre l’accent sur les activités de placement de M. Bastien et non sur l’institution financière débitrice et les activités auxquelles elle s’était livrée en tant que participante aux marchés ordinaires plus vastes [103] .

[64]  Il est important de rappeler ici que nous nous efforçons de déterminer l’emplacement du revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke, et non l’emplacement du revenu de TCIG ou d’ABL. Si le revenu de TCIG ou d’ABL était l’objet des présents appels, il serait possible d’accorder plus de poids aux activités de TCIG ou d’ABL qui ont procuré des avantages aux Premières Nations ou aux réserves, comme l’expédition de boissons et de certains produits alimentaires à ces communautés, ou peut-être le programme de petits déjeuners dans les écoles des Premières Nations du Nord (bien que ce programme ait pu être entrepris par la fondation caritative de TCIG).

(ii) Types de biens

[65]  Aux fins de l’article 87 de la Loi sur les Indiens, les biens qui font l’objet des présents appels sont des revenus, et plus précisément des revenus d’emploi.

(iii) Nature de l’imposition

[66]  La nature de l’imposition est celle de l’impôt sur le revenu aux termes de la LIR. À cet égard, les articles 5 et 6 de la LIR sont particulièrement pertinents.

b)  Pertinence et poids des facteurs

[67]  Tenant compte des trois considérations énoncées ci-dessus, je vais maintenant déterminer la pertinence et le poids à accorder aux facteurs de rattachement qui sont généralement pertinents dans le contexte des revenus de l’emploi.

(i) Résidence de l’employeur

[68]  Il y avait suffisamment d’éléments de preuve pour établir que TCIG résidait dans une réserve, ou peut-être deux ou plusieurs réserves, mais aucun élément de preuve n’étayait la résidence d’ABL. Par conséquent, si ABL était l’employeur de M. Morriseau et de Mme Smoke, le facteur de rattachement de la « résidence de l’employeur » ne leur est d’aucune utilité.

[69]  Bien que le critère de la « résidence du débiteur » (initialement élaboré dans un contexte de conflit de lois) ne doive plus être utilisé dans l’analyse de l’article 87, la résidence de l’employeur peut, selon les circonstances, être un facteur important [104] . Toutefois, il n’y a pas lieu d’accorder beaucoup de poids à la résidence de l’employeur à moins « d’une preuve au sujet de l’importance des activités de l’employeur dans la réserve, ou d’un bénéfice pour la réserve du fait de la présence de l’employeur » [105] .

[70]  L’importance d’un employeur offrant un avantage à une réserve a été abordée dans l’arrêt Monias, où l’employeur était l’Agence Awasis du nord du Manitoba. Cette agence avait été établie conformément à une entente entre les gouvernements du Canada et du Manitoba et une organisation représentant les chefs autochtones du Manitoba, grâce au financement du gouvernement fédéral, pour fournir des services sociaux aux enfants et aux familles dans les réserves du Nord du Manitoba. En analysant le poids à accorder à l’emplacement et à la nature de l’employeur (comme l’un des facteurs de rattachement), le juge Evans a déclaré ceci :

Dans le cadre de l’affaire présente, Awasis doit être considérée comme liée de très près aux réserves du fait de l’identité de ses membres et administrateurs et de leur résidence, des motifs qui ont mené à sa création, de son financement, de son statut d’organisme prévu par la loi, de ses objectifs et de la nature des services qu’elle fournit. Toutefois, le fait qu’Awasis ne conduise pas ses affaires dans une réserve et, semble-t-il, n’offre pas d’emploi dans les réserves, indique que son emplacement est hors réserve, ce qui vient affaiblir le lien entre l’employeur et les réserves aux fins de déterminer le situs du revenu d’emploi de l’intimé en vertu de l’alinéa 87(1)b) [106] .

[71]  Dans les présents appels, bien que les administrateurs de TCIG se soient réunis dans plusieurs réserves et que le siège social de TCIG se trouve dans une réserve (ou peut-être deux réserves), il n’y avait aucun élément de preuve selon lequel TCIG avait entrepris des activités commerciales ou créé des possibilités d’emploi dans les réserves. Si l’une des raisons de la création de TCIG était d’offrir des possibilités économiques aux populations autochtones, il semble, compte tenu des éléments de preuves que la plupart des possibilités d’emploi créées par TCIG, en lien avec ABL, se trouvaient à Winnipeg, et non dans une réserve.

[72]  Rien ne prouve qu’ABL était présente dans une réserve, outre une brève référence à un bureau dans la NCO, lequel a peut-être servi aux fins de recrutement [107] , ni qu’un avantage a été tiré de la présence de TCIG ou d’ABL dans une réserve. Comme il a été mentionné ci-dessus, ABL et les autres filiales de TCIG ont versé des dividendes annuels à TCIG, qui a distribué ces dividendes aux sept conseils tribaux (ou à leurs représentants) qui étaient les actionnaires de TCIG. Les conseils tribaux ont ensuite utilisé ces dividendes au profit des Premières Nations du Manitoba. Toutefois, cet avantage économique est né du succès économique de TCIG et de ses filiales dans le cadre de leurs activités commerciales, et non de la présence de TCIG ou de ses filiales dans les réserves. En outre, rien n’indique que les activités commerciales de TCIG ou d’ABL ont été menées dans une réserve.

[73]  Comme il est mentionné ci-dessus, ABL a versé des dons aux communautés des Premières Nations, mais aucun autre élément de preuve n’a été fourni concernant ces dons [108] .

[74]  ABL distribuait ses produits au Manitoba, dans le nord de la Saskatchewan, dans certaines régions de l’Ontario et dans les Territoires. M. Morriseau a tenu pour acquis que les produits étaient distribués à des magasins généraux des communautés du nord [109] ; bien que cela puisse constituer une hypothèse prudente, aucun élément de preuve précis n’a permis d’établir un lien entre les produits distribués et les réserves.

[75]  Étant donné le manque d’éléments de preuve de l’étendue des activités de TCIG et d’ABL dans les réserves ou d’un bénéfice pour une réserve découlant de la présence de TCIG ou d’ABL, je ne suis pas enclin à accorder beaucoup de poids à ce facteur de rattachement. Bien que la résidence de TCIG dans une réserve et la résidence éventuelle d’ABL dans une réserve soient des facteurs qui tendent permettre d’établir un lien entre le revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke entre cette réserve, pour les raisons susmentionnées, il ne s’agit pas d’un lien particulièrement solide.

(ii) Résidence de l’employé

[76]  Concernant le facteur de rattachement de la « résidence de l’employé », le juge Evans a déclaré ce qui suit dans l’arrêt Monias :

58.  Étant donné que la politique qui sous-tend l’article 87 vise à protéger les réserves en tant qu’entités économiques au bénéfice des membres de la bande qui y résident, la résidence des employés peut être un facteur significatif lorsqu’il s’agit de déterminer le situs du revenu d’emploi [...]

59.  Toutefois, la résidence du propriétaire du bien personnel ne peut être une exigence universelle, étant donné qu’elle n’est pas mentionnée dans la définition que la loi donne à la portée de l’article 87. En fait, il peut ressortir clairement des faits que les biens corporels d’une personne sont situés dans la réserve, même si cette personne n’y a pas sa résidence [...] Toutefois, je veux faire remarquer que dans l’arrêt Mitchell, [...] le juge La Forest, qui se réfère semble-t-il tant aux biens corporels qu’aux biens incorporels, a lié la disponibilité des protections fournies par les articles 87 et 89 à la question de savoir s’il y avait « un lien discernable entre le bien en question et l’occupation des terres réservées par le propriétaire de ce bien ». [Souligné dans l’original.]

60.  Le lieu de résidence peut donc être un facteur important servant à rattacher le revenu d’emploi à une réserve, alors que le fait qu’un employé ne réside pas dans la réserve peut indiquer que son revenu d’emploi n’a pas été acquis ou utilisé dans la réserve [...] Bien sûr, le lieu de résidence n’est qu’un des facteurs et il peut y avoir des situations où ce facteur est déplacé par d’autres qui ont plus de poids, ou reçoit une importance moindre [...] [110]

[77]  Même si M. Morriseau et Mme Smoke ont résidé à Winnipeg en 2012 et 2013 et n’ont jamais vécu dans une réserve, il est important de se rappeler que la Cour est appelée à décider si leur revenu d’emploi au cours de ces années se situait dans une réserve, et non pas s’ils résidaient eux-mêmes dans une réserve [111] . Bien que la résidence d’un employé autochtone ailleurs que dans une réserve puisse être potentiellement pertinente, il faut en général y accorder peu de poids [112] . Ainsi, le fait que M. Morriseau et Mme Smoke ne résidaient pas dans une réserve n’est pas un facteur important ou déterminant [113] . Par conséquent, j’accorde peu d’importance à ce facteur.

(iii) Lieu de travail

[78]  Le lieu du travail effectué par un employé particulier est l’un des facteurs les plus importants à prendre en compte dans l’analyse au titre de l’article 87. Étant donné que le revenu d’emploi est le résultat du travail effectué, le lieu de ce travail (ainsi que sa nature, dont il sera question plus loin) peut aider à déterminer le lieu du revenu [114] . En général, il convient d’accorder un poids important au lieu où le travail d’un employé est effectué [115] .

[79]  Le lieu de travail d’un employé n’est pas déterminant [116] ; néanmoins, le fait qu’un employé travaille hors réserve est un facteur qui tend à établir un lien entre son revenu d’emploi et un lieu hors d’une réserve [117] .

[80]  M. Morriseau et Mme Smoke ont exercé toutes leurs fonctions professionnelles à Winnipeg. Ils ont tous deux reconnu qu’ils n’avaient pas travaillé dans une réserve, ni même visité de réserve, dans le cadre de leurs fonctions. Le lieu où M. Morriseau et Mme Smoke effectuaient leur travail était un facteur critique qui tendait à situer leur revenu d’emploi à Winnipeg, plutôt que dans une réserve.

(iv) Lieu du paiement

[81]  Étant donné que, dans les présents appels, le type de biens est un revenu d’emploi et que la nature de l’imposition est l’impôt sur le revenu, le lieu du paiement du revenu est un facteur pertinent, d’autant plus que le revenu d’emploi d’un contribuable pour une année d’imposition est le traitement, le salaire et toute autre rémunération que le contribuable a reçus au cours de l’année [118] . Toutefois, le lieu de paiement n’est pas une considération particulièrement importante [119] , car le lieu de paiement n’a que peu ou pas de lien logique avec la politique qui sous-tend l’article 87 de la Loi sur les Indiens [120] .

[82]  Commentant le lieu du paiement de l’employé, le juge Bowie a déclaré ce qui suit dans l’affaire Walkus :

L’endroit où la personne est payée ne peut être utile dans l’analyse que dans la mesure où c’est un facteur qui fournit vraiment une certaine indication de la réponse à la question sous-jacente de savoir si « l’imposition de ce revenu aurait une incidence négative sur l’intérêt à l’égard du bien détenu par l’appelant à titre d’Indien ou si cela servirait simplement à conférer un avantage économique non offert aux autres » [121] .

[83]  Je n’accorde qu’une importance modérée au fait que M. Morriseau et Mme Smoke ont été payés à Winnipeg, et non dans une réserve.

(v) Nature des services ou circonstances particulières

[84]  Dans Folster, le juge Linden a fait les observations suivantes dans le contexte du revenu d’emploi et de l’article 87 de la Loi sur les Indiens :

20.  […] On ne doit pas oublier que ce critère est simplement un moyen dont disposent les tribunaux pour appliquer le principe du situs d’une manière rationnelle, en donnant une certaine armature à l’analyse. Et la question fondamentale de cette analyse est la suivante : eu égard au but poursuivi par le législateur en adoptant l’exemption d’impôt créée par l’article 87, où est-il le plus logique de situer le situs du bien meuble en cause? Ce critère n’est pas plus magique que cela [...]

27.  […] Le genre de bien meuble en cause, c’est-à-dire le revenu d’emploi, est tel qu’on ne peut juger de sa nature sans se référer aux circonstances dans lesquelles il a été gagné [...] Le bien meuble en cause est un revenu gagné par une Indienne qui réside sur une réserve et qui travaille dans un hôpital qui répond aux besoins de la collectivité de la réserve; cet hôpital était jadis situé sur la réserve, mais se trouve maintenant à proximité de la réserve qu’il dessert.

28.  […] À mon sens, quand le bien meuble en cause est un revenu d’emploi, il est logique de tenir compte du but principal et des fonctions de l’emploi sous-jacent dans le but précis de déterminer si l’emploi était exercé au profit des Indiens sur des réserves [...]

30.  […] [Mme Folster] ne travaillait pas sur le « marché ordinaire », mais aidait plutôt, en sa qualité d’employée de l’hôpital, à fournir des services de soins de santé à des membres de la bande indienne de Norway House. En tant que tel, son emploi faisait partie intégrante de la vie communautaire sur la réserve [122] .

[85]  Outre le lieu de l’emploi, la nature de l’emploi est également un facteur de rattachement important [123] . Un tribunal doit tenir compte des circonstances entourant le travail d’un employé et doit évaluer la situation dans son ensemble [124] . Lors de l’évaluation de la nature de l’emploi, il peut y avoir une différence entre la prestation de services sociaux et l’emploi exercé dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise à but lucratif [125] .

[86]  Comme il a été indiqué ci-dessus, M. Morriseau supervisait l’entrepôt d’ABL à Winnipeg, alors que Mme Smoke travaillait comme administratrice de secteur, d’abord pour ABL puis pour TCIG. TCIG avait été constituée pour offrir des possibilités économiques aux populations autochtones; cependant, rien ne prouve que ces possibilités économiques aient été créées dans les réserves. Bien que TCIG ait plusieurs filiales, la seule filiale décrite en détail lors de l’audience était ABL, qui menait ses activités à Winnipeg. Ainsi, en ce qui concerne les activités d’emploi réelles exercées par M. Morriseau et Mme Smoke, aucun élément de preuve (à l’exception de la distribution des produits d’ABL, dont il est question plus loin) ne permet d’établir un lien entre ces activités et une réserve.

[87]  Il n’y avait pas de preuve solide quant à l’emplacement des détaillants et des autres clients qui achetaient des produits auprès d’ABL [126] . M. Morriseau a déclaré qu’ABL ne livrait ses produits qu’à des entités des Premières Nations [127] . Aucun élément de preuve ne permet de confirmer que ces entités étaient situées dans des réserves; cependant, il est fortement probable d’en déduire que c’était le cas. M. Flett a déclaré qu’ABL distribuait ses produits au Manitoba, dans le nord de la Saskatchewan, dans certaines régions de l’Ontario et dans certaines parties des Territoires [128] . Encore une fois, aucun élément de preuve ne démontrer que les distributeurs de ces produits étaient situés dans des réserves.

[88]  Selon la description des destinations auxquelles ABL a expédié ses produits, il semble que beaucoup de ces destinations étaient considérablement éloignées de Winnipeg. Néanmoins, dans la mesure où ABL distribuait ses produits à des entités des Premières Nations situées dans des réserves, il y aurait eu un lien indirect entre ces réserves et les services rendus par M. Morriseau et Mme Smoke. De plus, l’exploitation par ABL (ou peut-être par la fondation caritative de TCIG) d’un programme de petits déjeuners visant à fournir des jus et des produits pour le petit déjeuner aux écoles des Premières Nations dans diverses réserves du nord du Manitoba et de l’Ontario [129] ainsi que le versement de dons par ABL aux communautés des Premières Nations [130] étaient des circonstances tendant à permettre d’établir un lien entre les activités d’ABL et l’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke et une ou plusieurs réserves.

[89]  Des indications utiles pour déterminer le poids à accorder au facteur de rattachement de la « nature des services » sont données dans l’arrêt Monias :

44.  La nature des services fournis par l’intimé dans le cadre de son emploi rattache son revenu d’emploi aux réserves. L’objectif principal des services qu’Awasis fournit par l’entremise de ses employés est de soutenir et renforcer les familles autochtones vivant dans les réserves et, notamment, de s’occuper des besoins sociaux des enfants dans les réserves [...]

[traduction] 45.  Il est clair que ce sont les personnes se trouvant dans les réserves où opère Awasis, ainsi que les réserves elles-mêmes envisagées comme des groupes sociaux, qui sont les bénéficiaires directs du travail des employés [...]

46.  Toutefois, bien que le travail des employés puisse aider à maintenir ou à améliorer la qualité de vie dans la réserve pour les membres des bandes qui y vivent, ce fait ne vient pas nécessairement rattacher l’acquisition ou l’utilisation de leur revenu d’emploi à la réalité physique des réserves [131] . [Souligné dans l’original.]

[90]  De même, dans le contexte des présents appels, bien que l’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke ait fait partie des activités grâce auxquelles ABL distribuait ses produits aux entités des Premières Nations et, peut-être même, au moyen desquelles elle exploitait un programme de petits déjeuners dans le nord du Manitoba et de l’Ontario, à mon avis, il n’y a pas plus de lien, ou peut-être un lien moindre, entre l’acquisition ou l’utilisation du revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke et les réserves qu’à l’égard des employés qui étaient les appelants dans l’arrêt Monias.

[91]  En résumé, bien que la preuve ait permis de démontrer, de façon générale, qu’ABL a vendu ses produits aux Premières Nations, aux entités des Premières Nations et aux clients des communautés du nord, aucun élément de preuve précis n’a permis de lier les destinataires de ces produits aux réserves au point de pouvoir dire que le revenu de M. Morriseau et de Mme Smoke était situé dans une réserve. Le seul lien avec les réserves établi grâce aux éléments de preuve était dans le contexte du programme de petits déjeuners d’ABL, mais ce programme n’était pas l’objet principal des activités d’ABL. En outre, il est possible qu’en réalité le programme de petits déjeuners ait été entrepris par la fondation caritative de TCIG [132] . Par conséquent, je n’accorde qu’un poids modéré au facteur de rattachement de la « nature des services ».

(vi) Considérations traditionnelles, économiques, sociales et culturelles

[92]  Bien qu’aucun élément de preuve ne démontre que des considérations traditionnelles, sociales ou culturelles auraient pu être pertinentes pour déterminer le lieu du revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke, dans leurs observations, ces derniers ont soulevé une considération économique. Comme il est mentionné ci-dessus, la thèse de M. Morriseau et de Mme Smoke est que l’activité économique et commerciale de TCIG et les possibilités qu’elle offre aux Premières Nations et à leurs réserves sont un facteur qui relie le revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke à ces réserves.

[93]  Comme je l’ai expliqué ci-dessus, bien que les considérations traditionnelles, économiques, sociales et culturelles puissent être un facteur tendant à renforcer ou à affaiblir le lien entre le revenu d’un contribuable et une réserve, [133]  ces considérations ne constituent pas un facteur de rattachement en soi. En outre, des éléments de preuve probants ou un « fondement factuel approprié » sont nécessaires pour démontrer un « rapport historique, social ou culturel » avec une réserve [134] .

[94]  Étant donné le peu d’éléments de preuve, [135] l’activité économique et commerciale de TCIG et d’ABL et les avantages qu’elles procurent aux conseils tribaux ne renforcent que légèrement le facteur de rattachement de la  « nature des services ».

(vii) Équilibre des facteurs de rattachement

[95]  Il s’agit d’un cas difficile, puisque certains facteurs de rattachement suggéraient que le revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke était situé dans une réserve, alors que d’autres facteurs de rattachement suggéraient que le revenu était situé à Winnipeg. Un résumé de l’importance que j’ai accordée aux cinq facteurs de rattachement est présenté ci-dessous :

  • a) Résidence de l’employeur : Compte tenu de l’incertitude quant à la personne morale qui était l’employeur et du fait qu’il n’y avait pas d’élément de preuve pour établir qu’ABL (par opposition à TCIG) résidait dans une réserve, et étant donné qu’il y avait peu d’éléments de preuve pour démontrer l’étendue des activités de TCIG et d’ABL dans les réserves ou un avantage découlant, pour une réserve, de la présence de TCIG et d’ABL dans celle-ci, je n’ai pas accordé beaucoup de poids à ce facteur de rattachement. Cependant, puisque ABL distribuait ses produits aux communautés autochtones du Nord, qui étaient peut-être situées dans des réserves, et puisque ABL faisait des dons aux Premières Nations et pourrait avoir entrepris un programme pour offrir des petits déjeuners aux élèves des écoles des Premières Nations (en supposant que le programme n’ait pas été entrepris par la fondation caritative de TCIG), j’ai accordé plus de poids à ce facteur que je ne l’aurais fait autrement.

  • b) Résidence de l’employé : J’ai accordé peu de poids au fait que M. Morriseau et Mme Smoke résidaient à Winnipeg, et non dans une réserve.

  • c) Lieu de travail : J’ai accordé une grande importance au fait que M. Morriseau et Mme Smoke ont exercé toutes leurs fonctions à Winnipeg et n’ont pas fait de visites, même occasionnelles, dans une réserve dans le cadre de leur travail.

  • d) Lieu du paiement : Bien qu’il s’agisse d’un facteur de rattachement pertinent dans le contexte des revenus d’emploi, ce n’est pas un facteur auquel il convient d’accorder un poids important. Par conséquent, je n’accorde qu’une importance modérée à ce facteur.

  • e) Nature des services ou circonstances particulières : Étant donné qu’ABL a distribué des produits à des entités des Premières Nations au Manitoba, dans le nord de la Saskatchewan, dans une partie de l’Ontario et dans les Territoires, un certain lien peut être établi entre l’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke et diverses réserves. Cependant, comme il y avait peu d’éléments de preuve, voire aucun (sauf en ce qui concerne le programme de petits déjeuners), pour montrer que ces entités étaient situées dans des réserves, je n’ai accordé qu’un poids modéré à ce facteur. Ce facteur de rattachement est légèrement renforcé par l’avantage économique fourni par TCIG et ABL aux conseils tribaux.

[96]  Si la Cour devait conclure que le revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke n’est pas assujetti à l’impôt sur le revenu, ce serait en raison d’une tendance à « remédier à la situation économiquement défavorable des Indiens » [136] ou à « conférer un avantage économique général aux Indiens », [137] mais ce n’est pas l’objet de l’exemption prévue à l’article 87. L’exemption vise plutôt à « préserver les droits des Indiens sur leurs terres réservées et à assurer que la capacité des gouvernements d’imposer des taxes ne porte pas atteinte à l’utilisation de leurs biens situés dans leurs terres réservées [...] » [138]

[97]  Comme il existe des parallèles entre les présents appels et les appels qui ont fait l’objet de l’arrêt Monias, l’approche adoptée par le juge Evans dans cette affaire pour évaluer les différents facteurs de rattachement peut fournir quelques indications à cet égard. Dans cet arrêt, le juge Evans se prononce ainsi :

65.  Toutefois, je dois pondérer le fait que l’intimé réside hors réserve et qu’il y exerce ses fonctions, souvent fort loin des réserves auxquelles Awasis offre ses services, avec les bénéfices réels que les résidents des réserves tirent des services de l’intimé, l’identité de l’employeur et le rôle important que ces services jouent dans le renforcement du tissu social fondamental des réserves [...]

66.  Le fait que le travail qui donne lieu au revenu d’emploi soit au bénéfice des Indiens dans les réserves et qu’il puisse être essentiel au maintien des réserves comme groupes sociaux viables, n’est pas en soi suffisant pour situer le revenu d’emploi dans les réserves. La politique qui sous-tend l’alinéa 87(1)b) n’a pas pour but d’offrir une subvention fiscale aux services fournis aux réserves. Il s’agit plutôt de protéger la propriété que les Indiens peuvent acquérir, conserver et utiliser dans une réserve, de toute atteinte par le biais de l’impôt, bien que dans le cas d’un bien incorporel, comme le revenu d’emploi, c’est le situs de son acquisition qui est particulièrement important. [Souligné dans l’original.]

67.  En édictant l’alinéa 87(1)b), le législateur a créé une exception importante au principe qui veut que les personnes qui sont dans des situations semblables doivent être traitées de la même façon aux fins de l’impôt. Toutefois, cette disposition ne peut être interprétée comme exemptant de l’impôt sur le revenu le revenu d’emploi des Indiens qui n’a pas clairement été gagné dans des circonstances qui lient son acquisition à une réserve en tant qu’unité économique [139] .

[98]  Dans les présents appels, je dois pondérer les faits selon lesquels, en 2012 et 2013, M. Morriseau et Mme Smoke résidaient, exerçaient leurs fonctions et recevaient leurs salaires respectifs à Winnipeg, par rapport aux faits que TCIG, et peut-être ABL, résidaient dans une réserve (bien qu’il y ait peu d’éléments de preuve soutenant que la présence de TCIG et d’ABL ait apporté un quelconque avantage économique à la réserve), que les bénéfices ont probablement été versés lorsque ABL a distribué ses produits aux entités des Premières Nations et aux communautés du Nord (bien qu’il y ait peu d’éléments de preuves liant spécifiquement cette distribution aux réserves) et qu’ABL a mis en place un programme de petits déjeuners (bien que les éléments de preuve suggèrent que le programme ait pu être entrepris par la fondation caritative de TCIG). À mon avis, les facteurs de rattachement indiquant que le revenu d’emploi de M. Morriseau et de Mme Smoke a été gagné à Winnipeg (c.-à-d. pas dans une réserve) l’emportent sur les facteurs de rattachement liant ce revenu d’emploi à une réserve. Bien qu’il s’agisse d’une affaire relativement close, compte tenu de l’ensemble des éléments de preuve, le lieu où M. Morriseau et Mme Smoke ont exercé leurs fonctions, c’est-à-dire Winnipeg, est le facteur de rattachement prédominant, faisant ainsi pencher la balance en faveur d’une conclusion selon laquelle le lieu de leur revenu d’emploi était Winnipeg, et non pas une réserve.

V. CONCLUSION

[99]  Pour les motifs précités, les appels sont rejetés. Ces appels ayant été entendus sous le régime de la procédure informelle, aucuns dépens ne sont adjugés.

[100]  Comme il a été expliqué ci-dessus [140] , les appels ont été interjetés en réponse à la confirmation de nouvelles cotisations établies par l’Agence à l’égard de feuillets T4 modifiés émis par TCIG plusieurs années après les années d’imposition en cause. Il semble que TCIG, apparemment à la demande de l’Agence, ait modifié rétroactivement sa position concernant l’assujettissement à l’impôt des salaires versés par TCIG et ABL à leurs employés autochtones en 2012 et 2013. Par conséquent, d’après ce que je comprends, aucun impôt sur le revenu n’a été retenu à la source sur ces salaires. À mon avis, si M. Morriseau et Mme Smoke n’ont pas déjà payé l’impôt dû au titre des nouvelles cotisations, cela créerait une difficulté importante s’ils devaient payer des intérêts sur arriérés sur cet impôt. Je pense qu’il serait approprié dans ce cas que le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire, aux termes du paragraphe 220(3.1) de la LIR, en faveur de M. Morriseau et de Mme Smoke, et annule tout intérêt qui aurait pu être établi à l’égard de l’impôt faisant l’objet des présents appels.

Signé à Edmonton (Alberta), ce 15e jour de janvier 2020.

« Don R. Sommerfeldt »

Le juge Sommerfeldt


RÉFÉRENCE :

2020 CCI 5

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

2017-3076(IT)I et 2017-3077(IT)I

INTITULÉ :

CHRISTOPHER MORRISEAU c. SA MAJESTÉ LA REINE et MIRANDA SMOKE c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 juillet 2018 et le 24 juin 2019

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Don R. Sommerfeldt

DATE DU JUGEMENT :

Le 15 janvier 2020

COMPARUTIONS :

Avocats des appelants :

Me Kenneth Young

Avocate de l’intimée :

Me Sandra Hoeppner

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Me Kenneth Young

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l’intimée :

Me Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 



[1]   Le terme utilisé par M. Morriseau et Mme Smoke dans leur témoignage était [traduction] « Indien inscrit » voir la Transcription, lignes 15 à 21 de la page 28 et lignes 2 à 7 de la page 45. Je crois comprendre que ce terme désigne une personne qui est inscrite comme Indien aux termes de la Loi sur les Indiens, comme il est cité dans la note de bas de page suivante.

[2]   Loi sur les Indiens, L.R.C. 1985, ch. I-5, en sa version modifiée.

[3]   Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e supplément), en sa version modifiée.

[4]   On ne m’a pas fourni de documents d’entreprise indiquant la dénomination sociale d’ABL; par conséquent, je ne suis pas certain que son nom soit « Arctic Beverages Limited » ou « Arctic Beverages Ltd ».

[5]   Pièces A-1 et A-2.

[6]   Voir l’alinéa 87(1)b) de la Loi sur les Indiens.

[7]   Williams c. Canada, [1992] 1 R.C.S. 877, [1992] 1 CTC 225, 92 DTC 6380, aux paragraphes 33 à 38.

[8]   Succession Bastien c. Canada, [2011] 2 R.C.S. 710, 2011 CSC 38, [2011] 5 CTC 111, 2011 DTC 5118, aux paragraphes 2 et 18.

[9]   Kelly c. Canada, 2013 CAF 171; inf. 2009 CCI 189.

[10]   Transcription, lignes 13 et 14 de la page 13.

[11]   Transcription, lignes 19 et 20 de la page 13.

[12]   Transcription, lignes 12 et 13 de la page 45.

[13]   Loi sur les corporations, L.R.M. 1987, c. C225.

[14]   Comme TCIG semble avoir été constituée aux termes d’une loi fédérale, il semble qu’elle ait pu être enregistrée dans une autre province, soit au Manitoba, de sorte qu’elle était tenue de déposer des déclarations annuelles d’information. L’intitulé de la case 3 des déclarations annuelles d’information pour 2012 et 2013 est [traduction] « Date de constitution en société ou de fusion ». Comme aucun des témoignages ne mentionne une fusion, il semble que TCIG a été constituée le 27 novembre 1989.

[15]   La pièce R-1, qui est la Déclaration annuelle d’information de 2012 déposée le 1er mai 2013 au Manitoba, indique que M. Flett était administrateur en 2012. M. Flett ne figure pas comme administrateur dans la pièce R-2, soit la déclaration annuelle de renseignements de 2013 déposée le 19 août 2014 à l’Office des compagnies du Manitoba. Au cours du contre-interrogatoire, M. Flett a déclaré qu’il a quitté son poste d’administrateur de TCIG en 2015, malgré le fait qu’un avis de changement de directeur, qui lui a été montré mais qui n’a pas été déposé comme élément de preuve (et qui ne m’a pas été présenté) puisse suggérer qu’il a cessé d’être administrateur de TCIG en 2013. M. Flett était, selon moi, un témoin éclairé et crédible ayant une connaissance approfondie de TCIG et de ses affaires. Je ne pense pas que la fiabilité de son témoignage soit compromise par le fait qu’il ait cessé d’être administrateur en 2013 ou en 2015.

[16]   Dans la déclaration annuelle d’information de 2013, le nom de cet actionnaire était « Swampy Cree Tribal Council ». Autrement dit, le mot « Cree » et non « Creek » a été utilisé, et la mention « Inc. » ne figurait pas dans la déclaration de 2013. Bien qu’il n’y ait pas de preuve sur ce point, je crois comprendre que le nom correct du peuple autochtone en question est « Swampy Cree ». Le nom de cet actionnaire est sans conséquence dans ces appels.

[17]   Dans le rapport annuel d’information de 2013, le nom de cet actionnaire est « West Region Economic Development Corp. ». Il pourrait y avoir eu un changement de nom, un transfert d’actions ou une erreur dans la déclaration. Le nom de cet actionnaire est sans conséquence dans ces appels.

[18]   Transcription, lignes 19 à 24 de la page 64.

[19]   Alors que M. Flett était administrateur de TCIG, celle-ci a versé des paiements annuels de 110 000 $ à chacun des sept conseils tribaux, [traduction] « ainsi que plus de 50 000 $ par conseil tribal pour les dons versés aux différentes Premières Nations. Ainsi, plus d’un million de dollars par an revenaient aux conseils tribaux et aux Premières Nations ». Voir la Transcription, de la ligne 24 de la page 111 à la ligne 4 de la page 112.

[20]   Transcription, lignes 8 et 9 de la page 114.

[21]   Transcription, de la ligne 27 de la page 121 à la ligne 14 de la page 122.

[22]   Transcription, lignes 13 à 20 de la page 122 et lignes 3 à 8 de la page 124. Les éléments de preuve n’ont pas permis d’établir clairement si la fondation existait en 2012 et en 2013.

[23]   Transcription, lignes 4 à 6 de la page 115.

[24]   Transcription, ligne 27 de la page 63 à la ligne 1 de la page 64.

[25]   Transcription, lignes 2 à 14 de la page 30.

[26]   Transcription, lignes 12 à 17 de la page 29.

[27]   Transcription, lignes 1 à 4 de la page 13.

[28]   Transcription, de la ligne 26 de la page 55 à la ligne 18 de la page 56.

[29]   Transcription, lignes 7 à 14 de la page 115.

[30]   Transcription, lignes 2 à 8 de la page 125, et lignes 7 à 12 et 25 à 28 de la page 127.

[31]   Transcription, lignes 3 et 4 de la page 12. Voir également la Transcription, lignes 22 à 25 de la page 28.

[32]   Transcription, lignes 14 et 15 de la page 33. Il n’était pas clair s’il s’agissait d’une référence au Southeast Tribal Council ou d’une référence à Southeast Resource Development Council Corp. (c’est-à-dire l’un des actionnaires de TCIG), qui était probablement une entité appartenant au Southeast Tribal Council.

[33]   Transcription, lignes 14 à 17 de la page 36.

[34]   Transcription, lignes 25 et 26 de la page 38.

[35]   Transcription, lignes 2 à 6 de la page 39.

[36]   Transcription, lignes 22 à 25 de la page 44. Voir également la Transcription, lignes 18 à 22 de la page 52.

[37]   Transcription, de la ligne 15 de la page 49 à la ligne 5 de la page 50. La preuve n’était pas très claire, puisque Mme Smoke a initialement déclaré ceci : « Je n’ai travaillé avec TCIG que jusqu’à la fin de 2011 » (p. 49, lignes 15 et 16). Elle a ensuite déclaré ceci : « C’est en 2012 que j’ai commencé à travailler chez TCIG. Avant, je n’étais pas employée par eux » (p. 49, lignes 17 et 18). Pour obtenir des précisions, j’ai posé la question suivante : « Vous avez dit qu’en 2011, vous avez travaillé ailleurs. Vous n’avez pas travaillé pour TCIG en 2011? » (p. 50, lignes 1 et 2). Mme Smoke a répondu : « Oui, j’étais employée par Arctic Beverages. Je crois que c’était juste avant Noël 2011, donc cette année était presque terminée » (p. 50, lignes 3 à 5). Si l’on suppose qu’à la fin de cet échange, Mme Smoke ait clarifié et confirmé ses souvenirs, il semble qu’elle ait travaillé pour ABL jusqu’en décembre 2011, date à laquelle elle a commencé à travailler pour TCIG

[38]   Transcription, de la ligne 23 de la page 52 à la ligne 25 de la page 53.

[39]   Transcription, lignes 16 à 21 de la page 126.

[40]   Transcription, lignes 3 à 5 de la page 70. M. Flett n’a pas indiqué s’il faisait référence aux Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Yukon, ou à l’ensemble de ces territoires.

[41]   Transcription, lignes 13 à 17 de la page 55.

[42]   Il n’a été question d’aucun changement dans ses fonctions ou son lieu de travail lorsqu’elle a cessé de travailler pour ABL et a commencé à travailler pour TCIG.

[43]   Transcription, lignes 19 à 26 de la page 56.

[44]   L’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke a déclaré qu’ils étaient payés à Winnipeg, mais a soutenu que ce facteur ne devrait pas être considéré comme important, et que M. Morriseau et Mme Smoke [traduction] « ne devraient pas être considérés comme ayant renoncé à leur droit à l’exonération prévue à l’article 87 »; voir les observations finales déposées le 30 novembre 2018, à la page 6.. L’avocate de la Couronne a soutenu que M. Morriseau et Mme Smoke ont été payés à Winnipeg par dépôt direct dans des comptes d’une caisse de crédit à Winnipeg; voir les observations écrites déposées le 30 avril 2019, page 9, au paragraphe 36. Voir également la Transcription, lignes 10 à 22 de la page 38.

[45]   Bastien, précité, note 8, aux paragraphes 16 et 17.

[46]   Williams, précité, note 7, p. 892 et 893, au paragraphe 37.

[47]   Bastien, précité, note 8, au paragraphe 18.

[48]   Voir Desnomie c. Canada, [2000] 3 CTC 6, 2000 DTC 6250, au paragraphe 7 (CAF); confirmant [1998] 4 CTC 2207, 98 DTC 1744, au paragraphe 9 (CCI). La Cour suprême du Canada a refusé l’autorisation de faire appel de la décision de la Cour d’appel fédérale (265 NR 398). Au paragraphe 9 de ses motifs, le juge de première instance, le juge Archambault, n’a pas mentionné, comme facteur de rattachement le lieu où l’employé est payé; cependant, dans la note 2 de ses motifs, il a déclaré que, bien qu’il n’y ait aucune hypothèse ou preuve spécifique concernant le lieu du paiement, étant donné que M. Desnomie vivait et travaillait à Winnipeg et que le siège social et le principal établissement de son employeur se trouvaient à Winnipeg, « il est difficile d’imaginer que le salaire aurait été versé ailleurs qu’à Winnipeg ».

[49]   Baldwin c. La Reine, 2014 CCI 284, au paragraphe 54; conf. sub nom. Zoccole c. Canada, 2015 CAF 258; autorisation d’appel refusée par la CSC, 2016 CarswellNat 1183; et Canada c. Shilling, 2001 CAF 178, aux paragraphes 31 et 32. Dans l’arrêt Bell v. Canada, 2018 FCA 91, au paragraphe 17, le juge Webb n’a énuméré que les quatre facteurs de rattachement énoncés par le juge Archambault au paragraphe 9 de l’arrêt Desnomie (CCI), ibid.

[50]   Bastien, précité, note 8, au paragraphe 28.

[51]   Ibid.

[52]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42 (deuxième puce, p. 15).

[53]   Kelly (CCI), précité, note 9, au paragraphe 47(f). Voir également Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 15.

[54]   Kelly (CCI), précité, note 9, au paragraphe 51; voir également Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 15.

[55]   Canada c. Robertson, 2012 CAF 94, au paragraphe 61. Voir également Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42 (deuxième puce, p. 15).

[56]   Robertson, ibid, au paragraphe 61.

[57]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42 (première puce, p. 15).

[58]   Bastien, précité, note 8, au paragraphe 28.

[59]   Dans l’arrêt De Beers Consolidated Mines Ltd. v Howe, [1906] AC 455, à la page 458 (HL), Lord Loreburn a déclaré ceci : [traduction] « une société réside [...] là où elle fait réellement des affaires [...] et les affaires se font réellement là où se trouve effectivement le centre de gestion et de contrôle ». En général, la résidence d’une société est située là où les administrateurs se réunissent et prennent leurs décisions, à condition que ces décisions ne soient pas dictées par autre partie. Dans l’arrêt Bell c. Canada, [2000] 3 CTC 181, 2000 DTC 6365 (CAF), au paragraphe 50; conf. sub nom. par Walkus, [1998] 4 CTC 2526, 98 DTC 1857 (CCI), le juge Létourneau, pour déterminer la résidence d’une société dans le contexte de l’exonération prévue à l’article 87, s’est référé à des principes semblables énoncés dans l’arrêt Unit Construction Co. Ltd. v Bullock, [1960] AC 351, à la page 366, 372 (HL). Voir également Wood v Holden, [2006] EWCA Civ 26, [2006] STC 443 (Eng CA); British Columbia Electric Railway Co. v The King, [1946] CTC 224, 2 DTC 839 (PC); et Capitol Life Insurance Co. v The Queen, [1984] CTC 141, 84 DTC 6087 (FCTD).

[60]   Transcription, de la ligne 16 de la page 67 à ligne 2 de la page 68.

[61]   Dans l’arrêt Shilling, précité, note 49, aux paragraphes 2, 8 et 34 à 42, l’emplacement du siège social de l’employeur du contribuable dans la réserve a été pris en compte par la Cour pour déterminer l’importance à accorder à l’emplacement de l’employeur. Dans l’arrêt Pilfold (Succession) c. Canada, 2014 CAF 97, au paragraphe 4, conf. par 2013 CCI 181, au paragraphe 65, la juge Sharlow et le juge C. Miller, respectivement, ont pris en compte l’emplacement du siège social de l’employeur dans une réserve.

[62]   Transcription, de la ligne 19 de la page 116 à la ligne 6 de la page 117.

[63]   Transcription, lignes 3 à 17 de la page 68 et lignes 16 à 21 de la page 70.

[64]   Transcription, lignes 4 à 9 de la page 44.

[65]   Pièce A-3.

[66]   Transcription, lignes 6 à 9 de la page 132.

[67]   Transcription, de la ligne 1 de la page 97 à la ligne 6 de la page 98 et de la ligne 21 de la page 122 à la ligne 24 de la page 123.

[68]   Transcription, lignes 25 et 26 de la page 122.

[69]   BC Electric Railway, précité, note 59, p. 228; et Canada c. Monias, 2001 CAF 239, aux paragraphes 11 et 51.

[70]   Pièces A-1 et A-2.

[71]   Transcription, lignes 13 à 16 de la page 116.

[72]   Dans ses observations finales, précitées, à la note 44 de la page 2, l’avocat de M. Morriseau et de Mme Smoke a reconnu qu’ils n’avaient [traduction]« jamais résidé dans leurs réserves respectives ».

[73]   Certaines des destinations des produits expédiés étaient si éloignées de Winnipeg que les produits étaient expédiés par avion ou par des routes d’hiver. Voir la Transcription, lignes 14 à 18 de la page 37.

[74]   Transcription, lignes 25 et 26 de la page 38.

[75]   Transcription, ligne 3 de la page 39.

[76]   Transcription, lignes 14 et 15 de la page 33.

[77]   Transcription, lignes 16 et 17 de la page 36.

[78]   Transcription, lignes 4 et 5 de la page 39.

[79]   Observations finales, précitées, note 44, p. 6; voir également le paragraphe 24, ci-dessus.

[80]   Canada c. Folster, [1997] 3 CCI 157, 97 DTC 5315 (CAF), au paragraphe 28.

[81]   Harry Bell (CAF), précité, note 59, au paragraphe 40.

[82]   Transcription, lignes 12 à 24 de la page 29.

[83]   Folster, précité, note 80,

[84]   Kelly, précité, note 9. Je reconnais que l’appel de M. Kelly portait sur le revenu d’entreprise et que les présents appels concernent le revenu d’emploi.

[85]   Robertson, précité, note 55.

[86]   Observations finales, précitées, note 44, p. 4 et 5. Nonobstant la déclaration de la dernière phrase du premier paragraphe cité ci-dessus, il n’y avait pas, à mon avis, d’« élément de preuve important pour soutenir la présence de l’employeur dans les réserves ». Outre une brève indication selon laquelle ABL disposait d’un bureau dans la NCO, qui aurait pu être utilisé pour le recrutement (transcription, lignes 13 à 17 de la page 116), aucun autre élément de preuve n’a été présenté à l’audience concernant la présence d’ABL dans une réserve. En ce qui concerne TCIG, les seuls éléments de preuve de sa présence dans une réserve indiquaient que ses administrateurs se réunissaient dans les réserves, mais il n’y avait aucun élément de preuve quant à la fréquence et à la durée de ces réunions (par exemple, les administrateurs étaient-ils tenus de séjourner dans des hôtels ou de manger dans des restaurants situés dans les réserves?), ni aucune autre indication des retombées économiques pour les réserves du fait que ces réunions s’y tenaient. Des éléments de preuve démontrent que TCIG avait son siège social dans une réserve, mais il n’y avait aucun élément de preuve quant à la nature de ce bureau, par exemple s’il était situé dans des locaux loués et si le loyer était payé à un propriétaire situé dans la réserve, si TCIG était propriétaire du siège social et payait des frais s’apparentant à des taxes foncières municipales ou à une taxe comparable prélevée par une Première Nation ou une bande, et si des employés travaillaient au siège social. (Voir Shilling, précité, note 49, aux paragraphes 35 et 36.) Ainsi, à mon avis, il n’y avait que peu d’éléments de preuve, voire aucun, pour montrer qu’un bénéfice avait été versé à une réserve du fait de la présence de TCIG. Certes, TCIG a procuré des avantages économiques importants, voire substantiels, aux Premières Nations, mais ces avantages découlent de dividendes ou autres distributions versés par TCIG à ses actionnaires, les sept conseils tribaux ou leurs représentants, qui, à leur tour, ont versé des distributions aux Premières Nations.

[87]   Observations finales, précitées, note 44, p. 7.

[88]   Observations en contre-preuve, déposées le 31 mai 2019, p. 6, au paragraphe 23.

[89]   Réponse à l’appel no 2017-3076(IT)I, au paragraphe 11(h); et réponse à l’appel no 2017-3077(IT)I, au paragraphe 10(h).

[90]   Observations écrites de la Couronne, déposées le 30 avril 2019, p. 9 et 10, aux paragraphes 39 et 40.

[91]   Voir le paragraphe 28 précité.

[92]   Voir le paragraphe 30 précité. Voir également Harry Bell (CAF), précité, note 59, au paragraphe 40, où la Cour a indiqué que le concept d’avantage (qui, bien que lié au facteur de rattachement de la « nature des services », peut également avoir un certain rapport avec l’analyse des considérations traditionnelles, économiques, sociales et culturelles) « n’est pas un facteur de rattachement indépendant et autonome [...] »

[93]   En plus des arrêts Williams et Bastien, voir également l’arrêt Helen Bell, précité, note 49, au paragraphe 15.

[94]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 32.

[95]   Williams, précité, note 7, au paragraphe 37, et Bastien, précité, note 8, au paragraphe 18.

[96]   Bastien, précité, note 8, au paragraphe 18. Voir également Williams, précité, note 7, au paragraphe 37, et Kelly (CAF), précité, note 9, aux paragraphes 33 à 36.

[97]   Williams, précité, note 7, au paragraphe 37.

[98]   Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 57.

[99]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42, première puce.

[100]   Shilling, précité, note 49, au paragraphe 27.

[101]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42, quatrième puce.

[102]   Ibid.

[103]   Ibid, au paragraphe 47.

[104]   Williams, précité, note 7, au paragraphe 32; et Baldwin, précité, note 49, aux paragraphes 47 et 59.

[105]   Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 59; et Monias, précité, note 69, au paragraphe 50.

[106]   Monias, précité, note 69, au paragraphe 55.

[107]   Transcription, lignes 13 à 17, à la page 116.

[108]   Voir le paragraphe 14, précité.

[109]   Transcription, de la ligne 26 de la page 36 à la ligne 6 de la page 37.

[110]   Monias, précité, note 69, aux paragraphes 58 à 60.

[111]   Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 52; et Baldwin, précité, note 49, paragraphe 57(5).

[112]   Dubé c. Canada, 2011 CSC 39, au paragraphe 14; et Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 69.

[113]   Shilling, précité, note 49, au paragraphe 58; et Horn c. Canada, 2007 CF 1052, au paragraphe 101, conf. par 2008 CAF 352.

[114]   Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 72; Shilling, précité, note 49, aux paragraphes 47, 48 et 58; et Desnomie (CCI), précité, note 48, au paragraphe 18.

[115]   Horn (CF), précité, note 113, au paragraphe 86.

[116]   Monias, précité, note 69, au paragraphe 37.

[117]   Monias, précité, note 69, aux paragraphes 37 et 43.

[118]   Paragraphe 5(1) de la LIR. Voir également Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 56, qui confirme que le revenu d’emploi est imposable lorsqu’il est reçu.

[119]   Shilling, précité, note 49, au paragraphe 32; et Horn (CF), précité, note 113, au paragraphe 91;

[120]   Monias, précité, note 69, au paragraphe 57.

[121]   Walkus, précité, note 59, également publié sous [1999] 1 CTC 2086, au paragraphe 46.

[122]   Folster, précité, note 80, aux paragraphes 20, 27, 28 et 30. Bien qu’en 1997, le juge Linden ait fait référence au « marché » au paragraphe 30, précité, dans l’arrêt Bastien, précité, note 8, au paragraphe 52, rendu en 2011, le juge Cromwell a indiqué qu’il faut appliquer le facteur du « marché » avec prudence; voir également Kelly (CAF), précité, note 9, aux paragraphes 46 et 47. Compte tenu de ces mises en garde, je n’ai accordé aucun poids dans les présents motifs à la participation de TCIG, d’ABL et de leurs employés au « marché ».

[123]   Monias, précité, note 69, aux paragraphes 33 et 34; Horn (CF), précité, note 113, au paragraphe 92; et Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 72.

[124]   Monias, précité, note 69, au paragraphe 47.

[125]   Shilling, précité, note 49, au paragraphe 52.

[126]   Comme il est mentionné dans l’arrêt Harry Bell (CAF), précité, note 59, au paragraphe 43, « ni les conjectures ni les suppositions bien intentionnées ne sauraient remplacer des éléments de preuve réels et probants ».

[127]   Transcription, lignes 1 à 4 de la page 13.

[128]   Transcription, lignes 3 à 5 de la page 70.

[129]   Transcription, de la ligne 26 de la page 55 à la ligne 18 de la page 56; lignes 7 à 14 de la page 115; et lignes 2 à 27 de la page 124.

[130]   Transcription, lignes 2 à 8 de la page 125 et lignes 7 à 12 de la page 127.

[131]   Monias, précité, note 69, aux paragraphes 44 à 46.

[132]   Transcription, lignes 7 à 14 de la page 115 et lignes 2 à 27 de la page 124.

[133]   Bastien, précité, note 8, au paragraphe 28; Kelly (CCI), précité, note 9, au paragraphe 47(f), et Robertson, précité, note 55, au paragraphe 61.

[134]   Harry Bell (CAF), précité, note 59, au paragraphe 43.

[135]   Voir les paragraphes 71, 72, 86 et 87 précités.

[136]   Mitchell c. Bande indienne Peguis, [1990] 2 RCS 85, au paragraphe 131; Bastien, précité, note 8, au paragraphe 21; et Kelly (CAF), précité, note 9, au paragraphe 42.

  [137]   Williams, précité, note 7, à la page 885; Bastien, précité, note 8, au paragraphe 23, et Kelly, précité, note 9, aux pages 14 et 15.

[138]   Williams, précité, note 7, à la page 885; Bastien, précité, note 8, au paragraphe 23, et Baldwin, précité, note 49, au paragraphe 57. L’objet de l’exemption est examiné plus en détail aux paragraphes 59 à 63 précités.

[139]   Monias, précité, note 69, aux paragraphes 65 à 67.

[140]   Voir le paragraphe 2 ci-dessus.

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