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Dossier : 2017-2230(IT)I

ENTRE :

SANDRA ANNE MOTTLE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 24 avril 2018, à Kelowna (Colombie-Britannique)

Devant : L’honorable juge B. Russell


Comparutions :

Représentant de l’appelante :

Me Robert Wignall

Avocat de l’intimée :

Me Marta Zemojtel

 

JUGEMENT

  L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie le 11 décembre 2015 en application de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) est rejeté sans dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de juin 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


Référence : 2018 CCI 116

Date : 20180620

Dossier : 2017-2230(IT)I

ENTRE :

SANDRA ANNE MOTTLE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Russell

[1]  L’appelante, Mme Mottle, a interjeté appel (procédure informelle) d’une cotisation d’un montant de 10 849,92 $ en application de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la Loi) à l’égard d’un transfert de bien avec lien de dépendance à son endroit. La cotisation a été établie par le ministre du Revenu national (le ministre) le 11 décembre 2015, conformément au paragraphe 160(2) de la Loi. Elle est fondée sur l’hypothèse du ministre selon laquelle à compter de cette date, l’époux de l’appelante avait une dette impayée de 37 350,08 $ en application de la Loi et que, durant la période du 6 septembre 2013 au 18 juillet 2014, l’époux de l’appelante a pris des mesures pour que ses chèques de paye soient déposés par voie électronique dans le compte bancaire de Mme Mottle.

[2]  Cela s’est produit à 20 reprises différentes durant cette période, ce qui représente un transfert total de 10 849,92 $ au 18 juillet 2014. L’intimée a également présenté l’hypothèse, qui n’a pas été contestée, selon laquelle la dette de l’époux en application de la Loi s’élevait à 36 255,55 $ au 22 avril 2013 et est restée à ce montant jusqu’au 23 juin 2014, moment où elle a augmenté de 94,53 $ pour atteindre la somme susmentionnée de 37 350,08 $ à la date de la cotisation. Par conséquent, la dette fiscale dépassait de beaucoup le montant précis transféré à chacune des 20 occasions susmentionnées durant la période du 6 septembre 2013 au 18 juillet 2014.

[3]  Les montants transférés allaient de 100 $ le 17 mai 2014 à 1 500 $ le 6 septembre 2013. Le motif donné pour ces transferts dans le compte bancaire de l’appelante était que l’époux de celle-ci n’avait pas de compte à lui et qu’il était pratique pour son employeur, une personne qui était souvent à l’extérieur de la ville, de pouvoir le payer par transfert électronique.

[4]  Ces 20 transferts électroniques du chèque de paye de l’époux de l’appelante provenant de son employeur, faits directement dans le compte bancaire de l’appelante, constituent-ils des transferts aux termes du paragraphe 160(1) de la Loi? Ce paragraphe prévoit ce qui suit :

Transfert de biens entre personnes ayant un lien de dépendance

160(1) Lorsqu’une personne a, depuis le 1er mai 1951, transféré des biens, directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toutes autres façons à l’une des personnes suivantes :

a) son époux ou conjoint de fait ou une personne devenue depuis son époux ou conjoint de fait;

b) une personne qui était âgée de moins de 18 ans;

c) une personne avec laquelle elle avait un lien de dépendance,

les règles suivantes s’appliquent :

d) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement d’une partie de l’impôt de l’auteur du transfert en vertu de la présente partie pour chaque année d’imposition égale à l’excédent de l’impôt pour l’année sur ce que cet impôt aurait été sans l’application des articles 74.1 à 75.1 de la présente loi et de l’article 74 de la Loi de l’impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts revisés (sic) du Canada de 1952, à l’égard de tout revenu tiré des biens ainsi transférés ou des biens y substitués ou à l’égard de tout gain tiré de la disposition de tels biens;

e) le bénéficiaire et l’auteur du transfert sont solidairement responsables du paiement en vertu de la présente loi d’un montant égal au moins élevé des montants suivants :

(i) l’excédent éventuel de la juste valeur marchande des biens au moment du transfert sur la juste valeur marchande à ce moment de la contrepartie donnée pour le bien,

(ii) le total des montants représentant chacun un montant que l’auteur du transfert doit payer en vertu de la présente loi (notamment un montant ayant ou non fait l’objet d’une cotisation en application du paragraphe (2) qu’il doit payer en vertu du présent article) au cours de l’année d’imposition où les biens ont été transférés ou d’une année d’imposition antérieure ou pour une de ces années.

Toutefois, le présent paragraphe n’a pas pour effet de limiter la responsabilité de l’auteur du transfert en vertu de quelque autre disposition de la présente loi ni celle du bénéficiaire du transfert quant aux intérêts dont il est redevable en vertu de la présente loi sur une cotisation établie à l’égard du montant qu’il doit payer par l’effet du présent paragraphe.

[5]  On peut voir que cette disposition s’applique à un vaste éventail de transferts; c.-à-d. des transferts de biens, « directement ou indirectement, au moyen d’une fiducie ou de toutes autres façons [...] ». Ce libellé est extrêmement large dans le but d’englober même les façons les plus détournées de transférer des biens d’un débiteur fiscal à un destinataire avec lien de dépendance. Je considère que ce libellé de la loi englobe facilement la situation dans le cas qui nous occupe, où l’époux (débiteur fiscal) de l’appelante a pris des mesures pour que son employeur envoie ses chèques de paye directement dans le compte bancaire de l’appelante. Il s’agit d’un transfert « de toutes autres façons ».

[6]  L’argument de base de l’appelante, présenté par l’entremise du représentant de son comptable, était qu’une partie considérable de ces sommes transférées servait à payer les dépenses du ménage et de la famille. Des éléments de preuve ont été présentés, notamment des relevés de compte bancaire qui reflétaient soi-disant les dépenses faites par le ménage à l’aide des sommes reçues de l’employeur de l’époux par transfert électronique. Sur ce point, à la fin de l’audience, j’ai demandé aux deux parties d’examiner l’arrêt Yates c. Canada, 2009 CAF 50, et de présenter des observations écrites en conséquence. Elles l’ont fait.

[7]  Dans cette décision rendue en appel dans Yates, l’époux de l’appelante, un débiteur fiscal, avait déposé ses chèques de paye dans le compte bancaire de sa femme. La Cour d’appel fédérale n’a pas eu de difficulté à confirmer la décision de première instance de la Cour canadienne de l’impôt, selon laquelle cela constituait un transfert. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a précisé que l’article 160 ne permettait pas de considérer comme un facteur l’utilisation ou l’utilisation prévue de tout montant transféré pour les dépenses du ménage ou de la famille, peu importe les obligations juridiques qui sous-tendent ces dépenses.

[8]  Ce point a été expressément précisé dans la décision du juge Blais, Cour d’appel fédérale, au paragraphe 67 :

Une interprétation basée sur le langage clair du paragraphe 160(1) ne donne pas ouverture à une exception relative au droit de la famille ni à une exception applicable aux dépenses du ménage. Si le législateur avait voulu créer de telles exceptions, il les aurait expressément formulées. Il n’appartient pas à notre Cour d’interpréter la Loi de manière à y intégrer ces exceptions.

[9]  Par conséquent, je me vois obligé de rejeter l’appel, mais sans adjuger de dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de juin 2018.

« B. Russell »

Le juge Russell


RÉFÉRENCE :

2018CCI116

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2017-2230(IT)I

INTITULÉ :

SANDRA ANNE MOTTLE ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Kelowna (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 avril 2018

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable Juge B. Russel

DATE DU JUGEMENT :

Le 20 juin 2018

COMPARUTIONS :

Représentant de l’appelante :

Me Robert Wignall

Avocat de l’intimée :

Me Marta Zemojtel

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

[EN BLANC]

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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