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Dossiers : 2018-1058(IT)I

2018-4229(IT)I

ENTRE :

AUDREY TEDFORD MACINTOSH,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus sur preuve commune le 30 avril 2019,

à Ottawa (Ontario)

Observations écrites reçues le 21 mai et le 27 mai 2019

Devant : L’honorable juge K.A. Siobhan Monaghan


Comparutions :

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

Avocat de l’intimée :

Me Andrée-Anne Lavoie

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs du jugement ci-joints :

  1. L’appel interjeté par Mme MacIntosh auprès de notre Cour, le cas échéant, relativement à son admissibilité à la prestation universelle pour la garde d’enfants (PUGE), est annulé.

  2. L’appel interjeté par Mme MacIntosh, à l’encontre de la nouvelle cotisation établie pour son année d’imposition 2016 relativement au refus de la déduction pour frais de garde d’enfants, est rejeté.

  3. L’appel interjeté par Mme MacIntosh à l’encontre de la nouvelle détermination établie par le ministre relativement à son admissibilité à l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour la période de juillet 2016 à juin 2017, calculée en fonction de l’année de base 2015, est rejeté.

  4. L’appel interjeté par Mme MacIntosh à l’encontre de la nouvelle détermination établie par le ministre relativement à son admissibilité à l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour la période de juillet 2017 à juin 2018, calculée en fonction de l’année de base 2016, est rejeté.

  5. Chaque partie assumera ses propres dépens.

  Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de juillet 2019.

« K.A. Siobhan Monaghan »

La juge Monaghan


Référence : 2019 CCI 155

Date : 20190719

Dossiers : 2018-1058(IT)I

2018-4229(IT)I

ENTRE :

AUDREY TEDFORD MACINTOSH,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Monaghan

I. INTRODUCTION

[1]  Audrey Tedford MacIntosh est mariée à Jason MacIntosh et ils vivent dans une maison que Mme MacIntosh a achetée environ quatre ans avant son mariage. M. et Mme MacIntosh se sont connus durant leurs études secondaires, mais ils se sont ensuite perdus de vue pendant de nombreuses années. Ils se sont revus à un certain moment en 2014 et sont devenus amis. Lorsque le mariage de M. MacIntosh a pris fin en 2014, il n’avait nulle part où aller; il a alors emménagé dans le sous-sol de la maison de Mme MacIntosh en tant que locataire. Ils ont commencé une relation conjugale en 2015 (la date n’est pas précisée) et ils se sont mariés le 24 juin 2016.

[2]  En 2016, Mme MacIntosh a demandé une déduction pour frais de garde d’enfants à l’égard de son fils né d’une relation antérieure. Mme MacIntosh recevait alors la prestation universelle pour la garde d’enfants (PUGE) et l’allocation canadienne pour enfants (ACE). Cependant, à la suite de son mariage, le ministre a rajusté son admissibilité et lui a refusé la déduction pour frais de garde d’enfants.

[3]  Mme MacIntosh interjette appel :

a)  de la nouvelle cotisation établie le 2 novembre 2017 pour l’année d’imposition 2016, relativement au refus de sa demande de déduction pour frais de garde d’enfants de 4 496 $ pour l’année d’imposition 2016;

b)  des nouvelles déterminations établies par le ministre le 13 décembre 2017, relativement à l’admissibilité de Mme MacIntosh à l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour les périodes de juillet 2016 à juin 2017 et de juillet 2017 à juin 2018.

[4]  Mme MacIntosh s’est opposée à la nouvelle cotisation établie le 2 novembre 2017, mais celle-ci a été confirmée par le ministre par voie d’un avis daté du 25 janvier 2018. Elle s’est également opposée aux nouvelles déterminations de son ACE, mais ces nouvelles déterminations ont elles aussi été confirmées par voie d’avis datés du 19 mai 2017 et du 25 septembre 2018. Mme MacIntosh a donc interjeté les présents appels.

[5]  L’intimée semble indiquer que Mme MacIntosh interjette également appel relativement à la prestation universelle pour la garde d’enfants (PUGE) pour la période de juillet 2016 à juin 2017. Cela m’apparaît toutefois moins évident d’après l’avis d’appel qui a été signifié, bien que la PUGE soit mentionnée dans l’avis de confirmation daté du 25 janvier 2018.

II. PRESTATION UNIVERSELLE POUR LA GARDE D’ENFANTS

[6]  La PUGE est allouée aux termes de la Loi sur la prestation universelle pour la garde d’enfants. À la suite des modifications apportées à la Loi sur la prestation universelle pour la garde d’enfants, aucune prestation n’est versée au titre de la PUGE à l’égard d’un mois postérieur à juin 2016. Qui plus est, la Cour canadienne de l’impôt n’a pas compétence pour instruire quelque appel relatif au rajustement de la PUGE ou au refus d’accorder cette prestation. La compétence de la Cour canadienne de l’impôt est définie à l’article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt (la LCCI). Or, ni la LCCI ni la Loi sur la prestation universelle pour la garde d’enfants ne confère à la Cour canadienne de l’impôt compétence à l’égard de la prestation universelle pour la garde d’enfants [1] . Je ne peux donc pas examiner quelque appel concernant la PUGE, et tout appel interjeté par Mme MacIntosh à l’égard de la PUGE doit être annulé.

III. QUESTION PRÉLIMINAIRE

[7]  Lors de l’audition de ces appels, une certaine confusion régnait quant à savoir quel appel était lié à quelles questions. Plus précisément, l’avis d’appel dans le dossier 2018-1058(IT)I précise qu’il concerne [traduction] « l’avis de confirmation daté du 25 janvier 2018, basé sur l’année d’imposition 2016 ». Cet avis de confirmation portait sur la déclaration de revenus, et non sur l’allocation canadienne pour enfants. Cependant, l’avis d’appel mentionne également les avis de nouvelle détermination de l’ACE datés du 19 mai 2017 et du 20 juin 2017, qui portaient sur l’année de base 2015. Il ne mentionne pas la nouvelle détermination établie le 13 décembre 2017 relativement à l’année de base 2015.

[8]  De même, l’avis d’appel relatif au dossier 2018-4229(IT)I précise qu’il porte sur [traduction] « l’avis de confirmation daté du 25 janvier 2018 concernant mes prestations au titre de l’allocation canadienne pour enfants pour l’année de base 2015 ». On y mentionne l’avis du 20 juin 2017 (et non du 20 juillet 2017, qui porte sur l’année de base 2016), ainsi qu’un avis daté du 13 décembre 2017. Je présume que la mention du mois de juin est une erreur d’écriture, et qu’il aurait plutôt dû y être indiqué « juillet », sinon l’appel interjeté par Mme MacIntosh ne porterait pas sur l’année de base 2016. L’avis renvoie au dossier 2018-1058(IT)I portant sur l’année de base 2016. Je crois qu’il s’agit là encore d’une erreur.

[9]  En conformité avec ces éléments, la réponse de l’intimée dans le dossier 2018-1058(IT)I porte sur l’année d’imposition 2016 et l’année de base 2015 (et donc sur l’ACE pour la période de juillet 2016 à juin 2017). La réponse de l’intimée dans le dossier 2018-4229(IT)I porte uniquement sur l’année de base 2016 (et donc sur l’ACE pour la période de juillet 2017 à juin 2018).

[10]  À la lumière des observations des parties, je conclus (a) que l’appel 2018-1058(IT)I porte sur l’année d’imposition 2016 et l’année de base 2015 (et donc sur l’admissibilité à l’ACE durant la période de juillet 2016 à juin 2017) et (b) que l’appel 2018-4229(IT)I porte sur l’année de base 2016 (et donc sur l’admissibilité à l’ACE pour la période de juillet 2017 à juin 2018).

IV. EXPOSÉ DES FAITS

[11]  Mme MacIntosh a deux enfants nés de relations antérieures. Sa fille, aujourd’hui dans la vingtaine, fréquentait l’Université de Kingston durant les périodes en cause. Son fils, qui n’a pas encore dix ans, est l’enfant pour lequel Mme MacIntosh a demandé une déduction pour frais de garde d’enfants et des prestations d’ACE. Mme MacIntosh a la garde exclusive de son fils. Son fils vit avec elle et M. MacIntosh à temps plein, bien que son père biologique apporte une aide financière modeste et qu’il voie son fils une fois par semaine, qui reste parfois pour la nuit.

[12]  Avant son mariage, M. et Mme MacIntosh ont conclu un contrat de mariage (l’accord) qui définit les divers droits et obligations de chacun et précise que les deux souhaitent conserver leur autonomie financière. Cet accord couvre un certain nombre de sujets, dont les responsabilités financières à l’égard des enfants. L’accord précise très clairement que Mme MacIntosh sera seule responsable des frais d’entretien des enfants. Il y est notamment indiqué ce qui suit : [traduction]

-  Mme MacIntosh ne demandera aucune pension alimentaire pour enfants à M. MacIntosh.

-  Toute interaction que M. MacIntosh pourrait avoir avec les enfants ne doit pas être interprétée comme signifiant que celui-ci tient lieu de parent.

-  Toute contribution faite par M. MacIntosh au titre des dépenses ou du mode de vie du ménage ne doit pas être interprétée comme indiquant qu’il veut subvenir aux besoins des enfants ou que les enfants sont des personnes à sa charge.

M. et Mme MacIntosh ont tous les deux témoigné relativement au contenu de l’accord et à la manière dont ils gèrent leurs affaires financières en conformité avec cet accord depuis leur mariage. Je considère que ce témoignage est véridique.

[13]  Par conséquent, les éléments de preuve montrent clairement que Mme MacIntosh assume toutes les dépenses associées aux enfants. Elle assume l’entière responsabilité des paiements hypothécaires ainsi que de la plupart des dépenses liées à l’entretien de la maison, bien que M. MacIntosh contribue un montant fixe chaque semaine et assume les frais liés au service de télévision par satellite et à sa propre voiture. Mme MacIntosh assume toutes les dépenses associées au soin et aux activités parascolaires de son fils. Bien que M. MacIntosh entretienne une relation saine et heureuse avec le fils de Mme MacIntosh, les deux parties ont clairement établi que Mme MacIntosh est la seule responsable du soin de son enfant, notamment lorsqu’il s’agit de l’amener chez le médecin ou à des activités ou encore lorsqu’il faut rester à la maison avec lui parce qu’il est malade et qu’il ne peut pas aller à l’école. Je considère que ce témoignage est véridique.

V. ANNÉE D’IMPOSITION 2016 : FRAIS DE GARDE D’ENFANTS

[14]  La Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi) autorise un contribuable à déduire des frais de garde d’enfants pour un enfant admissible, lorsque ces frais sont payés par le contribuable ou par une personne assumant les frais d’entretien de l’enfant durant l’année visée. Cependant, lorsque le revenu du contribuable qui a un enfant admissible dépasse le revenu d’une personne assumant les frais d’entretien de l’enfant, c’est cette personne qui doit alors demander la déduction pour frais de garde, sauf dans des circonstances limitées [2] .

[15]  En l’espèce, Mme MacIntosh prétend que son fils est son enfant admissible [3] . Ce fait n’est pas contesté. Les éléments de preuve établissent également que, durant les années en cause, le revenu de Mme MacIntosh était supérieur à celui de M. MacIntosh. La seule question en litige est donc de déterminer si M. MacIntosh était une personne assumant les frais d’entretien du fils de Mme MacIntosh pour l’année d’imposition 2016. Le cas échéant, en tant que personne assumant les frais d’entretien ayant le revenu le moins élevé, lui seul pourrait déduire les frais de garde pour enfants.

 

[16]  Mme MacIntosh fait valoir que, puisqu’elle seule assume la responsabilité financière de son fils et que M. MacIntosh n’a aucune responsabilité financière envers lui, M. MacIntosh ne devrait pas être considéré comme une personne assumant les frais d’entretien de son fils. En d’autres termes, elle allègue que, malgré son mariage à M. MacIntosh, elle est en fait un parent seul pour son fils; elle devrait donc avoir droit à la déduction pour frais de garde d’enfants comme si elle était parent unique.

[17]  Compte tenu des dispositions établies entre M. et Mme MacIntosh, je comprends parfaitement qu’elle puisse alléguer que M. MacIntosh ne devrait pas être considéré comme une personne assumant les frais d’entretien de son fils, du moins au sens financier. Cependant, la Loi définit ce qu’est une personne assumant les frais d’entretien d’un enfant admissible aux fins de la déduction pour frais de garde d’enfants, et cette définition s’applique, quel que soit le contrat ayant force obligatoire conclu entre M. et Mme MacIntosh. Ainsi, même si l’accord semble lier les MacIntosh, il n’est malheureusement pas pertinent en ce qui concerne leurs obligations fiscales.

[18]  Une personne assumant les frais d’entretien d’un enfant admissible d’un contribuable pour une année d’imposition s’entend d’une personne (autre que le contribuable) qui :

réside avec le contribuable à un moment donné au cours de l’année et à un moment donné dans les 60 jours suivant la fin de l’année;

est (i) le père ou la mère de l’enfant, (ii) l’époux ou conjoint de fait du contribuable ou (iii) un particulier qui a déduit un montant pour l’enfant en application de l’article 118 de la Loi [4] .

[19]  Comme il est clairement indiqué, le statut de personne assumant les frais d’entretien est déterminé en fonction du lieu où la personne réside et du lien qui existe entre cette personne et l’enfant ou le parent de l’enfant. Malgré l’utilisation de l’expression « assumant les frais », la personne n’est pas tenue d’apporter quelque soutien à l’enfant. De fait, une personne qui subvient entièrement aux besoins financiers d’un enfant pourrait ne pas satisfaire à la définition de personne assumant les frais d’entretien.

[20]  Alors, comment la définition s’applique-t-elle à l’appel interjeté par Mme MacIntosh? Mme MacIntosh est le contribuable et son fils est l’enfant admissible du contribuable. M. MacIntosh serait donc une personne assumant les frais d’entretien du fils de Mme MacIntosh pour l’année d’imposition 2016, si M. MacIntosh était l’époux ou conjoint de fait de Mme MacIntosh et qu’il a vécu avec elle à un moment donné au cours de l’année 2016 et à un moment donné au cours des 60 premiers jours de 2017.

[21]  M. et Mme MacIntosh se sont mariés en juin 2016 et ils ont vécu ensemble, avec le fils de Mme MacIntosh, durant toute l’année 2016 ainsi que durant les 60 premiers jours de 2017. Ils vivent toujours ensemble en tant couple marié.

[22]  Par conséquent, les conditions permettant à M. MacIntosh d’être une personne assumant les frais d’entretien du fils de Mme MacIntosh en 2016, au sens défini dans les dispositions relatives aux frais de garde d’enfants, sont satisfaites.

[23]  Comme M. MacIntosh était une personne assumant les frais d’entretien du fils de Mme MacIntosh en 2016, et que son revenu en 2016 était inférieur à celui de Mme MacIntosh, cette dernière ne peut déduire les frais de garde pour son fils pour l’année 2016.

VI. ALLOCATION CANADIENNE POUR ENFANTS [5]

[24]  Une personne n’est admissible à l’ACE pour un mois donné que si elle est un particulier admissible au début de ce mois à l’égard d’une personne à charge admissible. Les expressions « particulier admissible » et « personne à charge admissible » sont toutes deux définies aux fins de l’application des dispositions relatives à l’ACE. Il ne fait aucun doute que le fils de Mme MacIntosh est une personne à charge admissible [6] .

[25]  De même, il ne fait aucun doute que Mme MacIntosh est un particulier admissible à l’égard de son fils : elle réside avec lui [7] , elle est le parent qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de l’enfant [8] et elle est résidente du Canada [9] .

[26]  Cependant, l’allocation canadienne pour enfants à laquelle un particulier admissible a droit est déterminée en fonction du « revenu modifié » du particulier.

[27]  Le revenu modifié d’un particulier pour une année d’imposition donnée est calculé en faisant la somme du revenu du particulier pour l’année en question [10] et du revenu de la personne qui était l’époux ou le conjoint de fait visé du particulier à la fin de cette année d’imposition. La question en litige en l’espèce est de déterminer si le revenu modifié de Mme MacIntosh doit inclure le revenu de M. MacIntosh.

[28]  L’ACE est habituellement versée sur une période de 12 mois allant de juillet d’une année à juin de l’année suivante (période de versement de l’ACE). L’ACE versée au cours d’une période donnée est calculée en fonction du revenu modifié du particulier admissible pour l’année d’imposition ayant pris fin le 31 décembre précédant immédiatement le début de la période de versement de l’ACE. Cette année d’imposition est désignée « année de base » se rapportant à chaque mois de la période de versement de l’ACE. En d’autres termes, l’admissibilité à l’ACE durant chacun des mois de la période allant du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017 inclusivement est déterminée en fonction du revenu modifié de l’année d’imposition 2015, désignée à cette fin année de base 2015. L’admissibilité à l’ACE durant chacun des mois de la période allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 inclusivement est déterminée en fonction du revenu modifié de l’année d’imposition 2016, désignée à cette fin année de base 2016.

[29]  En 2016, Mme MacIntosh a reçu l’ACE pour son fils. Cependant, aux termes d’un avis daté du 13 décembre 2017, l’ACE à laquelle elle avait droit pour les périodes de juillet 2016 à juin 2017 (la période 2016-2017) et de juillet 2017 à juin 2018 (la période 2017-2018) a été révisée et réduite. Ces réductions résultaient de la relation entre Mme MacIntosh et M. MacIntosh. En d’autres termes, le ministre a jugé que le revenu modifié de Mme MacIntosh pour les années de base visées par ces périodes devrait inclure le revenu de M. MacIntosh durant ces années, car M. et Mme MacIntosh étaient conjoints de fait ou époux à la fin des années de base pertinentes.

[30]  Comme l’ACE à laquelle Mme MacIntosh avait droit avait initialement été déterminée en fonction uniquement de son revenu, les nouvelles déterminations établies par le ministre exigeaient qu’elle rembourse une partie des prestations qui lui avaient précédemment été versées au titre de l’ACE. Pour cette raison, Mme MacIntosh n’a pas reçu l’ACE pendant un certain temps, même si des avis l’avisaient qu’elle avait droit à de modestes prestations au titre de l’ACE. De fait, l’ACE a été retenue et appliquée pour réduire le montant que Mme MacIntosh devait rembourser, selon le ministre, car les prestations qui lui avaient été versées en 2016-2017 au titre de l’ACE dépassaient les montants auxquels elle avait droit durant cette période selon la nouvelle détermination établie par le ministre. Par conséquent, si l’on présume que la détermination, par le ministre, de l’ACE à laquelle Mme MacIntosh a droit est exacte, cette dernière a reçu l’ACE révisée durant la période 2017-2018, quoique peut-être sous une forme autre qu’un dépôt dans son compte bancaire.

A. Année de base 2015 : ACE pour les mois de juillet 2016 à juin 2017 inclusivement

[31]  La Cour est appelée à décider si M. MacIntosh était l’« époux ou conjoint de fait visé » de Mme MacIntosh le 31 décembre 2015. Le cas échéant, son revenu de 2015 doit être ajouté à celui de Mme MacIntosh pour calculer le revenu modifié de cette dernière. L’expression « époux ou conjoint de fait visé » est définie à cette fin [11] . Selon cette définition, M. MacIntosh était un époux ou conjoint de fait visé de Mme MacIntosh le 31 décembre 2015 si, à cette date, (i) il était son époux ou conjoint de fait et (ii) il ne vivait pas séparé d’elle [12] .

[32]  M. et Mme MacIntosh ne se sont mariés que le 24 juin 2016; par conséquent, M. MacIntosh n’était pas, au sens légal, l’époux de Mme MacIntosh le 31 décembre 2015.

[33]  Cependant, une personne qui devient un époux un jour donné peut être réputé, aux fins de l’ACE, avoir été un époux à une date antérieure. La Loi précise que, lorsqu’une personne devient l’époux visé d’un particulier admissible, le particulier est tenu d’aviser le ministre de cet événement avant la fin du prochain mois civil [13] . De plus, aux fins du calcul de l’ACE à verser au cours du mois avant la fin duquel l’avis doit être donné et de tout mois postérieur, cette personne est réputée avoir été l’époux du particulier admissible à la fin de l’année de base se rapportant à ce mois.

[34]  Comment cette règle déterminative s’applique-t-elle en l’espèce? M. MacIntosh est devenu l’époux visé de Mme MacIntosh en juin 2016, lorsqu’ils se sont mariés. Mme MacIntosh était donc tenue d’aviser le ministre de son mariage avant la fin de juillet 2016. Et, aux fins du calcul de l’ACE pour le mois de juillet 2016 et chacun des mois suivants, M. MacIntosh est réputé avoir été l’époux visé de Mme MacIntosh à la fin de 2015, et donc le 31 décembre 2015.

[35]  Pour calculer son revenu modifié pour l’année de base 2015, Mme MacIntosh devait donc inclure son revenu et celui de M. MacIntosh pour l’année d’imposition 2015. C’est ce que le ministre a fait. Par conséquent, l’appel interjeté par Mme MacIntosh à l’égard de l’ACE pour la période 2016-2017 est rejeté.

B. Année de base 2016 : ACE pour les mois de juillet 2017 à juin 2018 inclusivement

[36]  L’année de base 2016 est l’année d’imposition pertinente pour le calcul de l’ACE pour la période 2017-2018. Comme M. et Mme MacIntosh se sont mariés en juin 2016, ils étaient des époux visés à la fin de 2016. En d’autres termes, pour la période 2017-2018, même si la règle déterminative n’est pas pertinente, le résultat est le même. Pour calculer son revenu modifié pour l’année de base 2016, Mme MacIntosh doit inclure le revenu de M. MacIntosh pour l’année d’imposition 2016.

VII. CONCLUSION

[37]  Bien que je sois sensible à la situation de Mme MacIntosh, pour les motifs précités :

  1. L’appel interjeté par Mme MacIntosh auprès de notre Cour, le cas échéant, relativement à son admissibilité à la prestation universelle pour la garde d’enfants (PUGE), est annulé.

  2. L’appel interjeté par Mme MacIntosh, à l’encontre de la nouvelle cotisation établie pour son année d’imposition 2016 relativement au refus de la déduction pour frais de garde d’enfants, est rejeté.

  3. L’appel interjeté par Mme MacIntosh à l’encontre de la nouvelle détermination établie par le ministre relativement à son admissibilité à l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour la période de juillet 2016 à juin 2017, calculée en fonction de l’année de base 2015, est rejeté.

  4. L’appel interjeté par Mme MacIntosh à l’encontre de la nouvelle détermination établie par le ministre relativement à son admissibilité à l’allocation canadienne pour enfants (ACE) pour la période de juillet 2017 à juin 2018, calculée en fonction de l’année de base 2016, est rejeté.

  5. Chaque partie assumera ses propres dépens.

  Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de juillet 2019.

« K.A. Siobhan Monaghan »

La juge Monaghan


RÉFÉRENCE :

2019 CCI 155

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2018-1058(IT)I

2018-4229(IT)I

INTITULÉ :

AUDREY TEDFORD MACINTOSH c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 30 avril 2019

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge K.A. Siobhan Monaghan

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 juillet 2019

COMPARUTIONS :

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

Avocat de l’intimée :

Me Andrée-Anne Lavoie

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

s.o.

Cabinet :

s.o.

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] Voir Goldstein c. La Reine, 2013 CCI 165 (inf.); Perron c. La Reine 2017 CCI 220 (inf.); Fatima c. La Reine 2012 CCI 49 (inf.) et Moïse c. La Reine, 2009 CCI 187 (inf.).

[2] L’alinéa 63(2)b) autorise le contribuable au revenu plus élevé à demander une déduction pour frais de garde d’enfants, pour des périodes durant lesquelles l’autre personne assumant les frais d’entretien fréquente un établissement d’enseignement ou est détenue en prison, ou est dans l’incapacité de s’occuper des enfants à cause d’une infirmité mentale ou physique confirmée par un médecin praticien. Aucune de ces exceptions ne s’applique en l’espèce.

[3] L’enfant admissible d’un contribuable relativement à une année d’imposition est défini au paragraphe 63(3) de la Loi. Cette définition inclut l’enfant d’un contribuable ou de l’époux ou conjoint de fait du contribuable, l’enfant devant avoir moins de 16 ans à un moment quelconque de l’année.

[4] Voir la définition de « personne assumant les frais d’entretien » au paragraphe 63(3) de la Loi.

[5] Avant le 1er juillet 2016, l’allocation canadienne pour enfants était désignée « Prestation fiscale canadienne pour enfants ».

[6] Voir la définition de « personne à charge admissible » à l’article 122.6.

[7] Voir la condition a) de la définition de « personne à charge admissible » à l’article 122.6.

[8] Voir la condition b) de la définition de « personne à charge admissible » à l’article 122.6. Aux termes de l’alinéa f) de cette définition, on présume que la mère est le parent qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de l’enfant si celui-ci réside avec sa mère. Bien que cette présomption ne s’applique pas toujours, rien ne laisse croire qu’il n’en était pas ainsi en l’espèce. De plus, d’après les éléments de preuve présentés et les critères énoncés à l’article 6302 du Règlement de l’impôt sur le revenu, je conclus que Mme MacIntosh assume principalement la responsabilité pour le soin et l’éducation de son fils.

[9] Voir la condition c) de la définition de « personne à charge admissible » à l’article 122.6.

[10] Calculé sans tenir compte de certains éléments à inclure et certaines déductions, ainsi qu’il est décrit en détail dans la définition de « revenu modifié » à l’article 122.6.

[11] Voir l’article 122.6 de la Loi.

[12] Pour l’application de cette définition, ils ne sont pas considérés comme vivant séparés, sauf s’ils vivent séparés pour cause d’échec de leur mariage ou union de fait pendant une période d’au moins 90 jours. M. et Mme MacIntosh n’ont jamais vécus séparés pour cause d’échec de leur mariage ou union de fait.

[13] Voir le paragraphe 122.62(7) de la Loi.

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