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Dossier : 2017-1804(IT)I

ENTRE :

MICHAEL G. MCCARTHY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu les 12 septembre 2018 et 18 janvier 2019, à Moncton (Nouveau-Brunswick).

Devant : L’honorable juge B. Russell


Comparutions :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Rhoda Lemphers

 

JUGEMENT

  L’appel interjeté à l’encontre des trois nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, le 2 juillet 2017, pour les années d’imposition 2011, 2012 et 2013 est accueilli, le tout avec dépens de 600 $ en faveur de l’appelant, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs suivants :

  • a) conformément aux conditions énoncées dans le consentement partiel à jugement, signé au nom de chacune des parties aux présentes, dont une copie conforme est jointe au présent jugement;

  • b) les montants de l’indemnité figurant dans les feuillets T4 de l’appelant de 26 626,01 $ pour l’année d’imposition 2011, de 37,492,08 $ pour l’année d’imposition 2012 et de 35 569,63 $ pour l’année d’imposition 2013 doivent être déclarés à titre de revenu aux termes de l’alinéa 56(1)v) de la Loi de l’impôt sur le revenu fédérale, et sont donc déductibles pour le calcul du revenu imposable conformément au sous-alinéa 110(1)f)(ii) de cette loi.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour de mars 2019.

« B. Russell »

Le juge Russell


Référence : 2019 CCI 69

Date : 20190405

Dossier : 2017-1804(IT)I

ENTRE :

MICHAEL G. MCCARTHY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS MODIFIÉS DU JUGEMENT

Le juge Russell

Introduction

[1]  L’appelant, Michael McCarthy, interjette appel suivant la procédure informelle à l’égard des trois nouvelles cotisations établies le 2 juillet 2017 par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). Ces nouvelles cotisations portent sur ses années d’imposition 2011, 2012 et 2013, respectivement. Deux questions sont soulevées dans l’avis d’appel : le ministre a refusé la déduction de certaines dépenses d’entreprise et la déduction pour amortissement pour chacune de ces années, ainsi que la déduction pour indemnités, comme l’a demandé l’appelant.

[2]  La première de ces questions, la déduction de certaines dépenses d’entreprise et la déduction pour amortissement, a été traitée dans un « consentement partiel à jugement », signé par les deux parties et déposé auprès de la Cour peu de temps après la reprise de l’audience en date du 18 janvier 2019. J’y reviens à la fin des présents motifs. La deuxième question portant sur le refus de la déduction pour indemnités est la question principale abordée dans les présents motifs.

Preuve

[3]  Les faits pertinents établis en preuve sont ainsi résumés : pendant toute la période pertinente, l’appelant travaillait pour le gouvernement fédéral (l’« employeur ») comme agent correctionnel, dans un pénitencier fédéral du Nouveau-Brunswick. Cet emploi était assujetti à une convention collective entre le Conseil du Trésor et le syndicat de l’appelant, soit le Syndicat des agents correctionnels du Canada (la « convention collective »).

[4]  L’article 30.15 de la convention collective sous la rubrique « Congé pour accident de travail » dispose ce qui suit :

L’employé-e bénéficie d’un congé payé pour accident de travail d’une durée fixée raisonnablement par l’[e]mployeur lorsqu’une réclamation a été déposée en vertu de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État et qu’une commission des accidents du travail a informé l’[e]mployeur qu’elle a certifié que l’employé-e était incapable d’exercer ses fonctions en raison : a. d’une blessure corporelle subie accidentellement dans l’exercice de ses fonctions et ne résultant pas d’un acte délibéré d’inconduite de la part de l’employé-e [...]

[5]  En février 2011, l’appelant a été blessé accidentellement dans l’exécution de ses fonctions. Conformément à la convention collective, il a demandé et obtenu un congé de maladie payé en se servant de ses crédits de congé de maladie non utilisés, et il a déposé une demande d’indemnisation auprès de la Commission des accidents du travail du Nouveau-Brunswick, appelée TravailSécuritaireNB. En avril 2011, TravailSécuritaireNB a certifié que la blessure subie en service avait empêché l’appelant de travailler, et a donc approuvé sa demande d’indemnisation.

[6]  À la suite de cette approbation de TravailSécuritaireNB, l’employeur a accordé à l’appelant un « congé pour accident de travail ». Au début de ce congé, les crédits de congé de maladie que l’appelant avait demandés et utilisés après avoir subi sa blessure, y compris pour les trois premiers jours suivant le moment où la blessure est survenue, lui ont été remis. Ces mesures respectent à la fois les dispositions de la convention collective et les procédures de TravailSécuritaireNB.

[7]  L’appelant est demeuré en congé pour accident de travail pendant les trois années qui ont suivi (les années en cause), pendant lesquelles l’employeur lui a versé un revenu équivalent à son plein salaire comme agent correctionnel.

[8]  L’employeur a émis un feuillet T4 à l’appelant à l’égard de chacune des trois années d’imposition en question. Chaque année, le feuillet T4 précisait un montant équivalent au plein salaire de l’appelant, versé pour cette année d’imposition.

Question en litige

[9]  L’appelant soutient que 85 pour cent des paiements de l’employeur totalisant son plein salaire reçu pendant qu’il était en congé pour accident de travail constituaient des indemnités d’accident du travail et, par conséquent, devaient être déclarés conformément à l’alinéa 56(1)v) de la Loi, et étaient entièrement déductibles selon le sous-alinéa 110(1)f)(ii) de la Loi. Les trois montants en question s’élèvent à 26 626,01 $ (2011), 37 492,08 $ (2012) et 35 569,63 $ (2013).

[10]  Voilà la question en litige. Les paiements en question devaient-ils être déclarés en vertu des articles 3 et 5 de la Loi en tant que salaire normal, ou encore, est-ce que 85 pour cent de chacun de ces paiements constitue un revenu conformément à l’alinéa 56(1)v), rendant ainsi leur déclaration obligatoire :

indemnité reçue aux termes d’une loi fédérale ou provinciale sur les accidents du travail pour blessure, invalidité ou décès.

Analyse

[11]  Les indemnités qui doivent être déclarées conformément à l’alinéa 56(1)v) donnent droit à une déduction compensatoire totale selon le sous-alinéa 110(1)f)(ii) de la Loi. Cette dernière disposition est ainsi rédigée :

Pour le calcul du revenu imposable d’un contribuable pour une année d’imposition, il peut être déduit celles des sommes suivantes qui sont appropriées [...] f) [...] une indemnité reçue aux termes d’une loi fédérale ou provinciale sur les accidents du travail pour blessure, invalidité ou décès [...].

[12]  Je perçois cette disposition de compensation comme reflétant le principe général voulant que les dommages-intérêts versés pour lésions corporelles ne soient pas imposables. Dans le cas des fonctionnaires fédéraux, la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, ch.    C-50, dans sa version modifiée, dispose à l’article 9, dans un extrait pertinent, que :

Ni l’État ni ses préposés ne sont susceptibles de poursuites pour toute perte – notamment décès, blessure ou dommage – ouvrant droit au paiement d’une pension ou indemnité sur le Trésor ou sur des fonds gérés par un organisme mandataire de l’État.

[13]  Par conséquent, l’appelant ne peut intenter contre son employeur, la Couronne fédérale, une action en dommages-intérêts pour lésions corporelles (qui ne seraient pas imposables) lorsqu’une indemnité pour ce préjudice est payable par le Trésor. Il est tout à fait opportun que cette indemnité soit elle-même non imposable.

[14]  L’appelant cite des énoncés tirés du bulletin d’interprétation IT-202R2 de l’Agence du revenu du Canada (ARC), intitulé « Indemnités pour employés ou travailleurs », publié le 19 septembre 1985. L’ARC a depuis « archivé » le bulletin IT-202R2. Il est entendu que les bulletins d’interprétation de l’ARC n’ont pas force de loi, comme tous ces bulletins le mentionnent clairement. Les énoncés sur lesquels je me fonde particulièrement couvrent les paragraphes 1b) à 4 du bulletin d’interprétation. Ils sont ainsi libellés :

1b). Dans le présent bulletin, « Indemnité » comprend toute somme versée par une commission d’accidents du travail [...] et comprend toute indemnité reçue en vertu de la Loi sur l’indemnisation des employés de l’État [...].

[et]

4. [...] Un employé peut, aux termes d’un contrat de travail ou d’une convention collective, ou s’il bénéficie d’un congé pour accident avec plein salaire en vertu de la Loi sur l’administration financière, recevoir son salaire ou traitement durant une période où il a également droit à une indemnité d’accidents du travail. Lorsque, dans ces conditions, l’employé ne reçoit aucune indemnité d’une commission d’accidents du travail, le montant versé par son employeur, dans la mesure où il n’excède pas celui de l’indemnité, doit être inclus comme indemnité dans le calcul de son revenu pour cette année-là en vertu de l’alinéa 56(1)v). L’excédent, s’il y a lieu, doit être inclus dans le calcul du revenu de l’employé en vertu du paragraphe 5(1).

[15]  L’intimée cite une certaine jurisprudence contestant la position de l’appelant selon laquelle les montants en question doivent être déclarés en vertu de l’alinéa 56(1)v) de la Loi, et qu’ils sont par conséquent déductibles conformément au sous-alinéa 110(1)f)(ii) de la Loi. Évidemment, sous réserve de la doctrine du stare decisis, le ratio decidendi de la jurisprudence a force de loi, contrairement aux énoncés des bulletins d’interprétation de l’ARC, archivés ou non.

[16]  Dans l’arrêt Canada c. Whitney, 2002 CAF 266, la Cour d’appel fédérale (CAF) était appelée à décider si l’indemnité reçue par une employée du gouvernement du Nouveau-Brunswick, alors qu’elle était incapable de travailler en raison d’un accident du travail, tombait sous le coup de l’alinéa 56(1)v) et du sous-alinéa 110(1)f)(ii). En accueillant l’appel, la CAF a reconnu qu’il était fondamental de déterminer si l’indemnité avait été (comme ces dispositions précitées le prévoient de manière identique) « reçue en vertu d’une loi sur les accidents du travail […] ».

[17]  La CAF a établi que les montants pertinents n’avaient pas été versés « en vertu » d’une loi en matière d’indemnisation des accidents de travail. Dans cette affaire, le processus d’attestation de l’invalidité de la Commission des accidents du travail du Nouveau-Brunswick avait été intégré dans la convention collective entre le syndicat de la contribuable et le gouvernement du Nouveau-Brunswick, au moyen d’une simple entente entre ces deux parties, mais en l’absence d’un fondement législatif, y compris dans la Loi sur les accidents du travail, LRN -B 1973, c W-13, dans sa version modifiée. Par conséquent, dans cette affaire, la CAF a conclu que la participation de la commission des accidents du travail de la province et que son adoption du processus d’attestation de l’invalidité étaient « sans fondement statutaire ». Le pouvoir de verser les montants en question n’était pas de nature législative. Le pouvoir de verser l’indemnité provenait plutôt des seules conditions de la convention collective.

[18]  Dans l’arrêt Whitney, la CAF a également souligné que la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick précisait qu’une indemnité ne pouvait pas être versée tant qu’il n’y avait pas eu interruption de la rémunération pour une période équivalant à trois jours de travail; ce qui n’est pas arrivé. Il a également été souligné que la contribuable avait reçu cent pour cent de sa paie normale, et non seulement 85 pour cent de cette somme, comme le prévoyait la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick. Ces autres motifs ont étayé les conclusions de la CAF selon lesquelles le régime d’indemnisation de la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick n’avait pas été suivi.

[19]  Abordant le bulletin d’interprétation IT-202R2, la CAF a écrit ce qui suit :

[...] la Loi [de l’impôt sur le revenu] elle-même ne comporte aucune ambiguïté [...] et le Bulletin [IT-202R2], qui n’est pas un document de nature législative, ne peut donner naissance à une ambiguïté alors même qu’il ne s’en trouve aucune dans les dispositions pertinentes de la Loi [de l’impôt sur le revenu].

[20]  Peu de temps après, une différente formation de la CAF a statué sur l’arrêt Suchon c. Canada, 2002 CAF 282. Dans cette affaire, un employé d’IBM, avait subi des blessures lors d’un événement d’IBM qui l’ont confiné à un fauteuil roulant. Au fil du temps, il ne pouvait plus occuper ses fonctions; il a donc été inscrit au programme de prestations d’invalidité d’IBM et a par la suite touché des revenus. Il a soutenu que l’alinéa 56(1)v) et le sous-alinéa 110(1)f)(ii) de la Loi devraient s’appliquer à ce revenu. En rejetant l’appel, la juge Sharlow a écrit ce qui suit (au paragraphe 18 de l’arrêt) :

La Cour a décidé [dans l’arrêt Whitney] que l’indemnité n’était pas visée par l’alinéa 56(1)v) et [le] sous-alinéa 110(1)f)(ii), sauf si elle était versée en vertu d’une loi concernant l’indemnisation des accidents du travail. Une indemnité versée en vertu d’un accord contractuel, même si elle comporte une décision rendue par un comité ou une commission d’indemnisation des travailleurs en dehors de l’exercice de sa compétence réglementaire, est hors du champ d’application de ces dispositions. Dans la mesure où le bulletin IT-202R2 n’est pas conforme à cette interprétation, il est erroné en droit.

[21]  L’intimée a également cité un arrêt de la Cour suprême du Canada – Martin c. Alberta (Workers’ Compensation Board), 2014 CSC 25. L’appelant, M. Martin, était un employé du gouvernement fédéral, en Alberta. Il a fait une demande d’indemnisation des accidentés du travail fondée sur une blessure qu’il prétend avoir subie (stress engendré par l’employeur) dans son milieu de travail, l’obligeant à prendre une absence autorisée indemnisée. Le Workers’ Compensation Board de l’Alberta a rejeté la demande de M. Martin en raison d’une politique provinciale. Une question préliminaire était de savoir si la politique provinciale devrait ou pouvait être utilisée pour trancher une demande d’indemnisation d’un employé fédéral.

[22]  À cet égard, l’article 4 de la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État, L.R.C. 1985, ch. G5 (dans sa version modifiée) (LIAÉ) a été mis en évidence. (Il est entendu que la LIAÉ n’était pas pertinente dans l’un ou l’autre jugement de la CAF précité, puisque ni l’un ni l’autre ne concernait un employé du gouvernement fédéral.) Les paragraphes 4(1), 4(2), 4(3) et 4(6) de la LIAÉ disposent ce qui suit :

4. [Personnes admissibles à une indemnité] (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, il est versé une indemnité :

a) aux agents de l’État qui sont :

(i) soit blessés dans un accident survenu par le fait et à l’occasion de leur travail,

(ii) soit devenus invalides par suite d’une maladie professionnelle attribuable à la nature de leur travail;

b) aux personnes à charge des agents décédés des suites de l’accident ou de la maladie.

(2) [Taux et conditions] Les agents de l’État visés au paragraphe (1), quelle que soit la nature de leur travail ou la catégorie de leur emploi, et les personnes à leur charge ont droit à l’indemnité prévue par la législation – aux taux et conditions qu’elle fixe – de la province où les agents exercent habituellement leurs fonctions en matière d’indemnisation des travailleurs non employés par Sa Majesté – et de leurs personnes à charge, en cas de décès – et qui sont :

a) soit blessés dans la province dans des accidents survenus par le fait ou à l’occasion de leur travail;

b) soit devenus invalides dans la province par suite de maladies professionnelles attribuables à la nature de leur travail.

(3) [Détermination de l’indemnité] L’indemnité est déterminée :

a) soit par l’autorité – personne ou organisme – compétente en la matière, pour les travailleurs non employés par Sa Majesté et leurs personnes à charge, en cas de décès, dans la province où l’agent de l’État exerce habituellement ses fonctions;

b) soit par l’autorité, judiciaire ou autre, que désigne le gouverneur en conseil.

(6) [Indemnité, etc. versée par le Trésor] Peuvent être payés sur le Trésor :

a) les indemnités et frais accordés au titre de la présente loi;

b) les avances comptables – à toute autorité habilitée par la législation d’une province ou sous le régime de la présente loi à trancher les cas d’indemnisation – jugées utiles par le Conseil du Trésor pour couvrir les indemnités et frais qui peuvent être accordés sous le régime de la présente loi;

c) pour les provinces où les frais de fonctionnement de l’autorité compétente sont assumés par la province ou couverts par les cotisations des employeurs, ou par les deux à la fois, la fraction de ces cotisations que le Conseil du Trésor estime juste et raisonnable;

d) pour les provinces où l’autorité expose des dépenses en vue d’aider les victimes à se réadapter ou à faire disparaître tout handicap résultant de leurs blessures, la fraction de ces dépenses que le Conseil du Trésor estime juste et raisonnable;

e) les avances comptables – à toute autorité –, pour les dépenses visées aux alinéas c) et d), que le Conseil du Trésor juge utiles.

[23]  Dans l’arrêt Martin, la Cour suprême du Canada a confirmé qu’en vertu de la LIAÉ, les lois ou politiques provinciales s’appliquent à un employé fédéral aux fins d’indemnisation des travailleurs. Le libellé de la LIAÉ était clair, et, comme suite logique, les lois et politiques provinciales applicables s’appliquaient également à la question préliminaire des critères d’admissibilité (Martin, aux paragraphes 20 à 28).

[24]  Je conclus donc que l’indemnité reçue par l’appelant dans le présent appel, qui correspond à 85 pour cent de son plein salaire pendant qu’il était en congé pour accident de travail, constituait une indemnité « reçue en vertu d’une loi sur les accidents de travail […] » étant le libellé de la Loi commun à l’alinéa 56(1)v) et au sous-alinéa 110(1)f)(ii). En l’espèce, la loi pertinente sur les accidents de travail est la LIAÉ fédérale qui établit le droit à l’indemnisation, incorporant par renvoi et déléguant les questions pertinentes à TravailSécuritaireNB, y compris la détermination de l’admissibilité et la fixation du montant. En ce qui concerne le montant, nous notons que le paragraphe 38.11(2) de la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick limite l’indemnité à un maximum de 85 pour cent de la rémunération.

[25]  En l’espèce, la procédure prévue par la loi, comprenant les politiques, est indiquée de façon centralisée dans la convention collective de l’appelant. La convention collective renvoie aux rôles et fonctions de TravailSécuritaireNB, qui ne sont pas sans fondement statutaire, comme dans l’arrêt Whitney. Ils sont prévus par la LIAÉ, notamment à son article 4.

[26]  En l’espèce, l’indemnité de 85 pour cent de la paie de l’appelant a été versée par le gouvernement fédéral (étant son propre assureur), plutôt que par TravailSécuritaireNB. Cela est sanctionné par le législateur à l’alinéa 4(6)a) de la LIAÉ, précitée, qui autorise le gouvernement fédéral à prélever sur le Trésor, « les indemnités [...] accordé[e]s au titre de la présente loi ». L’indemnité accordée dans le contexte du processus d’indemnisation des accidentés du travail provincial applicable, un processus que la LIAÉ a incorporé par renvoi, a donc été « accordé[e] au titre de la présente loi »; c.-à-d. en vertu de la LIAÉ.

[27]  L’intimée soutient qu’un montant de plus de 85 pour cent de sa rémunération a été versé à l’appelant. Il a reçu 100 pour cent de sa paie normale. Ce n’est cependant pas un problème. Seulement 85 pour cent du total de sa paie normale constituait une indemnité, comme il est établi dans le processus d’indemnisation des accidentés du travail du Nouveau-Brunswick. Puisqu’il a également reçu le reste, soit 15 pour cent de sa paie normale, ne change rien au fait que la première tranche de 85 pour cent constituait une indemnité en vertu de la LIAÉ.

[28]  L’intimée soutient également que les paiements en question n’ont pas été effectués en vertu de la LIAÉ, puisque la procédure prévue dans la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick n’a pas été suivie, dans la mesure où le paragraphe 38.11(3) de cette loi exige une interruption de la rémunération et des avantages pour une période minimale de trois jours de travail. L’intimée fait valoir que cette disposition n’a pas été respectée, parce que les congés de maladie ont été affectés aux trois jours, qui ont par la suite été convertis en congés payés pour accident de travail, et que, par conséquent, l’appelant n’avait subi aucune interruption de rémunération.

[29]  Toutefois, comme l’a souligné l’appelant, le paragraphe 38.11(7) de la Loi sur les accidents du travail du Nouveau-Brunswick rend non applicable la disposition relative aux trois jours prévue au paragraphe 38.11(3), lorsque l’incapacité découlant de la lésion se poursuit pendant plus de vingt jours de travail, comme c’était manifestement le cas en l’espèce. Je renvoie au libellé pertinent du paragraphe 38.11(7) :

Lorsqu’un travailleur souffre d’une incapacité entraînée par une lésion [...] pendant plus de vingt jours de travail, la Commission lui verse une indemnité relativement à la période visée au paragraphe (3) [...].

[30]  Compte tenu de ce qui précède, je conclus en faveur de la prétention de l’appelant selon laquelle 85 pour cent de sa paie normale reçue au cours des années d’imposition en cause, pendant qu’il était en congé pour accident de travail, constituait du revenu conformément à l’alinéa 56(1)v) de la Loi, et était donc déductible selon le sous-alinéa 110(1)f)(ii) de la Loi.

[31]  Pour revenir à la première question en litige concernant le refus de déduire certaines dépenses d’entreprise et un amortissement, question pour laquelle un « consentement partiel à jugement » a été déposé, j’accepte les conditions dudit consentement, comme en témoigne mon jugement rendu en même temps et conformément aux présents motifs du jugement.

[32]  J’accorde également à l’appelant des dépens de 600 $ sous le régime de la présente procédure informelle.

Les présents motifs modifiés du jugement remplacent les motifs du jugement datés du 29 mars 2019.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour d’avril 2019.

« B. Russell »

Le juge Russell


RÉFÉRENCE :

2019 CCI 69

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2017-1804(IT)I

INTITULÉ :

MICHAEL G. MCCARTHY c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Moncton (Nouveau-Brunswick)

DATES DE L’AUDIENCE :

Le 12 septembre 2018

Le 18 janvier 2019

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge B. Russell

DATE DU JUGEMENT :

DATE DES MOTIFS MODIFIÉS DU JUGEMENT :

Le 29 mars 2019

Le 5 avril 2019

COMPARUTIONS :

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Rhoda Lemphers

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

[EN BLANC]

 

Cabinet :

[EN BLANC]

 

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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