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Dossiers : 2012-3093(IT)G

2012-3094(IT)G

ENTRE :

2078970 ONTARIO INC., EN SA QUALITÉ D’ASSOCIÉE DÉSIGNÉE DE LUX OPERATING LIMITED PARTNERSHIP,

et

2078702 ONTARIO INC., EN SA QUALITÉ D’ASSOCIÉE DÉSIGNÉE DE LUX INVESTORS LIMITED PARTNERSHIP,

requérantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 


ORDONNANCE RELATIVE AUX DÉPENS

Devant : L’honorable juge David E. Graham

Participants :

Avocats des requérantes :

Me David R. Davies

Me Shawn W. Tryon

Avocats de l’intimée :

Me Michael Taylor

Me Raj Grewal

 

ORDONNANCE

  Des dépens s’élevant à 66 592,75 $ sont adjugés aux requérantes, auxquels s’ajoutent 735,95 $ en débours et la TPS applicable.

  Aucuns dépens ne sont accordés à l’une ou à l’autre des parties à l’égard de leurs observations sur les dépens.

  Le paiement des montants ci-dessus peut être reporté jusqu’à ce que l’appel de l’intimée à la Cour d’appel fédérale soit tranché.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour d’octobre 2018.

« David E. Graham »

Le juge Graham

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’avril 2019.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2018 CCI 214

Date : 20181031

Dossiers : 2012-3093(IT)G

2012-3094(IT)G

ENTRE :

2078970 ONTARIO INC., EN SA QUALITÉ D’ASSOCIÉE DÉSIGNÉE DE LUX OPERATING LIMITED PARTNERSHIP,

et

2078702 ONTARIO INC., EN SA QUALITÉ D’ASSOCIÉE DÉSIGNÉE DE LUX INVESTORS LIMITED PARTNERSHIP,

requérantes,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

Le juge Graham

[1]  Dans mon ordonnance datée du 11 juillet 2018, j’ai répondu en faveur des requérantes à une question qui m’avait été posée en vertu de l’article 58 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (Procédure générale) (« l’article 58 des Règles »). J’ai également accordé les dépens aux requérantes. J’ai donné aux parties le temps de s’entendre sur les dépens, à défaut de quoi elles devaient présenter des observations écrites sur les dépens. Les parties ne sont pas parvenues à s’entendre et elles ont maintenant présenté des observations écrites.

[2]  Les requérantes demandent des dépens de 194 038,10, $ plus les débours et la TPS. Ces dépens représentent 50 % des honoraires des requérantes à partir du moment de la préparation et du dépôt des avis d’appel jusqu’à la rédaction des avis de requête pour la présentation de la requête aux termes de l'article 58 des Règles, plus 75 % des honoraires des requérantes par la suite, et tous les débours et la TPS pertinente. Les requérantes ne demandent qu’on leur accorde qu’un seul mémoire de dépens.

[3]  L’intimée fait valoir que des dépens correspondant à un pourcentage se situant entre 20 % et 25 % des frais réellement engagés par les requérantes relativement à la requête aux termes de l'article 58 des Règles seraient plus appropriés.

[4]  Il y a deux questions que je dois aborder. La première est la portée des dépens. La seconde est le montant des dépens.

Portée des dépens

[5]  Les requérantes demandent des dépens pour l’ensemble de leurs appels. L’intimée soutient que les dépens ne devraient être payables que pour la requête aux termes de l'article 58 des Règles. Je suis d’accord avec l’intimée.

[6]  L’alinéa 147(5)a) des Règles permet à la Cour d’adjuger les dépens relativement à une étape de l’instance. Dans mon ordonnance, j’ai accordé les dépens aux requérantes par rapport aux deux étapes de la requête aux termes de l'article 58 des Règles [1] . Je n’ai pas adjugé les dépens relativement à l’appel lui-même. Même si ma décision concernant la requête aux termes de l’article 58 des Règles a pour effet de résoudre les appels, cela ne s’est pas encore produit. Au contraire, l’intimée a interjeté appel de ma décision devant la Cour d’appel fédérale. Par conséquent, il serait à la fois inapproprié et prématuré pour moi de traiter des dépens liés à l’ensemble des appels. Si la Cour d’appel fédérale confirme ma décision et que l’intimée consent ultimement au jugement en faveur des requérantes, les parties peuvent alors s’engager dans les processus d’adjudication des dépens relatifs à l’appel.

[7]  Compte tenu de tout ce qui précède, je ne traiterai que des dépens liés à la requête aux termes de l’article 58 des Règles.

Montants des dépens

[8]  Le paragraphe 147(3) des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale) énonce les facteurs dont la Cour peut tenir compte en attribuant des dépens.

Le résultat de l’instance

[9]  Le résultat d’une instance peut influer sur les dépens de deux façons. Le niveau général de réussite d’une partie est un facteur important pour déterminer si les dépens devraient être adjugés à une partie. Lorsqu’un tribunal décide d’adjuger des dépens à une partie, le niveau général de réussite de la partie peut également servir de facteur pour déterminer le montant de ces dépens.

[10]  À mon avis, au moment de déterminer le montant des dépens à adjuger, l’issue de l’instance n’est qu’un facteur approprié à prendre en considération s’il est possible qu’une partie ait eu partiellement gain de cause dans l’instance. Lorsqu’une instance porte sur un certain nombre de questions différentes et qu’une partie a eu gain de cause à l’égard de toutes ces questions, cette situation militera en faveur d’un montant plus élevé de dépens. Si une instance porte sur un certain nombre de questions différentes et qu’une partie obtient gain de cause sur seulement une partie de ces questions, le niveau général de réussite de cette partie entrera en ligne de compte au moment de déterminer le montant des dépens. Si une instance porte sur une seule question pour laquelle il existe un certain nombre de différentes issues possibles (p. ex., une question d’évaluation), le niveau de réussite d’une partie sur cette question sera pertinent par rapport au montant des dépens. Cependant, lorsque le seul choix qui s’offre à la Cour est de trancher entre l’une ou l’autre des positions, sans qu’il soit possible de donner gain de cause en partie à l’une des parties, le fait qu’une partie ait obtenu gain de cause par rapport à cette question ne devrait pas, à mon avis, influer sur le montant des dépens adjugés. La partie a obtenu gain de cause. Cette réussite n’a pas été de plus grande ou de moindre ampleur que ce que la partie aurait pu espérer obtenir; par conséquent, ce facteur n’exerce aucune influence dans un sens ou dans l’autre sur le montant des dépens.

[11]  Les requérantes ont entièrement obtenu gain de cause dans leur requête aux termes de l'article 58 des Règles. C’est pour cette raison que je leur ai accordé des dépens. Toutefois, ce n’est pas une raison pour accorder des dépens plus élevés. La question soulevée dans la requête aux termes de l’article 58 des Règles obligeait la Cour à trancher entièrement en faveur de l’une des deux parties. Ainsi, le fait que les requérantes aient entièrement obtenu gain de cause indique qu’elles ont obtenu gain de cause, rien de plus. Par conséquent, au moment de déterminer le montant des dépens à adjuger aux requérantes, je n’accorde aucun poids au fait que les requérantes ont entièrement obtenu gain de cause.

Les sommes en cause

[12]  Le montant en cause dans les appels est important. Il totalise 33 876 914 $ en déductions refusées et en inclusions au revenu. Étant donné qu’une décision en faveur des requérantes sur la requête aux termes de l'article 58 des Règles devrait permettre aux requérantes d’obtenir gain de cause dans leurs appels, la somme en cause dans la requête aux termes de l'article 58 des Règles équivaut au montant en cause dans les appels. Ce montant important milite en faveur de l’adjudication de dépens élevés.

L’importance des questions en litige

[13]  La question tranchée dans la requête aux termes de l’article 58 des Règles est importante pour l’évolution du droit fiscal. La décision clarifie le mécanisme d’un certain nombre de dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu qui n’ont pas été examinées auparavant et, ce faisant, procure une certitude procédurale au ministre du Revenu national et aux contribuables.

[14]  De plus, il semble que la décision puisse avoir une incidence immédiate dans l’instance de l’affaire Sentinel Hill [2] . Ce n’est pas à moi d’analyser ou de décrire les répercussions possibles. Je suis toutefois convaincu que, tout au moins, l’analyse juridique de la décision aidera les parties et la Cour dans le cadre de cet appel.

[15]  Tout ce qui précède milite en faveur de l’adjudication d’un montant élevé de dépens.

Les offres de règlement

[16]  Aucune offre de règlement n’a été faite dans le cadre de la requête aux termes de l’article 58 des Règles. Cela n’a rien d’étonnant étant donné la nature de la question dont j’étais saisi et à laquelle je ne pouvais répondre que par tout ou rien.

La complexité des questions en litige

[17]  Les questions soulevées dans la requête aux termes de l’article 58 des Règles étaient complexes. Elles exigeaient une analyse textuelle, contextuelle et téléologique du paragraphe 152(1.4). Étant donné l’absence de jurisprudence concernant ce paragraphe et les paragraphes 152(1.7) et (1.8), l’analyse contextuelle était particulièrement complexe. Dans l’ensemble, la complexité des enjeux milite en faveur de dépens plus élevés.

La charge de travail

[18]  La quantité de travail en cause dans la requête aux termes de l’article 58 des Règles n’était pas importante et correspondait à la complexité des enjeux. Il y a eu un jour et demi d’audience, soit une demi-journée pour la première étape de la requête et une journée complète pour la seconde. Par conséquent, je n’accorde aucun poids supplémentaire à ce facteur.

La conduite d’une partie ayant influencé la durée de l’instance

[19]  Lorsqu’il est question de dépens relativement à une requête aux termes de l’article 58 des Règles, il est important de tenir compte de l’effet que la présentation de la requête a eu sur l’appel sous-jacent. Une requête au titre de l’article 58 des Règles qui tranche ou raccourcit considérablement la durée d’un appel sous-jacent permet aux deux parties d’économiser temps et argent. La dépense qui donne lieu à ces économies est le coût de la présentation de la requête aux termes de l’article 58 des Règles. Par conséquent, le moment logique de tenir compte de ces économies survient lorsqu’il est question d’adjuger les dépens relativement à la requête aux termes de l’article 58 des Règles. Le fait de reporter l’examen de ces économies jusqu’à l’attribution des dépens à l’égard de l’appel sous-jacent obligerait la Cour à revoir les dépens qui ont déjà été adjugés pour la requête aux termes de l’article 58 des Règles et à déterminer si une partie supplémentaire de ces dépens devrait être prise en compte à l’égard de l’appel dans son ensemble. Cela semble inutilement compliqué. Cela pourrait aussi amener le juge qui a entendu l’appel à remettre en question les dépens adjugés par le juge qui a entendu la requête aux termes de l'article 58 des Règles. Compte tenu de tout ce qui précède, je conclus qu’il convient de tenir compte de l’effet d’une requête aux termes de l’article 58 des Règles sur l’ensemble du procès au moment d’attribuer les dépens pour la requête aux termes de l’article 58 des Règles.

[20]  En présentant et en plaidant avec succès la requête aux termes de l'article 58 des Règles, les requérantes ont évité d’avoir à s’engager dans un long procès comportant une multitude de questions complexes de fait et de droit. Cela a permis aux deux parties d’économiser beaucoup de temps et d’argent. Tout cela milite fortement en faveur d’une augmentation des dépens.

La dénégation d’un fait ou un refus d’admettre

[21]  Rien n’indique que l’une ou l’autre des parties ait nié un fait ou refusé d’admettre quoi que ce soit qui aurait dû être admis.

Les étapes inappropriées, vexatoires ou inutiles

[22]  Aucun élément de preuve n’indiquait qu’une étape quelconque de l’instance était inappropriée, vexatoire ou inutile.

Les étapes accomplies de manière négligente, par erreur ou par excès de prudence

[23]  Aucun élément de preuve n’indique qu’une étape quelconque de la procédure a été accomplie de manière négligente, par erreur ou par excès de prudence.

Le caractère justifié du recours à un ou plusieurs témoins experts

[24]  Il n’y avait pas de témoins experts.

Toute autre question pertinente

[25]  L’intimée soutient que les frais engagés par les requérantes relativement à la requête aux termes de l'article 58 des Règles sont trop élevés et qu’il ne devrait pas incomber à l’intimée d’indemniser les requérantes pour leurs frais « extravagants ». L’intimée cite les dépens adjugés dans d’autres instances qui, selon elle, étaient plus complexes.

[26]  Les frais réellement engagés par les requérantes dans le cadre de la requête aux termes de l'article 58 des Règles étaient de 133 185,50 $. Je suis d’accord avec l’intimée pour dire que ce montant semble élevé pour l’audition d’une requête d’une journée et demie. Toutefois, cela ne semble pas très exagéré, compte tenu du montant en cause et de la complexité de la question. Dans l’ensemble, ce facteur milite en faveur de dépens légèrement moindres.

Conclusion

[27]  Dans l’ensemble, à la lumière de tous les facteurs mentionnés ci-dessus, et en particulier, de l’importance des enjeux et du temps économisé par la présentation de la requête aux termes de l'article 58 des Règles, j’estime que des dépens équivalant à 50 % des frais réellement engagés par les requérantes sont appropriés. Les frais réellement engagés par les requérantes pour la présentation d’une requête aux termes de l'article 58 des Règles étaient de 133 185,50 $. Par conséquent, j’accorde aux requérantes des dépens s’élevant à 66 592,75 $.

[28]  Les débours des requérantes liés à la requête aux termes de l'article 58 des Règles étaient de 735,95 $. L’intimée doit payer ces débours.

[29]  L’intimée doit payer toute la TPS applicable sur tout ce qui précède.

[30]  Aucuns dépens ne sont accordés à l’une ou l’autre des parties à l’égard de leurs observations sur les dépens.

[31]  Étant donné que cette question fait l’objet d’un appel à la Cour d’appel fédérale, le paiement des montants ci-dessus peut être reporté jusqu’à ce que l’appel soit tranché.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour d’octobre 2018.

« David E. Graham »

Le juge Graham

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’avril 2019.

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :

2018 CCI 214

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2012-3093(IT)G

2012-3094(IT)G

INTITULÉ :

2078970 ONTARIO INC., en sa qualité d’ASSOCIÉe désignéE de LUX OPERATING LIMITED PARTNERSHIP et de 2078702 ONTARIO INC., en sa qualité d’ASSOCIÉe désignéE de LUX INVESTORS LIMITED PARTNERSHIP c. SA MAJESTÉ LA REINE

DATE DE L’AUDIENCE :

Requête tranchée sur la base d’observations écrites

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge David E. Graham

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 31 octobre 2018

PARTICIPANTS :

Avocats des requérantes :

Me David R. Davies

Me Shawn W. Tryon

Avocats de l’intimée :

Me Michael Taylor

Me Raj Grewal

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour les requérantes

Nom :

Me David R. Davies

Me Shawn W. Tryon

Cabinet :

Thorsteinssons LLP

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 



[1]  Même si je n’ai pas procédé à l’audition de la première étape de la requête aux termes de l’article 58 des Règles, l’ordonnance du juge Visser du 7 septembre 2017 prévoyait que les dépens à cette étape devaient être déterminés par le juge qui mènerait l’audition de la seconde étape de la requête.

[2]  Sentinel Hill Productions IV Corporation en sa qualité d’associée désignée de SHAAE (2001) Master Limited Partnership c. La Reine, dossier de la Cour canadienne de l’impôt nº 2009-2248(IT)G.

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